Le Challenge

By cocorukia

189K 14.9K 2.3K

Lors d'une soirée, Gabriel répond à un gage lancé par ses amis : il doit embrasser un homme, un parfait incon... More

Prologue
Chapitre 1 - Le challenge
Chapitre 2 - Rencontre improbable
Chapitre 3 - Piégé
Chapitre 4 - Sursis or not sursis
Chapitre 5 - Un rendez-vous dérangeant
Chapitre 6 - Un sauveur inespéré
Chapitre 7 - Un loup dans la bergerie
Chapitre 8 - Abus de pouvoir
Chapitre 9 - Jeu de dupes
Chapitre 10 - Du cauchemar au rêve
Chapitre 11 - Après la tempête, le chaos.
Chapitre 12 - En vie
Chapitre 13 - Cohabitation et confidences
Chapitre 14 - Révélation
Chapitre 15 - Guet-apens
Chapitre 16 - Tumultes et turbulences
Chapitre 17 - Retour sur Terre
Chapitre 18 - Invitation inattendue
Chapitre 19 - La raison ou le cœur
Chapitre 20 - Thomas
Chapitre 21 - Le cœur ou la raison
Chapitre 22 - La raison du cœur
Chapitre 23 - Baptême du feu
Chapitre 24 - Soir de tempête
Chapitre 26 - Mise au point
Chapitre 27 - Possession
Chapitre 28 - Le tournant
Chapitre 29 - la curiosité d'Alban
Chapitre 30 - La dispute
Chapitre 31 - La rencontre
Epilogue
Merci !

Chapitre 25 - L'ombre du passé

5.1K 384 105
By cocorukia


Nous sommes beaucoup plus sages les jours suivants, nous laissant le temps de prendre conscience de cette soirée si renversante.

Et puis, je ne veux rien précipiter non plus par peur qu'il ne réalise ce qu'implique notre relation. Qu'elle-est-elle d'ailleurs ? Nous ne sommes pas véritablement des amants, nous sommes encore moins un couple. A-t-il seulement réfléchi à ce que c'est de sortir officiellement avec un homme ? Aux conséquences inéluctables sur sa vie, peut-être sur son travail ? Je sais ce que c'est de se faire insulter parce que je suis homosexuel, mais lui ? Est-il prêt à supporter d'éventuelles remarques ?

J'ai l'impression d'être un voyageur sur un quai de gare, ne sachant pas encore quel train prendre, dans quelle direction aller et ne sachant pas si mon sac contient les bonnes affaires pour faire face au voyage qui m'attend.

Mais si je suis honnête, je crois que j'ai aussi peur de moi. Rêver d'être avec la personne qu'on aime est une douce et rassurante illusion. Elle est comme un nuage dans le ciel, visible mais hors d'atteinte, c'est le deal dès le départ. Alors quand cette illusion semble tout à coup réalisable, atteignable, elle apporte son lot d'espoirs, de rêves nouveaux, d'attentes plus ambitieuses et c'est terrifiant.

Je n'avais pas ressenti autant la crainte de l'échec, de ne pas être à la hauteur et surtout la peur de l'abandon ou du rejet depuis que j'ai quitté la maison de mes parents. Je me rends compte à quel point mes sentiments pour lui sont capables de me porter mais ils sont tout aussi capables de me détruire. J'ai espéré qu'il me regarde et qu'il m'aime mais sans songer véritablement à un avenir concret.

Je réalise à quel point j'ai fui toute forme d'engament sentimental jusqu'ici en dehors de mes amis. Mes quelques liaisons n'ont jamais duré plus de quelques semaines, trouvant toujours une excuse ou une raison pour y mettre fin. L'amour que je porte à Thomas est unique, j'en prends enfin conscience. Quoi qu'il arrive, je ne pourrais aimer personne d'autre comme je l'aime lui.

Thomas me surprend, finalement, il semble bien plus calme que moi à gérer cette situation. C'est lui qui devrait être déstabilisé, en train de se torturer l'esprit au lieu de moi qui laisse libre cours à mes doutes et mes anciennes angoisses.

