Le voyait-elle comme un traitre à présent ? Ou bien un genre de terroriste cruel, un psychopathe sadique ? Il n'était pas dénué d'aussi peu d'humanité. Il était un Psychique, pas un monstre.

Sa main se posa sur le visage de Layla. Elle était si pâle, les cernes sur ses yeux indiquant le peu de nuit paisible qu'elle avait pu connaitre ces derniers temps. Elle dormait mal. La preuve en était qu'il essuyait régulièrement ses larmes. Elle les déversait tout en dormant.

Là-bas, dans ce laboratoire clandestin de l'USRP, un lieu aujourd'hui en ruine mais que Layla avait connu, Dorian avait pu voir des installations suffisamment illustratrices des horreurs que des personnes comme lui avaient dû subir. Des personnes comme Layla. Des Psychiques. Il comprenait pourquoi sa mémoire bloquait le souvenir de cette année. Il comprenait, mais il devait l'obliger à retrouver cette mémoire perdue. L'USRP n'était pas une organisation pour laquelle Layla devait se battre. Une branche par pays, très organisée, l'Unité Spéciale de Recherche sur les Psychiques se battaient en apparence pour intégrer les Psychiques parmi les humains normaux, sans dons. On les forçait à vivre cachés et soumis, leur imposant plus de devoirs que de droits, des règles différant avec celles des droits humains habituels. Selon le pays, l'USRP pouvait être pire encore. A tort ou à raison.

Avec la destruction de Colombe, on accusait la France d'être simplement devenue trop laxiste avec la menace psychique. L'USRP d'Allemagne en particulier portait cette accusation, soutenue par les Etats-Unis, un poids suffisamment important pour faire opiner la plupart des Etats face à cette remarque. Et bien sûr, la Russie ne semblait pas d'accord, tout comme ses pays alliés. Les alliances politiques donnaient toujours raison sans à avoir à tenir compte des faits. On oubliait alors que les droits psychiques en France étaient aussi liberticides que dans le reste du monde. A ceci près qu'en France, le statut d'humain était accordé aux Psychiques. Autrement dit, un Psychique possédait les mêmes droits et devoirs qu'un humain lambda, ajouté à cela ses droits et devoirs de Psychiques et des règles lui étant imposé.

Une menace pour les organisations plus hautes, un espoir pour les Psychiques qui voyaient une évolution dans leur statut.

Dorian n'était pas dupe. Certes, avec le nouveau dirigeant de l'USRP français, il y aurait de l'espoir. Dorian savait qui était vraiment ce nouveau Monsieur Z. Seulement, l'USRP n'était qu'un centre de recherche. Une unité de recherche avec un bras armée, certes, mais dont la principale activité demeurait la recherche, l'observation et l'espionnage. La branche plus armée de l'organisation était récente, imposée pour gérer les petites criminalités psychiques d'un pays.

Ce dont Dorian se méfiait davantage était la tête pensante. Les autorités supérieurs dirigeant ces systèmes de contrôle des Psychiques. En travaillant pour l'USRP, c'était pour ces organisations que Layla travaillait.

— Et dire que je suis censé être le méchant, soupira-t-il d'un sourire en écartant une mèche de cheveux du visage de Layla.

Et soudain, sans prévenir, Layla ouvrit les yeux. Des yeux étranges, sans pupille, aveugle et comme tourbillonnant d'une lueur étrange. Ne laissant pas le temps à Dorian de se protéger, elle hurla.

***

Ma voix enrouée, je ne pu parler. J'étais habituée, ma voix reviendrait vite.

Cela m'arrivait de plus en plus souvent de perdre ma voix après avoir poussé mon cri de banshee. En usant presque chaque nuit, sans oublié son utilisation quotidienne pour les missions de l'USRP, et ajouté à cela les cauchemars dont je ne me souvenais pas à mon réveil mais qui me tétanisait durant quelques instants, il n'était plus aussi étrange que ça que ma voix se perde. Elle reviendrait bientôt. Sans doute lorsque mon cœur se remettrait à battre dans un rythme plus lent.

Une main se glissa sur mon visage. Dorian l'attirait vers le sien.

— Tes yeux... Non, j'ai dû rêver.

Il me relâcha, son sourire habituel revenant aussi vite.

— Tu devrais te rendormir, il est encore tôt.

Un regard autour de moi me permit de remarquer le changement de pièce. Je ne me trouvais plus dans une cage mais dans une chambre vraiment... jolie. Presque luxueuse.

Hier, lorsque Dorian m'avait proposé son aide, je n'avais pas accepté. Mais surtout, je n'avais pas décliné. Etait-ce la raison pour laquelle il me permettait une captivité plus agréable ?

— Où est Dumbe ?

— Il va bien.

Repoussant les draps, je quittais le lit confortable. Le constat premier se trouva dans mes vêtements, visiblement changé.

— Je veux le voir.

— Tu ne peux pas.

Ce refus... Finalement, la situation en elle-même m'était familière. Moi, enfermée dans une chambre, la chambre d'un homme me désirant captive et me refusant toute demande. Dorian avait changé, et en cet instant il devenait comme Ryan.

Que c'était-il passé ? Où était partit Dorian, mon frère de cœur, celui avec lequel j'avais vécu le pire ? Celui qui m'avait sorti de Colombe ? Où était passé cet ami, cette seconde famille ?

— Laisse-moi partir.

Il leva sa main, y recueillant une larme sur mon visage. Pourquoi est-ce que je pleurais ? Cela n'avait pas de sens.

— Tout va bien se passer, Layla. Tu n'es pas enfermée, je ne te forcerai jamais à rien.

Disait-il vrai ? Allait-il me laisser partir ?

— Avant que tu ne prennes une décision, laisse-moi te montrer quelque chose.

Donc non, il ne souhaitait pas me relâcher. Comprenant mes doutes, il secoua de la tête.

— Après, je te promets de te laisser partir. Mes hommes te ramèneront chez toi ou n'importe quel lieu de ton choix.

— Promis ?

— Croix de bois, croix de fer, jura-t-il en se barrant le torse avec sa main.

Les Psychiques - Laisse-moi partirWhere stories live. Discover now