-Bonsoir, lui réponds-je embarrassée à mon tour qu’il me voie dans une tenue pareille y a-t-il  un problème ?
-Euh, en fait oui, mais laissez, je crois que vous étiez sur le point de partir, dit-il ses yeux déviants vers mon décolleté.
-Ne vous inquiétez pas, entre voisins il faut bien s’entraider, que vous arrive-t-il ?dis-je en faisant mine de n’avoir rien remarqué .
-En fait, j’ai rendez-vous à l’autre bout de la ville et la batterie de ma voiture est à plat. Je venais vous demander si vous aviez des câbles.
-Ah non désolée, je n’ai pas de voiture. Mais peut-être que c’est sur notre chemin, avec mon amie nous allons aussi en périphérie, où devez-vous vous rendre ?
-Au Cube, vous connaissez ?
-Quelle coïncidence ! Dis-je étonnée. C’est là que nous allons !

    Nous sommes interrompus par des bruits étranges venant de la cage d’escalier, comme des grognements. Nous nous regardons en haussant les sourcils, curieux de voir de qui ou de quoi proviennent ces sons.

-Pff… non mais je te jure… quelle idée de choisir un immeuble sans ascenseur ! Grr… elle va m’entendre ! Je vais la…
-Coucou Noémie ! La coupé-je dans ses récriminations avant qu’elle ne commence à jurer comme un charretier. Je te présente mon voisin M. Robert.
-… tuer. Oh, euh, bonsoir, désolée, enchantée, bafouille-t-elle rougissante.
-Enchanté de même, dit-il d’une voix étrangement grave. Mais appelez-moi Bertrand, je vous en prie, lui sourit-il.
-Bertrand… murmure-t-elle les yeux brillants.

     Si mon voisin n’avait pas presque l’âge d’être son père, je jurerai qu’il lui a tapé dans l’œil, et réciproquement. Mais je dois me faire des films. Enfin…

-Hum hum, essayé-je d’attirer leur attention. Bon, j’étais en train de proposer à Bertrand qui se rend aussi au Cube de nous accompagner si tu es…
-Bien sûr ! Me coupe-t-elle. J’en serai ravie !
-C’est vraiment gentil de votre part, le temps de prendre mon téléphone et mon portefeuille et je suis à vous, dit-il en appuyant son regard sur Nono.
-Très bien, dis-je, je vais prendre ma veste, Nono tu peux venir deux secondes.

    Elle hoche de la tête mais reste figée. Je suis obligée de la tirer par le bras.

-C’était quoi ça, lui demandé-je une fois la porte fermée.
-De quoi tu parles ? Fait-elle l’innocente.
-T’es folle ! Il doit avoir l’âge de ton paternel !
-Peut-être qu’il est un peu plus âgé que moi, mais sérieux il est trop sexy ! Tu me l’avais pas dit qu’il était si viril ton nouveau voisin ! Et cette voix… ouh la la ! J’ai chaud, dit-elle en s'éventant avec ses mains.
-Tu dois vraiment être en manque, c’est pas possible !
-Tous les goûts sont dans la nature ! Et… il est marié ?
-Mais je n’en sais rien ! Tout ce que je sais, c’est qu’il a une fille dans la vingtaine.
-Pas grave, je vais avoir toute la soirée pour mieux le connaitre. Au fait, tu es sublime ce soir, pas autant que moi naturellement, me charrie-t-elle.
-Naturellement, pouffé-je. On va avoir tous les hommes à nos pieds !

     Nous nous observons dans le miroir de mon entrée et c’est vrai qu’on fait un duo de choc. Elle, grande blonde aux yeux marron portant une longue robe en satin rouge fendue jusqu’à mi-cuisse ainsi que des escarpins assortis, et moi, avec ma robe dos nu en lurex et des escarpins pailletés. J’attrape mon trench noir, mes clés et nous sortons de mon appartement. Bertrand est adossé au mur en face concentré sur son téléphone. Lorsque je claque la porte il relève la tête et recommence à dévisager Noémie qui rougit comme une adolescente. Je lève les yeux au ciel, je sens que je vais me retrouver toute seule dans ce club.

     Nous rejoignons la petite 206 noire de Nono. Naturellement c’est une trois portes ! Je me sacrifie et grimpe à l’arrière, heureusement que ma robe s’arrête au-dessus du genou ! Avec la même robe que Noémie, il m’aurait été impossible d'y accéder sans la bousiller, et Bertrand est vraiment très grand, pas sûre qu’il y serait arrivé sans se cogner la tête.

     Une fois tous attachés, nous quittons le parking sur les chapeaux de roues. Nous ne sommes pas meilleures amies pour rien ! Elle est comme moi, droguée à l’adrénaline. Bertrand étouffe un grognement, et je le vois serrer la poignée de la portière. Il doit commencer à regretter d’avoir accepté notre invitation. Il doit se dire, comme tous les hommes, femme au volant , mort au tournant. Noémie me regarde dans le rétroviseur central, elle a un sourire diabolique, on se comprend , elle veut mon aval pour pouvoir en mettre une couche supplémentaire. Je lui fait un clin d’œil et je m’accroche vite aux poignées de toute mes forces. Quand elle arrive à la prochaine intersection, elle nous fait un virage au frein à main digne d’un film d’action. Bertrand souffle un « oh putain ». Je suis morte de rire à l’arrière. Heureusement que j’ai laissé mes cheveux lâchés car une coiffure sophistiquée n’aurait pas survécus à la violence de ce virage. Je lui fais signe de se calmer car je n’ai pas envie non plus de ressembler à un épouvantail en arrivant.
Le portable de Bertrand sonne lorsque nous sommes stoppés à un feu rouge.

-Ouais…répond-il sèchement à son interlocuteur.
-J’arrive… enfin j’espère… murmure- t-il.
-Je t’expliquerai, à tout de suite.

     Lorsque nous arrivons à destination, Bertrand lâche un grand soupir de soulagement. Il sort, rabat son siège et me tend sa main pour m’aider à m’extirper de cette boîte de conserve. Je la saisis et je ne peux m’empêcher de sourire en le voyant si pâle et tremblant. Je le remercie d’être si galant, ce qui le fait rougir. Noémie me lance un regard de tueuse, apparemment elle est plus qu’intéressée par le cinquantenaire. Les papis c’est pas mon truc, elle le sait pourtant.










Shaky LoveWhere stories live. Discover now