Samedi
C'est vraiment la folie, je n'ai pas eu le temps de m'asseoir depuis 8h du matin. Ma sœur court de partout et la voir comme ça me stresse aussi. Tout le monde a quelque chose à faire et on se doit de respecter ça pour que son mariage soit parfait. J'étais tellement occupée par les préparatifs que ce n'est que maintenant que je prends conscience que ma sœur ne va plus vivre avec nous. Une de plus qui part, j'espère secrètement qu'Asma ne se mariera jamais..
J'ai pas le temps de penser à ça, la negafa vient d'arriver dans notre petit appartement bien rempli par mes sœurs et les sœurs de mon futur beau-frère. Mon père est revenu hier, il est étrangement calme depuis et est partis se préparer chez Assad, le futur marié. Moi je suis la bonne de service, vu que je suis la cadette on m'envoie chercher tout ce dont les autres ont besoin. Je fais des aller-retour entre ma maison et celle d'Assad, j'ai de la chance qu'il soit un mec du quartier et qu'il habite le bâtiment d'en face.
Alors qu'on m'avait envoyé une énième fois chez Assad, les garçons m'interpelle en bas du bloc.
Nabil - Ça doit faire la trentième fois que je te vois faire ce chemin depuis ce matin.
Abdel - Miskina, elle est la soumise de ses sœurs.
— Parlez pas vous savez pas comment c'est chiant ! Vous êtes tous prêts pour ce soir ?
Lucas - T'inquiètes on a tous nos costards, on va faire hella au cortège !
Je rigole et leur dit à ce soir car je suis pressée. Je repars vers la tour d'en face quand une main m'arrête et me tire un peu plus loin, à l'égard du regard des autres. Une imposante carrure se place devant moi.
Tarik - Pourquoi tu m'évites ?
Voilà ce que je redoutais le plus. Je ne l'évite pas vraiment, mais c'est juste que j'essaye de moins lui parler depuis la soirée de son retour. Ouais, je l'évite quoi.
— Arrête de dire n'importe quoi.
Tarik - Téma tu me regardes même pas dans les yeux.
Je relève la tête à contre cœur et plonge mes yeux dans les siens. Un frisson parcourt tout mon corps et je baisse instinctivement la tête, putain j'en ai marre d'être faible devant lui.
C'est exactement pour ça que je l'évite, pour ne pas qu'il remarque ce que je ressens pour lui. J'ai pas envie de gâcher notre amitié, je sais que jamais rien ne se passeras entre nous. Pourquoi il s'intéresserait à moi d'ailleurs ? C'est Tarik, tout le monde le kiff dans la tess et moi, je ne lui arrive même pas à cheville. Il a dû en voir des filles plus belles que moi.
— J'dois vraiment y aller.
Il me regarde encore quelques secondes avant de finalement lâcher mon bras.
Tarik - Saha, à ce soir.
*
L'heure de la fête arrive à grand pas et je vois petit à petit tout le monde sortir dehors pour le début du cortège. Nous sommes partis chez Assad pour que l'imam les marient religieusement, il n'y avait que la famille proche. Après tous les youyou et les photos, on est tous sortis dehors pour le cortège.
Je m'installe dans la voiture avec Asma et Nour, tout le monde klaxonne et y'avais pleins de drapeaux, j'avais Mohamed sur les genoux et on était assis à l'avant, le petit il kiffais sa vie. J'ai vu Nabil, Lucas et Tarik passer en voiture vite fait à côté de nous, ils faisaient les fous à conduire vite.
On est les premiers à arriver à la salle et je pars directement changer ma robe bleu nuit pour un caftan d'une couleur beaucoup plus vive.
A présent tout le monde est dans la salle et n'attend plus que l'entrée des mariés. La musique est forte, Delya souffle une dernière fois avant de rejoindre son mari et d'entrer dans la salle. Tout le monde fait des youyou et Asma et moi les suivons de près jusqu'à leur trône où ils s'installent, on est placé dans une table pas loin. La fête commence, musique rebeu a fond et les daronnes qui dansent déjà avec Delya.
A cet instant là, ma mère me manque. J'aurais aimé qu'elle voie Delya aussi heureuse. Je m'interdis d'être triste pendant un jour si important, mais c'est plus fort que moi. J'espère que de là où elle est ma yemma nous voient, et qu'elle est fière de nous.
J'essaye de penser à autre chose et balaye la salle du regard. Je trouve les garçons tous assis dans une table au fond, quand je le vois. Je suis surprise de voir qu'il me regarde déjà, je baisse la tête et m'avance jusqu'à leur table.
