Déchirure -Relation prof-élèv...

By Perso197

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Ils ne comprennent pas. Ils trouvent cela anormal. Ils me jugent. Je m’en fiche. Ils ne savent pas ce que c’e... More

Prologue
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25

Chapitre 15

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By Perso197

«  Maintenant. Je suis devant chez toi. »

Il… Quoi ? Devant chez moi ? De stupeur, je lâche mon portable qui retombe avec fracas sur le parquet. Le voyant tomber comme au ralenti, je serre les dents mais suis incapable de le rattraper. Heureusement, il n’éclate pas en petit morceaux et paraît encore plutôt vivant quand je le ramasse.

-    C’était quoi, ça ?  crie ma mère depuis la cuisine.

-    Rien, rien ! Euh… Maman, euh… Céline a oublié de me rendre mon livre d’anglais, elle arrive pour me le rendre. Je sors pour la retrouver à l’arrêt de bus et je reviens tout de suite après, d’accord ?

-    D’accord ! Dis-lui de rester manger si elle veut !

Je déteste vraiment, mais vraiment, mentir à ma mère. Elle me fait confiance et je la trahis ainsi. Mais je n’ai pas le choix, je ne peux pas prendre le risque qu’elle voit M. Stevan… Je prends mon portable qui ne semble avoir aucune séquelle de  sa chute et tape fébrilement un SMS à mon professeur.

«  Pas devant chez moi. Allez à la rue suivante, nous nous retrouvons là-bas dans une minute. J’arrive. »

Sans prendre le temps de vérifier qu’il me répond, je descends les escaliers à toute vitesse et sort, voyant la voiture de M. Stevan qui s’éloigne dans le virage menant à la rue voisine. Aussitôt qu’elle a disparu, je me mets à courir en le maudissant intérieurement. C’est lui qui voulait se cacher, et il vient tranquillement chez moi alors que ma mère est là… Sans me laisser le choix en plus. Qu’aurait-il fait si je ne lui avais pas envoyé de message disant que je voulais lui parler ? Aurait-il sonné chez moi ? Serait-il tombé sur ma mère lui demandant ce qu’il voulait ?

J’essaye d’arrêter d’y penser. Je commence à être légèrement essoufflée, mais ma course me fait du bien. Je cours après une voiture, un bruit de moteur, un amour perdu. Je cours pour tous ces moments où j’ai pleuré, où j’ai ri, pour tout ce que j’ai fait pour lui. Je cours pour oublier, pour vivre, pour exister. Je cours. Et ça me fait du bien.

En arrivant près du virage, j’arrête de courir, brusquement terrifiée. La panique qu’il croise ma mère avait fait disparaître toute peur de lui parler, jusqu’à cet instant précis. Et maintenant qu’il faut aller l’affronter, je m’en sens incapable. Incapable de croiser ses merveilleux yeux bleus, de revoir cette bouche qui m’a offert tant de sourires lumineux, de faire face à celui qui m’a brisé le cœur.

Mais pourtant, il le faut.

Un pas. Je commence à apercevoir la rue, calme et silencieuse. Le bruit du moteur s’est arrêté.   

Deux pas. L’aile de sa voiture arrive dans mon champ de vision.     Souvenirs des moments où il m’a ramenée. Souvenirs étouffants.   

Trois pas. Je m’arrête.

En face de moi, une silhouette. Que je reconnaîtrai entre mille.

Mon amour. Mon bourreau.

-    Je suis là.

Ma voix brise le silence et l’assurance dont je fais preuve me surprend moi-même. M. Stevan se retourne et fixe sur moi ses yeux bleus-gris. Son regard semble lire en moi comme un livre ouvert, mais cette fois je ne baisse pas les yeux. Son visage est pâle, cerné, comme s’il n’avait pas dormi cette nuit. Il ne m’avait pas parût aussi abattu ce matin.

-    Joy… murmure-t-il d’une voix étranglée.

Je frissonne. J’avais oublié l’effet que ses paroles avaient sur moi, même lorsqu’il a cette voix rauque qui le rend encore plus sublime. Mais je ne tomberai plus dans ce piège.

-    Je suis content que tu sois venue, chuchote-t-il.

-    Je ne suis pas là pour toi. Je suis là parce que j’en ai assez que tu viennes me détruire.

Il fronce les sourcils et s’approche d’un pas, mais je recule.

-    Qu’est-ce qui te prend, Nathan… ? Pourquoi venir chez moi maintenant, alors que ma mère est là et qu’on aurait pu se faire surprendre ?

