Cendres de Lune [TERMINÉ]

Per FairyLife2003

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Dans un monde où les vampires et les loups-garous règnent en maîtres, Lyssandra est une Neutre, c'est-à-dire... Més

Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
Chapitre 26
Chapitre 27
Chapitre 28
Chapitre 29
Chapitre 30
Chapitre 31
Chapitre 32
Chapitre 33
Chapitre 34
Chapitre 35
Chapitre 36
Chapitre 37
Chapitre 38
Chapitre 40
Chapitre 41
Chapitre 42
Chapitre 43
Petit mot de la fin

Chapitre 39

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Per FairyLife2003

Lorsque Julian lui avait avoué que les bagues n'étaient pas obligatoires, mais qu'elles diminuaient la douleur ressentie au moment de la transformation, Lyssandra lui en avait voulu pour son mensonge. Après tout, il lui avait fait prendre des risques pour rien. Elle préférait ne pas songer à ce qu'il serait advenu si Dame Miranda l'avait surprise à fouiller dans sa chambre... Sans doute lui aurait-elle fait connaître la couleur de ce grenier plus tôt. Désormais, la jeune fille comprenait pourquoi les pierres étaient si importantes.

Déjà qu'elle avait l'impression que tous ses os étaient broyés un par un, elle osait à peine imaginer ce qu'elle aurait ressenti si sa douleur n'avait pas été "atténuée".

Toutes les fois où elle s'était plainte d'avoir mal en quelque part lui semblaient dorénavant bien dérisoires. Son corps était si endolori qu'elle ne se rendait même pas compte des changements qui s'y opéraient. Ses jambes et ses bras qui se transformaient en pattes, sa peau qui se recouvrait d'un pelage gris, ses yeux qui abandonnaient leur teinte marron au profit d'un bleu clair... Elle se promit que si elle survivait à cette mutation, alors plus jamais, au grand jamais, elle ne se lamenterait pour la moindre souffrance.

Après les secondes les plus longues de son existence, toute douleur cessa subitement. Troublée, Lyssandra n'arrivait plus à fixer la moindre pensée. Elle ne s'étonnait même pas d'être debout sur quatre pattes, de voir le bout de son museau pointu, d'avoir des oreilles de forme triangulaire au sommet de sa tête... Elle ne s'étonnait tout simplement pas d'être un animal.

Sa forme de louve lui était aussi naturelle que si elle avait toujours fait partie d'elle, et qu'enfin, elle pouvait se dévoiler.

Ce qui l'embêtait, c'était qu'elle ne semblait pas maîtresse d'elle-même. Des sortes de pulsions guidaient ses actes, comme si une seconde entité — son entité animale — prenait le contrôle. Elle tournait en cercles à travers le grenier sans en avoir conscience, expirant nerveusement du museau pareil à si elle était en colère. La louve avait envie, non avait besoin de quitter cet endroit. Des images de la forêt s'imprimaient dans son esprit, exprimant sa nécessité de s'y rendre. Tous ses sens étaient décuplés, et le silence et l'étroitesse des lieux n'en devenaient que plus insupportables. Calme-toi, tenta de se raisonner Lyssandra. Calme-toi. Mais les pensées de la jeune fille s'évanouissaient derrière les instincts de l'animal, accentuant sa rage et son impatience.

Une odeur presque imperceptible parvint finalement au museau de la louve, qui huma l'air à la recherche de sa source. Lyssandra réalisa que son odorat, tout comme sa vision, était extrêmement précis, détectant immédiatement d'où s'échappait la fumée qui se répandait dans l'air. Elle resta étourdie quelques instants, mais le sommeil ne la gagna pas.

Bientôt, elle entendit un bruit, et ses oreilles se dressèrent, leurs pointes noires orientées vers l'avant. Malgré la pénombre, ses yeux désormais bleus distinguèrent chaque imperfection dans le bois de la trappe qui se soulevait. Ils discernèrent également chaque pierrerie incrustée dans la broche de Dame Miranda, lorsque celle-ci fit son apparition dans l'ouverture, un plateau dans les mains.

Croyant que sa drogue avait une nouvelle fois fonctionné sur la jeune fille, la vampire grimpa sereinement dans la pièce, sans prendre la peine de refermer la trappe derrière elle. Elle jeta un regard circulaire sur le grenier, mais malgré ses facultés surnaturelles, ne vit pas la louve grise tapie dans l'ombre. Elle ne se formalisa guère de l'absence du corps endormi de Lyssandra, supposant certainement qu'elle était derrière une caisse ou dans un recoin hors de sa portée. La femme déposa le plateau par terre dans un geste dédaigneux, avant de se figer.

