P.S.: Encore une fois c'est Atalune, bref, voici le nouveau format, aussi tenu par un excellent auteur. Voilà, bien venu dans "La Critique du Double V", un format basé sur la critique d'histoires plus ou moins bonnes, afin de vous faire découvrir des textes et de peut être vous apprendre quelques petites choses. Eh oui, maintenant on se prend pour des professeurs. Bref, vous retrouverez toutes les œuvres critiquées dans une liste de lecture sur mon profil. Maintenant je vous laisse avec lui, bonne lecture et joyeux Noël à tous!
ValentinVenere, 20 décembre 2017
Je précise que ce qui suit ne reflète que mon opinion personnelle, n'engage que moi, et se base le plus possible sur des arguments factuels. Les éventuels débats dans les commentaires devront se faire dans le respect et la bonne entente.
Bonjour tout le monde ! Je ne sais pas trop comment commencer ce nouveau format alors je débute comme ça, en mode youtubeur débutant. Dans ce... Cette... Je sais pas trop comment appeler ça donc on va dire critique ! Bref dans cette nouvelle chronique, j'aborderai des ouvrages sur Wattpad (et pas « fictions », n'en déplaise à certains) et formerait une sorte de critique en exposant mon avis, subjectif bien entendu, mais en essayant d'argumenter au maximum, parfois en agrémentant le texte d'une interview de l'auteur. D'ailleurs, cela m'amène au sujet de ce premier segment : "Chevalier Larouille 1: Facies Mortis", écrit par m_okubo. Tout d'abord, résumons l'histoire.
Synopsis :
Eté 1129. Un mystérieux cavalier arpente la Provence, laissant un chapelet de cadavres horriblement mutilés dans ses traces. Quelques paysans l'ont entr'aperçu. Ils parlent d'un immense destrier noir, d'une silhouette lourdement cuirassée, et d'une aura de terreur suffocante ; les rares ayant vu son visage sont désormais trop déments pour pouvoir en témoigner.
Il n'est pas seul à parcourir les routes du comté. Un vieil homme sans nom va de place en place, ne s'arrêtant jamais, fuyant toute gloire et toute amitié. Sa jument grisâtre et fatiguée transporte un arsenal suffisant pour équiper une cohorte, et sa cotte de mailles rouillée dissimule peut-être le chevalier le plus dangereux des royaumes latins.
(Extrait du synopsis original)
Vous l'aurez compris, pas besoin d'être Sherlock Holmes pour deviner que l'ambiance sera sombre et surtout bien badass. Mais on y reviendra, promis !
Bref, revenons à nos moutons (ou plutôt à nos chevaux dans le cas présent –j'espère que vous aimez l'humour un peu pété parce que c'est ma spécialité-). Nous sommes prévenus dès le départ que le roman se déroule dans un genre de Moyen-Age alternatif, dans lequel les personnages parlent bien souvent comme vous et moi, le tout saupoudré d'une atmosphère toute droite sortie d'un western spaghetti des années 60. On peut retrouver cette démarche consistant à mélanger deux genres éloignés dans des animes tels que Cowboy Bebop et Samurai Champloo (tous deux réalisés par le génial Shinichiro Watanabe). Ceci étant dit, nous pouvons rentrer dans le vif du sujet, c'est-à-dire...
La critique :
Bon, je vais commencer par vous spoiler mon avis final (oui je suis un petit margoulin) en vous disant que, à mon humble avis, Chevalier Larouille (celui-ci en tout cas, je n'ai malheureusement pas finit le tome 2) est un des meilleurs livres disponibles sur Wattpad. Et je ne vais bien entendu pas vous laisser là, les bras ballant, sans vous dire pourquoi, ça serait assez criminel de ma part et surtout absolument pas professionnel ! Tout d'abord, parlons des points positifs.
