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1ère place - lysance

Château de Calambiers, France, 1785

Le comte était furieux. Sa fille avait encore refusé le mariage ! Ce n'était pas réellement une surprise, elle l'avait toujours fait, depuis l'âge de ses seize ans, alors que bon nombre de prétendants s'étaient présentés à la porte. Monsieur de Calambiers, père de cette jeune femme, avait toujours accepté le fait qu'elle refuse à chaque personne, jugeant qu'elle était encore jeune – et surtout, que les vieillards qui se présentaient n'étaient pas aptes pour épouser sa douce Mélodie.

Cependant, l'arrivée du marquis de Baveil, richissime noble, n'était pas passée inaperçue dans l'esprit du comte. C'était une aubaine pour sa fille, une chance inestimable de s'élever socialement !

Ils s'étaient violemment confronté, elle et ses deux parents ; sa mère l'avait même menacé de la renier et de l'envoyer dans un couvent perdu en pleine campagne française. Mais rien n'y avait fait : elle refusait le mariage ! Le marquis devait venir le jour suivant le conflit, et le comte craignait que sa fille ne sache pas se tenir.

Le lendemain, jour de l'arrivée du marquis, Mélodie était introuvable. Les domestiques, et même les parents se mirent à la chercher, sans succès. Son père maudissait le sort de lui avoir offert une telle enfant : pourquoi n'acceptait-elle pas d'être comme les autres, docile ?
Le marquis arriva à dix-huit heures, pour souper avec la famille. On lui avoua que Mélodie était introuvable, mais ce ne fut pas un problème pour lui. Il demanda à aller se balader dans les jardins, espérant secrètement qu'il y trouverait la jeune femme.

Mélodie écrivait depuis le début de la journée. Allongée dans l'herbe, cachée derrière des bosquets en bordure de la forêt qui avoisinait sa demeure, la brune avait su trouver la meilleure cachette pour réaliser sa passion. Elle inventait des histoires sur des femmes libérées ; sur des femmes qui, comme elles, étaient confrontées à un destin qu'elles haïssaient, mais qui comme elles, s'opposaient fermement aux règles sociétales. Peut-être qu'elle pourrait gagner sa vie avec ses livres...

Soudainement, un raclement de gorge la fit sursauter. Elle manqua renverser de l'encre sur sa robe, mais parvint à retenir l'encrier de justesse.

— J'ignorais que ma promise écrivait.

Mélodie releva le regard vers le nouveau venu. Grand, blond au regard noisette, il souriait d'un air bienveillant. La brune sentit son cœur rater un battement ; elle le trouvait magnifique, à vrai dire.

— Qui êtes-vous ? demanda-t-elle, surprise.

— Alexandre de Bourvers, marquis de Baveil. Vous êtes Mélodie, je suppose ?

La blonde hocha lentement la tête. Il s'installa à ses côtés, puis attrapa le papier sur lequel elle était en train d'écrire. Elle tenta de le retenir, mais il lut, sans se soucier de ses murmures paniqués et de ses jurons.

— Un livre ? Sous un pseudonyme, murmura-t-il. Intéressant. J'ignorais que les petites familles nobles possédaient de telles personnalités sous leur toit. Vous n'êtes pas comme les autres nobles, Mademoiselle, à broder et à tisser des paniers ?

— Je suis libre. Je resterai à jamais libre, et jamais je n'accepterai de vous épouser.

— Notre mariage serait donc une forme de prison, pour vous ?

— Exactement.

Il la dévorait presque du regard. Il était si heureux de la retrouver, après tant de temps à la chercher !
Alexandre changea de sujet. Il l'interrogea sur ses passions, mais elle ne répondait que par des phrases courtes. Il se mit donc à parler de lui, de ses rêves. Au fur et à mesure, la jeune femme se détendait, souriant même à ses quelques mots d'humour et répondant à quelques questions avec plus d'entrain.

Anthologie HistoriqueWhere stories live. Discover now