Tentation en édition

By Lalie308

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[ Gagnante Watty 2019 dans la catégorie New adult] Michelle Lawson, 23 ans, femme afro et atypique, traverse... More

Prologue
Chapitre 1: Paumée.
Chapitre 2: Tarée
Chapitre 3: Trahison sucrée
Chapitre 4: Ottawa
Chapitre 5: Secret
Chapitre 6: Jeu de rôle
Chapitre 7: L'orée de l'addiction
Chapitre 8: Briser la glace
Chapitre 9: La soirée
Chapitre 10: S'incruster
Chapitre 11: Imposteur.
Chapitre 12: Piétine mon cœur
Chapitre 13: Ami?
Chapitre 14: Confusion
Chapitre 15: Tenter
Chapitre 16: Stop
Chapitre 17: Tempête d'attirance
Chapitre 18: Seconde première fois
chapitre 19: Monde d'illusions
Chapitre 20: Doutes
Chapitre 22: Confiance
Chapitre 23: Famille
Chapitre 24: Démon
Chapitre 25: Pardon?
Chapitre 26: Vengeance
Chapitre 27 : Grillés
Chapitre 28: Au revoir ( Réécrit)
Chapitre 29: Haine ou amour? (Réécrit)
Chapitre 30: Négociations (Inédit)
Epilogue

Chapitre 21: Découverte

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By Lalie308

Baby, please no promises.
Bébé, pas de promesses je t'en prie.
'Cause we won't keep our promises.
Car nous ne tiendrons pas nos promesses.
~Shawn Mendes~
-x-

<< Bébé, pas de promesses, je t'en prie. Car nous ne tiendrons pas nos promesses. >> Shawn Mendes.

Michelle

Mes nerfs sont très fragiles ces derniers jours, je suis accoudée au comptoir de la réception principale. Audrey raconte à Harry et moi ses folles aventures aux Bahamas. Tandis que je feins de l'écouter, mon regard se pose sur un visage que je reconnais instantanément. Mon sang ne fait qu'un tour dans mes veines. Alors ce n'était pas une illusion le jour où je l'ai vu dans le parc ?

— Michelle, eh oh, me rappelle Audrey d'une voix haut-perchée en secouant sa main devant mes yeux.

Au même moment, son regard croise le mien. Mon cœur s'arrête tandis que la fureur prend le dessus sur moi. Je lis clairement la panique dans son regard. Il se retourne à la hâte pour sortir d'Homel quand Audrey l'appelle soudainement.

— Hey Louis, tu ne viens pas nous saluer ? l'appelle-t-elle avec toute sa luminosité.

Il se rapproche en hésitant.

— Salut, commence-t-il, le regard fuyant et clairement embarrassé.

Les éclairs dans mes yeux ne doivent sûrement pas passer inaperçus en cet instant, je sens le regard d'Harry sur moi.

— Michelle, voici Louis, il travaille en traduction, fait Audrey. Louis, voici Michelle, la meilleure auteure au monde.

Il me tend la main comme si de rien n'était et je crois entendre un << enchanté >> ? Il se fout de moi ce connard. Je lui lance un regard coléreux avant de sortir en trombe de l'endroit. Des souvenirs atroces remontent à la surface, l'état de Tania à cette époque.

— Michelle, attends, s'il te plait.

Je me retourne si violemment que je sens ma tête sonner.

— Quoi ? crié-je à en rompre mes propres tympans.

— Ce n'est pas ce que tu penses, bredouille-t-il gêné.

Il est toujours aussi grand, mais n'empêche, je le fixe dans les yeux avec toute la rancœur possible.

— Qu'est-ce que je crois à ton avis ? Que tu étais censé être au Japon ? Que tu as plaqué ma meilleure pote pour rien ? Tu n'es qu'un salaud Louis. Tu savais pourtant qu'elle avait repéré une agence de mannequinat à Toronto, crié-je en me foutant royalement des gens qui nous observent à l'extérieur de l'immeuble.

— Non, non. J'y suis vraiment allé. J'y ai fait une année et puis j'ai eu ce travail inattendu ici à seulement vingt ans, je ne pouvais pas reculer. Je...

