CHAPITRE 2

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            Quand Lena quitta l'immeuble, elle ne croisa personne, ce qui ne fut pas pour lui déplaire. Elle n'était pas d'humeur à se faire alpaguer par la voisine du dessous qui lui tiendrait la jambe pendant une demi-heure. Tout le voisinage connaissait la profession de Lena et chacun connaissait aussi son caractère taciturne et peu sociable, mais cette vieille commère ne semblait pas en être impressionnée et n'avait de cesse de lui raconter la vie de Pierre, Paul ou Jacques, ce dont la jeune femme se fichait éperdument. Malgré sa façon de l'envoyer paître à chaque fois, sa voisine ne semblait pas comprendre le message et revenait toujours vers elle. Sans doute dans l'espoir de se mettre des ragots croustillants sous la dent qu'elle irait raconter à son foutu club du troisième âge. Lena ne supportait pas cette bonne femme qui aimait vivre du malheur des autres. Sa curiosité malsaine la mettait mal à l'aise tout comme l'aura écœurante qui gravitait autour d'elle. Cette vieille peau lui faisait froid dans le dos.

            L'air frais l'accueillit quand elle se retrouva dehors, la forçant à mettre fin à ses sombres pensées. Lena commença à courir, d'abord au pas, avant d'accélérer la cadence. Dans cette ville aussi vivante de jour comme de nuit, la jeune femme ne croisa pas grand monde, chose guère étonnante à la vue de l'heure matinale. Les quelques Londoniens déjà dans les rues ne gênèrent pas sa progression à son grand soulagement. Quand elle sortait pus tard, la jeune femme devait faire attention à tout le monde mais ce matin, personne ne lui prêtait attention et elle ne prêtait attention à personne.

            L'appartement qu'elle louait se situait juste en face de l'ancienne société Abbey National. Ancienne car elle avait quitté les lieux en 2002, bien avant que la détective s'y installe. Cependant ce n'était pas pourquoi ça que l'appartement avait trouvé grâce à ses yeux mais pour ce qui s'y trouvait encore. Le 221B Baker Street. L'immeuble où elle vivait se situait juste en face de la demeure du héros fictif Sherlock Holmes. Et la fenêtre de son salon donnait sur ce qui était aujourd'hui, le musée de ce détective aux capacités de déductions hors normes. Grande amoureuse des œuvres de Sir Arthur Conan Doyle, Lena admettait que c'était grâce à lui qu'elle avait trouvé sa voie. Il avait été une grande source d'inspiration pour toutes les choses qu'elle avait entrepris et n'avait aucun regret sur ses choix.

Sauf celui de ne pas avoir pu sauver Ashton.

          Lena accéléra. Il ne fallait pas qu'elle pense à autre chose que sa course. Elle devait rester concentrée. La jeune femme traversa Baker Street et, après avoir dépassé King Cross et Paddington elle arriva enfin à son lieu de salut.

            La salle de boxe "Harper's" était le seul endroit où elle se sentait bien après un rêve ou quand ses souvenirs devenaient trop douloureux. Elle était dirigée par Elliott Harper, un ancien militaire à la retraite, reconverti en coach, que Lena avait rencontré cinq ans plus tôt. Accusé de meurtre de sa femme à l'époque, la détective lui était venues en aide. La défunte lui était apparue dans un de ses rêves pour en prendre le contrôle afin de lui montrer le déroulement de la nuit fatidique.

             Un homme masqué, introduit chez le vieux couple, était en train de fouiller le salon quand la femme était entrée dans la pièce après qu'un bruit l'ai réveillé. L'homme, paniqué, s'était emparé du premier objet venu et lui avait fracassé le visage avec. Les cris de la vieille dame avait alors sorti son époux du sommeil. Il était descendu en trombe. Le corps sans vie de sa femme étendue là, au milieu de la pièce, l'avait glacé d'horreur. Au lieu de le soulager, l'absence du meurtrier le rendit fou de rage. Elliott s'était alors précipité sur sa femme pour la prendre dans ses bras, serrait l'arme du crime à l'en briser et y laissant ses empreintes. Il avait été arrêté par la suite. Les inspecteurs en chargent de l'enquête était persuadé que le vieil homme avait voulu maquillé le meurtre en cambriolage qui avait mal tourné. Ils ne s'étaient pas laissé avoir par son désespoir qu'ils pensaient forcés. Après son rêve, madame Harper était apparue juste devant elle pour la supplier d'aider son mari. Lena n'aimait pas l'injustice alors elle avait accepté l'enquête. Ça ne serait pas la première fois qu'elle avait une cliente venue de l'au-delà.

Les Chroniques de Londres T.1 Le fantôme de WhitechapelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant