PDV Caroline
De la paume de ma main, je lisse des plis invisibles de ma tenue tout en observant ma silhouette longiligne dans le miroir. Mon reflet est appréciateur et pourtant, je ne suis plus sûr de rien.
Inconsciemment, je repense à mon rêve où mon ventre était arrondi. Toutes les nuits, il se répète inlassablement. Devenir mère n'a jamais fait partie de mes plans. J'étais encore jeune pour avoir de tels projets, mais maintenant cette possibilité s'est évanouie avec mon vampirisme. Je ne pourrais plus rien faire pour changer ça, mais je ne regrette pas pour autant ma vie d'avant. Klaus avait raison quand il l'a souligné. Je préfère cette version de moi-même. J'ai seulement le sentiment que mon subconscient cherche malgré moi à me faire comprendre qu'un jour ou l'autre, le fait de ne pas pouvoir donner la vie me manquera.
Et en même temps, d'où vient cette soudaine complicité avec Rebekah ? Dans le rêve, nous sommes proches alors que dans la réalité, elle me méprise. Peut-être que tout est lié après tout, la blonde originelle n'a jamais caché à quel point ce manque de créer sa propre famille a creusé un vide chez elle.
Dans un soupir, je saisis mon masque doré sur la commode et quitte la pièce. Cette fois, je ne peux plus reculer. Ce bal me rend nerveuse car je sais que je vais me retrouver directement projeté dans leur monde. Depuis mon arrivée à la Nouvelle Orléans, j'ai passé la plupart de mon temps ici, dans cette maison. Klaus a tout fait pour me tenir écarté le plus possible. Peut-être l'a-t-il fait pour me protéger de Marcel, peut-être même de lui-même.
Je ne suis pas idiote pour savoir que je me suis retrouvé projeté de l'autre côté du miroir où ceux qui vont chercher à les atteindre ne sont pas forcément « les méchants ».
Je vais devoir m'habituer à cette situation. Je vais devoir moi-même changer. Suis-je prête à le faire ? j'ai déjà commencé, mais la véritable question est jusqu'à quel point je suis prête à le faire ?
J'ajuste mon boléro noir à longs poils sur mes épaules comme pour m'envelopper dans une douce chaleur réconfortante jusqu'à ce que mes yeux se posent sur lui.
En bas de l'escalier, il est là et il est splendide. Il porte une chemise blanche et ses traits durs ont déserté son visage. Impossible, de retenir mon sourire béa en le contemplant. Le rouge naturel de ses lèvres est davantage mis en valeur et me donne envie de mordre dedans. J'ai toujours vu le bon chez cet homme et inconsciemment, le trouver dans cette couleur ne fait que de me raccrocher à cette certitude.
— Tu as lâché tes cheveux ! me fait-il remarquer en ne pouvant s'empêcher de glisser ses doigts dans mes boucles.
— Je sais à quel point tu aimes quand ils le sont.
Un sourire éclaire son visage. Désormais, c'est lui qui a l'apparence d'un ange et je me fiche complètement qu'il soit déchu ou non. Tout ce qui compte, c'est que cet homme soit le mien.
— Tu es magnifique ! me dit-il après m'avoir fait tournoyer lentement.
— Je n'étais pas sûr de la robe, d'habitude c'est toi qui les choisis pour moi.
Cette fois, il ne l'a pas fait. Il n'a fait aucun effort et s'est montré désagréable avec tous le monde. Klaus ne souhaitait pas ma présence à ce bal, mais au fond nous savons tous les deux qu'Elijah a raison. J'ai déjà attiré l'attention de Marcel. Ne pas y aller ne ferait que l'interloquer et me rendrait trop précieuse à ses yeux.
— C'est vrai, j'aime bien les choisir, mais à y réfléchir, je crois que je préfère te les enlever, me chuchote-t-il à l'oreille avec taquinerie.
Mes joues s'empourprent. Il m'intimide autant qu'il arrive à me sentir femme.
— Tu es pas mal toi aussi, le blanc te va bien.
À ma remarque, il grimace avant d'ajouter :
— Remercie Kol, il m'a volé ma chemise.