— Tais-toi, hurlé-je, à cran.

Je me rappelle encore et encore comment Tania avait été mal en disant pourtant qu'elle allait bien. Elle suivait difficilement les cours dans son école à cause de ça, loin de son pays et de sa famille. J'ai même dû refuser un stage dans une structure très importante et j'ai appris que le stagiaire devait être aussitôt engagé après. Je me rappelle les grosses poches de cernes sous les yeux de Tania, ses pleurs incessants à cause de cet idiot. Il aurait pu lui dire qu'il était à Ottawa, revoir les possibilités. Elle a eu mal pendant des années.

— Tania l'a bien pris, je lui ai dit, je t'assure.

Sa phrase me donne une gifle en pleine figure.

— Pardon ? Tu veux dire qu'elle le savait et qu'elle ne m'aurait rien dit ? Espèce de menteur, comment oses-tu ?

— Je te promets Michelle. Je...

Je ne le laisse pas finir sa phrase que je marche à pas de guerrière jusqu'à la voiture où Abdou aussi se hisse en me regardant inquiet. Des larmes mouillent mes joues tellement je suis en colère. Je lance un appel à Tania, je dois en avoir le cœur net tout de suite. Mais c'est impossible, elle ne me ferait pas ça. Elle décroche au bout de la deuxième sonnerie.

— Miss Mich, entame-t-elle.

— Je viens de croiser Louis.

— Oh...

Un rire nerveux s'échappe de ma gorge.

— Il a osé me dire que tu savais tout...

— Je... commence-t-elle sans finir.

— Non, Tania, ne me dis pas que...

— Écoute, je ne voulais pas te le dire pour que tu ne me voies pas différemment, il m'a dit qu'il ne m'aimait plus et qu'il avait une copine. Je voulais que tu continues de penser que je vivais le parfait amour et que c'était possible pour toi aussi, m'avoue-t-elle.

Ma langue donnée au chat, aucun mot ne parvient à sortir de ma bouche. Je raccroche. Je me passe la main sur le front ressentant une forte chaleur m'accabler. J'ai sacrifié une partie de mon avenir pour elle et elle garde un secret pareil ? Dès que je tourne la tête, le visage d'Harry se présente à moi. Il a les traits serrés sous le coup de la colère. Il ouvre la portière.

— Descends, m'ordonne-t-il.

Et il pense sérieusement que je vais obéir ? Je croise mes bras sur ma poitrine, et l'ignore. Abdou la commère fait semblant de ne rien remarquer de la petite scène, mais garde une oreille bien tendue.

— Ne me pousse pas à bout Ginger, insiste-t-il.

— Je ne crois pas que ce soit le meilleur endroit pour une scène, vous savez ? remarque Abdou, mais on l'ignore.

Je souffle d'exaspération avant de descendre de la voiture. Je croise mes bras sur ma poitrine.

— Quoi ?

Harry m'observe incrédule tandis que j'essaie de faire baisser la pression en moi.

— Quel est le problème ? me demande-t-il plus calmement.

— Le problème ? Le problème est que ma meilleure amie est une menteuse. Le problème est que j'entretiens une relation clandestine. Le problème, c'est ma vie, hurlé-je quasiment.

Harry regarde autour de lui et sourit aux quelques personnes présentes.

— Le rapport avec Louis ?

— Tu es jaloux ? demandé-je plus agacée que flattée.

— Harry ? Michelle ?

Nous nous tournons vers Audrey qui marche vers nous.

— Tout va bien ? demande-t-elle une fois à notre niveau.

Je lance un regard à Harry puis à Audrey.

— Oui, soupiré-je. Je dois juste rentrer.

— Michelle, on n'a pas fini de discuter, m'avertit Harry.

— Je n'ai plus rien à dire, me contenté-je de siffler avant de remonter dans la voiture.

C'est risqué de se donner ainsi en spectacle, mais je n'arrive pas à me contenir. Abdou démarre en silence. Pendant que nous nous éloignons, j'observe Audrey qui parle doucement à Harry. Elle tire son visage vers elle en posant sa main sur sa joue. Je détourne le regard, de plus en plus blessée. Blessée que ma vie ne s'accorde qu'à celle des autres, et d'être celle qui fait constamment des sacrifices.

