/🏹/ David contre Goliath

8 1 0
                                    

Nos yeux se lèvent à l'unisson. Les quelques secondes d'incompréhensions sont suivies d'une illumination générale. C'est si évident que personne n'y a pensé plus tôt.

« Mhm. On a qu'à lui tirer dessus. Ils l'ont bien battu comme ça à l'époque dit Yéléna.

J'ai déjà essayé et ça ne lui a rien fait.

— Puis on perd l'effet de surprise si on se met à mitrailler le ciel. »

Le capitaine n'a pas tort. On doit donc l'attaquer au corps à corps pour le faire redescendre. Si toutes nos déductions sont exactes, il doit être extrêmement vulnérable vu l'espace qu'il occupe. Je regarde Adam, le seul d'entre nous capable de l'atteindre. Je doute qu'il parvienne à voler aussi haut avec ce temps. Les bourrasques nous frappent avec une certaine régularité et la pluie n'est pas près de s'arrêter. C'est un chaos sans nom dans lequel nous nous trouvons.

June se rappelle d'un détail :

« Ama nous a affirmé que Lucy ne peut pas voler. Il a besoin d'avoir une partie de son corps en contact avec un objet relié au sol.

— Si c'est vrai, il doit s'être perché en haut d'un arbre. »

La conclusion du capitaine est cohérente.

« Alors on trouve ce pied sur lequel il repose, on le fauche...

— Et il va s'écraser c'fumier. » complète Charly.

Nous devons nous rendre dans la forêt pour confirmer cette hypothèse. La sève devrait nous camoufler, mais les Ohanzees ne sont pas aveugles. Il faut trouver le bon endroit et surtout le bon moment. Au milieu des combats, de cette ligne infinie de violence et de hurlements, nous apercevons une brèche. Pour aller plus vite, je grimpe sur le dos du capitaine avec Adam et June. Moi qui n'ai jamais fait d'équitation, je m'accroche comme je peux. Mes bras enlacent le cou affreusement glissant de l'équidé, couvert de sève et de pluie. Pourvu que je ne tombe pas...

On décide de mettre Yéléna en pôle position pour faire office de bélier et partons à vive allure. Une petite bestiole tente de nous arrêter, mais se fait percuter de plein fouet par notre vache aux longs poils. Étonnamment, aucun ohanzee ne nous suit. Notre camouflage olfactif doit fonctionner !

Après quelques secondes de course intensive, nous voilà au milieu de la forêt. Le combat fait rage derrière les arbres, mais il ne nous concerne plus. Notre priorité, c'est de trouver Lucy. Le capitaine nous explique que toutes les mines antipersonnel ont été désactivées dès que les ohanzees ont dépassé la lisière. Mesure qui permettra d'éviter les accidents lorsque les wakizas parviendront à repousser l'envahisseur. Autant dire que ce n'est pas gagné... Je reste tout de même sur mes gardes et regarde attentivement où je mets les pieds avant de redescendre.

Par où commencer ? Il y a des milliers d'épicéas dans cette forêt et seulement deux d'entre nous sont capables de monter en haut des arbres. Charly qui n'aime pas rester les pattes croisées tente de grimper à un arbre. Elle échoue lamentablement et tombe dans cet immonde bourbier qu'est devenu le sol. Ça me rappelle ces films sur la Première Guerre mondiale, dans les tranchées françaises où les maladies et les rats pullulaient.

Si l'on part du principe qu'il s'est positionné le plus haut possible afin de ne pas être attaqué, il s'est sûrement posé sur le plus grand arbre des environs. Je transmets l'information à Adam qui s'envole puis à June qui s'élance dans les arbres avec une agilité insoupçonnée. On décide finalement de rester tous les quatre ensemble, impuissants. On se contente de courir au hasard les yeux levés dans l'espoir de trouver quelque chose. La situation agace ma guéparde, tout comme le capitaine qui ne supporte pas d'attendre. Il meurt d'envie d'aller se battre avec ses frères d'armes, mais reste tout de même pour nous protéger. Un sacrifice qui, je l'espère, en vaudra la chandelle.

Là où se terre le diableWhere stories live. Discover now