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Le weekend est passé très vite après la soirée samedi dernier. J'ai passé mon dimanche à lire dans ma chambre et à travailler un peu pour mes cours. J'ai proposé à Jeffrey que nous nous retrouvions aujourd'hui pour étudier à la bibliothèque avant que j'aille travailler chez Becker. Je prépare mon sac de cours, mon ordinateur et note le nom des cours que j'ai besoin d'imprimer là-bas. J'attrape un classeur au passage qui me servira à ranger mes cours, et glisse le tout dans mon sac. Je jette un coup d'œil dans le miroir et me demande si je garde cette tenue ou non. Finalement, je décide que ça fera l'affaire.
Je détourne le regard du miroir mais retourne brutalement la tête vers la glace en fixant mon poignet et passe mon autre main dessus. Je ne porte plus mon bracelet. Je continue de tâter mon poignet comme si ce geste allait le faire réapparaître. Je l'ai peut-être enlevé et posé quelque part ? Impossible... Je ne le retire jamais, je le garde constamment avec moi, je ne l'enlève même pas pour dormir ou prendre ma douche. Je farfouille quand même ma table de nuit et ma boite à bijoux, dans un espoir de le trouver là, mais il n'y est pas.
La panique me gagne et je me force à respirer calmement. Ce bracelet c'est Harry qui me l'avait offert. Une simple et fine chaîne dorée avec une petite breloque en forme de "M". C'était un cadeau pour mes dix ans. Je ne l'ai jamais quitté, c'était devenu mon bracelet porte-bonheur, il me protégeait de tout. Je sais que dès que je suis un peu nerveuse, ou mal à l'aise, je ne peux pas m'empêcher de porter ma main à mon poignet et tripoter ce petit bracelet.
Je prends une grande inspiration et refoule cette drôle de sensation qui s'insinue en moi au fur et à mesure et je m'habitue à mon poignet nu. J'attrape mon sac que je passe sur mon épaule et quitte ma chambre. Je sors mes écouteurs et traverse le campus et essayant de penser à autre que mon bracelet disparu. Je ne me suis pas rendue compte que je ne l'avais plus avant aujourd'hui alors je suppose qu'hier, je l'avais encore. Il doit être dans ma chambre, il faudra que je la fouille de fond en comble mais je garde espoir de le retrouver.
J'atteins la bibliothèque universitaire de l'autre côté du campus et en franchis les portes puis traverse le grand hall et marche le long des rangées de livres jusqu'à trouver une table libre. Je dépose mes affaires sur la table, dégaine mon ordinateur et mes notes et me met à travailler. Rapidement, je me rends à l'imprimante et utilise mes crédits pour imprimer tous mes cours que je tape à l'ordinateur. Une fois revenue à ma table, je me concentre et relis ces cours et les annotant et en ajoutant de la couleur.
Soudain, je sens une présence derrière moi et j'ai à peine le temps de me retourner que quelqu'un m'embrasse sur la joue. Je souris.
— Salut, toi, chuchote gaiement Jeff.
Il s'installe en face de moi et dépose ses affaires sur la table.
— Qu'est-ce que tu travailles, là ?
Je relève la tête de mes notes.
— Mon cours de littérature classique. Et après je vais passer à mon cours de français.
— J'avais oublié que tu faisais du français.
Je lève mes yeux au ciel. Au lycée, on a eu des cours de français et Jeff a toujours détesté ça. Il trouvait ça trop difficile comme langue, mais pas moi. Et ça m'a enchanté de voir que je pouvais poursuivre le français à l'université.
Il me sourit et commence à travailler en silence. De temps à autre, nous discutons un peu et je l'aide pour certains devoirs. Nous rions de temps en temps parce qu'il fait semblant de ne rien comprendre ce que j'essaie de lui expliquer depuis vingt minutes, et il le fait uniquement pour que je me lève et vienne m'assoir à côté de lui. Ça me fait du bien de rire avec mon meilleur ami – et petit-ami –, passer du temps avec Jeffrey me fait toujours du bien.
Je me surprends à le dévisager discrètement alors qu'il est concentré sur son travail. Je me mords la lèvres tandis que mon regard l'observe. Je connais déjà mon meilleur ami, je le connais par cœur même. Pourtant, je ne me serais jamais douté de ses sentiments pour moi. Je me reconcentre sur mon travail, mais reste près de lui. Être avec lui, c'est rassurant et protecteur, comme si j'étais dans un cocon. C'est tellement agréable.
Jeff est l'exact opposé de Carter. Avec Carter, il n'y a pas de cocon. C'est plutôt avoir la sensation d'être jeté vers l'inconnu, c'est un enchaînement de sensations, toutes plus nouvelles les unes que les autres, et c'est à la fois effrayant et excitant. Mais pourquoi est-ce que je pense à Carter maintenant ? Je secoue la tête comme pour chasser mes pensées. Je sors avec Jeff, pas avec Carter.
