Bonascre

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Les majestueuses montagnes des Pyrénées s'élevaient fièrement, leurs sommets enneigés touchant les cieux d'un blanc éclatant. Les arbres sombres bordant la forêt se tenaient droit tels des sentinelles protégeant un secret inavouable.
Le village reculé de Bonascre niché au creux de cette nature sauvage semblait être un refuge paisible, préservé du tumulte du monde extérieur. Le pavage des rues demeurait comme dans l'ancien temps, et secouait les voitures roulant dessus.
C'est dans ce coin reculé qu'Emma, une jeune fille de onze ans au visage empreint d'innocence, vivait avec sa famille. Ses yeux étincelants reflétaient sa curiosité insatiable et son esprit vif, toujours en quête d'aventures qui dépassaient les frontières de leur petite communauté. Ceux qui la connaissait vraiment diraient d'elle qu'elle était une fille discrète et réfléchie.

Alors qu'Emma vaquait à ses occupations habituelles dans les rues tranquilles de Bonascre, une brise légère caressait son visage. Pourtant, quelque chose de subtil flottait dans l'air, se mêlant à la douceur de cette journée en apparence normale. Une tension imperceptible, un frisson furtif qui semblait parcourir les ruelles pavées, laissant dans son sillage une atmosphère pesante. Les conversations chuchotées des villageois paraissaient se teinter d'une lueur d'inquiétude.

Les journées s'écoulaient, toutes semblables à la précédente, et Emma continuait d'observer le monde à travers ses yeux d'enfant. Mais alors qu'elle parcourait les rues animées de Bonascre, elle remarqua des silhouettes flottantes sombres, menaçantes, furtives, aux fenêtres et aux angles des maisons. Elle aurait eu du mal à décrire la forme de ces silhouettes. À première apparence, elle les aurait qualifiées humanoïdes, mais après une seconde d'observation, elle n'en était pas si sûre. Celles-ci lui apparaissaient toutes déformées. Un frisson, partant du sommet de son crâne, traversa son échine en lui caressant le dos jusqu'à lui faire trembler légèrement les jambes, tandis qu'elle tentait de trouver une explication rationnelle à ces apparitions insaisissables. Cependant, chaque fois qu'elle essayait de partager ses observations avec les adultes, ses mots étaient balayés d'un rire condescendant, rejetant ses craintes comme de simples imaginations enfantines, comme si un vent lointain emportait ses paroles dans le vide.

La nuit tombait sur Bonascre et Emma se retrouvait seule dans sa chambre. Les murs semblaient vibrer d'étranges bruits, des murmures indistincts qui envahissaient son espace. Elle scrutait chaque recoin, chaque objet à la recherche de l'origine de ces sons perturbants. Les rideaux s'agitaient calmement sans qu'elle ne sente de brise, une lumière extérieure vacillait alors que la ville dormait, le plafond grinçait mais personne ne se trouvait dans la grange de sa vieille maison. Ses recherches ne donnaient aucun résultat. Les ombres dansaient sur les murs, amplifiant le mystère qui paraissait s'épaissir autour d'elle.

Le sommeil échappait désormais à Emma, ses nuits devenant des cauchemars éveillés. Des silhouettes menaçantes s'invitaient dans son champ de vision en plein jour, s'immisçant dans les moindres recoins de son esprit. Des visages déformés et des mains griffues semblaient la guetter à chaque tournant. Ses proches remarquaient son état de détresse grandissant, mais la cause de son tourment restait un mystère pour tous.

Un soir, lors d'un repas en famille, Emma décida de briser le silence et de partager ses perturbations nocturnes avec ses parents. Les mots sortirent de sa bouche avec une sincérité désespérée, implorant leur compréhension et leur aide.
"Maman, papa, aidez moi..."
Cependant, ses parents échangèrent un regard amusé, croyant à une nouvelle fantaisie de l'imagination enfantine. Les éclats de leurs rires résonnaient dans la pièce à chaque parole, étouffant et écrasant la détresse muette d'Emma.

Déterminée à trouver un répit, Emma prit une décision audacieuse mais peu réfléchie. La folie grandissant en elle l'empêchait de penser lucidement, le sommeil lui manquait, un bruit ou une silhouette l'interrompait chaque minute d'un semblant de calme. Elle se dirigea vers la forêt dense qui bordait Bonascre, espérant y trouver un refuge loin des ombres menaçantes et des cris résonnant dans sa tête. Mais à mesure qu'elle avançait entre les arbres majestueux, de nouvelles hallucinations la troublaient. Des murmures étouffés semblaient provenir de l'obscurité, accompagnés de formes indistinctes qui se mouvaient furtivement entre les troncs centenaires. Les arbres paraissaient se pencher vers elle, les buissons frémissaient rapidement derrière son passage, les branches griffues semblables à des doigts décharnés cherchant à la saisir.

Cependant, le destin avait d'autres plans pour Emma. Alors qu'elle s'enfonçait dans la forêt, un piège sournois se referma sur elle. Un trou béant caché par du feuillage mort s'ouvrit sous ses pieds, l'engloutissant dans les entrailles de la montagne. Les parois rugueuses semblaient se refermer sur elle, privant son esprit déjà tourmenté de toute échappatoire. Dans l'obscurité écrasante, elle ressentait la présence des visions qui ne la quitteraient plus. L'air était lourd de désespoir, chargé d'une énergie inquiétante qui pénétrait jusqu'au plus profond de son être.

Emma savait désormais qu'elle serait emprisonnée dans ce trou pour l'éternité. Les visions se mêlaient à ses pensées, distordant la réalité et plongeant son esprit dans un tourbillon incessant de cauchemars. Les ombres se matérialisaient devant elle, s'insinuant dans les replis de son âme tourmentée, laissant entrevoir un avenir sans fin, hanté par les horreurs indicibles. L'espoir de retrouver la lumière s'évanouissait peu à peu, laissant place à une solitude oppressante qui la torturerait pour l'éternité.

Courte Histoire d'Horreur n°1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant