-Et donc, tu veux faire quoi au juste ? fit La Voix avec scepticisme.
La charpente de la remise où Nathanaël s'était réfugié grinça quand il posa son pied droit sur l'avant dernier barreau de l'échelle branlante qui menait jusqu'à la mezzanine où Mr Grumbler stockait le foin pour les deux vieux chevaux de traies de l'orphelinat.
-Je veux apprendre à voler.
Le fait qu'il aurait sûrement dû demander des conseils pratiques (et théoriques) à une personne avisée ne semblait pas vouloir le stopper dans son élan. Il avait encore une fois rêvé de l'aigle royal et la première idée qu'il avait eut en se levant -à l'aube- le matin-même était d'aller apprendre à voler. Parce que s'il arrivait sans problème à avoir une force surhumaine, il ne voyait absolument pas pourquoi il ne pourrait pas se mettre à voltiger comme un colibri s'il y pensait très fort.
Comme Rowena lui avait assuré que certains sorciers avaient la capacité de se transformer en animaux, l'idée même d'en devenir un aussi lui suffisait à lui faire sentir que deux ailes lui étaient poussées dans le dos durant la nuit. Sa maîtrise des lois de l'apesanteur et de la gravité avait fini de le persuader que tout ceci était une excellente idée : une pomme tombe attirée par l'attraction terrestre mais si celle-ci vole, elle ne tombe plus...non ?
-Laisse-moi te dire que je pense que tout ceci va très mal se terminer, mon Humain, l'avertit Sa Conscience.
-Mais non, tu verras Soul, je vais virevolter partout d'ici peu ! rétorqua Nathanaël, légèrement agacé du peu de confiance que lui accordait sa propre conscience.
Après maintes réflexions très complexes, l'enfant avait conclu que cette voix n'était autre que sa conscience. Il avait bien une seconde hypothèse mais le fait qu'elle incluait les termes « maladie psychologique » et « pas tout seul dans ma tête » l'avait rapidement fait pencher en faveur de la première hypothèse. Comme sa conscience lui avait cassé les oreilles depuis le jour d'avant, le matin en se levant, en se douchant, en s'habillant -en fait, elle lui avait cassé les pieds depuis qu'elle avait ouvert la bouche-, il avait tout bêtement décidé de la nommer Soul. Parce que « La Voix » n'était pas hyper rassurant (il n'était pas Jeanne D'Arc et osait espérer que cette voix n'était ni Dieu ni le Diable), parce qu'étant sa conscience elle était un bout de son âme et surtout parce qu'elle le « soûlait grave ».
-On ne pourra pas dire que je ne t'ai pas prévenu !
-Promis, si ça ne fonctionne pas tu pourras me dire « je te l'avais bien dit ! », dit Nathanaël en soupirant.
Il avait absolument tout préparé : un tas de foin à l'atterrissage (au cas où celui-ci serait plus rude que prévu), un système de corde relié par des poulies pour la sécurité et même la trousse de secours (on n'était jamais trop prudent) !
Le garçon s'approcha du bout des pieds vers la dernière planche de la mezzanine, avança le cou pour juger la hauteur, déglutit, agrippa les deux poutres verticales qui partaient du sol pour venir soutenir la charpente, ferma les yeux et inspira longuement. Il se concentra sur son objectif : voler. Il occulta toute son envie de posséder des ailes, des griffes et un bec d'oiseau pour ne diriger ses pensées que vers un seul et unique but comme le lui avait appris Godric. Il sentit le pouvoir gronder au fond de lui, remonter ses entrailles comme un courant de lave dans la cheminée d'un volcan en éruption, et jaillir de son essence même comme du champagne jailli de sa bouteille. Il rouvrit les yeux et su que les paillettes de ses yeux devaient danser la kalinka : il voyait pour la seconde fois -la première étant lors de sa grosse colère contre Salazar- son aura magique l'entourer de sa jolie couleur mordorée. Il sentait le pouvoir brut qui s'en dégageait, il prit une grande inspiration et sauta dans le vide...
...pour rester en apesanteur une milliseconde avant de s'écraser lamentablement dans le tas de foin en contrebas.
-Je peux le dire ? Dis, Nat' je peux le dire ? s'étrangla Soul alors qu'elle riait aux éclats.
Le dit Nat' peinait à se débarrasser de tous les morceaux de foin qui venaient se loger dans tous ses orifices, crachotant à qui mieux mieux, ne réussissant par là qu'à se baver dessus. Pas découragé pour un sous, le garçon refit le chemin une deuxième fois.
