Chapitre 4 (réécrit)

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- Je te l'aurais dit si ça n'allait pas... je te promets : je vais bien.

Elle me sonde un moment du regard, l'air pour le coup super impressionnante avec son regard détecteur de mensonge, puis finit par m'offrir un petit sourire rassuré.

- Si tu le dis, je te crois, elle murmure en pressant ma main. Bon, j'y vais mais on se retrouve ce soir !

Elle nous adresse un dernier signe de la main avant de s'éloigner en direction de sa voiture, tandis que je me sépare également de notre groupe pour rejoindre les cours. Même si je les apprécie tous (ou presque), j'ai toujours un peu de mal de rester en leur présence si Amber n'est pas là.

J'ai passé l'après-midi seule et pas une seconde je ne suis parvenue à écouter ce que les professeurs disaient. Je n'ai même pas pris les cours en note, ni réussi à décrocher mon regard du Colin imaginaire épinglé sur le mur du fond de l'amphithéâtre. Il est partout où je regarde, partout où je marche, et je ne peux m'empêcher de penser que ces pensées obsessionnelles et totalement intempestives auront un impact négatif sur mes études, et ma vie en général. Ce qui m'exaspère en réalité, ce n'est pas autant que je n'arrive pas à me concentrer, mais plutôt que je ne comprends pas ma réaction. Je ne fais pas partie de ces gourdes dégoulinantes de romantisme qui croient au coup de foudre, mais plutôt de celles qui pensent qu'un amour, ça se construit, et que ça s'apprend à mesure que l'on apprend à connaitre l'autre personne. Et puis, la question ne devrait même pas se poser : ce Colin a beau m'obséder depuis plusieurs jours, je mettrais sans hésiter ma main à couper que je ne figure même pas dans la file d'attente de ses pensées.

Le haut de mon crâne est brûlant à cause du soleil frappant, et je souffre le martyr dans mes Vans à cause de la température exceptionnellement élevée. J'ignorais qu'il pouvait faire si chaud à New-York, mais j'imagine que le réchauffement climatique y est pour quelque chose. Ou alors c'est moi qui ai un problème. Le GPS de mon Iphone m'indique qu'il ne me reste qu'une petite vingtaine de minutes avant d'arriver chez Terrence's, et je profite de ma promenade pour passer un coup de fil à ma mère, qui doit être en pause déjeuner. Je lui raconte tout à propos de mon nouveau job, de mes amis, et de ma nouvelle vie. Elle est évidemment très heureuse pour moi, son unique fille, mais doit déjà reprendre son service après seules quelques petites minutes, à mon grand regret. Je dois admettre que même si tout semble me sourire ici, je ressens un énorme vide sans ma famille, mon repère.

Lorsque j'arrive enfin devant la façade du Terrence's, je suis submergée par une grande vague de soulagement. J'ai l'impression d'avoir fait Paris-Marseille à pieds. Une fois rentrée dans l'établissement, je me dirige vers le comptoir du bar pour reposer mes pieds, ce que je peux me permettre étant donné que je suis en avance.

- Salut Mia, ça va ? me demande gentiment Marc en me servant un verre d'Iced-tea, la seule boisson que je daigne boire en dehors de l'eau.

- Moi je vais bien, mais je ne pourrais pas en dire autant de mes pieds, je réponds avant de boire une gorgée.

- Tu n'as toujours pas de voiture ?

- Non, pas encore, mais il va bien falloir que je m'en procure une j'imagine.

Il se moque gentiment de moi tandis que le bar commence à se remplir, et je ne réalise que quelques minutes avant mon service que je ne me suis toujours pas changée, portant encore mon jean slim et un débardeur.

- Je dois aller me changer, mais on se retrouve après ! je m'écrie à Marc en courant dans les vestiaires.

Amber a vraiment bon goût en matière de mode. La petite robe noir aux manches mi-longues et au dos-nu qu'elle m'a choisie me va à ravir, et je suis plus qu'à l'aise dedans. Quant aux talons... j'imagine que je vais devoir m'y faire. C'est d'un pas rapide mais maladroit que je rejoins la scène, devant les dizaines de clients du restaurant qui prennent place. Je manque de m'étaler de tout mon long sur la scène en me tordant la cheville avec ces fichus talons trop hauts, mais j'arrive saine et sauve à mon tabouret, et c'est avec le coeur battant la chamade que je m'y assieds. En réalité, le fait que personne ne me regarde m'arrange considérablement, je me sens plus confiante et moins vulnérable, mise à nue. C'est peut être étrange à dire, mais jouer d'un instrument comme je le fais, c'est-à-dire avec mes tripes, mon coeur, c'est comme se mettre à nu devant le monde entier, et ça demande plus de courage que peut le soupçonner le public. Et à mon grand contentement, aucune des personnes dans la salle ne me prête attention, je suis inexistante et invisible à leurs yeux, presque autant que la plante dans le coin du salon que personne ne prend la peine de regarder. Aucune paire d'yeux n'est dirigée dans ma direction... sauf une. La sienne. Je l'ai senti arriver avant même que mon regard ne croise le sien, et je me déteste pour ça, tout simplement parce que ça prouve à quel point je suis profondément enfoncée dans la folie. Je ne le connais même pas, nom de Dieu !

Ne me quitte pas (Disponible en pré-vente chez Hachette, Black Moon Romance)Where stories live. Discover now