*

Harry

J'observe Michelle qui s'en va, impuissant. Je ne comprends pas encore bien ce qui vient de se passer. Ce que Louis a en rapport avec elle ou encore avec Tania. Sa réaction quelque peu disproportionnée. Et surtout, pourquoi je ne dis pas simplement la vérité à Audrey.

— Tout va bien ? me demande-t-elle doucement en tirant mon visage vers elle.

— Oui, oui, bafouillé-je.

— Il y a un problème avec Michelle ? Je suis peut-être parano, mais j'ai l'impression qu'il se passe quelque chose entre vous.

Sa phrase me fait sursauter. La panique monte en moi. C'est peut-être l'occasion de tout avouer. Mais elle pourrait aller tout raconter à sa mère ou à je ne sais qui. Je suis le mieux avisé des conséquences que cela pourrait avoir sur Michelle ou sa carrière.

— Ne dis pas de bêtises, me contenté-je de bredouiller.

Elle esquisse un léger mouvement de recul, les sourcils froncés comme si je venais de lui pincer le cœur. Le mien bat anormalement dans ma poitrine, cette situation avec Michelle m'échappe peu à peu des mains. J'aimerais la rassurer, mais aussi qu'elle me rassure. Je n'aimerais pas que ce genre de disputes grille notre relation. Parce que le jour où cela se fera savoir par un des membres d'Homel, les conséquences seront affreuses. Encore plus si Victoria l'apprenait. Je soupire bruyamment puis me tourne vers Audrey qui me scrute d'un regard inquisiteur.

— Je crois que je n'ai jamais eu à gérer un auteur aussi tout feu tout flamme, tenté-je en feignant d'être encore plus irrité que je ne le suis déjà.

Un petit sourire tord les lèvres d'Audrey qui jette un dernier regard à la route.

— Oui, Michelle est spéciale, commence-t-elle.

Puis elle se rapproche à nouveau de moi et enlace ses bras autour de ma taille.

— Mais c'est une gentille fille, vas-y mollo avec elle, ajoute-t-elle de sa voix cajoleuse.

Je ne parviens pas à me dérober au pincement qui me picote le cœur lorsqu'Audrey paraît si bonne. J'hésite entre lui dire la vérité et continuer avec le mensonge. Lui dire serait définitivement trop dangereux. Plusieurs personnes ont déjà leurs regards sur Michelle et moi, alors oser rompre cette fausse relation ne confirmerait que leurs suspicions. Après le départ d'Audrey, je me rends dans mon bureau pour me plonger dans le travail. J'ai pensé écrire à Michelle ou l'appeler, mais ma fierté ne m'en donne pas l'occasion. Jack a enfin été viré d'Homel, pour mon plus grand plaisir.

 Pas juste à cause de toutes les auteures qu'il a déjà harcelées, mais surtout parce qu'il a osé mettre ses pattes sur Michelle, ma Michelle. Sous une interminable pluie, je rejoins enfin ma maison le soir, seul et sans nouvelles de Michelle. Je ne m'attendais pas à ce que les choses se détériorent aussi vite. Que dis-je, tout ce que je touche se détériore toujours, très vite. Michelle aurait raison de s'éloigner. Mes doigts sont enflammés, ils peuvent la brûler, trop vite.

Michelle

Je suis allongée sur mon sofa, près de Charly qui joue avec mes cheveux comme à son habitude. Mes yeux sont figés sur le plafond. Mon appartement est faiblement éclairé — comme d'habitude, ce qui a valu à Charly de me traiter de vampire à plusieurs reprises. Mais j'aime cette lumière tamisée, la romance qui s'en dégage et la mélancolie qui parfume mon chez-moi.

— Waouh, je ne sais vraiment pas quoi dire. Tu as une de ces vies Mich, se prononce enfin Charly après que je lui ai fait un débriefing de ma journée merdique.

En guise de réponse, j'émets un soupire long et bruyant qui arrache un ricanement à mon ami.