-    Je préfère quand tu me tutoies, me dit-il avec un sourire terne sans répondre à ma question.

-    Tu…

-    Pour ma défense, je ne savais pas que ta mère était là. Et… Je suis là car je veux qu’on s’explique. Je ne peux pas rester sur les paroles d’hier car… Je tiens à toi. Je t’aime.

Il y a une semaine, j’aurais été ravie d’entendre ces mots. Aujourd’hui, j’ai simplement envie de venir le frapper de mes poings serrés pour qu’il se taise. Mais je me contente d’hausser les épaules.

-    Je n’ai pas le temps de t’écouter, dis-je sans sourire. Je ne suis venue que parce que je voulais que tu arrêtes tes messages, tes paroles, tes mensonges. Je te l’ai dit hier, c’est fini entre nous. Et il n’y a rien à redire à ça.

Il me regarde, soupire, et reprend la parole :

-    Moi, j’ai quelque chose à dire. Je ne suis plus amoureux d’Isabelle. Je t’aime toi. Je t’ai toujours aimé. As-tu seulement pensé à ce que je risquais en sortant avec toi ?

-    Je…

-    Je ne t’ai jamais demandé si tu m’aimais réellement, car je le sentais. Et ça m’a suffi pour tout plaquer, pour m’enfoncer dans une histoire qui allait nous faire souffrir tous les deux. Je risque mon boulot pour toi mais je m’en fiche, car je t’aime. J’aurais fait n’importe quoi pour toi… J’aurais été en prison si on m’avait découvert car que tu n’es pas encore majeure, mais ce n’était pas important tant qu’on pouvait être ensemble…

La tension qui règne entre nous m’empêche de prendre la parole, de l’arrêter avant qu’il dise quelque chose qui me fera revenir sur ma décision. Et c’est mon silence qui le convainc de reprendre la parole.

-    Toi, tu as pu en parler à tes amis qui te soutiennent, dit-il d’une voix sourde. Moi je ne le peux pas. Je passerais pour un gros pédophile. Je dois vivre avec un masque pour toi, le masque du professeur qui ne fait que son travail. Alors après tout ça, tu crois vraiment que je ne fais que jouer avec toi ?

Je suis incapable de dire quoi que ce soit. Il baisse les yeux et je le vois trembler de colère.

-    Nathan, parviens-je finalement à murmurer, je…

-    Je me cache pour te protéger, tu le comprends ça ? C’est pour ça que tout à l’heure, lorsque tu es venue me voir pour que l’on parle, j’ai dû te renvoyer ! Je voyais le regard des autres, j’entendais ces stupides rumeurs, et la seule phrase qui tournait en boucle dans ma tête c’était « Il ne faut pas qu’elle souffre »…

Il s’arrête à nouveau et cette fois, il lève bravement les yeux vers moi. Mais avant même qu’il ne puisse reprendre la parole, je dis à voix haute ce qui me hante depuis la veille.

-    Mais j’ai vu comment tu regardais Isabelle. Tu crois m’aimer, mais elle te troublait. J’ai vu l’amour qui se lisait dans tes yeux quand tu as posé ton regard sur elle.

Il a une espèce de rire sarcastique qui me fait frissonner.

-    Tu veux savoir pourquoi c’est vers elle que je suis allé, plutôt que de te prendre dans mes bras ? T’es vraiment sûre de vouloir le savoir ?

Je reste silencieuse, les larmes me montant aux yeux. Je ne l’ai jamais vu ainsi. Il expire de rage.

-    J’avais peur pour toi ! crie-t-il soudain.

-    Nathan…

Sa voix se radoucit tandis qu’il me regarde, et pour la première fois je vois dans ses yeux toute la souffrance qui l’habite.

-    J’avais peur, Joy. Je craignais qu’elle ne nous trahisse, qu’elle aille voir le directeur pour lui dire qu’elle m’avait vu avec toi. Elle a deviné si vite… Et j’ai vu dans ses yeux son envie de vengeance. Evidemment que ça m’a troublé… Ce n’était pas de l’amour pour elle que tu as pu voir, mais pour toi… Je voulais te protéger, la supplier de ne rien faire, de ne rien dire.

Ses aveux me coupent la respiration et je le vois lutter pour ne pas s’énerver.

-    Et tu m’as quitté pour ça… Parce qu’à chaque fois, je ne voulais que te protéger. Tu me hais parce que je t’aime. Et ça, ce n’est pas juste…

-    Je…

-    Ne parle pas.

