Même si j'étais consciente que Cleonie me détestait, avoir été trahie par la sœur de mon âme-sœur me brisait le cœur. Jamais je n'aurais pensé qu'elle me haïsse au point de me vendre à l'ennemi.
Caleb se plaça devant moi, horrifié, malgré l'impuissance qu'il représentait face à cette situation.
Quatre personnes que je ne connaissais pas apparurent devant nous, impassibles. Caleb se jeta sur le premier et lui asséna de violents coups mais fut arrêter par deux des autres qui le frappèrent à leur tour.
- Arrêtez ! Je vous en prie ! Criai-je, en larmes.
Je ne supporterais pas l'idée qu'il se fasse tuer par ma faute. L'homme à la carrure imposante qui n'avait encore ni rien fait, ni rien dit, stoppa ses camarades bien qu'ils maintenaient toujours mon ami au sol.
- Quelqu'un te cherche et aimerait te revoir, Aliyah. Viens avec nous et nous laisserons la vie à ton ami.
Sa façon de parler, son calme, sa force... Il ne pouvait pas être humain. Tout me portait à croire qu'il était un loup-garou, mais je me doutais de l'identité de celui qui me cherchait. Elliott Hamilton, mon ex-mari. Lui qui prétendait être dégoûté par les créatures surnaturelles, avait osé faire équipe avec eux juste pour m'attraper !
- J'accepte de vous suivre si aucun membre de mon peuple n'est blessé.
- Ton peuple ?
L'étonnement de celui qui me faisait face, ce grand blond à la chevelure bouclée et aux yeux verrons, m'inquiéta.
- Tu es devenue l'Alpha Luna des Nightshadows ?
Quelque chose n'allait pas, pourquoi semblait-il aussi contrarié par cette nouvelle ?
Alors qu'il était trop occupé à réfléchir pour faire attention à moi, je plongeai sur le sol pour venir en aide à mon ami, sacrément amoché. Je pris son visage entre mes mains et il parvint à me regarder difficilement.
- Sauve-toi, chuchota-t-il.
- Il n'en est pas question.
Le blond m'attrapa violemment le bras et me releva alors que je fis mon possible pour me débattre, parvenant à lui asséner un coup dans la mâchoire qui l'obligea à me lâcher.
Encore une fois, l'adrénaline prit possession de mon corps et je saisis le poignard qu'il avait accroché à la ceinture de son pantalon. Je reculai de deux pas et le pointai vers lui, montrant que je n'hésiterais pas à lui asséner un nouveau coup.
Alors qu'il s'apprêtait à avancer, l'un de ses camarades le stoppa en posant une main sur son épaule.
- Il la veut vivante Ates, tu le sais. Elle ne doit pas être blessée.
Le dénommé Ates leva les yeux au ciel et me destina un sourire hypocrite en me tendant sa main.
- Allez chérie, donne-moi ce couteau.
Mon côté orgueilleux n'apprécia pas du tout ce ton hautain qu'il prit avec moi. Je n'étais pas n'importe qui, j'étais Aliyah, une Alpha prête à tout pour sauver sa peau et celle de sa meute.
Je compris rapidement que ma vie comptait pour Elliott, qu'il voulait tout simplement me torturer avant de me tuer. Ils ne pouvaient donc pas me faire de mal, mais moi je le pouvais.
Lorsque Ates s'approcha de moi, Caleb, qui s'était relevé, se mit à se débattre brusquement, toujours maintenu par ses bourreaux.
- L'approche pas !
Bien sûr, son ordre ne servit à rien car le blond était déjà à moins d'un mètre de moi.
- Jolis yeux, commenta-t-il.
Étant donné mon état imprévisible, je devinai facilement qu'il parlait de mes pupilles rouges. Je ne me laissai pas surprendre et lui plantai la lame dans l'épaule, lui arrachant un cri de douleur.
Malheureusement, il reprit l'arme avant que je ne puisse la récupérer.
- Sale garce ! Cracha-t-il en se tordant de douleur.
Il m'attrapa, me retourna et appuya brusquement mon dos contre son torse en me maintenant fermement.
Il me sortit du chalet sans grande difficulté bien que je faisais tout pour me dépêtrer de son emprise.
Une fois à l'extérieur, je repérai la faille par laquelle ils avaient pu entrer. Une porte secrète, celle de secours, avait été ouverte de l'intérieur, certainement par cette traîtresse de Cleonie.
Je tombai nez à nez avec cette dernière, toujours prisonnière de mon ravisseur.
