❝ CHAPITRE 15 ❞
▷ TW : AUCUN
Nous avions besoin d'une mise au point. Telles étaient les raisons pour lesquelles je m'étais rendue aussitôt dans son bureau, au dernier étage, surplombant l'intégralité des lieux.
Masamichi Yaga était mon professeur référent, et de ce fait, il était celui qui m'assignait les futures tâches. Si en ce vendredi nous étions en jour de congé, mon principal quant à lui en avait décidé autrement.
Pas qu'il me détestait mais plutôt parce que mon cas lui posait problème, mon retard vis-à-vis des autres devenait un frein.
Mais ça, il en était conscient puisqu'il avait insisté pour me faire intégrer cette classe et non l'inférieure. Une décision lourde de conséquences pour les autres élèves de seconde année.
" Pour pouvoir t'assigner à nouveau une mission, il est primordial que tu maîtrises ton énergie maudite. Bien que des équipements soient à ta disposition, ce serait du gâchis pour tes origines de te réduire à cela. C'est pour ça que je te convoque à cet entraînement aujourd'hui. "
Son discours démontrait à quel point j'étais en retard vis-à-vis des autres. Comme s'il pensait pouvoir tirer quelque chose de mon talent inexistant. J'avais beau me convaincre d'y arriver, mes pensées, elles, me démontraient le contraire.
Étant considérée comme inférieure aux hommes, il m'était difficile d'entrevoir une quelconque puissance en moi. D'autant plus accompagnée de ce fardeau lors de ce fameux entraînement, à l'instant où il fit irruption dans le bureau.
" Pourquoi encore moi ? J'avais d'autres trucs à faire ! "
D'une moue nonchalante, Satoru entrait dans le bureau les mains dans les poches. L'air agacé d'avoir encore affaire à moi, bien que je n'en pensais pas moins. Je te rassure salopard, moi non plus je n'avais pas envie de m'entraîner à tes côtés.
Mais le prof nous y avait forcé, alors, je n'avais plus qu'à te suivre sur ce chemin que tu empruntais, dans lequel tu décidais de marquer l'arrêt.
" Faut vraiment tout t'apprendre à toi, putain qu'est-ce que t'es nulle. "
" Mais je t'emmerde, contente-toi de m'apprendre puisque tu es si fort ? "
" Tu ne parlais pas comme ça il y a quelques semaines, alors redescends. "
" Peut-être parce qu'on me l'empêchait ? "
Satoru avait vraiment du mal à digérer la transition. Si je lui ai paru timide auparavant, c'est peut-être parce que j'y étais forcée. À vrai dire, sortir du clan Zenin m'avait ouvert les yeux sur la liberté de penser.
Avant cela, jamais je ne me serais dit qu'il était possible d'en vouloir à quelqu'un. Je ne pouvais que me blâmer moi-même, lorsque j'habitais encore avec Naoya. Je n'étais rien de plus qu'une épouse docile qu'on pouvait manier à sa guise. La vulgarité de Toji m'avait sûrement traumatisée.
" Commence par activer ton énergie maudite, après on verra pour la maîtrise. "
Comme si le talent était inné chez moi, Satoru me demandait l'impossible. Je ne savais ni quoi, ni comment faire ce qu'il attendait. J'ignorais tout de sa provenance et c'est bien ce qui me freinait à réaliser cet exploit.
Malheureusement pour moi, j'étais entourée de l'impatience en personne. Pas même le temps de réfléchir qu'un soupir franchit la barrière de ses lèvres, puis il démontra toute l'irritation qu'il put éprouver. C'est bien dans ce genre de conditions que j'échouais les tentatives les unes après les autres, et cette fois-ci, ce fut celle de trop.
" Putain mais t'es conne ou tu le fais exprès ? "
Il s'était levé, les lunettes tombées de son nez. Je ne le connaissais pas aussi nerveux, mais pouvais d'ores-et-déjà comprendre qu'il ne m'apprendrait rien.