Sa voix est tranchante, agressive, et je sens qu’il est prêt à transférer toute sa colère sur moi. Je me sens soudain incroyablement égoïste. Je n’ai jamais pensé à ce que lui pouvait ressentir. Je n’ai jamais réfléchi à ce qu’il risquait pour moi. Je me suis contentée de vivre dans une illusion et lui, pour ne pas me blesser, ne m’a jamais expliqué à quel point il souffrait pour moi.

Bien sûr que je savais qu’il risquait son emploi, mais je préférais ne penser qu’à moi pour arrêter d’avoir mal loin de lui. Mais je n’ai jamais réfléchi au reste : ses amis à qui il devait mentir, le directeur qui lui faisait confiance, la honte qu’il devait éprouver à sortir avec une fille ayant presque une quinzaine d’années de moins, même pas encore majeure. Il risquait la prison pour moi, il était prêt à tout perdre rien que pour m’avoir, et, pas une seule fois je n’avais pensé à ce qui arriverait si on était découverts.

-    Tu avais raison, me dit-il de ce même ton haineux. Nous sommes trop différents. Ca aurait jamais pu marcher entre nous. Mais je voulais que tu saches que… Je t’ai vraiment aimée, Joy. Je me suis pas foutu de ta gueule. Toi par contre, tu n’as pensé qu’à toi. Je te pensais assez mature pour notre relation, je me suis trompé. T’es comme les autres, finalement. Tu fantasmes sur ton prof, tu crois l’aimer, mais la vérité c’est que tu veux juste te sentir un peu plus adulte. Je ne t’en blâme pas, je me blâme moi d’avoir laissé tout ça se produire.

-    Nathan, je suis…

-    Désolée ? Pas autant que moi. Je voulais te parler non pas pour te dire de rester avec moi, mais je t’aime et je voulais que tu le saches. Maintenant, c’est dit.

Il se détourne sans un regard et se prépare à remonter dans sa voiture, avant que je ne l’appelle :

-    Nathan !

-    Rentre chez toi, Joy. Tu semblais si pressée en arrivant.

-    J’ai été conne… Pars pas, s’il te plaît.

Il se tourne vers moi et me jauge du regard, semblant se demander si je vaux la peine qu’il reste. Profitant de sa seconde d’hésitation, je fais un pas vers lui :

-    Je regrette Nat’… J’étais tellement focalisée sur moi-même que j’ai pas pensé à tout ce qu’impliquait notre histoire… Mais t’as pas le droit de dire ça, t’as pas le droit de dire que je suis comme les autres quand je suis avec toi. Je risque aussi beaucoup, mais je t’aime et je n’ai peur de rien tant que t’es là. C’est pour ça que je t’en voulais pour Isabelle et pour m’avoir rejeté ce matin, j’avais peur que tu me laisses.

Ses magnifiques yeux se ferment l’espace d’une seconde, comme s’il doutait de ce que j’ai dit. Et alors que je n’attends plus de réponse, il finit par prendre la parole, toujours de ce ton dur qui m’effraye :

-    Qu’est-ce que tu veux que je te dise ? Que je te pardonne ? Il n’y a rien à pardonner, ce qui est fait est fait. Tu vois bien que c’est trop compliqué entre nous, on passe notre temps à s’engueuler, comme si on n’avait pas assez de problèmes comme ça…

Je soupire et m’approche à nouveau de lui. Cette fois, il n’y a plus qu’une cinquantaine de centimètres en nous.

-    On est comme ça, Nathan. On le sera toujours. C’est ça qui nous rend vivants, c’est d’être capable de s’affronter. On pourrait être un couple normal, sans problèmes. Mais on a plongé dans la difficulté dès qu’on s’est mis ensemble. On savait que ce serait dur, mais ça ne nous a pas fait peur parce que c’est ça qu’on aime… Et c’est pour ça que peu importe ce qui arrive, on revient toujours l’un vers l’autre. C’est ça qu’on aime, et on s’aime aussi.

Nathan baisse les yeux sur moi. Un pli barre son front soucieux mais je sens sa rage se calmer peu à peu. Je tente de lui prendre la main mais il la retire aussitôt. Voyant l’air blessé sur mon visage, il se mord la lèvre inférieure et soupire en reculant d’un pas. J’attends désespérément un mot, une réponse, mais il a l’air tellement hésitant que je suis obligée de le supplier.