Abdel - MachAllah, une beauté cette fille.
Lucas - On dirait une princesse.
Nabil - C'est la plus belle ma sœur.
— Merci, vous êtes tous très beau aussi.
Tarik n'a pas bronché mais a toujours son regard posé sur moi. Sa chemise noire le met très en valeur, il s'est bien coiffé et est très très beau. Toutes les filles de la salle doivent baver sur lui, et y'a de quoi. Je pars m'asseoir à côté de Nabil en espérant qu'il me change les idées, parce que son frère qui est en face de moi me perturbe affreusement.
La soirée se passe très bien, on a tous essayer de profiter de Delya avant qu'elle parte du cocon familiale. Y'a rien qui me fais plus plaisir que de voir toute ma famille ensemble et heureuse. Il doit être plus de 23h et la fête bat son plein, tous les garçons sont partis danser avec Assad et j'en profite pour sortir prendre l'air.
Les endroits fermé avec beaucoup de monde comme ça, c'est pas trop mon délire. Parfois ça devient trop pour moi, et puis éviter Tarik pendant toute une soirée c'est dur aussi.. Me demander pas pourquoi je fais ça, c'est juste que je n'arrive plus à affronter son regard.
PDV Tarik
J'ai vu qu'elle toute la soirée. Mais apparemment, elle non. J'sais pas c'que j'ai fait, et j'deviens fou en essayant de trouver ce qui a pu la brusquer. Parce que y'a eu un changement, peut-être que c'est le fait que j'sois parti si longtemps.
À un moment j'la vois plus, je cherche à chaque recoin de la salle mais y'a rien. Puis j'me rappelle qu'un jour elle m'avait dit qu'elle aimait pas les endroits bondés de monde. C'est con, mais j'me souviens de pleins de détails inutiles sur elle de ce genre, comme qu'elle préfère le ketchup à la mayonnaise. Sa mère j'deviens fou, ferme ta gueule Tarik.
Je sors et comme je l'avais deviné, j'la trouve dehors toute seule en train de regarder le ciel.
— Qu'est-ce que tu fais ?
Habibe - Je prend l'air, y'a trop de monde dans la salle.
J'hoche la tête et me rapproche d'elle, on regarde le ciel ensemble. Puis j'me mets à la regarder, j'aime pas du tout cette situation.
PDV Habibe
Tarik - Bon, y'a quoi ?
Voilà ce que je redoutais. Il doit sûrement parler de la "distance" que j'ai instauré entre nous. Mais je ne peux pas lui donner la vraie raison, bien évidemment. Alors je cogite dans ma tête pour essayer de trouver un mytho, et vite.
— Ça me fais bizarre.
Tarik - De quoi ?
— Ma sœur qui ne va plus vivre avec nous.
Bon, il y a une part de vérité dans ce que j'lui dis. Il doit sûrement rien comprendre vu que c'est un mec et qu'il n'a que des frères. Ça me rappelle le moment où Nour allait se marier, j'avais pleurée toute la nuit parce que je la voyais comme une mère et l'a voir partir me déchirais le cœur. Et là, c'est Delya, Asma allait suivre et me laisser seule avec mon père, je n'aime pas du tout cette idée..
Tarik - Ne soit pas triste, c'est une bonne chose qu'elle se marie. Et puis un jour ça sera ton tour.
— Sah ? Je ne me vois pas du tout mariée.
Tarik - On va tous y passer.
— Même toi ?
Tarik - Même moi.
Ça me fait drôle d'imaginer Tarik marier. Il est imprévisible comme mec, libre comme l'air et toujours à naviguer de partout sans rien demander à personne.
PDV Tarik
J'sais même pas comment j'ai fait pour que la conversation dérape sur ça. Moi ? Parlé de mariage, surtout avec une meuf ? C'est trop chelou.
Elle est belle ce soir. Ses long cheveux noir lissée retombe sur son dos magnifiquement et le pire c'est qu'elle le fais même pas exprès, c'est ça que je préfère chez elle. H24 naturelle cette meuf, ça change des autres que j'ai connus.
J'sais qu'entre elle et moi c'est pas clair, je l'ai su dès le début. J'l'ai surtout compris quand j'étais en Espagne, loin d'elle. C'est pas normal pour moi d'autant penser à une personne, j'ai jamais vraiment connu ça. Des copines sérieuses bien sûr que j'en ai eu, mais moi-même j'l'ai jamais était. Mais avec elle j'sais que c'est différent, que c'est une fille bien et qu'elle le resteras. Et j'pense que c'est ça dont j'ai besoin en ce moment, de quelqu'un qui m'apaise et y'a qu'elle qui arrive à me faire ça.
