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Ses paupières s'ouvrirent sur un lieu inconnu, lugubre et sinistre. Le froid remontait le long de son corps lui donnant de légers frissons qui firent disparaître les dernières sources de chaleur. Cette fraîcheur fit apparaître des nuages de buée à chaque souffle saccadé qu'elle expirait. Son esprit était flou et ses membres engourdis. Elle s'appuya sur le sol humide de ses mains abîmées afin de se redresser et observer l'endroit où elle se trouvait. En levant les yeux, elle remarqua les arcs boisés ainsi que des hauts poteaux de pierre maintenant en place le temple dans lequel elle se trouvait. Le doux son de l'eau résonna dans ses oreilles, et se fut en tournant la tête qu'elle vit une fontaine régnant au milieu du sanctuaire du temple. Elle se trouvait toujours dans son pays, et cela la soulagea un peu. Malgré tout, aucuns souvenirs ne lui vinrent. Elle ne savait plus qui elle était, d'où elle venait, où était-elle à présent et pourquoi elle était ici. Elle s'assit alors sur le rebord des marches qui permettent l'accès au temple. Elle ne reconnaissait même pas l'endroit dans lequel elle se trouvait. Aucunes informations du paysage lui rappelaient le moindre souvenir. Il faisait très sombre, et la jeune fille ne voyait que de légères formes noires dessinées par les arbres qui enveloppaient le sanctuaire. La peur survient quand elle vit une silhouette noire sortir de ces arbres et se diriger vers elle. Elle recula sur le sol avant de percuter le mur du temple avec son dos.
La forme noire était présente devant elle mais ne bougea pas plus. Elle s'accroupit et la fille pu enfin apercevoir un visage avec la lumière de la lune qui reflétait les traits d'un garçon. Un garçon qui semblait plutôt en colère aux premiers abords. Ses cheveux étaient noirs ainsi que ses yeux, et il portait sur tout son corps d'étranges marques noires. La jeune fille le dévisagea longtemps avant de se racler doucement la voix :
« Qui... Qui êtes-vous ? demanda-t-elle d'une petite voix.
- Qui je suis ? Tu oses me demander qui je suis ? Et toi donc, qui es-tu ? annonça-t-il d'un ton grave.
- Je... euh... pardon mais euh je ne me rappelle pas qui je suis... » dit-elle en fronçant les sourcils, essayant de se souvenir d'elle, mais tout était flou dans sa tête. Elle observa ses mains, les tournant dans les deux sens, et remarqua de légère marque noire sur ses mains remontant sur ses avant-bras, le même type de marque que portait le garçon en face d'elle. Elle toucha alors son corps, son visage, passant ses doigts dans sa chevelure longue et noir corbeaux. Elle secoua la tête en se recroquevillant sur elle-même. Elle ne se souvenait de rien. Elle ne connaissait même pas son prénom et cela lui faisait peur. Elle se demanda si tout cela n'était pas un mauvais rêve. Sans qu'il s'y attende, le garçon entendit des pleurs, de plus en plus fort, et vit que la jeune fille se frappait la tête violemment. Il s'approcha d'elle pour lui attraper les poignets puis vit les marques noires sur les mains de la jeune fille, puis observa les mêmes sur ses propres mains et ses bras :
« Oh non... non non non pas ça ! »
Le jeune homme commença a paniqué en reculant brusquement, descendant les escaliers en courant sous le regard apeuré de la jeune fille. Il souleva rapidement le bas de son pantalon, vérifiant l'état de ses jambes, puis accourut jusqu'à la fontaine, affichant son reflet dans l'eau grâce au clair de lune. Son corps était entièrement marqué de signes et lettres noires. Une sorte de tatouage apparenté d'idéogrammes tout le long de son corps. Il toucha ses cheveux, louchant sur cette couleur noire de jais. Le jeune homme serra les dents et jura. Il se retourna et avança vers la jeune fille au regard terrifié face à celui du garçon en furie. Il agrippa la chevelure noire de la jeune fille et la tira pour la sortir hors du temple, la jetant sur la terre humide. Les pleurs sur les joues de la jeune fille ne cessèrent pas de couler en masse, le ventre tordu de peur et d'appréhension : allait-il la tuer ? La torturer ?