— La dernière fois qu'on s'est embrouillé tous les deux, tu n'as pas voulu me laisser m'expliquer. Je ne pense pas que tu devrais faire la même erreur avec Tania. C'est clair qu'elle tient beaucoup à toi, comme une sœur. J'aimerais bien ne t'avoir que pour moi, mais donne-lui le bénéfice du doute.

— Hummm, me contenté-je de répondre.

— Et pourrais-je savoir ce qu'a fait Harry de mal ? Parce que je ne vois pas encore, continue Charly.

— Rien, j'en ai juste ma claque de voir Audrey toujours aux alentours. Elle est géniale cette fille et j'aimerais juste qu'on soit honnêtes...

— Tu voudrais qu'elle sache ? me coupe Charly. Tu sais que c'est dangereux, pas vrai ?

— Oui, je le sais. Et en plus elle en souffrira beaucoup, observé-je. Oh, Charly, je suis dans la merde, grogné-je en enfouissant ma tête dans son cou.

Charly prend vraiment la situation à la rigolade puisqu'il ricane ouvertement.

— Avec le temps, on verra. Pour le moment, évite de tout foutre en l'air avec Harry, me conseille-t-il.

J'ai désespérément envie de voir Harry, de l'embrasser et de le laisser me consoler. Mais une force invisible m'en empêche, une peur inopportune se faufile en moi. Peur de quoi ? Je ne sais pas.

— Et avec Ashley ? demandé-je pour changer de sujet.

C'est au tour de Charly de soupirer, ce qui ne m'arrache pas l'ombre d'un sourire. Mon cœur est morose, triste et blessé. Il ne parvient pas à sourire.

— Elle a décidé de prendre quelques jours de congés. Elle a fait un tour aux États-Unis. Andrew est resté avec des membres de sa famille, m'annonce-t-il, un peu évasifs.

— Et le père d'Andrew ?

— Connard, siffle Charly en se tendant.

Je n'ose pas m'étendre sur le sujet. Je me suis toujours posée des questions sur le père d'Andrew, pourquoi Andrew avait l'air si triste quand il en parlait, mais jamais je n'avais eu le courage de demander, par peur de ne paraître trop indiscrète. Samedi matin, je décide enfin de me rendre chez Harry, histoire de recoudre les fils plutôt distendus entre nous. 

Cette maison me paraît toujours si mystérieuse, légèrement glauque malgré son charme. C'est comme si elle renfermait les secrets d'Harry. Abdou insiste pour attendre à l'extérieur sous prétexte qu'il doit assurer ma protection, n'importe où et n'importe quand. J'esquisse des pas lourds et hésitants lorsque je marche vers la porte d'entrée.

 Celle-ci est légèrement ouverte, ce qui me surprend. J'entends des rires à l'autre bout de la pièce, des rires de femme. Mon cœur se serre et ma vue se brouille. J'ose une main tremblante sur la poignée puis ouvre la porte. Plus je marche tel un cadavre pour ne pas faire de bruit, plus les bruits s'intensifient.

— Ne fais pas cette tête Harry, rigole la voix féminine qui a l'air d'avoir perdu son souffle.

Dès que je me pose sur le seuil de la cuisine, je découvre Harry, assis sur une chaise et vêtu d'un ensemble jogging. Mes yeux restent figés sur la femme à ses côtés. Elle porte un simple débardeur et un short. Ses bras, un de ses pieds et une partie de son cou portent des cicatrices de brûlure, son visage porte des traits très fins : yeux en amande parsemés d'un voile gris-vert, cheveux bruns, nez aquilin et lèvres charnues rosées. Sa poitrine tremblote lorsqu'elle rigole tandis qu'Harry boude, mais qu'un sourire déforme la commissure de ses lèvres.

 Soudainement, ils se tournent tous les deux vers moi et les sourires et les rires s'évanouissent dans l'air qui devient de plus en plus irrespirable. Soudainement ankylosés, mes pieds n'arrivent plus à faire de geste, mes yeux restent figés dans l'instant. Les yeux d'Harry s'agrandissent tellement lorsqu'il me voit qu'ils auraient pu éclater. Pourtant, la jeune femme se rhabille de son sourire avant de boire une gorgée du contenu de sa tasse.

— Oups, souffle-t-elle amusée.