Pas même à maîtriser ce que l'on me demandait, non, je demeurais encore et toujours le poids lourd qu'il soutenait du bout des doigts. Un sentiment qui me laissait un dégoût envers moi-même.
" Le seul con ici, c'est toi Satoru ! "
" Bah voyons, regarde-le, toujours à se croire au-dessus de tout le monde ! "
Surpris nous étions lorsque ces deux voix surgirent à nos arrières, deux jeunes femmes étaient dressées derrière nous. Vêtues du même uniforme que notre école, je fus d'autant plus surprise de ne les avoir encore jamais vu en une semaine.
Je ne pus que constater le tempérament de feu qu'elles pouvaient posséder. À commencer par remettre Gojo en place, lui qui répliqua aussitôt.
" Venant d'une faible ça ne m'étonne pas. Utahime tu devrais changer de disque, t'es lourde. "
Les deux femmes ne prirent part au débat, mais entrèrent dans le vif du sujet. Toutes deux s'approchant de nous, semblant s'intéresser à mon sujet.
" Qu'est-ce qu'il se passe ici ? "
" Vois-tu Mei-Mei, cette incapable ne sait toujours pas activer son énergie occulte. " Gojo me rabaisse.
" Je te trouve un peu dur sur les bords avec la nouvelle. D'ailleurs comment tu t'appelles ? "
Totalement stressée par l'environnement, j'avais vraisemblablement du mal à m'exprimer. Je n'avais jamais été aussi entourée, et n'avais jamais autant attiré l'attention. Ce qui me fit m'exprimer de manière timide et réservée, face à ces deux femmes qui représentaient à mes yeux, des figures charismatiques.
" Z-Zenin Kana... "
" Zenin ? J'aurais jamais cru. M'enfin, nous allons trouver la source de ton blocage, l'énergie ne devrait pas être un frein pour toi. "
Aussi bienveillantes qu'elles l'étaient, ces deux filles s'apparentant être nos aînées, m'avaient prise sous leur aile. Gojo avait profité de l'occasion pour nous fausser compagnie, puis, un grand entraînement fut au rendez-vous.
Malgré les échecs que j'enchaînais à la suite, Utahime et Mei-Mei ne cessaient de m'encourager. Elles m'analysaient puis me donnaient certains conseils quant à la source de son activation.
Et puisque rien n'est impossible dans la vie, avec une poignée d'efforts et d'encouragements, je pus enfin y parvenir, soudainement félicitée par mes aînées.
" Félicitations ! Tu vois que tu peux y arriver, finalement ce n'est pas si difficile que ça ? "
Elles pouvaient parler elles, c'était loin d'être mon cas. Mais je faisais tout comme et acquiesçais les éloges qu'elles pouvaient me faire. Mais maintenant activée, que devais-je faire à présent ? Je n'avais aucune idée du but qui m'était destiné.
" Et maintenant... Je fais quoi avec ça ? "
" Je ne connais pas les sorts du clan Zenin, pour le savoir, il faudrait t'y renseigner ? "
" C'est un peu délicat... " Je lui avoue.
" C'est déjà bien pour aujourd'hui ? Tu verras le reste lors de tes prochains entraînements, d'accord ? "
L'heure qu'affichait le cadran de ma montre démontrait bel et bien l'issue de l'entraînement. Par respect et politesse pour celles qui m'ont accordé leur patience, je les remerciais puis les saluais en guise de gratitude.
Je ne comptais pas les retenir plus longtemps. Lorsque je les quittais pour vagabonder dans l'école, d'autres sujets me préoccupaient. Des sujets bien plus profonds et internes, qui me faisaient m'arrêter au bord de ce point d'eau, qu'en était-il de ma véritable identité.
Achetée par le clan Zenin, c'est tout comme si je faisais partie des leurs. Néanmoins, en ce qui concernait le monde de l'occulte, mon énergie maudite était rattachée à mon clan d'origine, le clan Takeda.