Toujours assise sur le sol, elle se mit à reculer quand le jeune homme s'approcha d'elle :
« Est-ce que tu as la moindre idée de ce que tu viens de faire ? De ce que tu viens de m'infliger ?
- Je n'ai aucune idée de ce qui se passe, s'il te plait, je ne sais rien, je n'ai rien fait, je veux juste me réveiller de ce mauvais rêve ! hurla-t-elle sous ses pleurs.
- Tu vas me faire croire que tu es innocente ? Que tu sois la victime dans cette histoire ? » s'écrit-il en attrapant l'avant-bras de la jeune fille pour la relever de force. Celle-ci se cacha le visage de son autre main, de peur qu'il ne la frappe :
« S'il vous plait, je vous jure que je ne sais rien, ne me tuez pas s'il vous plait... souffla-t-elle à travers deux sanglots tremblants.
- Te tuer ? Moi ? Mais ma pauvre, tu n'as toujours pas compris qu'entre toi et moi, le danger vient de toi en réalité, annonça-t-il d'une voix moqueuse.
- Que... Quoi ? balbutia-t-elle
- Tu es déjà morte abrutie ! C'est de ta faute si on devient comme ça !
- Comme quoi ? Je ne comprends pas... »
Le garçon souleva la manche de son pull et celle de la jeune fille et elle remarqua que les marques avaient prise plus d'ampleur.
« Observe-toi dans l'eau de la fontaine. »
Elle hésita un instant, fixant le regard du jeune voir pour vérifiant qu'il ne se moquait pas d'elle. Elle s'approcha alors de l'eau et vit son reflet. Ses yeux s'écarquillèrent quand elle vit les marques noires dans son cou qui remontent sur son visage et viennent s'encrer dans sa peau, autours de ses yeux, son nez et ses lèvres. Elle toucha alors son visage de ses mains tremblotantes. Des larmes continuèrent de couler puis elle se retourna vers le garçon :
« Qu'est-ce qui m'arrive ? chuchota-t-elle.
- Tout est de ta faute, c'est à cause de toi si on est comme ça, je te déteste pour avoir commis un tel acte.
- Je ne comprends pas... Je ne te connais même pas, je ne sais même pas qui tu es...
- Qui je suis ? A ton avis on est où là ?
- Dans un temple, je dirai dans le centre de Tokyo. Mais je ne vois pas ce que j'ai pu faire, tu racontes n'importe quoi !
- Ah bon ? Et tu l'expliques comment ses marques sur nos corps et nos cheveux corbeaux ! Tu as osé de suicider dans ce temple, non pardon dans mon temple, et par ta faute, on se retrouve damné pour ton acte. Qu'est ce qui t'as pris de faire ça ?
- Tu mens... Je ne suis pas morte c'est faux, je n'aurais jamais pu faire ça !
- Apparemment si, tu nous as condamné tous les deux. Tu ne pouvais penser aux conséquences de tes actes avant de faire cela ?
- Je ne suis pas morte arrête de dire ça je n'ai rien fait ! hurla-t-elle, ne voulant rien entendre de plus.
- Si tu l'es. Regarde-toi une nouvelle fois dans le reflet et dit moi que tu es humaine avec cette apparence. »
La jeune fille se pinça les lèvres, elle le voyait pourtant, ça n'avait rien de naturel d'être marqué de cette façon. Elle baissa la tête vers le sol, puis observa ses mains. Mais qu'est-ce qui s'est passé ? Qu'a bien t-il pu arriver pour qu'elle en arrive à prendre cette décision ? Elle finit par observer autour d'elle, comme si la réponse se trouvait dans le ciel rosé de l'aurore. Elle n'avait même pas fait attention à l'aube tellement le garçon l'avait occupé. En pensant à lui, elle remarqua qu'il avait disparut de son champ de vision. De ce fait, elle se retourna pour le trouver et c'est ainsi qu'elle le vit devant l'entrée du sanctuaire. Elle alla alors à son encontre afin d'avoir des réponses à ses questions. A quelques pas de lui, elle aperçu qu'il cherchait à sortir de ce sanctuaire. Mais en réalité, il semblerait qu'ils soient bloqués dedans car le jeune homme n'arrivait pas à passer de l'autre côté de l'entrée. Un étrange voile transparent le repoussait à chaque fois qu'il voulait mettre une main en dehors de la propriété. Elle l'entendit râler et ressortir toutes les insultes possibles. C'est alors qu'elle décida de se racler la gorge afin de faire comprendre qu'elle était là, mais le garçon ne se retourna pas pour autant et ne dédaigna même pas un regard vers celle-ci :
« S'il te plait, j'aurais quelques questions à te poser... demanda-t-elle avec hésitation.
