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Assise devant la fenêtre, mon regard est perdu vers le paysage. Le soleil est présent et éclaire tous les horizons. Je vois les enfants, tout souriant, en train de jouer au ballon, tandis que leurs mères sont assises non loin et discutent entre elles, tout sourire. Oui, il fait beau dehors et tout le monde a l'air heureux tandis que moi je ne le suis pas.

Je ne me souviens même plus de la dernière fois où j'ai ri, ça doit remonter à loin maintenant. Je me souviens par contre depuis quand je ne suis plus heureuse, et c'est depuis ce jour où ma vie a changé du tout au tout, oui depuis ce jour où j'ai épousé Moussa. Depuis ce jour, je sombre complètement, j'ai le cœur meurtri, vide, complètement vide.

Vivre est devenu est une souffrance pour moi, je ne compte même plus les jours où j'aurai souhaité être morte tant ils sont nombreux. L'idée de me suicider m'a déjà traversé l'esprit et cela à de nombreuses reprises mais ce petit être dans mon ventre m'empêche de le faire. Oui, je suis enceinte et cela fait tout juste huit mois. Huit mois que je porte la vie, huit mois que je porte l'enfant d'un homme que je n'aime pas, huit mois que je souffre encore plus car je n'ai jamais souhaité que mon enfant porte le même sang que Moussa.

Je m'éloigne de la fenêtre pour aller m'allonger sur mon lit, je regarde mon ventre bien rond tout en me mettant à le caresser. Cet enfant je l'aime tellement malgré qu'il ne soit pas encore là, il est ma force aujourd'hui et ma seule joie dans ces moments de ténèbres. Même si j'aurais souhaité qu'il n'est pas cet homme comme père, cela ne joue en rien sur tout l'amour que je lui porte. Je me battrai pour lui et j'espère un jour pouvoir partir de ce mariage douloureux car je refuse que mon enfant grandisse dans un mariage comme celui-ci.

Je ne souhaite pas que mon enfant vive ce que je vis : ni qu'il voit ce que je vois. Je le refuse ! J'ai supporté beaucoup dans ce mariage, les coups de mon mari, les insultes de mon mari, sa méchanceté, sa dureté, sa nervosité mais jamais je n'accepterai que mon bébé subisse ce que moi j'ai vécu. Ni qu'il voit tout ça, je ne sais pas encore comment je vais mettre fin à ce mariage mais je me suis fait la promesse de partir un jour et cela coûte que coûte.

La sonnerie de mon portable me fait sortir de mes pensées, le nom de ma sœur Fatoumata s'affiche à l'écran.

— Allô, dis-je.

— Allô petite sœur, comment tu vas ?

— Ça peut aller et toi ?

— Ça va. Je suis de passage à Paris. On se fait un petit resto, ce soir ?

Je ne réponds pas directement, je n'avais pas spécialement l'envie de sortir. En réalité, je n'avais plus goût à rien. Pourtant, fût un temps où j'aimais ces choses-là : sortir, m'amuser, mais aujourd'hui, j'avais complètement perdu ma joie de vivre. Je ne me reconnaissais plus, je n'étais plus cette femme pétillante, joviale qui ramenait la joie autour d'elle. Non, j'étais devenue comme un cadavre. J'avais l'impression d'être seulement en vie physiquement mais d'avoir le cœur mort.

— Je t'avoue que je n'ai pas envie de sortir. Une prochaine fois peut-être, dis-je.

— Binta, tu es sérieuse là ? Tu sais très bien que je ne suis pas souvent sur Paris et tu me refuses une sortie ?

Comprenant qu'elle n'allait pas arrêter d'insister tant que je n'accepterais pas, je décide d'accepter.

— On a à parler en plus.

Je savais très bien de quoi elle allait vouloir me parler, de mon frère Adama et de ma mère. À qui je n'adresse plus la parole depuis tout juste un an. Je leur en veux de m'avoir infligé ce mariage. Je leur en veux de ne pas me comprendre. J'ai eu beau leur dire que je ne suis pas heureuse dans ce mariage, ça ne leur fait absolument rien. Ils savent pourtant tout ce que mon mari me fait subir. Combien de fois je suis allée devant eux, les larmes aux yeux, avec des hématomes aux visages mais quelles ont été leurs paroles ? « Binta, le mariage n'est pas facile de nos jours. Tu dois patienter »

Battue, l'islam m'a sauvé Where stories live. Discover now