— Ça va ? me demande Jeff en posant une main dans mon dos.
Je hoche la tête.
— Oui, mais il y a quelque chose qui me dérange un peu.
Il se tourne un peu plus vers moi et pose son crayon sur ses feuilles de cours.
— Je t'écoute.
— J'ai perdu mon bracelet, commencé en tendant mon poignet vers lui. Tu sais, celui que je porte toujours.
Il attrape mon poignet et glisse sa main dans la mienne.
— Oui, je me souviens, depuis que je te connais il ne t'a jamais quitté.
Je hoche la tête. Jeff n'est pas au courant pour Harry et toute l'histoire avec ma famille. Et il ne sait pas que c'est mon frère qui m'a offert ce bracelet.
— Je tiens beaucoup à ce bracelet.
— Je sais Mia, mais ce n'est pas grave d'accord. Tu vas peut-être le retrouver, mais si jamais tu ne le retrouves pas, je pourrais t'en offrir un autre si tu veux.
Je ne sais pas pourquoi mais je ne peux pas m'empêcher de me sentir un peu contrariée. J'aurais préféré qu'il me rassure et qu'il me dise que j'allais le retrouver, qu'il ne devait pas être loin. Ou même qu'il me demande pourquoi il était si important pour moi. Mais je ne veux pas un autre bracelet. Lorsqu'un objet est cher à nos yeux, rien ne pourra jamais le remplacer.
Je dégage doucement ma main de la sienne.
— On devra continuer à travailler, j'ai encore beaucoup de choses à faire.
Jeff semble froncer un peu les sourcils mais ne pose pas de questions et se remet à travailler après m'avoir fait un sourire. Je ne sais pas s'il fait semblant de n'avoir pas perçu que quelque chose n'allait pas, ou s'il n'a réellement pas vu que cette histoire de bracelet me tracassait vraiment. Ça m'étonne un peu de Jeff. Il a toujours lu en moi comme dans un livre ouvert.
Si j'en avais parlé à Carter, il m'aurait soit réconforté, soit dit que ce n'était qu'un bracelet de merde et que on s'en foutait qu'il soit perdu. Avec Carter, je ne sais jamais à quoi m'attendre, c'est le chaud ou le froid. C'est un peu excitant, mais aussi très perturbant parfois. Mais enfin, pourquoi faut-il que je compare sans cesse Jeff à Carter ? L'un est mon petit-ami, l'autre... je ne suis même pas sûre que ce soit mon ami. Je pense que c'est parce que Carter s'est comporté plutôt gentiment avec moi dernièrement.
Je me concentre sur mes cours. Soudain, je sens la main de Jeff se poser sur mon avant-bras.
— Je pense que je vais y aller. Il est déjà seize heures.
Je relève brusquement la tête.
— Seize heures ?! Mais je devrais être à la librairie !
Je commence à ramasser mes notes de cours rapidement, froissant au passage quelques feuilles et fourre le tout dans mon sac.
— Mince ! J'avais complètement zappé, déclare Jeff, en ramassant lui-aussi ses affaires. Je suis désolé.
— Ce n'est pas ta faute, je n'ai pas fait attention à l'heure.
Je lui dépose un bref baiser sur la joue en souriant puis m'enfuis en marchant rapidement dans la bibliothèque, ne courant pas pour ne pas attirer les regards sur moi. Je sors du bâtiment et me mets cette fois à courir en direction de l'arrêt de bus, près du parking à côté de la résidence. Lorsque j'y arrive, je suis un peu essoufflée d'avoir traversé le campus et soupire bruyamment en me postant devant la fiche des horaires de bus.
— C'est pas vrai ! grogné-je en découvrant que le prochain bus ne passera pas avant minimum vingt-cinq minutes.
Je tourne à moitié sur moi-même, sans doute dans une tentative désespérée de voir apparaître un moyen de transport miraculeux. Je passe ma main sur mon front puis sors mon téléphone mais je ne vois pas qui prévenir étant donné que je n'ai le numéro d'aucun membre de la famille Becker.
— Merde ! Merde !
Je continue de paniquer, quand un garçon arrive à l'arrêt de bus. Autant je n'avais pas envie d'attirer les regards sur moi en courant dans la bibliothèque, autant je me fiche complètement d'avoir l'air d'une folle à cet arrêt de bus.
— Mia ?
Je me retourne brusquement vers le garçon et réalise alors que c'est Carter.
— Carter ? demandé-je stupidement.
Une voix dans ma tête me rappelle que Carter a une moto et qu'il sait où se trouve la librairie et je perds soudain toute crédibilité.
— Carter ! J'ai besoin de toi, enfin, de ta moto. Je... J'ai loupé le bus, il... je suis déjà en retard. J'ai besoin que tu me déposes à la librairie où je travaille. Tu veux bien ?