Je secoue la tête, ça suffit, le travail ne va pas se faire tout seul comme par enchantement. Je me reconcentre sur mon écran : une chose à la fois, un jour après l'autre, c'est déjà bien suffisant pour l'instant.

*

La pause déjeuner est la bienvenue. Mon portable, qui était sur vibreur, affiche un SMS. Eléonore, la directrice de l'association qui m'a aidé à l'époque, me demande de la recontacter sans plus d'explication. Il doit se passer quelque chose pour qu'elle me contacte ainsi.

Je m'isole dans un bureau vacant pour la rappeler :

- Bonjour Eléonore, c'est Gaby, j'ai reçu votre message. Que se passe-t-il ?

- Gaby, bonjour, merci de me rappeler. Ecoute, je ne sais vraiment pas comment t'annoncer cela alors je vais être directe : ta mère nous a contacté. Elle a demandé si nous avions tes coordonnées. Je lui ai dit que je n'étais pas sûre de les avoir. J'ai pris son numéro en lui indiquant que je ne pouvais rien lui promettre. Que veux-tu que je fasse ?

L'annonce est tellement inattendue que j'en reste sans voix. Plus de dix ans, sans se voir ni se parler. Le mot mère a perdu toute signification pour moi, depuis, il n'est plus qu'un terme désuet du passé. La voix d'Eléonore, me ramène à la réalité :

- Gaby ? Gaby ? Tu es toujours là ?

- Oui, pardon Eléonore, ça fait tellement bizarre ...

- Oui, je comprends. Tu veux prendre du temps pour savoir ce que tu veux faire ?

- Non, pas besoin. Donnez-moi son numéro. Si elle rappelle, dites-lui que vous n'avez plus mes coordonnées.

- Bien, je t'envoie son numéro par SMS. Prends soin de toi Gaby.

- Merci Eléonore, vous aussi.

- Gaby ?

- Oui ?

- Je sais ce que t'ont fait tes parents et que leur pardonner est loin d'être simple. Tu peux encore être déçu également mais crois-moi, le regret de ne pas avoir essayé est quelque chose de bien pire. Prends le temps d'y réfléchir, d'accord ?

- Promis, encore merci Eléonore. J'essaierai de passer vous voir bientôt.

- Ça me ferait plaisir oui. Au revoir Gaby.

Je suis encore sonné suite à ma conversation avec Eléonore. Le bip de la messagerie me sort de ma léthargie : incroyable, leur numéro n'a pas changé, ils doivent donc toujours habiter à la même adresse. Mon esprit est vide et déborde à la fois tandis que mon cœur se serre en me souvenant de mes parents. Je n'avais plus pensé à eux depuis une éternité et maintenant la vue de ce simple numéro est comme un corps qui sort de sa tombe.

Un nouveau message me fait sursauter, il vient de Thomas cette fois : « T'es où ? Je t'attends à la cantine ». Ces simples mots suffisent à réchauffer mon cœur. Je lui réponds aussitôt : « J'arrive ! ».

*

J'ai à peine posé mon plateau repas sur la table, qu'il me demande ce qui ne va pas. Décidément je ne peux plus rien lui cacher visiblement. J'essaie bien d'éviter le sujet mais sa ténacité fini par me faire flancher et je lui raconte donc mon échange téléphonique avec Eléonore :

- Tu comptes faire quoi ?

- Je n'en sais rien du tout ...

- Depuis combien de temps tu ne les a pas vu ?

- Presque douze ans ...

Il répond par un sifflement

- Tu sais pourquoi elle cherche à te joindre ?

- Non, elle n'a rien dit à ce sujet.

- Tu sais que tu peux compter sur moi si tu as besoin.

- Je sais, mais là pour le moment je ne sais pas quoi faire du tout ...

- Partons quelque part ce week-end alors.

- Hein ?

- Oui tu sais c'est un concept où on prépare un bagage léger afin de passer deux jours en dehors de la ville !

- Merci, je suis perdu pas débile ...

- Heureux de l'apprendre ! C'est donc décidé, je m'occupe de tout !

