Partie 32

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Sarah :

Sans nouvelle de puis 6 mois, depuis si longtemps, depuis une éternité ...

Yanis s'est attaché plus que jamais à Sarah qui reste son dernier lien avec son père disparu dans ce pays qu'il croyait un lieu de sécurité et d'espoir. La guerre n'aura pas enlevé son père mais le destin l'a rattrapé à mille lieu de son pays d'origine.

Sarah ne quitte plus durant de longue heure la fenêtre comme si Süleyman allait sortir à l'angle de la rue. L'automne s'installe doucement, le temps embrasse la douleur du coeur comme pour l'accompagner dans sa blessure.

En cette grisaille, les joues habillées des perles des sentiments brisés, le craquèlement des fagots soumis à la braise consume les derniers souvenirs d'un temps jadis débordant d'amour et de passion.

Le regard sur l'automne, à travers la fenêtre partiellement embuée, l'esprit troublé tente de percer la cour intérieur donnant sur le cœur pour cerner la raison du présent, miroir d'un passé sans futur.

Ici et là, des feuilles virevoltes dans la chute jusqu'à se perdre dans les méandres d'une saison révolue. Ici et là des brides de souvenirs s'envolent pour un horizon vers l'oubli...

Au loin les cris de joie des enfants qui se jouent du mauvais temps interpellent l'esprit éperdu à l'écoute de ses dernières soubresauts d'une innocence perdue à jamais. Un silence qui se fait l'écho d'une voix éteinte qui n'a que les mots du regard face aux maux de l'âme.

Le cœur serré entre l'étau du temps et le marteau de la conscience, loin de tout angélisme le corps s'enchaîne malgré lui au passé devenu l'enclume d'un navire échoué au large du désespoir.

Les larmes séchées sur les joues de Sarah témoigne d'un amour éperdu, tout semble si irréel, si improbable. Pourquoi le destin s'acharne sur moi ? Une question sans réponse mais qui emporte tant d'espoir.

Ô Süleyman, lorsque mon regard se perd, c'est ton visage que je voie, de jour comme de nuit, ni le soleil, ni la lune ne peuvent voiler à mon cœur ma passion que tu as fait naître au premier touché... Je n'ai pu te dire combien je t'aime, je n'ai pu te dire combien je te désire, voilà déjà que le destin me prive encore une fois de sa perle. Où es-tu ?

Si seulement tu savais, si seulement tu étais là, toi qui au mur des "Je t'aime" as reçu de ma part une déclaration sans retenue, toi qui sais déjà tout de moi, même la part d'ombre qui fait la lumière de mon âme... Je languie ton regard qui me rendait ma dignité perdue... 

Étrange est la vie, sur ces chemins imprévisibles ... c'est dans tes yeux que je veux la vivre ma réussite si modeste soit-elle , reviens-moi je t'en supplie !

Yanis s'approcha de Sarah avec prudence comme s'il percevait dans la douleur de Sarah une expression qui réclame un réconfort et beaucoup de tendresse... lui qui a tant souffert après la perte de sa mère, lui qui tant vécu pour son age dans ce périple de la vie entre la guerre, l'exile, les camps de réfugiés et aujourd'hui la disparition de son père ... il semble trop mature pour son age.  

Au bruit des pas de Yanis,  Sarah sortie de son état, son regard posé sur Yanis finit par verser les dernière larmes que son cœur avait à offrir aujourd'hui avant de lui ouvrir les bars grands ouverts et de lui dire :

- " Vient par là mon petit prince, ne t'inquiète pas, on va le retrouver ton père je te le promets je vais tout faire pour que l'on soit réuni à nouveau."

Yanis rempli d'émotion contient ses larmes et lâche quelques mots digne d'un adulte :

- " Sarah tu sais mon père me disait souvent face à l'épreuve il faut s'en remettre à Allah, à lui nous appartenons et vers lui nous retournerons"

- " Ô mon trésor viens par là"

Les yeux pleins de larmes Sarah offre une étreinte à Yanis.

- " Sarah tu penses qu'il a pu m'abandonner pour rejoindre ma mère ? Lui aussi est monté au ciel ? pourquoi il ne donne plus signe de vie ?  "

- " Non Yanis, jamais ton père ne t'abandonnerait, je suis sur, il est surement entrain de tout faire pour revenir."

Malgré son désire de paraître fort, Yanis finit par craquer et de lâcher en larme : 

- " Il me manque tellement ! j'ai peur de ne plus jamais le revoir ..."

-" Viens Yanis, regarde je vais te montrer ce petit recueille que j'ai trouver dans les affaires de ton père, tu veux que l'on lisse ensemble un de ses poèmes ? "

La souffrance de Yanis fait oublier à Sarah sa propre souffrance.

- "Oui je veux entendre ses mots, je veux sentir son esprit, son cœur et son âme "

- " regarde voilà un de ses poèmes qui me tient à cœur , il l'a intitulé : Chrysalide "

" Ô poète, le printemps t'attriste et tu as certes tes raisons,
Toi qui verses les larmes de vers au-delà des saisons,

Ce qui fut jadis s'est envolé, ce qui est présent va voler,
Ainsi est l'œuvre du temps, à quoi bon pénitence t'imposer ?

Qu'elle est donc ce désir ? Crois-tu ordonner le la au destin ?
Veux-tu geindre jusqu'au bout de la nuit céleste sans fin ?

Tes perles peuvent-elles racheter la jeunesse dérobée ?
Ton livre des comptes dispose qui sait des vierges feuillées ?

Que dire de ton silence à la rime et la prose fait de douleur ?
Peux-tu lui en vouloir qu'il s'acharne sur la faiblesse du cœur ?

Nulle n'est tenue à la fatalité de l'infortune, Pas même l'astre royal des ténèbres, la lune !

Là où ton âme pose l'ancre, Il y a l'éminence de ton encre,

La grandeur honore la constance ta valeur, Sur le chemin de la vie toujours à l'heure... "

- "Je reconnais bien là mon père, son âme de poète, si seulement je pouvais le serrer une dernière fois dans mes bras !" 

- " Viens dans mes bras mon trésor, on va aller faire un tour, on a besoin de changer d'air, on va retourner vérifier dans les urgences des hôpitaux ... on va afficher encore des avis de recherche dans les rues de Paris ... "

Yanis essuie ses larmes et fait un signe d'approbation avant de saisir la main tendue de Sarah.

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Ps: merci à vous d'être encore là après une absence si longue... haalpulaar La_Barhamienne lemarqueur RebbeiL ....

Le dernier trainWhere stories live. Discover now