Arrivé sur la mezzanine entre les deux poutres, il se concentra à nouveau, la magie rejaillit, il sauta...et finit une fois encore dans le tas de foin.
-Bon, et là je peux le dire ? insista Soul.
-Tais-toi ! ragea Nathanaël. Tais-toi, je réessaye !
En théorie, cela devait fonctionner alors pourquoi, pourquoi en pratique cela se soldait-il par un échec ?
-Plusieurs, en fait.
-Plusieurs quoi ?
-Plusieurs échecs.
Au risque de se répéter, Soul lui tapait sur le système. Sans plus l'écouter, Nathanaël réfléchit. Si faire voler son corps était trop compliqué, devait-il d'abord essayer de faire voler des choses plus petites ? S'il parvenait à maîtriser l'art de la virevolte (?), de l'envol (?) sur une masse plus petite, il arriverait sûrement plus facilement à maîtriser cette magie sur lui-même. Le « miaouuuuuuuuu » caractéristique de Marie-Madeleine, la chatte blanche de Mrs Fridge, lui confirma qu'il était temps de tester sa théorie.
-Petit, petit, appela Nathanaël en direction des bruits. Viens là ma grosse !
-Sérieusement ? Tu vas utiliser un pauvre chat pour l'envoyer au casse-pipe ? intervînt Soul, horrifiée.
-C'est juste une expérience de maîtrise, répliqua l'enfant. Elle ne craindra rien.
-Il est vrai que si tu la protège autant que tu t'es protégé toi tout à l'heure, il n'y aura absolument aucun problème !
Le ton de Soul était clairement sarcastique mais Nathanaël fit comme s'il n'avait pas entendu.
-Minou, minouche !
Marie-Madeleine, qui avait senti le danger, avait tenté un replis stratégique mais Nathanaël l'avait attrapée -non sans peine- avant qu'elle ne puisse s'enfuir. Attachée à la corde, en haut de la mezzanine, Marie-Madeleine griffait le garçon dans un vain espoir de pouvoir échapper au terrible sort qui l'attendait.
-Heureusement qu'elle est déjà blanche sinon le stress lui aurait fait blanchir le poil, fit remarquer Soul, d'un ton désapprobateur.
-Quand j'aurais besoin de tes commentaires, je te ferais signe Soul ! coupa Nathanaël.
Un coup de patte bien placé failli lui faire perdre l'usage de son œil gauche mais le garçon n'arrêta pas ses efforts pour autant.
-Voilà, c'est prêt !
Il tira sur la corde rattachée à la poulie fixée à la charpente ce qui souleva Marie-Madeleine qui hurlait son mécontentement. Il concentra sa magie et sa volonté de la faire voler sur la chatte en colère et lâcha la corde.
Marie-Madeleine miaula à la mort, gigota les pattes dans le vide...et à sa grande surprise et celle de Nathanaël et Soul, elle resta là où elle était -c'est-à-dire à deux mètres cinquante du sol.
-J'ai réussi, Soul j'ai réussi ! s'exclama Nathanaël.
Sous l'excitation de son exploit, sa concentration faiblit et Marie-Madeleine poussa un dernier miaulement avant de foncer droit dans le tas de foin.
-Mouais, c'est pas encore hyper au point, remarqua Soul.
-Toi, tais-toi ! grogna le garçon.
Maintenant que Nathanaël avait confirmation qu'il était possible de faire voler de petites masses (enfin, léviter aurait été plus approprié dans ce cas-ci), se faire voler lui devait être possible aussi. Quand un problème lui résistait, Mrs Collins lui conseillait généralement de le regarder à l'envers. Donc, s'il n'arrivait pas à se faire voler lui-même cela voulait dire que quelque chose d'autre pourrait le faire. Si invoquer sa magie pour se donner le pouvoir de voler ne fonctionnait pas, il lui suffisait d'invoquer une force capable de le faire voler !
Une force comme l'air.
Le souvenir de Rowena contrôlant les arbres, celui du sortilège de Salazar contrôlant la terre tout autour de la fontaine et le dernier de lui-même lançant des boules de feu étaient si frais dans sa mémoire qu'il n'eut aucun besoin de se concentrer pour en faire rejaillir tous les détails. S'il voulait voler, il lui faudrait contrôler l'air. Cela faciliterait d'autant plus sa capacité de vol quand il serait sous sa forme animagus.
