Indignées

By une_bulleuse

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A 17 ans, Léonie est victime de viol. A cause d'une photo qui a circulé sur les réseaux sociaux, Maëlle est c... More

Avertissement
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
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Nouveau projet !

Chapitre 16

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By une_bulleuse

Léonie

     J'ai à peine posé mon plateau que je le regrette déjà. Je me suis dit que ça leur ferait plaisir que j'accepte de manger avec elles mais en voyant Maëlle et Eliott rigoler quelques tables plus loin, je meurs d'envie de les rejoindre.

Parce que même si je suis redevenue amie avec Sacha, Érine et Pauline, nous sommes bien moins proches qu'avant.

Pauline suit mon regard et émet un ricanement.

— T'es plus obligée de traîner avec Maëlle maintenant qu'on se reparle. Franchement, je ne sais pas comment tu faisais pour la supporter, c'est une vraie peste cette fille. Et puis il serait peut-être temps de lui dire que les mini-shorts, c'est complètement démodé.

Comme il fallait s'en douter, Érine et Sacha pouffent de rire. Je leur adresse un regard noir et elles se calment aussitôt.

— Si tu la connaissais un peu mieux, tu saurais que c'est une fille géniale et que si je passe du temps avec elle, c'est parce que je l'apprécie beaucoup, grincé-je.

Mais visiblement, Pauline n'a pas l'air de comprendre le message car elle surenchérit :

— Oh arrête Léo, pas à nous ! On sait très bien que c'est parce que tu avais besoin d'un bouche-trou. Mais maintenant que tu as retrouvé la raison...

— Pardon ?!

— Bah maintenant que tu nous reparles et que tu t'es plus ou moins remise avec Mathis quoi, complète Sacha.

Alors là, je suis complètement estomaquée. Où ont-elles entendu que je m'étais remise avec Mathis ?

— C'est lui qui vous a dit ça ? demandé-je, sur la défensive.

— On a bien vu quand il t'a couru après au parc la dernière fois. Et puis, il nous a dit que tu l'avais embrassé, me confie Érine.

Je nage en plein cauchemar, ce n'est pas possible autrement. Je croyais qu'elles avaient compris.

Et puis pour qui est-ce qu'il se prend Mathis, à raconter n'importe quoi ?! Bon, certes, je l'ai embrassé. Mais je lui ai aussi dit que je ne voulais plus rien avoir à faire avec lui. Et je pense que c'est quand même sacrément important. Bien plus important qu'un simple baiser qui ne voulait pas dire grand-chose.

— Il a probablement oublié de vous dire que je l'ai repoussé ensuite et que je lui ai dit que je ne voulais plus le voir.

Les filles s'échangent alors des regards et je ne peux m'empêcher de leur demander ce qui se passe.

— On croyait que tu étais enfin passée outre, soupire Sacha.

— Outre quoi ? m'écrié-je, peu désireuse de connaître vraiment la réponse.

— Outre cette histoire de viol, me répond Pauline comme s'il s'agissait d'une formalité.

Je manque de m'étrangler.

Je ne comprends pas. Je n'y arrive pas. Je refuse de comprendre ce qu'elles sont en train de me dire.

Érine en remet une couche, terminant de m'achever :

— On croyait que tu t'étais rendue compte que cette histoire de pseudo viol est ridicule. OK, tu as eu un rapport sexuel avec ton copain alors que t'en avais pas très envie mais de là à parler de viol, je trouve que tu exagérais un peu. Après, je peux comprendre que tu cherchais à attirer l'attention mais il y a d'autres moyens. Tu imagines les conséquences pour Mathis ?

Les mots d'Érine me semblent très lointains, je les entends à peine. Mais ça ne les empêchent pas de me faire mal. C'est comme si elle avait planté un couteau en plein dans mon cœur et qu'elle le remuait encore et encore pour me faire toujours plus mal.

J'ai soudainement la tête qui tourne et tout devient flou autour de moi. Je me lève brusquement et sors de la cantine. Elles n'essayent même pas de me rattraper.

Mes pas me guident jusqu'au porche derrière le lycée. Une fois seule, j'éclate en sanglots.

Je suis vraiment idiote d'avoir pensé qu'elles avaient compris et qu'elles venaient s'excuser pour cette raison. J'aurais dû comprendre qu'elles n'acceptaient juste pas que je puisse avoir d'autres amis et être tout autant populaire.