-    S’il te plaît…

Une nouvelle fois, il cligne des yeux.

-    Je n’ai pas envie de te mentir, Joy, finit-il par souffler. Je n’ai pas envie de te dire qu’on oublie tout ça et qu’on reprend là où on en était. Qu’on recommence au début, même. Parce que c’est impossible. On a vu après quelques jours que ça nous faisait autant de mal l’un à l’autre d’être ensemble. Alors on va devoir en rester là. Tu mérites mieux, il faut que tu choisisses la facilité et non pas la souffrance.

-    Nathan…

-    Je ne vais pas te dire que je ne t’aime pas, car tu le sais mieux que personne, je suis fou amoureux de toi. Et c’est pour ça que je dois te laisser partir. Parce que…

Je m’approche de lui avant qu’il n’ait pu dire autre chose et plaque ma bouche sur la sienne. Aussitôt, une vague de chaleur m’envahit et j’ai la sensation d’être là où je le devrais. Ma main vient fourrager dans ses cheveux tandis que l’autre se colle derrière sa nuque. Après quelques instants d’hésitation, je le sens répondre à mon baiser, sa langue venant jouer avec la mienne. Il place sa main au creux de mon dos, venant coller totalement mon corps au sien.

Nous partageons ainsi ce baiser passionné durant un moment qui me paraît trop court, avant de nous séparer en même temps, essoufflés.

-    Je… Tu… C’était quoi ça ? finit par demander Nathan.

J’ouvre la bouche pour lui répondre, puis la referme. La vérité, c’est que je ne sais pas quoi lui dire. J’aurais aimé qu’il ne pose pas de question sur ce qui venait de se passer, car je n’ai aucune véritable réponse à lui offrir. Mais son air perdu m’oblige toutefois à tenter de formuler une réponse.

-    Je… J’avais pas envie que tu partes. Pas comme ça, finis-je par lâcher.

-    Joy… Est-ce que tu as écouté ce que je viens de te dire ?

Je plante mon regard dans le sien.

-    Et toi, est-ce que tu m’as écoutée ? Je me fiche de la difficulté, je me fiche de tout ça. Tu t’es battu pour moi chaque fois que ça n’allait pas, et aujourd’hui tu veux abandonner… Pourquoi ? Pourquoi si près du but ?

-    C’est mieux pour tout le monde…

-    Pour toi peut-être ! Et encore, vu la façon dont on s’est embrassés, j’ai comme un doute. Je t’aime, tu m’aimes, on se fiche du reste. Tu t’es expliqué, je me suis expliquée, on devrait pouvoir passer à autre chose. Et quelque part, tu le veux aussi. Sinon, pourquoi aurais-tu répondu à mon baiser ?

Il semble hésiter et me jette un long regard. Au bout de quelques secondes de lutte contre lui-même, il finit toutefois par murmurer une réponse qui me glace.

-    Parce que c’était la dernière fois que je t’embrassais et… Je voulais en profiter. Je voulais une dernière fois. Je voulais sentir ton cœur qui battait, reflet du mien, tes lèvres si douces, ta chaleur qui me rassure. Je voulais, le temps d’un dernier baiser, me persuader qu’on était toujours ensemble. Comme si on avait pas tout foutu en l’air.

J’avale ma salive et sens les larmes me monter aux yeux. Il doit le voir car il s’approche de moi et me caresse la joue.

-    Je suis désolé. Je ne t’oublierai pas, même quand on devra faire semblant de ne rien être l’un pour l’autre durant les cours. Je ne t’oublierai jamais.

Il baisse légèrement la tête, m’embrasse sur la joue et murmure à mon oreille :

-    Au revoir, Joy.

Avant que je ne puisse faire un geste, il commence à s’éloigner et ouvre la portière de sa voiture. Il s’installe, et je vois sa main se poser sur la portière pour la fermer. Aussitôt, un cri étranglé sort de ma gorge :

-    Nathan !

Son geste semble s’arrêter, comme s’il était en train d’écouter ce que je voulais lui dire.

-    Tu t’es suffisamment battu pour moi, dis-je dans un souffle. Et je ne nous laisserai pas tout détruire comme ça. Maintenant, c’est à moi de me battre pour toi. Je t’aime.

Il y a un silence, avant que la portière ne claque et que la voiture démarre. Alors qu’elle s’éloigne au loin, je parviens à sourire malgré les larmes qui roulent sur mes joues.

Je sais qu’il m’a entendue.

Je ne le laisserai pas partir ainsi.

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