Harry se lève maladroitement, se passe une main nerveuse dans les cheveux puis marche vers moi. Il me prend la main puis me tire dans le salon. Je reste toujours éberluée par la situation. Lorsque je retrouve mes esprits, j'arrache mon poignet de celui d'Harry en fronçant les sourcils.

— Je ferai mieux de partir, lancé-je en prenant déjà le chemin de la sortie.

— Michelle ?

C'est la femme. Je m'arrête au beau milieu du séjour puis me retourne vers elle. Comme cela se fait-il qu'elle me connaisse ? Elle est déjà en face de moi avec un beau sourire puis me tend la main.

— Moi c'est Aliyah, la sœur d'Harry.

Je cligne plusieurs fois des yeux. La sœur d'Harry ? Mon regard oscille entre Harry et elle avant de finalement s'arrêter sur Harry à qui je lance un regard interrogateur.

— Ouais c'est fou. Personne ne me connaît à part Abdou, m'indique-t-elle. J'ai oublié de fermer la porte après mon petit jogging dans la forêt.

— Sœur ? Une sœur ? bafouillé-je en regardant droit devant moi.

Harry m'a dit qu'il n'avait pas de famille et maintenant je découvre qu'il a une sœur ?

— Je...

— C'est bon Liyah, tu peux aller dans ta chambre, je lui en parlerai, indique doucement Harry.

— J'ai bien une bouche et enfin un être vivant en face de moi, plaisante-t-elle, mais Harry n'a pas l'air de le prendre à la rigolade.

— Aliyah, la prévient-il, la faisant rouler des yeux.

— D'accord, d'accord.

Puis elle s'en va. Mon regard se pose à nouveau sur Harry qui se gratte nerveusement la tempe.

— Je croyais que tu n'avais pas de famille, grondé-je d'un ton faible pour que sa sœur n'entende rien.

— À part elle, me répond-il du tac au tac.

Je secoue nerveusement ma tête, me mords la lèvre en tentant de tourner et retourner le problème dans ma tête.

— Et tu n'as jamais cru bon de m'en parler ? le tancé-je, blessée.

Décidément tout le monde pense bien de me cacher tout et n'importe quoi.

— C'est compliqué Michelle, je ne pouvais pas. Et tu n'aurais pas dû la rencontrer, souffle-t-il honnêtement.

Cette histoire est si malsaine qu'elle me donne des frissons. Que peut bien vouloir cacher Harry ? Qu'est-il arrivé à sa sœur pour qu'elle soit dans cet état-là ?

— Harry, commencé-je doucement. Les secrets sont trop pour moi. Il y en a de partout et je n'en veux plus.

J'ai l'impression d'être à bout. D'abord cette relation quasi secrète qui fait en quelque sorte de nous des délinquants, les secrets que me cache Charly par rapport à Ashley, les secrets que Tania m'a cachés et continue peut-être de me cacher et encore de nouveaux secrets. Voilà pourquoi je déteste autant vivre dans ce monde et que j'ai toujours préféré m'égarer dans le mien, voir les choses comme je le voulais. 

Mais ce monde me retient par ses tentacules et m'oblige encore et encore à le prendre dans la face. Harry ne bouge pas d'un poil, semblant mener une lourde bataille intérieure. Il se cale contre le sofa, le regard perdu dans le vide et la mâchoire excessivement contractée. Il a l'air de souffrir, d'avoir mal. J'aimerais le prendre dans mes bras en ce moment. Mais j'aimerais juste savoir pourquoi il a cru bon de me cacher une chose aussi importante, une personne aussi importante.

— Je n'ai jamais voulu que mes barrières s'écroulent si facilement Michelle, articule-t-il d'une voix blanche malgré la multitude d'émotions qui voyagent sur son visage.

Je tente de me calmer pour l'écouter, pour essayer de comprendre.

— Pourquoi la caches-tu ici ? demandé-je d'un ton plus posé.

Il lève d'abord un regard meurtri sur moi, puis le détourne. Son torse s'élève et s'abaisse irrégulièrement et ses poings sont serrés sur le fauteuil.

— Tu l'as vu ? Je ne veux pas que les gens la pointent du doigt, qu'ils se moquent d'elle ou qu'ils la traitent différemment. Aliyah est comme la prunelle de mes yeux et je veux juste la protéger de ce monde dehors, de ce monde de fou.