- Ose me les poser et tu finis six pieds sous terre, cracha-t-il froidement.
- D'accord... »
Elle repartit vers la fontaine pour s'asseoir sur le rebord, et continua d'observer le garçon s'acharnant en vain sur la barrière translucide. Elle chercha alors des raisons pour lesquelles il lui en voulait. Qu'avait-elle fait pour qu'il soit autant en colère ? Qui était-il en réalité ? Pourquoi eux seuls sont coincés dans ce temple ? Elle eu alors l'idée de fouiller le temple afin de d'obtenir quelques réponses. Elle s'approcha du bâtiment et monta les escaliers en analysant le sol afin de trouver un indice. Ne trouvant rien, elle entra à l'intérieur du temple, et pu voir une statuette bouddhiste, présente dans chaque temple, avec disposé dessous une tablette de pierre avec une gravure sur celle-ci. Elle s'approcha alors et lit les inscriptions :
« Le temple appartient à la déesse de la gaieté, UZUME*,
Gardé par son kami* RAI, protecteur du domaine pour l'éternité,
Il reçoit et exauce les vœux laissés à la place d'UZUME,
Et il représente la joie et la gaieté de ce temple,
Soyez heureux et bons. »
La jeune fille ne comprenait pas tout. La seule chose qu'elle retenait, c'est que le kami, l'esprit protecteur semble très apprécié car au-dessus d'elle se trouvait des centaines de papiers pendus sur une grille avec des vœux inscrits dessus. Des gens venaient ici pour donner leurs vœux et priaient pour qu'ils s'exaucent. La jeune fille fait alors marche arrière et sortit du temple ne trouvant pas d'autres informations. Mais c'est en sortant du temple qu'une lumière attira son attention sur sa droite. Elle tourna la tête et observa une petite chaîne de fer. Elle prit la chaîne pour l'identifier et remarqua un mot écrit sur le pendentif accroché à la chaîne. Il était inscrit « AKANE » dessus. Ce pendentif lui appartenait-elle ? Ou était-ce à quelqu'un d'autre ?
Elle sortit totalement du temple afin de rejoindre la fontaine où finalement, le garçon avait fini par s'asseoir. Elle s'approcha de lui doucement et s'assit à deux mètres de lui :
« Je crois que j'ai trouvé comment je m'appelle, dit-elle de petite voix, hésitante.
- J'en n'ai rien à foutre, marmonne-t-il toujours énervé.
- Akane, je crois que c'est mon prénom, continua-t-elle en appréhendant ses réponses.
- J'en n'ai toujours rien à foutre.
- Pourquoi tu me détestes tant ? Je ne me souviens même pas comment je suis morte.
- Eh bien peut être parce que tu t'es suicidée dans mon temple ! cria-t-il soudainement.
- Ton temple ? Est-ce que par hasard... tu t'appellerai Rai ? demanda-t-elle, peu sûre d'elle. Le jeune homme lui lança un regard plein de haine.
- Comment tu sais ça ? cracha-t-il méchamment.
- Euh... et bien, c'est écrit sur la pierre à l'intérieur du temple. Tu es un esprit alors ? »
Le jeune homme ne répondit rien, il regardait seulement ses mains, tordant ses doigts dans tous les sens comme s'il était préoccupé par quelque chose.
« C'est toi n'est-ce pas ? L'esprit protecteur du temple ?
- Tu crois aux esprits maintenant, alors que tu ne crois même pas à ta propre mort ?
- Euh... C'est plus simple de croire aux esprits plutôt que d'être mort à vrai dire... Alors tu en es un ?
- Oui. C'était moi Rai.
- C'était ?