Les conséquences pour Mathis ?! Vraiment ? Ce n'est pas lui qui a peur de sortir seul le soir, qui se réveille en pleine nuit à cause de cauchemars. Lui, il s'est contenté de me briser en mille morceaux et de continuer sa petite vie bien tranquille.

Et moi, je me retrouve à pleurer. Encore.

J'entends des pas se rapprocher alors j'essuie rapidement mes larmes du bout de ma manche et essaye de me calmer.

Mais ce n'est autre qu'Eliott qui avance vers moi d'un pas hésitant. Je lui fais un petit signe de la tête et il vient s'asseoir à côté de moi, me prenant dans ses bras alors que je me remets à pleurer. On reste plusieurs minutes dans cette position. Eliott me serre fort contre lui et caresse mes cheveux d'une main, geste qui a le don de m'apaiser.

Son pull est probablement trempé de mes larmes mais je crois qu'il s'en fiche.

Lorsque je finis par me calmer, je me redresse et il m'offre un sourire de réconfort.

— Je pensais qu'elles avaient compris mais je suppose que j'ai été stupide de le croire.

Je réalise alors qu'Eliott ne doit probablement pas comprendre de quoi je parle. Je lui explique brièvement ce qui s'est passé à la cantine et je peux voir sa mâchoire se serrer à plusieurs reprises.

— Réaliser que les gens ne sont pas toujours ceux qu'on croyait qu'ils étaient ça fait mal, me dit-il finalement. Mais crois-moi, ces filles ne te méritent pas Léo.

J'acquiesce, entendre ces mots dans la bouche de quelqu'un d'autre me fait le plus grand bien.

— Je crois que je suis surtout énervée de ne pas m'être rendue compte de tout ça avant. J'ai passé des années à les idéaliser et à penser qu'elles étaient géniales, qu'on resterait amies toute notre vie... Je me sens vraiment idiote.

— Tu n'as pas à te sentir idiote. Le principal, c'est que tu te sois rendue compte qu'elles ne t'apportaient rien de bon.

Je souris. Eliott est vraiment génial, il trouve toujours les bons mots.

Je pose ma tête sur son épaule et il enroule son bras autour de moi. Je savoure cet instant, sachant qu'on ne pourra pas rester ici toute la journée et qu'il nous faudra bien retourner en cours.

Juste au moment où la sonnerie annonce la fin de la pause déjeuner, je me redresse et propose à mon ami :

— J'ai une rencontre avec les filles des autres lycées après les cours mais je me disais qu'on pourrait aller acheter le tourne-disque de Maëlle demain. Enfin, si tu es d'accord bien sûr.

Eliott acquiesce mais une seconde après, il fronce les sourcils.

— Comment est-ce que tu t'es débrouillée pour l'argent ? Je pensais qu'on devait vendre des cookies...

Pour seule réponse, je lui adresse un sourire malicieux. Hors de question que je lui avoue que c'est ma petite sœur qui les a faits et qu'elle a arnaqué toute la famille en prétextant que c'était un projet scolaire pour verser de l'argent à une association. Elle m'a même demandé dix euros sur tout ce qu'elle a récolté, pour s'acheter des bonbons qu'elle a dit. Du haut de ses six ans, c'est déjà une vraie businesswoman !

Eliott et moi retournons en cours, le sourire aux lèvres, bras dessus bras dessous.

     Je retrouve Victoire, Luce et Amandine dans le même café que la première fois. Nous avons beaucoup échangé toutes les quatre depuis, discutant des affiches, des sujets qu'on pouvait aborder dans les groupes de parole... Elles ont réussi à faire quelques actions au sein de leurs lycées et j'ai l'impression que ce qui n'était qu'un tout petit projet au début commence à prendre de l'ampleur.

Elles sont déjà installées et arborent de grands sourires.

On discute d'abord de tout et de rien, demandant des nouvelles de chacune. Puis Luce rentre directement dans le vif du sujet :

— Avec des filles de mon lycée, on a pensé faire un die-in à l'intérieur même de l'établissement. On s'allongerait toutes dans le hall ou dans la cour du lycée et on pourrait avoir des pancartes pour dénoncer les viols, les agressions sexuelles...

J'acquiesce, plus qu'enthousiaste à l'idée. Cela pourrait avoir un impact bien plus direct que de simples affiches.