Vraiment, cet homme va me rendre chèvre mais son attention me décroche enfin un sourire.

*

Impossible de connaître notre destination en embarquant dans la voiture le samedi matin. J'ai beau eu le harceler de questions, je reste sans réponse alors que le paysage, campagnard à présent, défile. Je finis par m'assoupir bercé par les vibrations de la voiture. Thomas me réveille doucement :

- Gaby, nous sommes arrivés, réveille-toi.

J'ouvre les yeux sur une petite rue dans laquelle nous sommes stationnés. Elle me semble familière mais ce ne peut pas être ce que je crois. Je me redresse et regarde cette fois attentivement autour de moi : c'est pas vrai, il n'a pas fait ça quand même ?! Cette rue, bien sûre que je la connais, la maison de mes parents est située juste un peu plus loin.

Je me tourne vers Thomas avec une expression mêlant incompréhension et colère pour toute question :

- Avant que tu ne dises quoi que ce soit, je tiens d'abord à te dire que je sais que ce n'est peut-être pas une bonne idée d'avoir pris cette initiative mais je commence à te connaître. Tu te serais torturer l'esprit pendant des jours, voire des semaines avant de te décider à agir et alors tu aurais agi seul comme d'habitude sans rien me dire. Mais les choses ont changé Gaby, tu n'es plus seul à affronter ce qui vient et je voulais m'assurer d'être là pour te soutenir.

- Comment as-tu osé ...

Ma voix tremble de colère quand je lui adresse enfin la parole, mes poings serrés reposant sur mes genoux. Il me stoppe aussitôt :

- Tu es en colère contre moi, je le comprends. Tu te sens trahi, je le comprends aussi. Maintenant, tu as encore le choix, tu peux descendre de cette voiture et leur faire face une bonne fois pour toute ou nous pouvons repartir immédiatement. C'est à toi de décider ...

Une tornade de pensées et de sentiments contradictoires ravage mon crane. Je lui en veux au point d'avoir envie de le frapper, mais d'un autre côté, en mon fort intérieur, je sais qu'il n'a pas tout à fait tort et ça m'agace d'autant plus.

Mon regard dévie vers la rue à nouveau, la maison est juste trois maisons plus loin de notre stationnement. Je pousse un profond soupir :

- Ok, maintenant que sommes là, autant y aller ...

*

C'est tremblant que je presse la sonnette du numéro 18, je ne suis prêt à rien, mais avec eux je ne le serais jamais de toute façon. Thomas m'accompagne mais il est resté en retrait appuyé contre la façade de la maison. J'entends des pas qui s'approchent puis la porte s'ouvre :

- Bonjour ... maman ...

Ce mot peine à franchir mes lèvres. Elle n'a pas changé tant que cela. Des cheveux blancs, des rides en plus agrémentent à présent son visage mais sinon, elle a exactement la même coupe de cheveux et le même style vestimentaire que dans mes souvenirs.

Elle a d'abord un moment d'hésitation puis ses yeux s'écarquillent de surprise en me reconnaissant et c'est ensuite de l'inquiétude qui gagne son visage. Elle tourne la tête vers l'intérieur de la maison comme si elle avait peur que quelqu'un ne la surprenne :

- Gabriel ? Qu'est-ce que tu fais ici ?

- Je te signale que c'est toi qui a cherché à me joindre, alors voilà, je suis là, je t'écoute ...

- Je voulais te contacter oui, mais je ne pensais que tu viendrais ici ... J'ai vu ton nom dans un article de journal et celui de cette ... association.

- Qu'est-ce que tu veux ?

- Ton père a eu des soucis, il doit une somme d'argent à une personne qui lui donne jusqu'à la fin du mois pour le rembourser ... C'est une personne qu'il ne vaut mieux pas contrarier ... Nous n'avons trouvé aucune solution pour réunir l'argent alors quand j'ai vu ton nom ... Tu sembles avoir un bon emploi et puis nous restons tout de même tes parents, donc ...

J'accueille l'information aussi bien qu'un uppercut en plein estomac. Il n'y avait aucune once de repentis dans sa démarche. A aucun moment elle ne montre du remord ou de la honte de me demander de l'aide. Je prends énormément sur moi pour rester aussi impassible que possible :

- Combien ?