-Si je comprends bien, tu es sûr et certain de devenir un animagus et tu es sûr et certain de parvenir à contrôler l'air...Quelle modestie ! souligna Soul en ricanant.
-Si je comprends bien, tu n'as aucune confiance en moi et tu t'attends à ce que j'échoue ! la singea Nathanaël en ronchonnant.
Soul se racla la gorge (un son assez dérangeant étant donné qu'elle n'en avait pas) :
-Je n'aurai pas dit ça comme ça, mais c'est bien résumé.
Nathanaël se positionna en haut de la mezzanine et se prépara à réunir sa magie dans...dans quoi au juste ? En y repensant il avait toujours eut un « récipient » d'accueil à sa magie or là il s'agissait de quelque chose qui n'avait pas de consistance et qui était invisible. S'il s'était agît d'eau, de terre ou de feu cela aurait été bien plus simple. Il était bien plus à l'aise avec ce qu'il pouvait visualiser.
Visualiser un courant d'air était autrement plus compliqué.
-Je te dirai bien de visualiser un courant d'air avec une couleur pour que ça te soit plus simple mais comme tu ne désires pas entendre mes commentaires -fort intelligents de surcroît-, je ne te dirai rien, fit Soul, d'une voix boudeuse.
-Tu n'as pas besoin de me le dire, j'y avais déjà pensé, répliqua l'enfant avec beaucoup de mauvaise foi.
-Dois-je te rappeler que je suis dans ta tête et que par conséquent je sais que tu n'y pensais pas du tout ?
Gnagnagna. Bien que Nathanaël ne le dît pas à voix haute, il savait que Soul l'entendrait et au soupir qu'elle poussa, il sut que c'était chose faite.
Soul lui cassait peut-être les oreilles mais elle se révélait être une précieuse alliée en ce moment même (il regretta aussi sec d'avoir penser à ça, elle ne pourrait sûrement plus jamais s'arrêter de lui donner des conseils désormais) et malgré tout, il dû s'avouer que sa solution était la meilleure qu'ils avaient eu pour l'instant.
S'il « visualisait » le vent en lui donnant une couleur, il devrait parvenir à lui donner un corps tangible. Il réfléchît un instant et opta pour un gris pâle, le bleu étant déjà réservé à l'eau. Il prit une grande inspiration, ferma les yeux pour mieux se concentrer et dessina dans son esprit un courant d'air gris. Il dessina les courbes, les volutes et les caresses du vent et une fois tout ceci en tête –il pouvait presque le toucher mentalement – il appela sa magie.
Comme un taureau trop longtemps retenu, elle déferla en lui avec force et chaos. Il ouvrit les yeux et eût le plaisir de voir une mini-tornade tourbillonner au beau milieu de la remise.
Sans plus tarder, il sauta dans le vide
L'air rassemblé en un seul point amortit sa chute avec la douceur d'un édredon de plumes. Il était à plusieurs mètres du sol et virevoltait librement. C'était une sensation grisante mais pas autant qu'être à plusieurs centaines de mètres du sol. Il demanda à la mini-tornade de lui faire toucher le plafond et, docile, celle-ci s'exécuta.
Elle s'exécuta avec tant de verve, que Nathanaël se retrouva plaqué contre la toiture avec force, lui coupant la respiration sur le coup. Et comme si la tornade avait désormais décidé qu'elle n'en ferait qu'à sa tête, elle éjecta l'enfant qui atterri –par chance- dans le tas de foin. Nathanaël n'eût que le temps de relever la tête pour voir la tornade pousser encore plus la charpente qui céda dans un craquement sinistre.
Les débris tombèrent un peu partout autour du tas de foin au fond duquel Nathanaël avait plongé de lui-même pour s'en protéger. Le clous énorme et dressé d'une des planches s'arrêta à un millimètre de son entrejambe et l'enfant pu respirer à nouveau. Se dégageant des décombres, il pût analyser les dégâts. La toiture de la remise était éventrée en son centre, les deux pans de murs de planches qui restaient menaçaient de s'effondrer à chaque instant. Le seul point positif était que sa frayeur avait fait disparaître sa mini-tornade.
-Belle maîtrise ! ironisa Soul. J'ai hâte de voir avec quelle maîtrise tu vas maintenant expliquer ça à Mrs Fridge.
-Comme disait Mr Miyagi à Daniel-san : « la meilleure façon d'esquiver c'est de pas être là », informa Nathanaël avant de prendre ses jambes à son cou.