Un grognement menaçant venait de résonner.

La louve sortit de l'ombre, les crocs découverts, son regard bleu transperçant Dame Miranda. Ses griffes acérées bruissaient sur le parquet, prêtes à fondre sur leur proie à tout moment.

L'expression de la vampire était gravée dans l'effroi, ses yeux verts exorbités de terreur comme Lyssandra ne les avait jamais vus.

— Quoi... Comment ? balbutia-t-elle sans pouvoir bouger d'une semelle.

Elle dévisageait l'animal comme si elle cherchait à y reconnaître la Neutre qu'elle connaissait. L'idée que l'insignifiante petite chose dont elle avait puisé le sang pendant des années puisse s'être transformée en loup-garou lui paraissait sans doute inconcevable. Pourtant, elle dut bien vite prendre conscience de la réalité car elle fit mine de se ruer sur la trappe. Sa vitesse surdéveloppée ne lui servit à rien, la louve ayant bondi sur elle au même moment afin de la faire tomber au sol.

Ses pattes massives plaquées sur les épaules de sa victime, Lyssandra sentait ses griffes s'enfoncer dans la chair glacée de la vampire. Toute la rage, la colère, la haine qu'elle éprouvait envers Dame Miranda refaisaient surface, plus dévastatrices que jamais. Elle avait irrémédiablement envie de planter ses crocs dans le cou de cette femme qui avait toujours tout fait pour la faire souffrir, qui l'avait enfermée ici pendant des semaines, qui avait laissé mourir sa mère... Le souvenir de cette dernière agonisant dans ce grenier attisa le feu qui brûlait en elle, la faisant plonger ses pattes encore plus profondément dans le corps de sa proie.

— Lâche-moi ! glapit la vampire en se débattant. Espèce de sale petite...

Elle ne termina pas sa phrase, la louve ayant poussé un nouveau grondement terrifiant. Ses canines n'étaient qu'à quelques centimètres du visage de Dame Miranda. Elle pouvait lire et sentir toute l'épouvante qui animait le regard de la femme, et s'en délectait. Les rôles s'étaient enfin inversés. Maintenant, c'était elle qui la faisait souffrir.

La louve aimait la sensation de sentir sa victime trembler, de voir l'espoir la quitter peu à peu au fur et à mesure qu'elle comprenait qu'il n'y avait qu'une seule issue possible. Sa vengeance était à portée de crocs. Dès qu'elle aurait tué la vampire, Lyssandra serait libre. Elle pourrait retrouver Julian et... Non ! intervint une voix lointaine dans son esprit. Tu ne seras pas libre.

L'image de Julian avait permis à Lyssandra — la vraie Lyssandra — de reprendre le dessus sur la bête aveuglée par ses instincts. Tuer Dame Miranda ne lui apporterait pas sa liberté. Au contraire, elle la perdrait sans doute à tout jamais. La mort de la vampire ne ferait que hanter sa conscience. Les rôles s'étaient inversés, en effet. Mais si la buveuse de sang n'était plus un bourreau, cela voulait-il dire que Lyssandra devait le devenir ? À présent qu'elle ressentait ce plaisir sadique en voyant Dame Miranda souffrir, elle comprenait pourquoi cette dernière avait été aussi cruelle envers elle. Comme il était facile de se laisser submerger par la haine, de se réjouir des souffrances de son ennemi !

Sauf que Lyssandra était plus forte que cela.

Si elle voulait être libre, alors mettre un terme aux jours de Dame Miranda n'était pas la solution. La louve desserra lentement sa prise sur la vampire, ne quittant pas ses yeux verts étincelants de terreur. Elle pouvait au moins profiter de voir ce sentiment faire voler en éclats la plaque de marbre qu'était d'ordinaire ce visage impitoyable.

Lyssandra grogna une dernière fois au nez de la buveuse de sang, avant de sauter vers la trappe toujours ouverte. De fines marches en bois descendaient vers un espace pas plus grand qu'un placard, mais la louve put tout de même s'y faufiler. Sa vision surnaturelle lui permit de distinguer une nouvelle ouverture malgré l'obscurité, nichée au bas d'un mur. Elle crut d'abord qu'elle ne pourrait pas y passer, mais tenta quand même de s'y glisser en pliant ses pattes au maximum. Se retrouvant dans la chambre de Dame Miranda, cela lui confirma qu'elle venait bien de sortir de la petite trappe cachée derrière un des miroirs.

