4 - Xélion

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Tw: prostitution

Il était allongé dans son bain. Panja, la sous-maitresse du bordel, lui avait fait préparer une eau délicieusement froide et parfumée. Il changea de position, s'immergeant presque entièrement et laissant sortir de l'eau ses genoux et sa tête.

Quatre mois qu'il se cachait. Quatre longs mois à se faire passer pour mort et à mendier. Il avait l'impression que tout le monde voulait voir ses tripes hors de son corps. Il s'était si bien habitué à la protection que lui avait accordé le dieu qu'il en avait oublié ce qu'était le danger. La maréchaussée le recherchait sous le décret du nouveau roi depuis son coup d'État et plusieurs organisations criminelles c'étaient alliées pour le faire couler et récupérer sa petite fortune.

Il fut tiré de ses sombres pensées par une jeune humaine qui venait d'entrer dans la pièce. Elle s'inclina par respect puis déposa un tas de vêtements et une paire de bottes. Il l'a suivi des yeux, puis elle sortit.

Il se leva et enjamba le rebord de la bassine d'eau. Il se secoua comme le ferait un chien. Il mit quelques minutes à se sécher en partie dû au temps sec et chaud de Samudr. Il déplia une chemise et la passa sur son corps maigre. Il fallait réellement qu'il reprenne du poids, il avait la peau sur les os. Il prit le second vêtement, un pantalon grisâtre qu'il enfila prestement. Il le serra à la taille avec une ceinture et enfila les bottes laissées là.

Il récupéra son couteau et s'observa dans le bout de miroir brisé. Il tourna la tête, plaqua la lame contre sa joue et commença à enlever la couche de poil dru qui couvrait son visage. Quand il eut fini avec son visage et qu'il eut été satisfait, il prit une mèche de cheveux et la coupa, ainsi de suite jusqu'à avoir les cheveux assez longs pour couvrir ses oreilles balafrées.

Il avait la peau mate, couverte de petites cicatrices sans importance, des cheveux roux ondulés et des magnifiques yeux verts, qu'il devait sans doute tenir de son paternel. Il s'observa une dernière fois et sortit dans la cour du bordel.

C'était un regroupement de quelques piteux bâtiments d'un ou deux étages situés à Nadéi, un quartiers peu fréquentable de Samudr. La cour fermée donnait sur une petite rue très fréquentée en journée comme de nuit. Il traversa la cour avec la dégaine d'un alcoolique et rejoignit le bâtiment principal.

Il entra par la porte de derrière, conduisant dans un salon possédant des sofas insalubres, des tables et des chaises pour ceux qui voulaient aussi boire. Il y avait un escalier qui menait à l'étage, où se trouvaient les chambres des prostitués, aussi bien hommes que femmes.

– Quelqu'un sait où est Panja ?

Un elfe s'approcha de lui. Il ressemblait à la sous-maitresse, deux cornes entourées de cheveux noirs, une peau foncée et des yeux noisettes.

– Viens.

L'elfe s'en alla, Xélion le suivit rapidement.

– Ranjit, c'est ça ?

– Je ne comprends pas pourquoi maman t'aide alors que ta tête est à prix.

– Je suis si connu ? ironisa le rouquin.

L'elfe s'arrêta et le regarda.

– Tu es Xélion, « l'espoir » de Nadéi.

Il ricana à son nom et la moquerie que dégageait Ranjit. Son nom signifiait espoir en hari, pure plaisanterie en sachant qu'il s'agit d'un bâtard et que le seul espoir qu'il puisse représenter pour sa famille tant maternelle que paternelle, c'était sa mort prochaine.

Ranjit toqua et ouvrit la porte devant laquelle ils s'étaient arrêtés. La pièce était un petit bureau avec une chambre adjacente. La femme assise au bureau leva les yeux, puis en voyant Xélion, fit signe à son fils de partir.

C'était une elfe, on aurait dit qu'elle avait une vingtaine d'année, pourtant, elle en avait le double. Sa peau était particulièrement foncée tout comme ses cheveux et ses cornes avaient la même forme que celles de son fils. Elle était vêtue d'une grande robe mettant en avant ses formes.

 Xélion tira une vieille chaise et posa son derrière dessus. La maquerelle proposa du tabac qu'il accepta vivement.

– Bon, maintenant que j'arrive à rester près de toi sans vomir tellement tu chlinguais, ça va ?

Le rouquin la regarda, peu amusé par sa pique.

– Comment vont les comptes ?

L'elfe soupira.

– Mal. Ça fait quatre mois que tu n'as donné aucun signe de vie. Ton influence à Nadéi et aux alentours a été anéantie. On te disait mort aussi, ou emprisonné sous terre. Tu comprends ma surprise quand je t'ai vu en chair et en os, enfin plus en os sur le coup...

– Viens-en aux faits.

– Je n'ai pas la force de résister Xélion, j'ai l'impression d'être entouré de vautour près à se lancer sur ma carcasse. Reprends ta place, je ne comprends pas comment tu as pu tenir le coup pendant neuf ans.

– Parce que c'est mon travail Panja. Contrairement à toi qui n'a fait qu'ouvrir les cuisses pendant vingt ans.

Ils se regardèrent longtemps sans rien dire. L'humain esquissa un sourire.

– Mais bon ! Ce travail m'ennuie Panja !

Il posa ses pieds sur le bureau.

– Il me manque un je ne sais quoi de danger...

– Comme si être recherché par tout le monde n'était pas assez dangereux.

Il ouvrit théâtralement les bras.

– Non Panja... Au contraire, j'ai décidé d'arrêter de me cacher et réclamer ce que je veux par la force !

Elle le dévisagea.

– Et que veux-tu alors ? Tu as de l'argent, tu peux baiser qui tu veux dans ce bordel quand tu veux...

– Je veux mon nom et prouver à ma connasse de famille qu'elle aurait dû m'assassiner dans le berceau.

La maquerelle se moqua.

– C'est que tu as un nom ? Toi ? Un gosse de rue ?

– Je suis l'espoir des Tan Poris Panja, le petit bâtard roux d'une vieille famille noble.

La femme cessa de rire. C'était à son tour maintenant. Il avait eu peur, encore aujourd'hui, il a peur. Mais cette épée de Damoclès au-dessus de sa tête le faisait enfin sentir vivant. Au moins, s'il mourait, ce ne serait pas dans la misère de ses derniers mois.

– Je reprends mes quartiers Panja. Et aussi ma place au sein de ce bordel.

– Tu sais que je pourrais te dénoncer.

– Mais tu m'es loyale Panja. Car comme moi, tu aimes bien ces petites pièces.

Il prit sur le bureau une petite pile de sona et joua avec les rondelles de métal. La sous-maitresse sourit.

– Tu veux tes anciens quartiers j'imagine ?

Il se leva et se dirigea vers la porte.

– Au revoir cher Comte, déclara l'elfe.

Il vit du coin de l'œil la maquerelle faire une révérence odieuse et sortit. Il rejoignit son ancien bureau et y entra. 

Rien n'avait changé. Toujours ce bureau lamentable au milieu de la pièce, devant la fenêtre, puis dans un coin quelques ouvrages et son lit lamentable derrière la porte. Il alluma une vieille bougie. Il lui fallait le plus rapidement possible une ligne de défense et d'attaque. Une personne qui comme lui, vendait sa loyauté et il eut directement un joli nom en tête. Il fallait aussi qu'il accomplisse une petite vengeance avant sa mort.

– Je te promets que je vais t'écorcher vif Fanrei. Pour avoir osé entreprendre ma destruction. 

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