Oo
Rowena fixait Nathanaël en fronçant les sourcils.
-Et donc tu as cru bon vouloir t'essayer à la maîtrise d'un des quatre éléments sans même savoir quels sont les risques ? résuma t-elle d'une voix doucereuse.
En fuyant lâchement de la remise détruite, Nathanaël c'était heurté à Godric qui le fixait le regard noir, le nez frémissant, les bras croisés devant son torse. Si celui-ci lui avait paru être du genre à faire copain-copain quelques jours auparavant malgré sa carrure impressionnante, cela n'avait plus été le cas et il avait failli courir vers Mrs Fridge lui avouer son méfait car elle lui faisait beaucoup moins peur que le sorcier en colère en cet instant. Sans comprendre ce qu'il lui arrivait, Nathanaël s'était retrouvé au beau milieu d'une cour entourée d'anciens murs de pierres, une désagréable sensation au nombril s'atténuant peu à peu. Si le matin-même apprendre à voler lui paraissait une bonne idée, maintenant qu'il se retrouvait face aux quatre sorciers furieux son idée lui paraissait étrangement beaucoup moins judicieuse.
-Ce gosse est une calamité, rajouta Salazar en faisant apparaître sa langue fourchue.
-Quelle perspicacité, ce Salazar est mon nouveau héros ! cru bon de s'exclamer Soul.
-Nathanaël, tu dois comprendre que la maîtrise des éléments demande énormément de connaissances et de travail. Les éléments sont instables, capricieux et dangereux, lui expliqua Helga d'une voix douce mais ferme.
-En particulier l'air, Moustique !
Rowena ne cessait de le regarder avec une pointe d'émerveillement qu'elle peinait à cacher. Ce môme, sans aucune connaissance et aucune pratique, avait réussi à invoquer un Élémentaire d'Air. Si l'on omettait qu'il aurait pu raser l'orphelinat et le village voisin, cela relevait de l'exploit. Même elle –pourtant un Maître en Magie Élémentaire- n'avait réussi à invoquer une tornade qu'au bout d'une vingtaine d'années de pratique. Le plus impressionnant était que le gamin n'avait pas rassemblé l'air à disposition d'après les dires de Godric mais bel et bien matérialisé du vent venu de nulle part.
S'il y avait bien une règle fondamentale au principe de la Magie Élémentaire c'était qu'elle consistait à contrôler un des quatre éléments (ou une de leur combinaison) seulement et seulement si l'élément ou les éléments en question étaient présents physiquement parlant. Et bien que l'air avait cette particularité très pratique d'être présent partout (ce qui conférait un certain avantage aux Maîtres D'Air lors de combats, étant donné qu'ils n'avaient pas besoin d'avoir de gourde comme les Maîtres D'Eau ou encore de besaces de terre ou de fioles de feu comme les Maîtres de Terre et de Feu), en aucun cas on ne pouvait faire apparaître une tornade sans assister à la torsion caractéristique de l'espace environnant qui précédait chaque utilisation de l'élémentaire d'air. Or Godric était catégorique : la mini-tornade s'était matérialisée sans avoir amassée l'air autour d'elle.
-L'air est le plus dangereux des quatre éléments. Si tu peux éteindre un feu avec de l'eau ou de la terre, assécher une rivière avec de la terre ou du feu, combler une faille avec de l'eau –créant ainsi de la boue-, une tornade ne pourra jamais être stoppée avec du feu (à moins que tu ne veuilles créer un tornade de flammes), avec de l'eau (tu te retrouveras avec un tourbillon d'eau) ou avec de la terre (pas besoin de t'expliquer ce qu'est une tempête de sable), expliqua Rowena.
Godric se décolla du mur auquel il était adossé depuis leur retour et continua :
-Si tu invoques un Élémentaire –peu importe lequel- sois sûr de pouvoir le contrôler sinon c'est lui qui te contrôlera. Les quatre éléments tirent leur force de la nature elle-même. Et Mère Nature est bien plus forte que toi, n'oublies jamais ça.
-En bref, morveux, arrête de penser que parce que tu es un sorcier, tu es un être supérieur, trancha Salazar en sifflant.
-Tu as été bien inconscient, Nathanaël, continua Helga d'un ton réprobateur qui le fit rougir. Il me semblait que Rowena t'avait prévenu des risques quand tu as invoqué un Feudeymon l'autre jour.
