Chapitre 8 | Juliann

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Chez Juliann
Vendredi 15 Septembre
20 : 45

C'est le cerveau prêt à exploser que je me gare devant chez moi. Dire que ça ne va pas serait un euphémisme. Depuis quatre ans, la vie se moque de moi, prend un malin plaisir à me malmener. Je me souviens encore de ces jours où me lever le matin n'était pas une torture, où l'air me paraissait encore respirable. Où mon cœur  n'était pas totalement brisé. Une larme de rage s'écrase sur ma joue lorsque je repense à ses yeux verts, sa manière de me sourire, la façon dont elle fermait les yeux lorsque je caressais ses longs cheveux noirs. L'amour de ma vie m'a été arraché du jour au lendemain. Les médecins ont appelé ça une pré-éclampsie, j'appelle ça une putain de blague. Je venais d'avoir mon diplôme, je venais d'être titularisé, et elle devait commencer à travailler dans son cabinet d'avocat quelques mois après. On avait même trouvé une crèche pour Inès, et un super appartement. On allait sortir de ma petite chambre étudiante et vivre une vraie vie de jeunes mariés. Mais tout est parti en fumée lorsque je l'ai perdu.

Je n'ai même pas eu le droit de me laisser gagner par le chagrin car je devais être là pour elle, la prunelle de mes yeux. Ma raison de me lever chaque matin. Mais maintenant, mon ex, l'amie de ma défunte femme, cette sorcière manipulatrice me menace de me la prendre. De me prendre ma raison de vivre, mon trésor le plus cher. J'ai dû revenir dans ma région natale à cause du foutu scandale auquel j'ai été mêlé dans mon ancienne école, et maintenant, je dois tout recommencer. Sauf que je n'ai pas la force.

Aujourd'hui, c'est l'anniversaire d'Annaëlle. Je suis allé la voir, et j'ai chialé comme un gosse. Avec elle, tout était facile. De nous deux, c'était elle la grande rêveuse, l'optimiste. Moi, j'ai toujours eu les pieds sur terre. J'aurais tout donné pour qu'elle me dise que tout irait bien, que je n'ai pas à m'en faire, mais bien évidemment, je n'ai pas eu de réponse.

Je sors de ma voiture en claquant la portière et me dirige vers la porte, mais je m'arrête avant de l'ouvrir. Je dois me calmer. Ma vie est tellement en bordel que mon cerveau me fait croire que je m'entiche de mon élève. Impossible, c'est sûrement le moyen qu'il a trouvé pour me consoler. Ouais, juste une consolation. J'ouvre la porte, et je me fige en la voyant en train de se déhancher sur Wanna be avec ma fille qui tente de l'imiter. Bordel de merde, c'est pas une consolation. Ses boucles qu'elle a décidé de libérer virevoltent dans tous les sens et son sourire. Mon Dieu, ce sourire. Je ferme les yeux et inspire profondément en avançant vers elle. Je dois la virer. Dès que possible.

« Tiens, salut ! » s'exclame-t-elle en m'apercevant.

Mon regard s'attarde sur la peau de ses bras nus. Elle a retiré son pull, et je ne peux m'empêcher de regarder une cicatrice qu'elle a à l'épaule. Elle prend son téléphone pour éteindre la musique, elle ne semble plus avoir honte devant moi. Elle est tellement attirante. Foutu cerveau, arrête ça. Je prends ma fille et Drew dans mes bras lorsqu'ils me sautent dessus. Ces deux diablotins réchauffent mon cœur  cassé.

« Inès a déjà mangé, pris son bain, elle est prête à se coucher.
— Elle aurait déjà dû être au lit il y a une heure. Les consignes étaient claires, c'est pas compliqué pourtant. » je réponds sèchement.

Merde ! Un voile de tristesse recouvre son regard un court instant. Je passe mes nerfs sur elle, c'est injuste. Je me hais, je déteste qu'elle soit triste, surtout à cause de moi. Ses yeux noirs passent de la tristesse à la colère, et avant que je n'aie le temps de m'excuser, elle me lance son regard de psychopathe et reprend ses distances avec moi. Arrête ça, Ava...

« C'est le week-end, j'ai cru qu'elle avait la permission de rester jusqu'à vingt-et-une heures trente, mais ça ne se reproduira plus.
— Je...
— Drew on y va. »

TEACHME [PUBLIÉ SUR KINDLE ET AMAZON LES 14 & 21 JUIN]Where stories live. Discover now