Le principal attrait (et principal défaut, mais nous y reviendrons plus tard) de ce bouquin est son ambiance tout simplement magique et hyper prenante du début à la fin. Je précise que les lignes précédentes étaient totalement subjectives. Ceci étant mis sur la table, il faut tout de même avouer que l'auteur possède un réel talent pour transcrire en mots ce qu'il a dans la tête : chaque situation est méticuleusement décrite, sans que cela ne devienne jamais redondant ou trop lourd, on sent l'ambiance crade, poussiéreuse et pesante, les regards chargés de tension qui se croisent, la boue sur les chemins, on s'imagine parfaitement Larouille et les autres personnages, sans que leurs descriptions soient trop intrusives. Bref, du grand art (ceci n'est pas une publicité, promis).
Ensuite vient la qualité d'écriture. Tout dans ce livre respire passion et maitrise : orthographe et syntaxe irréprochables, tournures de phrases agréables à lire, moments d'action, de suspense ou de tension parfaitement décrits et vivants... Vous aurez compris qu'il n'y a ici pas de place à l'amateurisme. Un travail considérable a aussi été effectué sur les personnages, tous intéressants, parfois caricaturaux mais c'est pour la bonne cause (renforcer une ambiance aux petits oignons), dotés de dialogue véritablement savoureux (la scène d'intimidation entre Larouille et le meunier par exemple). L'auteur se permet même une petite critique des croisades en intro, chose admirable : « Depuis ce jour, je ne sais toujours pas si Dieu était avec nous lors de la Croisade. Mais, de toute mon âme, j'espère que non. J'espère qu'il regardait ailleurs. J'espère qu'à ma mort, je n'aurai pas à répondre de tout ce que nous avons fait là-bas. »
Une autre grande qualité est l'intrigue, extrêmement prenante du début à la fin, ni trop simple ni trop complexe, s'articulant comme un épisode de série autour du fil conducteur (fil rouge pour les intimes) qu'est Larouille, chevalier taciturne et sacrément charismatique ! Les personnages sont tous bien écrits, comme dit plus haut, et c'est un plaisir de suivre l'intrigue inquiétante et sombre, mais comprenant tout de même son quota d'humour et de phrases dignes d'un Bruce Willis/Arnold Schwarzenegger, ce qui rend la lecture agréable et s'inscrit parfaitement dans le ton général du livre, sérieux sans être morbide ou rébarbatif.
Le dernier point positif que j'aimerai souligner est le découpage de l'histoire. En effet, c'est un sujet qui n'est pas forcement abordé sur Wattpad et j'aimerai y remédier. Wattpad n'étant pas un livre papier, il ne s'utilise malheureusement pas de la même manière : son utilisation est souvent sollicitée dans les transports en communs, pendant une courte pause. Rares sont ceux qui lisent activement sur la plate-forme comme on lit un bouquin imprimé dans son lit avant de piquer un gros roupillon. Et Okubo l'a parfaitement compris : ses chapitres ne sont ni trop long ni trop courts, bien remplis et totalement adaptés à la lecture durant de courtes périodes. Malgré cela, Chevalier Larouille n'est pas un livre court, mais pas un livre long non plus. Il est simplement découpé de telle manière à ce que le temps ne nous paraissent pas long, ce qui ramène à la relativité du temps : le temps s'écoule différemment en fonction de comment on l'occupe, c'est uniquement une histoire d'impression. En effet, si on lit un livre de trois-cent pages découpé en trois chapitres, il nous paraitra plus long que s'il était découpé en trente chapitres de dix pages chacun. Le point du découpage réussit englobe aussi celui de la mise en page des paragraphes. Ceux-ci ne paraissent, à la manière des chapitres, ni trop longs ni trop courts, d'une longueur parfaite pour ne pas s'ennuyer ou trouver la coupure trop rapide. C'est effet un écueil sur lequel beaucoup d'auteurs, sur Wattpad ou non, s'échouent (j'en fais partie et j'assume). Un bon découpage et une mise en page réussie permet de gagner en confort de lecture et donc en qualité.