- Rah mais regarde ce que je suis devenu par ta faute ! Je suis maudit, je ne suis plus l'esprit protecteur de ce temple ! hurla-t-il soudainement de colère sur Akane, j'étais aimé de tous dans cette ville, même dans ce pays, j'apportais joie et bonne humeur, courage et espoir à la population. Toutes les personnes venaient dans ce temple pour que j'exauce leurs vœux tellement j'étais bon dans mon devoir. Et à cause d'une abrutie comme toi, qui a osé se suicider dans le temple où régnait paix et prospérité, je me retrouve rejeter par tous ceux qui m'ont aimé, et renié par ma propre déesse qui m'avait confié cette mission depuis des milliers d'années. Il a fallu d'une seule humaine démunie de toutes émotions pour me faire un coup pareil !
- Quoi ? Attends, je n'y suis pour rien moi ! Je ne me souviens même pas de ma vie d'avant !
- Mais à quoi tu pensais sérieusement ? A quel moment on se suicide dans un temple où les gens viennent chercher le bonheur ? Hein ? Je te hais ! Plus personnes ne viendra ici, je vais passer l'éternité dans la solitude, à recevoir malheur et problèmes sans cesse. »
Les larmes de la jeune fille se sont mises à couler en écoutant Rai envoyer toute sa rancœur sur elle. Cet horrible sentiment de culpabilité prenait place dans son corps alors qu'elle ne savait rien, ne savait pas pourquoi elle avait agi de cette façon. Elle comprenait la peine que ressentait Rai mais n'arrivait pas à enregistrer que c'était de sa faute. Pourtant elle ressentait le besoin de s'excuser, de demander pardon. Elle posa alors les genoux au sol, les mains marquées dessus, la tête baissée et s'inclina vers Rai :
« Je suis désolé Rai...
- Tes excuses sont inutiles, on ne peut pas revenir en arrière, de plus, tu t'excuses dans le vide puisque tu as perdu la mémoire. Personne ne sait la raison de ton acte, tu me fais plus pitié qu'autres choses. Relève-toi avant que je ne te marche dessus. »
La jeune fille se leva en vitesse, la tête toujours baissée et les mains liées devant elle, elle renifla encore une fois sous le regard du jeune homme. Puis soudainement, elle fit demi-tour vers la sortie du temple sous le regard interrogateur du jeune homme :
« Tu comptes aller où comme ça ? demanda-t-il la voyant s'éloigner de plus en plus.
- Chercher des réponses. Annonça-t-elle froidement, à présent à quelques pas des escaliers de sortie.
- Laisse tomber tu ne peux pas sort... » Il se stoppa quand il vit la jeune fille franchir la barrière qu'il ne pouvait dépasse précédemment. Il se leva d'un bon et accourut vers la sortie, derrière les pas de la jeune fille et remarqua qu'il pouvait aussi sortir à présent. Le voile transparent s'était enlevé. Il s'approcha encore d'elle, étant sur ses talons, et l'entendit renifler pour la énième fois :
« Tu vas pleurer encore longtemps ?
- Je ne peux pas croire que je me suis tuée. J'ai besoin de réponses.
- Ce n'est pas en pleurant constamment que tu vas réussir. »
Brusquement, Akane se retourna en le repoussant de ses mains violemment en lui criant dessus :
« Mais qu'est-ce que tu en as foutre ? Dégage ! Laisse-moi tranquille bon sang ! Je me suis excusée alors dégage ! Je n'ai pas besoin d'un connard comme toi en ce moment ! »
Le garçon se protégea des coups violent de la jeune fille qui semblait se défouler sur lui. Il finit par lui attraper une main afin de pouvoir en placer une :
« Je t'interdis de me parler comme ça ! C'est de ta faute si tu te retrouves dans cette situation !
- Mais tais-toi ! Tu ne sais rien de moi !
- Tu ne sais rien de toi-même non plus ! » vociféra-t-il méchamment.
Et la claque partie directement sur la joue d'un garçon.
***
*kami -> une divinité ou un esprit vénéré au Japon
* UZUME -> la déesse de la gaieté
Source : Wikipédia
Voilà pour ce premier chapitre, je préviens que ses deux personnages risquent d'être légèrement violent ou agressif entre eux par la suite.
Merci d'avoir commencé ce roman que j'écris totalement au filling haha !