Bien que je savais les pratiques qu'ils organisaient, j'étais incapable de me rappeler du moindre mouvement ou bien même de la moindre technique. Les femmes étaient séparées des hommes et de ce fait, j'ignorais tout de leurs capacités.
Pour cause, la misogynie omniprésente de mon père, qui interdisait ce genre de pratiques réservées uniquement aux hommes du clan. Qu'il crève en enfer, cette raclure m'avait renié et sûrement déjà oublié.
Le reflet de mon visage contre l'étang était d'autant plus insupportable que de représenter les traits familiers que je partageais avec lui. J'avais exactement la même gueule que ce fumier, et il me confortait d'autant plus à me détester.
Si je pouvais l'étriper je le ferais, mais l'idée m'était très vite passée, dès lors ou cette cigarette s'abattait contre mon reflet.
" T'as vu un cadavre dans l'eau pour la fixer comme ça ou quoi ? "
Quelque peu malaisée à l'idée d'être repérée, j'avais sursauté, puis avais dévié mon regard vers mon interlocutrice. Shoko semblait incompréhensive face à mon cas désespéré et je ne pouvais qu'acquiescer ses pensées.
Suite à son invitation de se prélasser au centre de la salle dédiée au repos, je l'avais vite suivie pour chasser ce bâtard de mes pensées. Nous avions pris des boissons aux distributeurs, puis nous étions affalées sur les banquettes surplombant le parquet.
Une activité digne de flemmardes comme nous l'étions, jusqu'à ce que cette personne arrive, m'ayant faite totalement redressée.
" C'est qui qui a des autorisations de sortie ? "
Muni d'un sourire empli de bienveillance, apportant chaleur et convivialité dans ce lieu, Suguru Geto nous apporta deux enveloppes, que je brandis lorsqu'il me la tendit.
À l'ouverture de cette dernière, c'est Shoko qui sembla être ravie. Moi quelque peu perturbée par la signification de cette dernière, dans l'attente de la moindre explication.
" Demain a lieu le festival des forêts, je me suis dit que ça nous ferait du bien à tous de sortir de là ? "
" T'es sérieux ? T'as eu ça comment ? Je galère à obtenir des autorisations moi ! "
" Disons que tes demandes et les miennes sont quelque peu différentes ? "
Je les regardais discuter, totalement absorbée par mes plus profondes pensées. Cette invitation semblait faire chavirer mon cœur. Je daignais comprendre pourquoi elle m'était adressée, alors que lui et moi ne nous étions plus adressés la parole.
Je n'avais pas eu l'occasion de le croiser cette semaine, et le voilà à m'inviter malgré les erreurs que je pus faire à son encontre. J'avouais manquer d'éléments pour le juger, et le questionnais subitement. Sûrement pour en avoir le cœur net.
" C-c'est vraiment pour moi ? "
Soudainement interrompu dans sa discussion, le brun reporta son attention en ma direction. Une mine quelque peu surprise puis il me répondit :
" À moins que tu ne m'aies encore donné un faux nom, oui elle est pour toi. "
" Mais enfin je- "
" Super ! J'en avais marre de tout le temps me les coltiner toute seule, je vais enfin pouvoir avoir de la compagnie féminine ! "
Shoko m'interrompit dans ma lancée, puis mit un terme à cette discussion. Elle l'eût fait indirectement puisqu'à la suite, le brun s'était échappé. Je n'avais même pas eu le temps de le remarquer.
Même si un sourire maquillait mes lèvres, je ne pouvais cesser de ressentir ce genre de sensations. L'impression d'être coupable, et me faisant culpabiliser. Cet acte m'avait d'autant plus démontré que ma place n'était pas ici. Non, j'avais vraiment du mal à m'intégrer.
A SUIVRE DANS LE PROCHAIN CHAPITRE