Il aimait écrire.
Elle aimait le lire.
Il aimait chanter.
Elle aimait l'écouter.
Il aimait observer.
Elle aimait l'observer.
Il était acteur de sa vie.
Elle était spectatrice de cette vie.
Mais un jour tout a basculé.
Et Randall a disparu.
Quand...
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« Il pleut beaucoup pour un mois d'août, tu ne trouves pas ? »
Assise en face des baies vitrées, le regard dans le vide, Marissa dessinait des petits nuages sur le carreau recouvert de buée. Les gouttes d'eau ruisselaient sur les vitres translucides de la chambre de Marissa. Bien qu'il soit 16 heures passées, elle était encore pyjama, avait les cheveux décoiffés, des cernes ornaient ses beaux yeux verts et du mascara mal enlevé de la veille avait coulé sous ses yeux.
Son visage n'exprimait aucune émotion, lorsqu'elle se tourna vers son interlocutrice. « Ouais Coline. »
Marissa avait la voix rauque, elle n'avait pas parlé de la journée. Elle toussa quelques fois afin de s'éclaircir la voix, pourtant elle ne rajouta rien.
Coline, qui était la petite sœur de Marissa, sauta afin de s'asseoir sur la petite étagère rouge de cette dernière. Ses pieds se balançaient dans le vide en fouettant l'air. Elle parcourut la pièce du regard afin de trouver quelconque occupation à sa grande sœur.
« Que dirais-tu de lire ? » demanda Coline en pointant du doigt un livre rouge et blanc. Peut-être que Marissa se sentirait mieux en s'occupant un peu ?
« C'est le livre que Randall m'avait offert. » Coline se pinça la lèvre inférieure. Comment avait elle put commettre cette erreur ?
C'est le livre dont il ne faut pas parler et ça pour plusieurs raisons. Premièrement c'est une histoire d'amour tragique, qui a le don de faire pleurer Marissa. Deuxièmement c'est le dernier cadeau qu'il lui a offert, le jour juste avant sa disparition. Et troisièmement il y avait inscrit un petit mot que seule Marissa avait le droit de lire, mais Coline était convaincue que c'était des paroles remplies d'amour.
Bien que cela fasse 4 ans que Randall ait disparu, Marissa n'a pas remonté la pente, comme on dit. Coline aimerait voir sa sœur faire des sorties pour aller au cinéma ou encore au parc mais elle a perdu son seul amour. Et dire qu'avant, Coline se plaignait de ne jamais voir sa sœur, elle aimerait tellement moins la voir maintenant. Elle serait heureuse. Personne ne pourrait le ramener. Pas même Coline et toute sa bonne volonté, personne.
Quatre ans plus tôt, il était parti faire des fouilles archéologiques avec Hershel, son meilleur ami. Ils avaient embarqué sur la bicyclette jaune de Randall, et avaient foncé dans les collines Ouest de la ville têtes baissés. Il s'était mis à pleuvoir, et les galeries qu'ils exploraient ont été inondés. Hershel n'a pas pu le sauver. Une partie de la ville a été également engloutis par les eaux.
Coline se rappelait vaguement de ce jour. Elle n'avait que 14 ans à l'époque. Mais elle se rappelle d'une chose, quand elle était rentrée chez elle, après que l'alerte soit levée, les rideaux gris de la chambre de Marissa étaient fermés. Quelques semaines plus tard, leur grand-mère avait décidé qu'il fallait changer d'air et ils avaient déménagé de Bretagne pour aller au bord de la mer.
« J'ai eu mon permis de conduire ! » dit Coline, en essayant toujours de détendre l'atmosphère. « C'est cool. »
Il y a des bons jours et des mauvais pour Marissa. On était clairement dans les mauvais. Même Charline, sa meilleure amie, avec qui elle partage cette douleur ne parvient pas à lui remonter le moral. Coline sauta de son perchoir et s'approcha de sa sœur. « Tu réponds pas aux appels vidéo de Charline ? »
Marissa tourna la tête vers sa sœur et dit :
« Je n'ai pas envie de parler et Charline aime parler. »
Coline savait pertinemment que c'était faux. Enfin pas vraiment, mais Marissa ne disait pas toute la vérité. La vérité était que Charline et Hershel habitaient tous deux, ensemble dans leur village d'enfance et que Marissa détestait cette endroit depuis l'accident. De plus voir Hershel, lui rappelle beaucoup trop de mauvais souvenir car l'accident de ce joue fatal est marqué sur sa peau. Hershel ne peut plus marcher depuis l'inondation.
Hershel avait tout pour réussir, c'était un pianiste extrêmement doué. Alors quand il a perdu l'usage de ses jambes, Charline a décidé qu'il devait continuer de jouer, c'est pour ça qu'elle a construit des systèmes de cales en bois permettant à Hershel d'appuyer sur les pédales du piano. Ça marche plutôt bien.
Coline se décida alors de quitter la chambre de Marissa à reculons. Elle retrouva sa grand-mère dans le salon et secoua la tête avant de soupirer.
« Elle ne veut pas me parler. -Elle est très triste mais ne t'en fait pas. Il faut qu'elle apprenne à vivre avec. -Tu as sans doute raison. »
Marissa, pendant ce temps, caressait le livre rouge et blanc avant de l'ouvrir afin de lire l'inscription qui y était inscrite.
« Chère Marissa,
Tu es vraiment géniale, tu le sais ça ? J'espère que tu le sais, car c'est la vérité. Ne changes jamais, tu es super pour moi. Voilà un petit cadeau, histoire que demain, tu m'oublies pas trop pendant que je fais mes fouilles archéologiques. Quand tu auras fini de lire ce livre, je serais de retour, promis.
Je t'aime vraiment très fort. R »
Marissa resta un instant stoïque, essayant de contrôler ses émotions mais elle fondit soudain en larmes. Alors qu'elle essuyait les larmes qui perlaient au coin de ses yeux, elle marmonnait et jurait à voix basse.
« Comment je pourrais vivre sans toi ? Pourquoi tu es parti putain ? »
Marissa se replongea dans ses pensées, et continua de longues heures à observer la pluie tomber.