— Et pourquoi pas des pancartes qui dénoncent les féminicides ? propose Victoire.

— C'est une bonne idée aussi mais je crois qu'il faut se concentrer sur un sujet en particulier. Et on ne se bat pas contre les féminicides mais contre le viol et les agressions sexuelles qu'on peut subir en tant que femmes mais surtout en tant qu'adolescentes, parfois au sein même du lycée, nuance Luce.

Je fronce les sourcils, pas complètement d'accord avec ce qu'elle vient de dire.

— Je ne pense qu'on se batte uniquement pour dénoncer les agressions. Si on se bat pour la cause féministe, il faut se battre pour toutes les femmes, où qu'elles soient dans le monde. Il faut se battre contre les agressions sexuelles, c'est vrai, mais aussi contre les féminicides, les violences faites aux femmes en général, contre l'excision et toutes les mutilations génitales pratiquées dans certains pays. Il faut aussi se battre pour le droit à l'avortement dans tous les pays du monde ou encore pour l'égalité salariale. Le féminisme, ce n'est pas simplement se battre pour les femmes de notre entourage ou d'un pays, c'est se battre pour toutes les femmes, peu importe leurs origines, leur couleur de peau, leur religion et leur orientation sexuelle.

Je m'arrête pour reprendre mon souffle et rougis légèrement en prenant conscience de tout ce que je viens de dire. Mais je pense chacun des mots que j'ai prononcés. Certes au début, j'avais en tête de dénoncer le viol, le harcèlement sexuel et ce genre de choses mais je réalise aujourd'hui que ça ne suffit pas, qu'il faut se battre pour toutes, pour l'égalité des sexes en général.

Finalement, les filles m'applaudissent, impressionnées par mon discours.

— Tout ça pour dire que je pense qu'on peut faire des pancartes pour dénoncer le viol mais aussi pour dénoncer les féminicides, terminé-je d'une petite voix.

Toutes les trois approuvent et j'en suis ravie. Nous évoquons alors quelques détails à prévoir ; est ce qu'on en parle d'abord à l'administration et autres questions du même genre. Pour ma part, je sais déjà que ce ne sera pas le cas. Mme Soirez n'acceptera jamais alors autant le faire sans le lui demander.

Juste avant que je parte, Amandine évoque une idée qu'elle a eue :

— Je me suis dit qu'il faudrait qu'on puisse avoir un impact aussi en dehors du lycée. Il faudrait quelque chose qui nous rassemble tous, quelque chose de plus grand que ce qu'on aura fait jusque là. Et j'ai pensé à une manifestation.

— C'est une excellente idée, s'exclame Luce. Mais ça ne risque pas d'être compliqué à organiser ? Parce qu'il faut d'abord faire une demande à la préfecture et je ne crois pas qu'on puisse le faire en tant que lycéennes...

Amandine arque un sourcil, joueuse.

— Qui te dit qu'on va faire une manifestation déclarée ?

On éclate de rire mais je réalise ensuite qu'Amandine est plus que sérieuse.

Une manifestation sauvage ? Je ne sais pas si c'est une très bonne idée. Ce n'est pas la même chose que de faire des actions dans notre lycée sans l'autorisation de l'administration. Là, c'est une toute autre histoire.

Je décide toutefois d'en parler aux filles lors de la prochaine réunion du groupe de parole pour avoir leurs avis.

     — Personnellement, je trouve l'idée géniale, commente Maëlle.

Je ne suis pas étonnée, je me doutais qu'elle approuverait. Par contre, je ne m'attendais pas à ce que la majorité soit d'accord avec elle.

— Mais, c'est quand même risqué vous ne croyez pas ? m'inquiété-je.

Toutes les filles me contredisent et c'est Gaïa qui achève de me convaincre :

— Honnêtement, je ne suis pas sûre que le fait qu'une manifestation soit déclarée ou non change grand-chose. Et puis de toute façon, on n'a pas trop le choix donc la question ne se pose pas. Ce serait le meilleur moyen de se faire entendre, bien mieux qu'un die-in dans la cour du lycée.

Elle a peut-être raison. C'est peut-être notre unique chance de nous faire entendre en tant que lycéennes, en tant que femmes. Notre seule chance de montrer à quel point nous sommes révoltées. Indignées.