La forêt toujours en tête, elle courut vers la sortie de la pièce, débouchant dans le couloir menant aux chambres des autres vampires. Elle passa devant les portes à toute allure, trop heureuse d'avoir enfin quitté ce grenier miteux. La louve descendit les escaliers en sautant au moins quatre marches à la fois, découvrant avec quelle force incroyable ses pattes musclées lui permettaient de bondir. Se retrouvant dans le hall, elle s'arrêta subitement.

Kristal et Alisée se tenaient dans l'embrasure de la porte d'entrée, revenant apparemment d'une promenade nocturne.

Stupéfiées, toutes deux se figèrent de surprise et la petite rousse poussa un cri suraigu en portant une main à sa bouche. Lyssandra n'aurait jamais cru penser une chose pareille, mais elle se rendit compte que les deux buveuses de sang lui avaient manqué, en particulier Alisée. Pourtant, une force qu'elle ne parvenait à dominer lui donnait envie de planter ses crocs dans le cou délicat des vampires. Ces dernières ne bougeaient pas d'un pouce, fixant l'animal comme si elles guettaient le moment où il allait leur sauter dessus.

La louve grogna sans parvenir à s'en empêcher, et Kristal sursauta en reculant d'un pas vers l'extérieur. Alisée restait immobile, ses si beaux yeux marron plongés dans les iris bleus de la bête. Son regard aidait Lyssandra à se maîtriser, et elle parvint quelque peu à repousser ses instincts primitifs. Sans doute que la magnifique vampire dut elle aussi ressentir ce changement, car elle se mit à balbutier :

— Lys... Lyssandra ?

Son visage s'éclaira et des larmes semblèrent même perler aux coins de ses yeux. Interloquée, Kristal se tourna vers elle, les sourcils froncés, avant de reporter son attention sur la louve.

— Mais... Mais qu'est-ce que c'est que cette...

La lumière dut finalement se faire dans son esprit, car elle ouvrit de grands yeux, avant de plaquer une nouvelle fois la main sur sa bouche. Lyssandra aurait voulu leur répondre ou être capable de faire un signe qui les conforterait dans leur idée, mais elle ressentait toujours ce besoin viscéral de gagner la forêt. Les vampires eurent assez de jugeote pour ne pas essayer de s'approcher d'elle, et se dégagèrent du pas de la porte.

Toujours guettée par l'envie de leur sauter dessus, la louve ne s'attarda pas et les contourna à toute vitesse, prenant tout de même le temps de leur jeter un dernier regard. Peut-être reverrait-elle un jour les vampires, mais elle savait que ce manoir, lui, elle le quittait pour de bon.

Enfin à l'extérieur, elle laissa l'air frais envahir ses poumons. Après toutes ces semaines à respirer la poussière du grenier, elle sentait la douce odeur des arbres, de la nuit, de la terre... Elle n'y avait jamais fait attention auparavant, mais elle se rendait désormais compte à quel point ces senteurs végétales lui étaient essentielles.

Un seul désir l'animait : celui de courir. Elle se faufila à travers les arbres majestueux, levant de temps à autre les yeux vers la lune argentée qui étincelait dans la nuit noire. Ses pattes battaient le sol terreux à une vitesse vertigineuse, sautant parfois pour éviter quelques troncs abattus. Au-delà du sifflement de l'air, la louve entendait des hiboux hululer, des insectes chanter, des feuilles s'envoler... Elle avait l'impression de pouvoir ressentir chaque pulsation de la nature qui l'environnait.

Elle courait sans savoir où elle allait, se laissant guider par son instinct qui lui dictait tous ses faits et gestes. La fatigue était inexistante, alors même que cela devait faire un long moment qu'elle ne s'était pas arrêtée. Lorsqu'elle ralentit aux abords d'un virage bien familier, Lyssandra comprit que ses pas n'avaient pas été sans but.

La louve était revenue à l'endroit où elle avait rencontré Julian pour la première fois, il y avait de cela maintenant deux mois.

Ce n'était pas l'intersection où ils avaient l'habitude de se retrouver pour aller au village, mais celle où la jeune fille avait croisé le regard argenté du loup. Elle avait sûrement dû faire un long détour avant d'arriver jusqu'ici, mais le fait était là : une force intérieure inexplicable l'avait ramenée à cet endroit.

S'arrêtant à l'endroit exact où elle était tombée dans la boue, Lyssandra parcourut les arbres du regard. Elle ne distingua aucune lueur grise parmi les troncs, mais bizarrement, n'en fut ni étonnée, ni déçue. C'était comme si elle savait depuis le début qu'elle ne trouverait pas Julian ici.

