Chapitre 7 - Comme un cheveu sur la soupe

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Nous grimpons jusqu'au niveau -4, la partie réservée aux forces de défense. Mon cerveau cesse alors de fonctionner quelques secondes devant l'horreur qui s'étale devant moi. Il y a des cadavres partout, et si la puanteur n'était pas si forte, j'aurais l'impression d'être en plein film d'action. C'est trop horrible pour être réel. Pendant quelques secondes, je me retrouve envahie par le souvenir de l'attaque de Yubei, puis par celui du début du Grand Chaos. On ne s'habitue jamais à côtoyer la mort. Adèle et bidule ne traînent pas, je les comprends, et filent vers les salles d'opération pendant que ma coéquipière et moi entreprenons de vérifier les corps un à un. Mes mouvements sont d'abord raides, tremblants. Puis je prends de l'assurance, aidée par l'adrénaline.

— Tous ces gens sont morts, déclaré-je à Lisa, alias ceinture verte. Ils ont reçu des tirs mortels.

— Les bâtards, ils nous ont massacrés.

— Des armes à lasers, si j'en crois ces brûlures. Je n'ose pas imaginer l'état des niveaux supérieurs.

— On doit d'abord récupérer les médocs, ordre de Lee.

— Génial, grâce à toi, j'ai l'impression qu'il est un peu avec moi, blagué-je pour essayer de nous détendre.

— Ne me remercie pas, ironise la garce. Tout de même, je me demande comment les aliens ont réussi à nous localiser... On ne sort jamais de terre à moins de dix kilomètres du site !

— Je ne sais pas, dis-je en masquant ma gêne.

Je ne peux quand même pas lui révéler maintenant qu'un selcyn, probablement équipé d'un traceur indétectable, a été ramené sur le site. Vu son émotion, je ne la sens pas hyper réceptive à ce genre de nouvelle. Nous terminons le niveau. Aucune trace des garçons, je garde espoir. J'ai toutefois reconnu mes amis de la boxe : tous morts, ensemble.

— Les rescapés de ce niveau ont réussi à se rendre sur les quais, dis-je en ouvrant la porte menant à la cage d'escalier. Montons au troisième.

— Je pense que l'accès à l'aile médicale va être compliqué. Tu as vu l'état des marches !

Je lui emboîte le pas et reste bouche-bé. C'est bien simple, l'endroit ressemble plus à une passoire qu'à une cage d'escalier. Je regarde Lisa et nous commençons notre ascension. Je soupire de soulagement en m'éloignant de la puanteur infecte du quatrième niveau, mais déchante rapidement en me demandant comment nous pourrons descendre d'éventuels rescapés par cette issue.

Niveau -3, l'aile médicale et scientifique. Mon étage. Nous galérons un moment à ouvrir la porte de sécurité, et quand enfin nous y parvenons, c'est l'horreur : des cadavres par dizaines tapissent le sol, si bien qu'on ne peut plus déceler le revêtement métallique sur une vingtaine de mètres, les murs gris sont crépis de sang noirci, les câbles électriques sont arrachés et pendent telles des lianes tout le long du couloir.

— Ce sont les corps qui bloquaient l'ouverture, constate Lisa avec effroi. Ils se sont tous amassés là avant d'être abattus comme des lapins.

Nous escaladons cette sinistre montagne en nous signalant à d'éventuels survivants. Je vérifie quelques constantes, plus pour me donner bonne conscience que par réel espoir de trouver quelqu'un de sauvable. Un truc au loin appelle mon regard. J'accélère le mouvement en essayant d'oublier sur quoi je marche.

— Eh ! Attends-moi ! crie Lisa.

J'ai déjà dépassé le tas de cadavres, attirée par des lettres écrites avec du sang sur un panneau métallique arraché du mur. Oh, mince. C'est bien ce que j'avais cru lire de loin. Je n'arrive pas à détacher mes yeux de ces lettres, la gorge serrée.

Corps étrangers [TERMINÉ] Where stories live. Discover now