Je leur parle ensuite du die-in, afin que nous puissions l'organiser dans les prochains jours. On réfléchit déjà à des idées de pancartes et nous convenons que chacune s'occupera de faire sa propre pancarte et de la ramener pour le jour-J.

Après la réunion, je rejoins Eliott à la sortie du lycée et nous allons directement en centre-ville pour acheter le tourne-disque.

— Bon, tu vas me dire comment t'as fait pour l'argent ? insiste mon ami.

Je pousse un soupir et accepte finalement de tout lui expliquer. A la fin de l'histoire, il éclate de rire en plein milieu du magasin, si bien que quelques clients nous jettent des regards noirs. Il se reprend mais je vois bien qu'il se retient de ne pas rire. Et à vrai dire, moi aussi.

— Je croyais que ta petite sœur était un ange, lâche-t-il au bout d'un moment.

— Je le croyais aussi. Jusqu'au jour où elle a caché ses bonbons et m'a accusée de les avoir mangé pour que mes parents lui en rachètent.

Eliott me regarde et je vois ses lèvres qui se mettent à frémir. Nous repartons tous les deux dans un fou rire incontrôlable.

Le pire, c'est que je n'invente rien. Alix est une menteuse hors pair !

On fait le tour du magasin sans trouver ce qu'on cherche. Un vendeur a remarqué que nous étions perdus et vole à notre rescousse.

— Je peux vous aider ?

— Oui, on cherche un tourne-disque.

Il hoche la tête et nous fais signe de le suivre. Une fois dans le bon rayon, il nous montre plusieurs modèles.

— Celui-là est un de nos modèles les plus populaires. Après, si vous cherchez quelque chose d'un peu plus moderne, je peux vous proposer ce modèle-ci, il y a le Bluetooth intégré et le son est incroyable. Celui-ci est très bien aussi et le design est superbe.

Il continue comme ça pendant plusieurs minutes et je hoche la tête à chaque fois, prenant un air très concentré. A un moment, Eliott me donne un coup de coude et me montre les prix d'un coup de tête.

Je laisse échapper une exclamation de surprise et le vendeur se retourne vers moi.

— Tout va bien ?

Eliott pouffe de rire tandis que j'essaye de me rattraper.

— Oui, oui. C'est juste que... notre budget est assez réduit, expliqué-je, le regard planté sur mes mains.

Le vendeur hoche la tête, se dirigeant alors vers le fond du rayon. Il paraît déçu. Désolée mon coco mais 300 balles pour un tourne-disque, c'est pas pour nous.

— Voici nos modèles les plus abordables. La qualité du son reste très bonne bien entendu mais il n'y a que très peu de fonctionnalités. Je vous laisse faire votre choix, rajoute-il en un sourire avant de se diriger vers d'autres clients.

Une fois qu'on a fait notre choix, je propose gentiment à Eliott de le porter jusqu'à la caisse.

— Quoi ?! Et pourquoi ce serait moi d'abord, je suis sûr que tu as tout autant de force que moi ! râle-t-il.

Il faut dire qu'Eliott est plutôt un gringalet dans son genre.

— Bon, on le porte à deux alors, concédé-je.

Nous prenons donc la boîte chacun d'un côté. C'est super lourd ce truc.

Évidemment, il faut que les caisses soient à l'opposé du rayon où nous sommes. Bah oui, ce serait moins drôle si c'était juste à côté.

— Non mais sérieux, ils pouvaient pas les mettre plus près les caisses, je grogne.

— Aller, dis-toi que ça musclera tes bras ! se moque Eliott.

Je lui adresse un regard noir qui a pour résultat de le faire taire sur le champ.

     — Transporter ce machin jusqu'aux caisses était une partie de plaisir comparé à ça.

Je rigole face à Eliott qui a perdu toute trace de positivité. D'un autre côté, je le comprends, porter cette boîte affreusement lourde pendant tout le trajet jusqu'à chez moi était sans doute la pire épreuve de ma vie.

— La prochaine fois, je commanderais sur internet, soupiré-je.

Il approuve et je lui propose de rester boire un chocolat pour nous remettre de nos efforts.

Nous nous installons dans le canapé et lorsqu'Alix débarque dans le salon, un sourire angélique sur les lèvres et qu'elle me demande si elle peut avoir un chocolat chaud, Eliott et moi éclatons de rire, repensant à ce que je lui ai raconté plus tôt.

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