— T'es différente ce soir.
Elle se retourne et me regarde les yeux pleins de questions, elle est mignonne quand elle fait cette tête.
Habibe - Comment ça ? Parce que j'porte une robe ?
— Non, c'est juste que.. Tu rayonnes, wAllah que tu rayonnes. Tellement que j'ai vu que toi toute la soirée.
Elle baisse la tête instinctivement, j'crois même qu'elle souris. C'est pas mon genre de faire le lover mais putain avec elle j'sens que j'suis obligé d'lui dire tout ce qui me passe par la tête.
Habibe - Arrêtes avec tes disquettes pourries.
— J'te ment pas.
Habibe - Pourquoi tu me dis tout ça alors ?
— J'sais pas, j'en avais envie.
Elle ne rajoute rien et se met à me regarder en souriant, c'est là que je m'aperçois que cette meuf n'est pas comme les autres, j'le sens déjà qu'il y a quelque chose de fort entre elle et moi. Jamais j'aurais pensé qu'elle allait prendre une aussi grosse place dans ma vie.
Habibe - Tu t'rappelle quand on se parlait pas ? Avant que t'ailles en prison.
— Aaah ouais, j't'aimais pas.
Habibe - Ah bon ?
— Ouais, j'aimais pas te voir tous le temps avec Nabil.
Habibe - Moi j'avais rien contre toi, c'est juste que t'avais l'air méchant. J'crois qu'on s'est parler qu'une fois avant que tu rentres en prison.
— Tu m'avais demander où était Nabil et j'avais tracer ma route sans te répondre.
Habibe - Elle rigole, je t'ai jamais pardonner ça.
— Mais j'me suis bien rattrapé non ?
Habibe - Ouais, j'sais même pas comment ça se fait qu'on se parle.
— J'sais pas.. On devait se parler, c'est tout.
J'allume une cigarette, j'ai envie d'lui dire pleins de choses mais j'y arrive pas, j'ai peur que ça marche pas et surtout de lui faire du mal. Elle est toute hnine, elle mérite quelqu'un de bien, moi j'ai juste peur de la salir.
Sans que je m'en rende compte, une petite main vient prendre la cigarette de ma bouche et l'apporte à la sienne. Elle tire une taffe et commence à rire.
— T'es malade Habibe y'a que moi qui ai le droit de faire ça, rends moi la.
Habibe - Je t'évites juste de chopper un cancer.
Et là j'me met à rire comme un con avec elle, la miss reprend mes phrases.
— Nan sérieux rends-moi la.
Elle continue de fumer et tourne la tête de gauche à droite. J'me rapproche d'elle et y'a plus que quelques centimètres qui nous séparent.
— Pourquoi tu me rends fou comme ça ?
Elle arrête de faire sa tête de maline et ne bouge plus. J'crois qu'elle a compris que je parlais plus de la cigarette. J'me rapproche encore un peu, tellement que ça commence à devenir dangereux. Son souffle commence à ralentir et elle baisse les yeux. C'est la première fois que j'la vois d'aussi près, et elle reste toujours aussi belle.
Habibe - Tiens, te rends pas fou pour ça.
Elle me remet la cigarette sur ma bouche et j'souris comme un con. Elle me regarde droit dans les yeux et se mords la lèvre inférieure. Faut pas faire des choses comme ça devant moi la miss, déjà que j'me retiens beaucoup trop.
Je jette la cigarette et me rapproche encore plus d'elle pour lui faire un smack rapide, j'pouvais pas m'en empêcher. J'aime la sensation de ses lèvres sur les miennes mais j'ai pas envie de la brusquer, j'veux faire les choses biens et pour l'instant j'vais devoir me contenter d'un petit bisou.
— On rentre ?
J'vois qu'elle n'a pas bouger mais elle se tourne vers moi et se met à rire.
Habibe - Oui, bouffon.
J'peux pas vous dire combien de temps on est rester à se chamailler avant de rentrer dans la salle.
En Espagne, j'ai eu le temps de bien penser à ma vie, et j'en ai marre de tout ça. Les putes, la bibi, on dirait que y'a que ça qui me fait carburer. J'suis humain après tout, tout ça sa m'apporte que du sale et j'en veux plus. Mowgli a besoin d'amour.
Elle est venue comme un ange dans ma vie, au bon moment comme par magie. Alors j'me dis que c'est un signe, je dois tout arrêter. Elle m'apporte que du bien cette mra. Ma mra.