Le tatouage

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         Une jeune infirmière avait aidé Aïkida à se soigner et lui avait indiqué où se trouvait la salle d'eau. Heureuse de rencontrer enfin une femme, la Fille Gelée discuta beaucoup avec, et apprit qu'elle se nommait Ambre.

        Mais lorsque la jeune Ar-Feiniel se lava, elle ressentit une sensation étrange dans son dos. En sortant de l'eau, elle se contorsionna devant le miroir de la pièce et aperçut un tatouage. Aïkida n'en avait jamais eu et écarquilla les yeux, choquée de voir l'encre parcourir sa peau. Ledit tatouage formait de grandes ailes noires et effrayantes alors qu'il recouvrait toute la surface dorsale de la jeune fille.

        Je n'ai jamais fait de tatouage. Mais alors comment ? Ils n'auraient pas osé me tatouer dans mon dos quand même ?! Mais je l'aurais senti non ? Bizarre... Ou alors... Le souvenir de sa vive douleur qu'elle avait ressentie lorsqu'elle s'était évanouie sur le dos du dragon revint à son esprit. Perdue dans ses pensées, elle finit de se préparer.

        

        Une fois propre et soignée, des gardes vinrent la chercher dans sa cellule où l'avait ramenée Ambre quelques instants plus tôt. Mais cette fois-ci, ils ne l'empoignèrent pas par les bras et se contentèrent de l'escorter. Les deux hommes la conduisirent dans la même grande salle où elle avait fait la connaissance des trois combattants quelques temps auparavant. Encore une fois, Leeroy, Tarek et Nàmo l'attendaient en discutant, et encore une fois ils se turent à son arrivée.

        De mauvaise humeur, Aïkida ne leur laissa pas le temps de parler et demanda sèchement :

— Où est-ce qu'on est ? Pourquoi je suis ici ? Pourquoi je suis la seule femme à avoir eu le droit d'entrer ? Les dragons existent ou ce n'était qu'un rêve ? Je n'ai pas rêvé puisque Tarek et Leeroy étaient avec moi. Mais pourquoi ? J'exige des réponses immédiates, annonça-t-elle en croisant les bras et en les foudroyant du regard.

Le faible sourire de Nàmo s'effaça aussitôt.

        Il lui indiqua un fauteuil et la jeune fille s'assit sans même le remercier, avant de le toiser de ses yeux furieux.

        Le Haut-Dragonnier soupira et s'installa en face de la Fille Gelée. Les deux autres restèrent debout tandis que Nàmo inspirait un grand coup avant de tout dévoiler :

— Nous sommes dans les Montagnes. Plus précisément dans la Vallée des Dragonniers. Nous sommes des Combattants Secrets, comme nous appellent les villageois. Les dragons existent bel et bien, et tu es ici car tu as su en maîtriser un, ce qui n'est possible que pour un dragonnier. Nous supposons donc que tu sois l'une des notres. Mais nous devions en être certains, c'est pourquoi tu t'es battue avec Tarek, le plus puissant dragonnier de la vallée après moi qui suis Haut-Dragonnier. Nous voulions évaluer tes capacités mentales et tes capacités de combats. Tu te bats très bien, et tu as su détourner l'attention de Tarek sans même t'en rendre compte. C'est une capacité qu'aurait un dragonnier peu de temps avant sa transformation.

Il fit une courte pause et reprit :

— Leeroy, Tarek et plusieurs gardes recherchaient le dragon que tu as maitrisé. Il s'était enfuit et personne ne doit connaitre leur existence hormis nous. Leeroy est également un dragonnier et il est presque aussi puissant que Tarek. Nous ne sommes que trois dragonniers dans toute la Vallée.

Tous les regards étaient fixés sur la jeune fille. Cette dernière se félicita de s'être assise, sinon elle serait tombée à la renverse. La tête lui tournait alors qu'elle fixait le vide avec de grands yeux écarquillés. Des dragonniers... C'est une blague ? Papa était ici ?

        Après toutes ces brusques révélations, Aïkida ne comprenait plus rien. Elle s'apprêtait à poser d'autres questions, mais les mots lui manquèrent. Nàmo continua alors ses explications :

— N'importe quel homme peut s'engager en tant que Combattant Secret, mais une fois qu'il met les pieds ici, il n'en sort plus beaucoup et est voué au silence. Tous ces hommes que tu as vus sont des Combattants. Ils cherchent à devenir dragonniers et essayent tous les jours de maîtriser un dragon. Mais seuls nous y sommes arrivés pour le moment. Ainsi que toi. Mais tu dois encore passer quelques tests. Nous doutons que tu sois un dragonnier car, depuis la nuit des temps, aucune femme n'a jamais maîtrisé un seul dragon. Donc il n'existe pas de féminin pour le mot « dragonnier ».

Nàmo fixa la jeune fille avec douceur et lui révéla :

— Ton père avait presque réussit à en maîtriser un. Mais il a échoué. Il était très téméraire et nous étions tous bouleversés quand nous avons appris son décès.

Leeroy, qui jusqu'à présent, avait fixé la jeune fille, détourna le regard en serrant la mâchoire.

        Aïkida était abasourdie. Ne sachant que répondre après tant d'explications si invraisemblables, la seule chose qui lui vint à l'esprit fut une autre question :

— Pourquoi j'ai un tatouage dans le dos ? demanda-t-elle, le regard vague et la voix tremblante.

Elle sentit Tarek se crisper, plus que les autres.

— Non... murmura-t-il en regardant la jeune fille dans les yeux.

Celle-ci, piquée au vif, se leva, se retourna et souleva sa tunique, dévoilant le magnifique tatouage de dragon qui habillait son dos pâle.

        Les yeux de Nàmo et de Leeroy se mirent à briller tandis que ceux de Tarek se glacèrent.

— Non... Non ! C'est impossible ! hurla-t-il furieux.

Il passa ses mains dans ses cheveux. Il était blême. La mâchoire et les poings serrés, il se mit à faire les cents pas dans la pièce. Et lorsqu'une chaise lui fit obstacle, il la balança d'un violent coup de pied, brisant le bois avec une facilité surprenante.

        Aïkida sentait sa rage remonter, énervée par le comportement excessif de Tarek. Mais lorsque celui-ci se retourna vers elle, toute la frustration de la jeune fille disparut soudainement. Elle ne décelait pas de la colère dans son regard, ni même de la haine.

        Ce qu'elle vit dans ses yeux émeraude, n'était rien d'autre qu'une profonde peur.

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