- Comment as-tu pu nous faire ça ? Lui demandai-je, une larme coulant déjà sur ma joue.
- J'espère que tu vas crever, se contenta-t-elle de me balancer au visage avant de s'en aller sans se retourner.
Je la regardai partir, une profonde haine ancrée en moi. Je n'arrivais pas à croire que j'avais été trahie par la sœur de celui que j'aimais. Elle venait de signer mon arrêt de mort sans le moindre regret, comment pouvait-elle faire une chose pareille à Milan ?
- Ton frère ne te pardonnera jamais ! Lui hurlai-je.
Elle ne me porta pas la moindre attention et le blond m'emmena à l'extérieur du camp où d'autres hommes nous attendait. Avec tant de personnes autour de nous, Caleb et moi étions fichus.
Alors que Ates m'attacha à l'aide de menottes, je le suppliai du regard.
- Laisse mon ami s'en aller, je t'en prie ! Il n'a rien à faire dans cette histoire...
Mon ravisseur s'esclaffa et me poussa dans le coffre d'une camionnette accompagné d'un rire diabolique.
- J'aurais pu accepter ta requête chérie, si tu ne m'avais pas planté.
Caleb, les mains liées également, fut balancé dans le coffre à mes côtés tel une vulgaire valise. Ils refermèrent les portes et démarrèrent le véhicule. Je compris que c'était fini, que je ne reverrais certainement jamais Milan...
Mon ami se releva et s'installa assit contre la parois, face à moi. Nous nous regardâmes quelques instants et je pus lire dans ses yeux la haine qu'il éprouvait.
- Je suis désolée, tout est ma faute...
- Tu n'y es pour rien, Aliyah. Je t'interdis de penser le contraire.
Caleb n'avait peut-être pas compris qu'à l'instant où Elliott nous aurait entre ses mains, ils nous torturerait. Je ne pus avoir le courage de lui avouer et préférai me taire, laissant ma tête tomber dans mes bras.
Soudain, une idée traversa mon esprit. J'avais désormais ce lien de télépathie avec mon âme-sieur qui pouvait me permettre de communiquer avec lui, même à distance. J'ignorais comment cela fonctionnait mais tentai désespérément d'entendre sa voix ou être sure qu'il puisse entendre la mienne.
- C'est inutile, m'interrompit Caleb. J'ai essayé aussi mais notre lien est brouillé par un sort. Ces enfoirés doivent travailler avec un puissant sorcier.
Mes pensées se dirigèrent vers Galaad partit la veille aider l'un de ses amis en conflit avec des fées. Si seulement il était resté un peu plus longtemps, il aurait certainement pu nous aider.
Je jurai en réalisant que Milan pourrait croire que son frère de sang et son âme-sœur avaient été tués lors de cette attaque inattendue. Comment réagirait-il s'il en venait à cette conclusion ? Mon cœur se brisa à cette idée obscure.
- On s'en sortira, princesse. On s'en sort toujours.
Les paroles de Caleb m'apaisèrent légèrement mais bien trop peu pour me permettre d'oublier la situation dans laquelle nous nous trouvions.
***
J'avais du mal à imaginer à quel point le camp s'était déjà éloigné... Milan devait être effondré à cet instant même, imaginant le pire. Cette sombre pensée me fit tressaillir.
Ce qui m'effrayait le plus était qu'il parvienne tôt ou tard à me localiser. Cela pourrait nous sauver seulement, c'était un énorme risque, et cette situation puait le piège à plein nez. Et si c'était le but ? Qu'il me retrouve afin que l'un de ses nombreux ennemis puisse l'assassiner?
- Tu penses trop.
Je levai les yeux au ciel à l'entente de la réflexion de Caleb. Ce dernier était solidement attaché à l'aide de menottes qui me semblaient impossible à briser. Pourtant, sa force naturelle aurait dû lui venir en aide...
- Elles sont en argent, me dit-il avec difficulté.
Je compris rapidement qu'il souffrait le martyr. Je me détestais de ne rien pouvoir faire. Ma transformation était si récente que j'ignorais comment je pourrais parvenir à nous défendre.
Instinctivement, je me concentrai sur ma force intérieur, suppliant ma louve de m'aider. Les miennes ne devaient pas être en argent car que je ne ressentais aucune douleur.
Sans vraiment savoir comment, je réussi à briser la chaîne qui unissait les deux bracelets, libérant mes mains. Caleb écarquilla les yeux, étonné par cet élan de force qui m'avait envahi.