J'ai débité mes phrases tellement rapidement que je me demande s'il a compris. Il semble un peu surpris et confus, mais surtout, pas assez réactif à mon goût. Enfin bon, je ne vais pas lui crier de se dépêcher alors que c'est mon seul moyen de transport actuellement.
— Je.. euh, oui. Si tu veux.
— Merci ! m'écrié-je, presque en sautillant.
Je ne perds pas de temps, et me dirige vers le parking où il gare habituellement sa moto, en espérant qu'il me suive de près. Finalement, lorsque je me retourne, il est juste derrière moi, et étouffe un rire.
— Quoi ? demandé-je, d'une manière un peu plus froide que prévu.
— Tu es... énergique aujourd'hui.
Il monte sur la moto, enfile son casque après m'en avoir tendu un.
— Je suis en retard à mon travail.
— Tu es surtout une stressée de la vie.
J'ignore son commentaire et accroche mes bras autour de sa taille tandis qu'il démarre en trombe. En moins de dix minutes, nous arrivons à la librairie et je descends rapidement de la moto.
— Merci ! Merci beaucoup ! fais-je en retirant le casque.
— Mia, je voulais...
— Je dois y aller, désolé ! le coupé-je en me dirigeant à grands pas vers la libraire.
J'entre dans la boutique et me détend un peu au son de la petite clochette. Daniel est derrière le comptoir.
— Excuse-moi, vraiment, commencé-je. Je travaillais mes cours, et je n'ai pas vu l'heure, et...
— Relax.
C'est la deuxième fois que l'on me demande de me détendre en l'espace de dix minutes. Est-ce que j'ai vraiment l'air d'une furie là tout de suite ? Étant donné que je suis encore essoufflée, que j'ai probablement le visage rouge, que je viens d'entrer en trombe dans la boutique et que j'ai rapidement planté Carter sur le trottoir, je dirais que oui.
— Il est seize heures quinze. Ç'aurait été mieux de nous prévenir mais ça va, on te connait, et tu n'arrives jamais en retard alors tu es excusée.
— Je suis désolée, répété-je.
Je dépose mes affaires derrière le comptoir et récupère mon petit badge.
— C'était qui le mec à moto ? demande Daniel avec un sourire en coin.
Je sens mes joues rougir.
— Oh, c'était Carter. Un ami, précisé-je, devançant les questions de Daniel.
— Un ami, répéte-t-il en murmurant.
Je ne peux pas m'empêcher de sourire malgré moi.
— Oh, au fait, est-ce que je pourrais avoir ton numéro ? lui demandé-je. Comme ça je pourrais te prévenir au cas où... enfin si besoin.
— Bien sûr !
Il s'empresse de griffonner quelques chiffres sur un petit bout de papier qu'il me tend, puis me salue et me laisse gérer seule la boutique. Il y a relativement peu de clients aujourd'hui, ce qui est assez étonnant parce que nous sommes lundi et qu'il y a plus de monde d'habitude. La fin de mon travail arrive vite et je quitte la librairie.
En arrivant à l'arrêt de bus, je ressens une petite pointe de déception en n'apercevant pas la moto de Carter. Je ne sais pas pourquoi, puisque de toute manière, il n'a aucune raison de venir me chercher. Je crois que je m'étais habituée à le voir plus souvent, et à ce qu'il se montre lorsque je m'y attends le moins.
Je ne sais pas pourquoi je pense à Carter. Je crois que la soirée de samedi a un peu embrouillé mes sens. Avoir été si proche de lui, physiquement parlant, ça m'a fait bizarre. C'était étrange comme sensation, j'en avais des frissons. Lorsqu'il s'est rapproché je me demandais ce qui allait se passer, est-ce qu'il voulait m'embrasser ? Et si oui, est-ce que je l'aurais laissé faire ? Je ne saurais pas répondre à cette dernière question, mais tout ce que je sais, c'est que quand je suis avec lui, je ressens une étrange sensation de liberté et de soudaine confiance en moi, comme si je me sentais invincible.
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Musique : Must Have Been The Wind - Alec Benjamin. Alec est un artiste que j'admire énormément puisque toutes ses compositions ont un réel sens et un message. Cette chanson évoque de manière délicate des violences conjugales et le thème contraste avec la douceur de cette chanson, c'est magnifique. Pour ce chapitre, les paroles n'ont rien à voir ^^ je l'ai choisi simplement parce que l'instrumental correspond parfaitement à ce moment partagé avec Jeff.
Encore désolé pour le retard de publication !! Je travaillais mes cours...
Et voilà ! Un nouveau chapitre ! Qu'en avez-vous penser ? Mia semble un peu perdues parmi ses pensées, ça promet ^^
D'ailleurs, milles merci pour les 2k de vues, vous êtes géniaux ♥ Merci à tous vos votes, et surtout vos petits commentaires ! J'adore les lire et voir que le roman vous plaît ♥
On est à exactement la moitié du roman, puisqu'il compte 64 chapitres ! Il y aura aussi deux épilogues ^^