- Quoi ?

- Combien il doit ?

- neuf mille euros ...

Je sors mon carnet de chèque et un crayon de ma veste :

- On est samedi, attends mardi et tu pourras l'encaisser.

Je retiens le chèque dans ma main alors qu'elle le saisit aussi vite qu'un vautour se jetant sur la carcasse qu'il vient de découvrir. Elle redresse la tête vers moi l'air interrogatif :

- Qu'on soit bien clair, j'estime à présent que je ne vous doit absolument plus rien. Je t'interdis d'essayer de me contacter à nouveau et je ne veux plus jamais entendre parler de vous. Peu importe ce qu'il vous arrive à partir de maintenant vous n'existez plus pour moi et je n'existe plus pour vous. As-tu bien compris ?

Elle hoche la tête, les yeux convoitant le morceau de papier salvateur que je n'ai pas encore lâché. Elle lance régulièrement des coups d'œil craintifs en arrière. Je comprends que ce qu'elle redoute c'est de voir mon père débarquer dans l'entrée : il ne saura surement jamais d'où vient l'argent miraculeusement apparu ...

Je ne supporte plus de la voir, elle me donne envie de vomir. Je lui cède le chèque et tourne les talons. Thomas, que j'avais complètement oublié, me retient alors par le bras et s'adresse à son tour à ma mère visiblement impressionné par sa carrure :

- Chère madame, je tiens à vous dire que Gabriel est un homme formidable, il est certainement la plus belle personne que j'ai rencontré jusqu'ici. Vous ne méritez absolument pas de côtoyer une telle personne. Je vais redoubler d'efforts pour lui prouver qu'il n'y a pas que des êtres aussi immondes que vous sur cette terre. Je vous mets également en garde, si jamais j'apprends que vous essayez de l'approcher à nouveau, croyez bien que je ferai tout mon possible pour vous rendre la vie bien plus compliquer encore. Ceci dit ...

Il me tire brusquement à lui, sa main m'enveloppe la nuque et il m'embrasse avec une sincérité désarmante. J'en oublie la présence de ma mère horrifiée par ce spectacle, surement décadent à ses yeux.

Lorsque ses lèvres quittent les miennes, il pose son front contre le mien et murmure :

- Pardon Gaby, je suis tellement désolée ...

- Ne t'excuses pas, tu ne pouvais pas savoir ... Partons d'ici s'il te plait ...

Nous regagnions la voiture, Thomas tenant fermement ma main dans la sienne. A peine installés dans l'habitacle, je fonds en larme. Chaque goutte salée a le goût d'un deuil que je peux enfin m'autoriser à faire.

***

Mon dieu, cette femme, j'ai une folle envie de lui arracher les dents une à une pour oser lui parler ainsi. Comment diable a-t-il réussi à devenir quelqu'un d'aussi bien en venant de ce tas d'immondices ?

Je m'en veux tellement de lui avoir forcé la main. Je ne peux imaginer ce qu'il ressent, moi qui a eu une enfance heureuse et des parents aimants. Ses larmes me fendent le cœur.

Je veux le voir sourire, je veux le voir heureux, je veux que ses larmes à venir ne soient que de joie, je veux tout ce qu'il voudra. 

Continue Reading

You'll Also Like

31.1K 749 6
Contraint par la force des choses de succéder à sa mère au titre de reine, le prince Ceylan se retrouve à devoir épouser le vainqueur d'un tournoi or...
82K 7.8K 27
Les fêtes de fin d'années approchent à grand pas... Comme beaucoup de ses congénères, Noah adore cette période. Les décorations de Noël qui illuminen...
32.5K 2.9K 95
Jérémy a pris une lourde décision qui ne manque pas de faire réagir son entourage : il veut devenir acteur. Non seulement il sait qu'il trébuchera de...
2.6K 175 25
Deux ans seulement après avoir échappé au cartel de son père, Raphaël se fait de nouveau embarquer dans de sombres affaires impliquant gangs, mafia e...