Sans réfléchir, je me précipitai jusqu'à lui pour l'aider à se défaire des siennes. À l'instant où je les touchai, une puissante brûlure m'arracha un gémissement de douleur.
- Arrête ça ! Tu ne pourras pas me les enlever sans souffrir.
Je devais trouver une solution, n'importe laquelle. Caleb vivait l'immense douleur que je venais de ressentir un quart de seconde depuis un trop long moment. Le voir résister à la tentation d'hurler et de se plier en deux me prouva à nouveau le courage de cet homme.
Alors que je m'apprêtais à retenter le coup avec toute la volonté que je pouvais trouver en moi, je fus projetée de part et d'autre du coffre, me cognant de partout, jusqu'à que le véhicule s'arrête. Caleb tomba près de moi, le visage crispé par la douleur.
Nous venions d'avoir un accident.
Le corps endolori, la tête vacillante, je puisai dans les dernières forces que je pouvais réunir à cet instant et ouvris la porte en assénant plusieurs coups de pied à cette dernière qui finit par céder.
J'entendis des bruits de bagarres, des cris, des coups, et compris qu'il fallait partir maintenant ou jamais.
Caleb avait dut se prendre un sacré coup sur la tête car il était inerte. Ce n'était clairement pas le moment !
Alors que j'essayais désespérément de le réveiller, une main se plaqua sur ma bouche et me tira en arrière malgré mes grands gestes pour me sortir de là.
Celui qui m'emmenait avec lui nous fit reculer de plusieurs mètres jusqu'à nous arrêter dans la forêt qui longeait la petite route sur laquelle était stoppée la camionnette.
- Surtout, ne crie pas où on est morts tous les deux.
Cette voix... Ce n'était pas la première fois que je l'entendais. Mon cerveau ne mit que quelques secondes à la reconnaître et quand la main se décolla de ma bouche et que je pus enfin bouger librement, je me retournai brusquement en reconnaissant instantanément l'homme face à moi.
- Damian ? Chuchotai-je.
Il s'agissait bien de lui. Depuis qu'il m'avait sauvée de mon ex-mari, je n'aurais jamais pensé le revoir. Encore moins lors d'une seconde tentative d'Elliott pour me kidnapper.
J'oubliai vite ces retrouvailles inattendues en apercevant des vampires piller la camionnette où nous nous trouvions et maintenir fermement mes ravisseurs. Tout était une question de karma, visiblement. Seulement, Caleb était encore dans le coffre et l'un des ces maudits suceurs de sang venait de pénétrer à l'intérieur.
- Caleb, soufflai-je, je dois l'aider !
Alors que je m'apprêtais à bouger, Damian me colla contre lui pour m'en empêcher.
- Ils sont là pour toi ! S'ils ne te trouvent pas, ils les laisseront partir. Ils ne risqueront pas de déclarer la guerre aux loups-garous sans raison. Or, tu es la seule cause qui en vaut la peine pour eux.
J'avais encore du mal à réaliser l'importance que je représentais aux yeux des créatures surnaturelles. Admettre que tous voulaient ma mort pour rompre une satanée malédiction me rendait dingue.
- Ces gars nous ont enlevés Caleb et moi, on doit le sortir de là !
- J'ai des amis tout autour, ils le libèreront. En attendant, suis-moi.
Étrangement, j'avais l'impression de pouvoir compter sur Damian. De toute façon, je n'avais pas vraiment le choix, soit je lui faisais confiance, soit je me retrouvais livrée à moi-même, dans l'incapacité de sauver mon ami.
Malgré la flagrante animosité qui avait émanée entre Milan et Damian quelques temps auparavant, ce dernier allait me ramener à mon âme-sœur, me prouvant qu'il était une bonne personne.
Nous courûmes longuement dans la forêt et je dus m'arrêter quelques minutes tant mon corps commençait à ressentir la fatigue. Cet accident m'avait grandement affaiblie.
Je pouvais ressentir à quel point Damian était contrarié, comme si quelque chose le mettait en colère mais je ne parvenais pas à savoir quoi. Je préférai ignorer cette émotion, trop pressée de retrouver Milan.
Alors que nous arrivions face à un immense camp, je compris que malgré la ressemblance, il ne s'agissait pas du tout de celui des Nightshadows.
- Où on est ? Demandai-je, méfiante.
Damian se retourna vers moi et je pus lire la satisfaction sur son visage.
- Bienvenu dans ton nouveau chez toi.