Chapitre 33 - Qui croire ?

Depuis le début
                                    

Ils obéirent et s'engagèrent dans le couloir lumineux où patientaient Duncan et Son Altesse, près d'une petite porte. L'ouverture du battant révéla un escalier en colimaçon très étroit, aux marches de pierre grise.

— Heureusement que vous vous êtes entraînée à tourner hier soir, car vous n'avez pas fini que d'avoir le tournis, la prévint le roi.

Et ce ne fut pas peu dire... Leur descente tortueuse dura si longtemps que la vue de la réserviste parut se retrouver envahie de spirales. Elle se tint tant bien que mal à la rampe constituée d'une simple corde retenue par des anneaux de métal. L'unique luminosité provenait du chandelier tenu par Duncan, qui devançait le groupe. Les ombres projetées par les flammes dansaient sur des murs dont la pierre, à mesure qu'ils s'enfonçaient dans les entrailles du palais, devenait de plus en plus brute.

Comment la falaise qui soutenait le château avait-elle pu être autant forée ? Était-ce bien raisonnable de laisser un tel édifice reposer sur du gruyère ? Certes, le monarque pouvait se permettre de jouer avec la mort, mais un effondrement ne réussirait franchement pas aux autres courtisans...

Lorsqu'une porte de bois se profila sur l'un des murs circulaires, Alisée crut qu'ils avaient enfin atteint leur but, cependant Sa Majesté la détrompa :

— Ici se trouvent les réserves de poudre du royaume, lui indiqua-t-il en s'arrêtant au milieu des marches afin de se tourner vers elle.

Sa fille fit immédiatement volte-face pour le foudroyer de son regard bleu.

— Livre-lui toutes nos stratégies, les effectifs de nos soldats et l'emplacement de nos camps d'entraînement, tant que tu y es !

Mais son agacement la déserta à la vue de la mine sceptique de la concernée.

— De poudre ? répéta-t-elle, ne voyant pas exactement de quoi il parlait.

Il lui mima une explosion, alors elle comprit. Sur la Terre des Loups, toute arme à feu, qu'elle fut un simple pistolet ou un canon, était formellement interdite. Ces équipements d'attaque inventés relativement récemment par les vampires effrayaient les lycanthropes, auxquels les balles en argent se révélaient fatales. Ils préféraient de loin les combats frontaux, quitte à y perdre la vie, plutôt que de lâches projectiles envoyés à distance. Dans ce domaine-là, seul le tir à l'arc trouvait grâce à leurs yeux.   

Ils considéraient aussi l'usage de la poudre comme trop hasardeux, une seule mauvaise manipulation pouvant se retourner contre son utilisateur.

— Vous... Vous voulez dire que les réserves de poudre du royaume sont stockées... sous le palais ? s'éberlua-t-elle.

La folie s'était-elle à ce point emparée du souverain ?

— Au moins savez-vous maintenant ce que veut vraiment dire "jouer avec le feu"...

Elle espéra qu'il allait éclater de rire et dévoiler une mauvaise blague, en vain.

— Soyez certain de me voir préparer mes valises dès notre retour en haut, l'avertit-elle.

Loin de lui accorder du crédit, il s'esclaffa et ils reprirent leur descente. Non seulement tu vis sous le même toit que le roi des vampires, mais en plus ce toit risque d'être réduit en poussière à tout moment... Elle n'avait absolument aucune raison de ne pas dormir sur ses deux oreilles... Aucune.

Sang de Rose [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant