Déplaisante discussion

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Le Duc de Lymington essaya de masquer son dégoût lorsque la main du marquis de Glaslyn se posa sur son épaule. Il se retourna avec lenteur pour faire face au visage grassouillet du père de Susan. Ce dernier lui offrit un regard faussement affecté :

— Mon cher Richard, je suis ravi de vous revoir. Comme se porte votre chère mère, Lady Mabelthorpe ? La disparition de John doit être insupportable. M'autorisez-vous à lui rendre visite demain ? Naturellement, je serai accompagné de mon épouse.

— Bonsoir Oswald. Ma mère serait enchantée de vous revoir ainsi que Lady Bradenham. Cependant, je crains que cela ne soit pas possible avant huit jours. Elle reçoit de nombreuses visites mais je veille à ce qu'elle ne se fatigue pas inutilement. Me permettez-vous de vous envoyer une invitation lorsque nous serons en mesure de vous recevoir convenablement ?

— Je suis soulagé d'entendre que Lady Mabelthorpe ne reste pas seule.

— Soyez sans crainte. Je veille à ce qu'elle soit bien entourée.

— Je n'en attendais pas moins de vous. Néanmoins, je ne pourrais venir avec mon épouse à Berlekey Street dans huit jours. Richard, cela m'ennuie de vous demander cela mais...pourrions-nous discuter dans un salon privé ? Je dois vous entretenir de certaines affaires importantes.

— Certainement. Allons dans celui de mon père.

Richard s'excusa auprès de ses amis et se rendit dans une petite pièce au premier étage. Il s'agissait en réalité d'un bureau où le défunt duc avait pour habitude de travailler et où il pouvait recevoir en toute discrétion.

Ils s'installèrent dans deux fauteuils confortables face à une imposante cheminée. Le duc servit un verre de brandy à son interlocuteur.

Le marquis de Glaslyn paraissait tracassé. Cela inquiéta Richard :

— Vous semblez préoccupé, Oswald.

— Vous n'ignorez rien des cambriolages qui ont eu lieu ces dernières jours en ville, Richard. Dieu du ciel, évidemment, vous les ignorez !

— Des cambriolages ?

Le jeune homme feint l'ignorance. Alors qu'il s'attendait à ce que Bradenham évoque le contrat de mariage conclus avec son père, il venait de confirmer les dires de Christopher. Et si cela inquiétait à ce point le marquis, c'est que l'affaire était sérieuse. Ce dernier contempla quelques instants les flammes face à lui avant de se tourner vers Richard :

— Plusieurs de mes amis ont eu à déplorer des intrusions dans leur demeure. Chaque fois, des domestiques ont été brutalisés, des femmes effrayées et de nombreux objets de valeur ont été dérobés. Les voleurs savaient exactement ce qu'ils cherchaient. Grâce à un ami, j'ai appris que les hommes de Scotland Yard pensent que les criminels sont une bande d'Irlandais particulièrement violents. J'ai pris des dispositions afin de sécuriser mon hôtel de Saint James. Je vous conseille vivement d'en faire de même.

— Pensez-vous être visé ?

— Je le crains. Et je dois malheureusement vous annoncer que votre famille l'est également.

Richard dévisagea son vis-à-vis avec appréhension. Son visage anxieux, ses traits tirés parlaient pour lui. Il ne plaisantait vraiment pas.

Richard tenta de maîtriser sa voix et de ne pas laisser paraître son appréhension :

— Comment le savez-vous ?

— J'ai découvert que chaque propriétaire qui avait été spolié avait un lien d'amitié avec moi. Ce sont tous mes amis proches qui ont été visés, Richard. Ce n'est pas une coïncidence. Quoi qu'en pensent les hommes de Scotland Yard. Savez-vous qu'ils ne m'ont même pas contacté ? Je dois chercher les informations par moi-même. C'est un véritable scandale.

{Sous contrat d'édition} Symphonie irlandaise (version roman)Where stories live. Discover now