Voici maintenant que nous abordons, à l'aide de notre avis critique, THE POINT NÉGATIF (c'est le seul selon moi) : l'ambiance et les dialogues. Et je vous entends déjà hurler derrière vos écrans numérico-électronico-machinchose « mais il a dit que c'était le principal point positif ! Menteur ! Lapidez-le et mettez-le au bucher ! ». Quoi ? J'exagère ? Mais non pas du tout. Bref, trêve de plaisanterie, je pense que vous avez eu votre dose d'humour à deux sous pour la journée.
Nous allons entrer dans la phase dite du point de vue. Ce que je vais dire ne relève pas de mon opinion mais de celle d'autres personnes, grâce à des commentaires et des avis que j'ai pu voir sur le livre. En effet, un des reproches fait par certains lecteurs est le fait que les dialogues et le ton général soit anachronique. Jamais vous n'auriez vu des hommes et femmes du Moyen-Age dire des choses comme « Qu'est-ce que tu veux, toi ! Tu te casses, t'entends ! » ou bien « Y a un truc qui a l'air de te chagriner ». Ce n'est selon moi pas un défaut, vu que l'intention de l'auteur est effectivement de créer une version alternative du Moyen-Age des années post-Croisades, mais il est important pour moi de souligner ce point, histoire de ne pas non plus manquer d'objectivité.
Voici maintenant, chose promise chose due, l'...
Interview de l'auteur :
Je crois que tu viens de Provence, lieu où prend place la saga du Chevalier Larouille : Cette région a-t-elle une part importante dans la conception de tes livres (souvenirs, paysages, ambiance...)?
Absolument ! On n'écrit bien que ce qu'on connait... Pas étonnant que presque tous les contes de Lovecraft se passent en Nouvelle Angleterre !
J'ai grandi entre plusieurs endroits du Midi, entre Toulouse et Avignon, l'Occitanie et la Provence, même si j'ai beaucoup bourlingué après, dedans et dehors de l'Hexagone. Mais le paysage dans lequel on grandit laisse une marque indélébile dans l'imaginaire...
Et puis je me rendais compte qu'il y avait quelque chose à faire avec ce décor, créativement parlant. Beaucoup de films ou livres se déroulent dans ces coins, mais l'image reste celle de Marcel Pagnol, des bérets et des santons, des vacances, des amourettes et des petits cafés... Rien de mal à tout ça, bien sûr... Mais merde. Je voulais, pour une fois, rendre la Provence Badass.
D'où tires-tu tes inspirations (films, livres, séries, musique, jeux...)?
Pour la forme : les films. Le cinéma a développé toute une gamme d'astuces visuelles pour faire passer des émotions, ou induire une ambiance, que la littérature exploite encore très peu. J'adore toutes les vidéos Youtube qui décortiquent ces trucs là (Every Frame a Painting, Cinefix, entre autres, je conseille chaudement)
Pour le fond : l'Histoire. Via des livres d'historiens, et ce bon vieux Wikipedia. Aucun univers de fiction, pas même le Legendarium de Tolkien, ne peut approcher la complexité, et la pure folie de l'Histoire.
Tiens, là, je viens de tomber sur l'ordre de Saint Lazare : des chevaliers de la Terre Sainte, genre Templiers, mais atteints de la lèpre. Il ne craignent plus la mort, ne sentent pas la douleur, et les érafler peut condamner à une agonie lente et atroce... Impossible à inventer, un truc pareil. Une mine d'or fabuleuse, l'Histoire.
Qu'est-ce que tu aimes dans le fait d'écrire?
L'ineffable Dorothy Parker disait "I hate to write, but I love having written". Il y a un peu de ça chez moi, mais pas tout à fait. J'aime beaucoup écrire, cette sensation planante quand les phrases viennent toutes seules, j'aime beaucoup avoir écrit, on se sent comme après une, un, enfin vous voyez, mais surtout, surtout, je déteste ne pas avoir écrit, et l'odieux sentiment de culpabilité qui va avec
Quand tu écris, à quoi apportes-tu le plus de soin dans ton livre?