— Je l'ai emprunté, rectifie ce dernier en apparaissant dans une chemise noire. Je n'allais quand même pas me rendre à cette petite fête dans une couleur aussi... salissante.
— C'est bien pour cette raison que je n'en porte jamais ! grogne mon originel.
Je retiens mon sourire à les voir se chamailler de cette façon. De l'autre côté du miroir, on y trouve également une facette différente des Mikaelsons et elle n'est pas pour me déplaire
Pdv Klaus
Dans sa longue robe jaune, Caroline est à tomber. Je ne l'aurais pas choisi de moi-même et pourtant cela aurait été une erreur de ne pas la voir dedans. Elle semble encore plus lumineuse qu'à son habitude. Sans parler de son masque. Elle a opté pour un si fin qu'il ne fait que souligner davantage son visage.
— Bien, puisque tout le monde est prêt et sait ce qu'il a à faire, je pense que cette fois, nous pouvons y aller, termine Elijah.
Lorsque ce dernier tend son bras à mon ange pour l'inviter à le suivre, j'arque un sourcil dans l'incompréhension la plus totale.
— Puis-je savoir ce que tu fais ? je demande aussitôt d'une voix tranchante.
— Caroline ne peut pas y aller avec toi. Si Marcel en venait à savoir ce qu'elle est, cela ne ferait que lui donner un avantage sur toi. Je vais donc l'escorter à ta place.
Petit à petit, je sens mon visage se déformer.
— Cesse de me regarder de cette façon, elle sera plus en sécurité, j'y veillerais. Et j'attends de toi que tu en fasses de même avec la tienne.
— La mienne ? je répète sans comprendre.
— Ta cavalière. Tu iras avec Katherine.
Cette fois, je ne peux retenir mon rire nerveux. J'ignore à quoi il joue, mais je n'approuve pas du tout son petit jeu.
— C'est une plaisanterie, n'est-ce pas ?
Mon frère a perdu la tête. S'il continue, je songe à l'étouffer avec ses boutons de manchettes qu'il termine d'attacher.
— Au contraire, je suis tout à fait sérieux !
— Elijah, je... je ne pense pas que ce soit une très bonne idée, Katherine elle-même cherche à le raisonner.
Tout comme je le suis, elle semble aussi horrifiée que je peux l'être. Les battements de son cœur s'accélèrent et me tambourinent le crâne. Je ne vais pas le supporter.
— Ma décision est prise, Niklaus. Accepte là.
— Et étrangement, tu ne crains pas que Marcel finisse par s'en prendre à elle si elle se trouve en ma compagnie ? Si tu tenais à t'en débarrasser, tu n'avais qu'à le dire plus tôt, je n'aurais pas donné tout ce mal pour te la ramener. Cependant, tout n'est pas perdu, je peux encore m'en charger.
À mes mots et ma menace qu'elle sait sincère, la brune déglutit tandis qu'Elijah me lance un regard noir en guise d'avertissement.
— Elle ne sera pas en danger en ta compagnie, ajoute mon frère. En vous voyant, Marcel n'aura pas de mal à comprendre qu'elle n'a aucune importance à tes yeux.
— Dois-je te rappeler qu'elle n'est plus rien d'autre qu'une pitoyable humaine ? Il est hors de question que je me traine un boulet dans son genre !
Mon frère soupire de lassitude.
— Katherine est habituée à interagir avec des vampires, elle n'aura aucun de mal à se fondre dans la masse.
— Oh ! Mais je ne doute pas de ses talents d'actrice.
— Bien ! Alors, le sujet est clos.
— Je n'irais pas avec elle ! je hurle de rage.
Mon ainé, agacé, se déplace si rapidement qu'il me fait sursauter.
— Tu cherchais à te racheter à mes yeux pour l'avoir retenue captive durant des mois. Je t'offre cette possibilité, alors ne me déçois pas.
Les rouages de mon cerveau tournent à plein régime. Je ne veux pas aller avec elle, mais mon frère n'a pas tort sur tous les points. Cette tension entre nous devient ingérable et il faut qu'on y mette un terme.
— Si jamais elle m'agace, je la mange l'humaine ! je réplique.
Un sourire amusé s'étend sur le visage de mon ainé.
— Marché conclu !