Chacun de ses mots porte une profonde douleur, une peur qui ne ressemble pas forcément à Harry. La situation reste toutefois confuse pour moi.

— Tu... Elle est restée ici pendant combien de temps ? lui demandé-je avec hésitation.

— Je vivais dans un appartement depuis l'âge de seize ans, on a d'abord vécu là avant de débarquer ici dès que j'en ai eu les moyens, m'apprend-il.

Une chose est certaine, je comprends pourquoi Harry ne m'a pas présenté à sa sœur. Mais en même temps, ça semble si malsain de garder une personne enfermée aussi longtemps. Harry et moi décidons enfin de sortir pour nous changer les idées. Pendant qu'il est sous la douche, je toque d'une main hésitante à la porte de sa sœur. La fameuse porte qui m'avait tant intriguée la première fois que je suis venue ici.

— Entre, crie Aliyah depuis l'autre côté de la porte.

Quand j'entre, elle est installée dans un grand fauteuil orange. Elle écrit quelque chose sur son téléphone avec un large sourire aux lèvres puis laisse son regard se poser sur moi. Le mien parcourt la chambre. Les deux seules couleurs ici sont l'orange et le blanc. Il y a un grand lit de marbre teint en orange au centre de la grande pièce. 

Un grand bureau avec un Mac ; quelques gadgets côtoient une large bibliothèque blanche avec des dizaines de livres. Les murs sont faits d'un papier peint blanc et il y a d'écrit en orange des centaines de mots dessus. En regardant de plus près, je repère un « Le cercle de la dérision » et fronce les sourcils.

— J'écris les titres des livres que j'ai le plus aimés sur ses murs, m'annonce Aliyah qui est maintenant derrière moi.

Je lis Divergent, The hate you give, les titres des sept livres d'Harry Potter, Pride and Prejudice, Game of thrones, Hunger Game et pleins d'autres titres que je reconnais.

— Aller viens, assieds-toi.

Aliyah est déjà installée confortablement dans son sofa, attendant que je la rejoigne. Elle est étonnamment de bonne humeur pour une personne enfermée pendant des années. Je m'assois timidement, extrêmement gênée puis tapote mes cuisses de mes doigts nerveux. Des mèches s'échappent de mes cheveux tressés en deux nattes.

— Harry est un peu spécial, commence-t-elle en me souriant.

— Tu peux un peu me parler de tout ça ? lui demandé-je doucement, assoiffée de compréhension.

Elle acquiesce avec un faible sourire avant de se mettre à parler. Le sourire sur son visage s'évanouit pour laisser la place à une expression neutre, presque douloureuse. Elle arbore la même expression qu'Harry lorsqu'il parle de son passé.

— Il y a eu cet incendie quand nous étions plus jeunes, commence-t-elle. Nos parents sont morts sur le coup, brûlés. J'ai fini dans un sale état. Harry devait avoir une dizaine d'années et moi quatre. Après ma guérison, on a été conduits dans un orphelinat. Il a dû poursuivre ses études en alternant hôpital et cours et moi j'ai dû faire une remise à niveau. Nous n'avions évidemment pas les moyens pour une bonne opération et Harry n'était qu'un gamin qui ne pouvait pas travailler. Les assurances de nos parents et l'aide gouvernementale ont heureusement pu faire de petites choses. Harry est allé dans une école publique. Le jour d'avant, on avait une famille, même si nous n'étions pas des plus aisés. Et le lendemain, plus de père, ni de mère ni personne. Tout le monde nous a abandonnés, comme si on nous avait effacés de leurs mémoires, même les personnes qui étaient proches de nous.

Elle se tait pendant un moment pour tenter d'encaisser à nouveau chacun de ces moments. Je l'observe silencieusement avec une grande envie de la prendre dans mes bras et de lui dire que tout ira bien. 

Voir ses parents brûler à quatre ans puis devoir faire face à une réalité aussi brusque, je la respecte déjà pour ça.

