— Tout va bien.

A force de répéter cette phrase, il arriverait sans doute un jour où moi-même j'y croirai.

Mais tout en me laissant ainsi bordée, quelque chose attira mon attention. Mon regard se posa sur une ombre. Une ombre qui prit forme pour devenir...

— Dorian ?

Aussitôt, mon père s'effondra.

— Papa ! hurlais-je en rattrapant l'homme qui tomba dans un genre de profond sommeil.

Et tout en s'évanouissant, ce dernier s'écroula sur moi qui tentait de le maintenir en place. Dorian arriva à ma hauteur, un grand sourire aux lèvres. Il ne m'aida pas à me débarrasser de mon père. Il ne s'inquiéta pas non plus de son état.

— Tu n'es pas facile à retrouver, Layla.

Il s'accroupit pour se rapprocher de moi.

— Et dire que tu as rejoint tes propres bourreaux entre temps... N'est-ce pas une forme dérivée du syndrome de Stockholm ? Ou peut-être un conditionnement ? Mais venant d'un Caméléon, je parlerai davantage d'adaptation.

Et tout en l'écoutant, nous seulement je comprenais que quelque chose n'allait pas mais un signal d'alerte retentit dans mon esprit.

— Dorian, qu'est-ce que tu...

Son regard s'assombrit, son sourire ne se tarissait pas.

— Layla, t'aurait-on recrutée pour que tu anéantisses Sandhre ?

D'autres individus sortirent de derrière les arbres. Des individus que je devinais être des Psychiques. Il m'arrivait d'être naïve, parfois un peu lente. Il m'arrivait également de comprendre un peu tard la situation. Mais je n'étais pas stupide.

Dorian écarta une mèche de cheveux de mon visage, son regard plus attendrissant.

— Je vais t'aider, Layla. Je t'apprendrai à contrôler le Caméléon en toi et à ne plus te laisser dominer par lui. Je t'apprendrai à ne plus craindre le monde. Je t'apprendrai à être enfin toi-même sans en être terrifiée.

— Tu fais partie de Sandhre.

Il acquiesça de la tête. Mon frère, celui qui était venu me sauver de Colombe, qui avait vécu la même terreur du Soleil de Dante, celui qui avait été le seul à résister aux pouvoirs psychiques d'une psychique Empathie... Celui en qui je n'aurai jamais cru devoir détourner ma confiance...

Les photos des atrocités produites par l'organisation criminelle me revinrent à l'esprit. Celles que Monsieur Z m'avait montré après avoir permis ma libération d'une prison clandestine et fait condamner Madame Z pour ça.

C'était ma chance de prouver à Monsieur Z que je n'étais pas un joueur que l'on pouvait se permettre de mettre sur la touche.

Aussitôt, je poussais mon cri de Banshee, prête à me battre contre des criminels. La main de Dorian se leva presque immédiatement, arrêtant tout aussi simplement mon cri. Ce fut comme un mur se dressant devant moi. Un mur présenté par sa main. Lorsqu'il la referma, mon cri disparu. Il venait de me l'arracher.

— Ta voix te reviendra d'ici quelques minutes. Peut-être quelques heures, continuait-il de sourire.

Comment avait-il fait ?

Je voulus repousser de nouveau mon père, remarquant une odeur qui l'enveloppait.

— Psychique Soporifique, se contenta d'expliquer Dorian en devinant mes pensées.

Un autre individu s'approcha, levant sa paume, prêt à souffler dessus. Dorian l'arrêta.

— Pas tout de suite, Morphée.

Sa main se saisit de mon père, le soulevant pour m'en libérer. Il me tendit ses longs doigts. Ainsi penché vers moi, ses cheveux blonds lui tombèrent sur le visage. Lentement, comme fait exprès pour ajouter un charme attrayant à l'homme..

« Tu étais mon frère », pensais-je en me souvenant de l'enfant qui avait vécu le passé que le mien. Nous étions deux, nous étions un, au point où il était venu à Colombe. Pour moi, pour me sauver. Au point où aucun Psychique n'avait su l'influencer.

Comment celui que je considérais comme un frère pouvait-il appartenir à un groupe de criminels aussi dangereux et barbare que le Sandhre ?

— Que tu le veuilles ou non, Layla, je vais t'aider. Ne m'oblige pas à te forcer la main.

— M...M'aider ?

Ma voix revenait. Elle était roque et fébrile, irritée également. Mais elle était bien là.

— Tu guéris plus vite que prévu. Saurais-tu utiliser la capacité de guérison de la Banshee pour toi-même ?

— Je...Je vais...

— Tu vas ?

Il se moquait de moi. J'avais toutes les peines du monde à parler et il osait se moquer de moi. Une toux douloureuse s'empara de ma gorge, tentant de dégager une gêne imaginaire.

— Non, tu as simplement forcé sur ta voix, comprit Dorian en tournant mon visage vers le.

Il recueillit une larme de sang sortit de ma bouche.

— Attend simplement de guérir. Ne te blesse pas.

L'inquiétude naissante disparu pour laisser place à un amusement soudain. Dorian se retenait de rire.

— Layla, je suis également un Caméléon. Un Caméléon avec bien plus d'expérience.

Il s'empara d'une liane venu le saisir à la cheville. Mes doigts plongés dans la terre avait voulu appeler certains dons offerts par mon identité de Caméléon. Apparemment sans succès.

— J'ai compris le message. Tu ne comptes pas coopérer.

Il se leva, claquant simplement des doigts pour donner son ordre. Aussitôt Morphée près de moi, main tendu, je n'eu qu'à donner un violent coup de pied tout en posa ma main contre mon nez pour que sa maudite « poudre dodo » lui revienne en pleine figure. K.O.

Ne laissant pas le temps au groupe de répliquer, je levais ma propre main. J'avais vu, j'avais appris. Je reproduisais.

Et mon odeur soporifique se répandit dans un espace bien plus grand que ce qu'avait proposé Morphée, plongeant la moitié des individus dans un profond sommeil. Le reste fut protégé par la rapidité de Dorian à répliquer. L'eau, venu de ma maison, sortait pour détruire l'odeur.

— Vraiment Layla. Je n'ai pas envie de te faire du mal.

Il n'avait que ses pouvoirs de Psychique pour l'aider. Moi, j'avais plus. Persuadée de pouvoir gagner, je fis la plus monumentale des erreurs. Il se saisit de mon poing en plein vol.

— Tu es un Caméléon qui ne sait pas se contrôler. Tu es influencée par les attentes des autres, me confia-t-il. Si je me mets à vouloir de toi que tu sois simplement irréfléchie, tu le seras, Layla.

Un autre coup de ma part partit, me faisant alors prendre conscience d'une possibilité psychotique. Peut-être que mes actions ne venaient pas de mon propre libre-arbitre, mais de l'adaptation du Caméléon voulant survivre. Dorian était le plus dangereux, celui à qui il fallait plaire. Mes instincts se tourneraient-ils vers des désirs qu'il maitriserait.

Gotcha, murmura-t-il alors en me portant un coup unique.

Mon esprit vacilla, mon corps perdit le contrôle. Je tombais, inconsciente, dans les bras de Dorian.

Monsieur Z avait raison. Je n'étais pas prête pour affronter Sandhre. Ses membres étaient bien trop forts pour la témérité et l'excès de confiance qui m'aveuglaient.

Les Psychiques - Laisse-moi partirWhere stories live. Discover now