Elle reprit sa route sans s'attarder davantage, fendant l'air encore plus vite qu'auparavant. Il semblait à la louve qu'aucune douleur ne viendrait jamais la ralentir, pas plus que le moindre épuisement. Son instinct la guidait vers un second endroit, où cette fois, elle sentait qu'elle trouverait ce qu'elle cherchait. C'était leur croisement.

Le croisement où ils s'étaient rencontrés pour la seconde fois, sans que la jeune fille ne sache qu'il était le loup qui l'avait tant fascinée. À l'époque, Julian — qui était soi-disant parti chercher de la farine et des pommes pour sa propriétaire — n'arrivait pas à faire avancer son vieux chariot. Même si elle savait désormais que cette rencontre n'avait pas été complètement improvisée, pour Lyssandra, rien ne viendrait jamais ternir ce souvenir.

Elle arriva sans peine au fameux croisement. Son coeur s'accéléra lorsqu'elle vit un loup au pelage brun clair, assis près d'un grand arbre. Il était tourné dans la direction opposée à la sienne, la tête basse. Malgré le pas léger de la louve, il dut l'entendre remuer des feuilles sous ses pattes. Ses oreilles pointues se dressèrent sur sa tête, puis il lui fit face. Ses yeux argentés exprimaient une tristesse infinie, si bien que pendant un instant, Lyssandra eut un moment de doute. Son si joyeux Julian pouvait-il être aussi triste ? Pourtant, dès qu'elle avait croisé son regard, aussi mélancolique était-il, elle avait senti que oui, il s'agissait bien de lui.

Le loup mit plus de temps à la reconnaître, car ses yeux gris demeurèrent abattus pendant encore quelques secondes. La surprise sembla ensuite s'y dessiner, alors qu'il ne cessait de fixer les iris bleu clair face à lui. Puis, en une étincelle, son regard s'illumina.

C'était comme si une force intérieure avait réussi à lui faire comprendre quelle était la personne cachée derrière la louve. Leur échange était simplement visuel, comme lors de leur toute première rencontre, pourtant chacun des mots qu'ils auraient voulu se dire était aussi limpide que s'il avait été prononcé.

Lyssandra ne sut comment, mais elle comprit que Julian l'avait attendue ici depuis le début de la pleine lune. Devinant qu'il devait avoir envie de courir tout autant qu'elle, elle reprit sa course, n'ayant besoin du moindre geste pour inviter le loup à la suivre.

Mieux entraîné, il devait certainement être capable d'aller encore bien plus vite qu'elle, mais il resta à ses côtés à chaque instant. Filer à travers les arbres était encore plus amusant quand on avait quelqu'un avec soi, et Lyssandra tenta plusieurs fois des accélérations pour voir jusqu'à quelle vitesse elle était capable d'aller. Julian la suivait sans mal, bien moins maladroit sous sa forme animale que sous sa forme ordinaire.

Ils traversaient des endroits de la forêt que la jeune fille ne connaissait pas, découvrant de jolis étangs ou encore une magnifique rivière. Plusieurs fois, ils croisèrent d'autres loups-garous, sans faire nullement attention à eux. Ils couraient simplement tous les deux, et c'était tout ce qu'ils voulaient.

Après un mois entier seule et enfermée, Lyssandra était enfin libre.

Et mieux encore, elle était avec Julian. Celui dont le souvenir lui avait permis de ne pas complètement perdre l'esprit.

Au bout d'un moment, le ciel noir commença à s'éclaircir, et la lune perdit de son éclat. Les deux loups ralentirent enfin le pas. La louve remarqua uniquement à ce moment-là le sac que Julian portait sur le dos... ce qui lui fit prendre conscience qu'elle-même n'en avait pas. Ses pensées devenant de plus en plus claires, et son instinct se faisant de moins en moins influent, elle devina ce qui allait bientôt se produire. Son museau n'était pas encore rétracté que déjà, elle s'était cachée derrière le plus gros arbre des environs. Elle sentit bientôt son pelage disparaître, ses membres reprendre leur forme originelle, et ce sans aucune douleur équivalente à celle de la transformation. Ses cheveux blonds retombèrent sur ses épaules nues, tandis qu'elle croisait les bras sur sa poitrine, priant pour que l'arbre sur lequel elle était adossée soit assez large pour la cacher.

N'osant dire un mot, elle entendit une boucle de sac se défaire, puis des bruissements de tissu. Elle sentait la panique commencer à monter, maudissant ce fichu aspect des loups-garous qui retrouvaient leur forme ordinaire sans le moindre vêtement. Il ne lui restait que ses deux bagues bleues, ainsi que son bracelet... qui était désormais rouge. Au passage, elle se rendit compte que son poignet cassé était désormais réparé.