A tout. Je suis terriblement perfectionniste, ce qui est un défaut, parce que ça ralentit tellement. Je peux passer une journée à essayer de bien écrire une réplique, pour virer tout le passage dans laquelle elle est 2 mois après lors d'une relecture. Ou encore rechercher dans le détail tout ce que sont sensés manger des paysans du 12ème siècle, pour n'en faire mention qu'en 2 mots au cours d'une description.
Quelle est ta méthode de travail quand tu te mets à écrire (s'il y en a une en particulier)?
Je prépare énormément en amont. Je précise au brouillon les lieux, les personnages, tous les détails de l'intrigue, avant d'écrire la première ligne d'un épisode.
Là aussi, je serais incapable de faire différemment. Partir sur un coup de tête et improviser en écrivant... J'admire ceux qui le font. De mon côté c'est l'angoisse de la page blanche puissance mille.
Penses-tu que tu as fait des progrès en terme d'écriture?
J'aime à penser que oui... Surtout sur la sobriété. J'ai une tendance à partir dans des envolées pseudo lyriques, mais j'ai l'impression que j'arrive à faire passer les ambiances plus efficacement, avec moins de mots à rallonge, dans les derniers épisodes. Mais on a tous encore tant à apprendre...
Prévois-tu d'écrire un livre qui ne serait pas lié à ta saga Larouille? Si oui, peux-tu nous livrer quelques détails?
J'ai quelques milliers de projets dans mes cartons, mais étant mortel, j'essaie pour l'instant de me concentrer sur ce bon vieux Larouille, pour une fois que j'ai réussi à me lancer dans un truc concrètement...
Il y avait un projet, en particulier, sur lequel j'avais commis une bonne tonne de travail préparatif, avant de laisser en suspens... Ca devait s'appeler Paleolégendes, une saga de fantasy dans un monde préhistorique. Je vous envoie les premières lignes en exclu, plutôt que de laisser ça moisir dans mes tiroirs : «L'Homo sapiens, l'espèce humaine, existe depuis plus de cent mille ans ; l'éveil à la conscience des premiers hominidés est peut-être beaucoup plus ancien. Alors que l'Europe est plongée dans l'enfer blanc du dernier âge glaciaire, des femmes et des hommes en tous points similaires à nous arpentent le monde depuis mille siècles.
Vingt fois l'âge des pyramides. Environ quatre mille générations. Autant de langages, de cultures, de croyances et d'histoire, dont il ne reste aujourd'hui que quelques ossements et des bouts de silex. Et que tout le monde a oublié.
Komimnon, lui, s'en souvenait.
Pas de toute l'histoire de l'humanité, bien sûr. Ni même celle de son peuple, la tribu Sôsen et ses innombrables branches et ramifications. Il se souvenait juste du plus important. Les grands ancêtres. »
Voilà voilà la suite un jour... Peut-être...
Et l'édition? Y as-tu pensé?
Peut-être un jour... Mais ce n'est pas une priorité. Le net regorge d'assez de témoignages odieux d'auteurs amateurs ayant épuisé des mois entier à imprimer leurs œuvres, envoyer synopsis et lettres de recommandation, pour voir leurs dossiers finir à la poubelle sans un regard des éditeurs...
Très peu pour moi. L'écriture est mon hobby, je ne veux pas que ça devienne prise de tête.
Et puis on est si bien sur Wattpad ^_^
En somme, je vous recommande vivemen xt ce livre, un vrai petit ovni dans l'univers Wattpadien ! J'espère que je vous aurai fait connaitre cet excellent auteur, qui mérite bien plus de vues et d'abonnés que ce qu'il a pour l'instant. Okubo est de ceux qui font mentir les détracteurs de Wattpad, dont l'argument principal est le manque de qualité des « fictions » qui y sont postées.
A une prochaine fois pour une autre critique!