— Personne ne voulait de moi. Harry ne voulait pas me laisser tomber. Il était assez nerveux et tout. On s'est enfouis un soir avec Harry et Abdou qu'on avait rencontré dans l'orphelinat. Il était arrivé quelque temps avant nous, mais ses parents l'ont abandonné à cause des charges. On a dormi dans les rues pendant plusieurs nuits puis les garçons ont trouvé du travail. Moi, je me contentais de nettoyer les chaussures des passants. Harry s'est battu pour moi et c'est pour ça que je fais ça pour lui, rester ici.

Elle regarde la pièce, comme si elle la découvrait à nouveau.

— Il a peur de dehors. Honnêtement, j'en avais aussi peur au départ, on n'avait pas les moyens pour une chirurgie plastique digne de ce nom et encore aujourd'hui, Harry a peur que ça tourne mal. Je ferai probablement toute ma fac entre ses quatre murs, des cours en ligne. Ah oui j'ai reçu mon diplôme de secondaire cette année.

Elle sourit à pointant le diplôme poser sur son mur.

— Mais je me fais de l'argent de poche pour vider les boutiques en ligne en écrivant pour des structures, depuis ma chambre. Ne le prends pas mal qu'il ne t'ait pas parlé de moi. Il a juste peur et il n'a jamais réellement su gérer ses émotions.

Je reste silencieuse tout le long de son monologue, essayant d'encaisser toutes ces informations. C'est affreux. Je n'aurai jamais pensé qu'Harry ait vécu tout ça.

— Il ne laisse même plus Abdou entrer, il ne veut plus que qui que ce soit me voie. Mais en vrai je vois toujours Abdou puisqu'il est parfois dans les parages quand je vais courir, mais ne le dis pas à Harry.

Elle a l'air un peu amusée par la situation, ce qui me réchauffe le cœur. Qu'elle aille aussi bien de l'avant. Elle est si forte. Ma mère n'est pas morte dans de pareilles conditions, j'ai toujours mon père et mon frère, et pourtant je n'arrive pas à être aussi forte qu'elle.

— Comment cela se fait-il que tu me connaisses ? lui demandé-je soudainement.

— J'ai un peu tiré les vers du nez à mon frère, glousse-t-elle.

— Tu... tu n'étouffes pas ici ? lui demandé-je en regardant une dernière fois la pièce.

— Oui, soupire-t-elle. Mais Harry ne veut pas et voilà.

Elle lance un regard rapide à la porte puis me dit tout bas :

— Tu pourrais lui toucher quelques mots pour moi.

— Oui, oui sans problème. Et si tu veux, on pourra faire plein de choses ensemble. Dans le style trucs de filles et tout.

Je me sens de plus en plus à l'aise avec elle. Elle est un petit soleil. Elle sourit si franchement malgré sa situation que j'en ai chaud au cœur.

— Et il faudrait que tu me donnes deux trois cours d'écriture parce que ton bouquin, il déchire, me lance-t-elle en se levant.

— Merci, mais ce n'est rien de si impressionnant.

— Ne fais pas ta modeste Mich. Tiens, j'avais acheté ceci une fois.

Elle me montre une statuette très bizarre avec des ailes, mais qui ressemble à un chien-chat.

— C'est ma veilleuse portable, m'annonce-t-elle fièrement.

Je ne peux empêcher le rire qui s'échappe de ma gorge.

— Je crois avoir trouvé mon alter ego, rétorqué-je avant que nous n'éclations à nouveau de rire.

Elle me montre des déguisements qu'elle porte lorsqu'elle s'ennuie pour poser pour Harry. On s'amuse à les enfiler. La porte s'ouvre soudainement sur Harry qui nous dévisage dans nos costumes.

— Oh mon dieu, deux Michelle à la fois, geint-il, mais reste amusé.

— Dis, hum, Harry, Aliyah pourrait venir avec nous non ? tenté-je.

Nous nous plaçons bras dessus bras dessous pour supplier Harry de laisser Aliyah nous accompagner. Son expression reste indéchiffrable. Va-t-il enfin céder ? 

****
Alors, qui se rappelle de Louis? Et de cette fois où Michelle a cru voir quelqu'un dans le parc?

La suite à 15 kiffs


Merci d'avoir lu.


Lalie

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