— Euh... Lyssandra ? fit Julian d'un ton hésitant, après un long moment de silence.

La jeune fille retint son souffle à l'entente de cette voix qui lui avait tant manqué. Des frissons parcoururent sa peau, mais la situation l'empêcha de s'émouvoir davantage.

— Ne... N'approche pas, balbutia-t-elle précipitamment en resserrant davantage ses bras autour de sa poitrine.

— Mais je ne... Oh désolé ! s'exclama-t-il après que la lumière se soit enfin faite dans son esprit. Je... Attends, je vais te donner ma chemise.

Un froissement de tissu se fit de nouveau entendre.

— Je te l'ai laissée sur le sac, tu peux venir la chercher. Promis, je ne regarde pas.

D'abord hésitante, elle finit par se détacher de l'arbre contre lequel elle était appuyée pour se tourner avec précaution vers Julian. Comme il le lui avait dit, il regardait dans la direction opposée. Il portait uniquement son pantalon, laissant visible son dos nu où les rayons du soleil naissant dessinaient des ombres. Elle ne put s'empêcher de l'observer un instant, avant de se sentir rougir et d'aussitôt détourner le regard. Attrapant la chemise blanche posée sur le sac près de l'arbre, elle l'enfila et la boutonna de ses doigts tremblants. Heureusement, le vêtement la couvrait jusqu'à la moitié des cuisses, mais cela ne l'empêchait pas de se sentir mal à l'aise...

— C'est... C'est bon. Tu peux te retourner.

Il s'exécuta, et à l'instant où Lyssandra rencontra son regard marron, toute trace de gêne la déserta. Peu lui importait sa tenue, elle n'avait qu'une envie, sauter dans ses bras. Pourtant, elle ne bougea pas, triturant la manche trop grande de sa chemise. Julian resta aussi à sa place, comme s'il craignait que le moindre geste ne la fasse disparaître.

— Comment... Je veux dire... Enfin peu importe, balbutia-t-il sans parvenir à retenir son magnifique sourire. Je n'ai même pas envie de chercher à comprendre. Tu es là et...

Il ne termina pas sa phrase, ne sachant sans doute pas lui-même quels mots il s'apprêtait à prononcer. Lyssandra était aussi confuse que lui, mais dans l'immédiat, elle non plus ne voulait pas se poser mille questions sans réponses.

Ils ne pouvaient peut-être pas tout de suite se l'expliquer, mais le fait était là : elle s'était transformée en louve. Malgré tous les obstacles et les imprévus qui s'étaient dressés sur leur chemin, rien n'avait pu les empêcher de les franchir et de les surmonter, jusqu'à enfin arriver à ce moment-là.

— Donc tu vois, fit-elle avec une légèreté mal assurée, finalement, ton plan s'est déroulé comme tu l'avais prévu...

Julian partit d'un petit rire nerveux qui lui était peu habituel, avant de faire un pas vers elle.

— Pas comme prévu, non.

Son soudain air sérieux troubla Lyssandra, tandis qu'il continuait de se rapprocher lentement. Les paillettes dorées qui brillaient dans ses yeux devinrent de plus en plus précises, et la louve ne put cesser de les contempler. Les battements de son coeur s'accélérèrent, alors que Julian levait une main pour caresser sa joue du bout de ses doigts. La chaleur qu'ils dégageaient était si apaisante que Lyssandra réussit presque, presque à rester calme, lorsqu'il déclara :

— Tomber amoureux de toi ne faisait pas partie de mon plan.

Ces simples mots bloquèrent le souffle de la jeune fille, qui ne parvint à articuler la moindre parole. Ses yeux se chargèrent de larmes alors qu'elle les fermait pour poser ses lèvres sur celles de Julian, brisant ainsi le faible espace qui les séparait. Le jeune homme glissa délicatement les mains sur sa taille tout en lui rendant son baiser, et elle passa les bras autour de son cou, oubliant complètement qu'elle ne portait qu'une maigre chemise. Elle laissa aller son corps contre le sien, désirant qu'ils ne se séparent plus jamais.

Ainsi dans ses bras, il lui était facile d'imaginer que les dernières semaines n'avaient été qu'un simple cauchemar.

Si on lui avait dit qu'une sensation aussi douce pouvait exister, elle ne l'aurait sans doute pas cru. Elle avait à peine conscience de la brise qui commençait à refroidir ses jambes, pas plus que du soleil qui se levait lentement derrière eux.

Seul témoin de cet instant hors du temps, ce dernier étincelait d'un éclat nouveau, aussi vif que l'amour qui brûlait dans le coeur des deux loups-garous.

Continua llegint

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