Nathanaël se sentait tout petit devant toutes les réprimandes des sorciers. Et dire qu'hier encore il avait juré ne s'entraîner au Feudeymon qu'en présence d'un des sorciers voilà qu'il manquait de détruire l'orphelinat en jouant avec le vent !
-Je suis désolé, je me suis emporté parce que j'ai encore rêvé de l'aigle cette nuit...bredouilla t-il, penaud.
-Vaut mieux pardon que permission, n'est-ce pas Nat' ?
Soul prenait un réel plaisir à le faire se sentir misérable et il ne pouvait même pas lui en vouloir, elle lui avait dit que tout ceci finirait mal.
-Tu as de la chance que j'aie senti ta déflagration magique, petit ! l'informa Godric. J'ai pu réparer tes bêtises.
-Merci, M'sieur Godric.
Puis s'adressant à toute l'assemblée :
-Est-ce que... est-ce qu'il est possible que vous m'appreniez la magie ? Euh...de manière officielle, je veux dire. Être votre apprenti, pour de vrai, pas que sur le chemin du village...enfin bref. Vous voulez bien ?
Helga ri doucement.
-Évidemment que oui, Nathanaël. C'est pour ceci que nous sommes venus après tout !
Godric s'approcha et lui ébouriffa gentiment les cheveux.
-J'ai cru que tu ne demanderais jamais.
-De toutes façons, on est bien obligés sinon tu vas raser l'orphelinat ou pire : le monde ! rajouta Rowena en ricanant.
-Je ne vois pas pourquoi j'enseignerai quoique ce soit à un morveux mal éduqué ! s'offusqua Salazar avant de voir le regard menaçant de sa femme. Mais, je suis quand même pressé de voir ce que tu vaux, gamin.
L'homme aperçut alors la mèche blanche du mioche, trônant au beau milieu de son épaisse tignasse.
-C'est quoi ça, morveux ? Un nouveau look ?
Nathanaël mit un instant avant de comprendre de quoi parlait le sorcier. Il passa instinctivement une main dans ses cheveux.
-Ah ça, c'est apparu hier. Je m'en suis aperçu vers midi quand j'étais au zoo. J'espère que ça va partir !
Et puis, ce souvenant soudainement de la conversation qu'il avait eut la veille avec le boa constrictor, il demanda :
-Au fait, vous êtes les Fondateurs de quoi ?
Les quatre sorciers relevèrent des sourcils étonnés.
-Comment es-tu au courant de ça ? demanda Godric.
-C'est le boa qui me l'a dit. D'ailleurs, il était étonné que vous soyez toujours vivants.
Salazar s'étouffa.
-Tu...tu as parlé à un serpent ?
-Ah oui, j'ai oublié de t'en parler Sal, Nathanaël m'avait dit qu'il comprend Sealvia, intervînt Godric en se souvenant des événements de quelques jours auparavant.
Salazar remonta sa lèvre supérieure, laissant apparaître des canines bien plus longues que le commun des mortels. Sa langue fourchue claqua son palais d'agacement.
-Tu ne pouvais pas me le dire plus tôt ?
-Tu comprends quelque chose, mon chéri? demanda Helga.
Nathanaël frissonna de dégoût à l'appellation tendre : il ne se ferait jamais à ça.
Le sorcier fixa sa femme un moment puis soupira.
-Absolument pas, à moins qu'il ne soit un descendant de Méduse comme moi –et on sait que ce n'est pas le cas-, il n'y aucune explication logique, fit-il. Non, ce qui m'embête vraiment c'est que j'avais préparé une petite surprise pour lui la prochaine fois qu'il s'attaquerait à ma fontaine. Cela concernait Sealvia et maintenant tout mon plan génial ne tient plus s'il comprend ce qu'elle dit !
Nathanaël ne savait pas s'il devait se réjouir ou s'inquiéter d' éventuelles représailles.
-Méduse, comme la Gorgone ? demanda t-il.
Il avait entendu parlé d'elle lorsqu'ils avaient abordés les mythes et légendes de la Grèce Antique quelques semaines auparavant avec Mrs Fridge.
-Exactement, morveux ! répondit Salazar.
-Ce n'est pas un mythe ?
-Bien sûr que non, gamin, Méduse était une sorcière narcissique, obsédée par sa beauté. Elle a vécu il y a bien des milliers d'années dans la Lybie actuelle. L'histoire raconte qu'elle voulait se parer des plus beaux atours, des plus belles richesses et elle utilisait son statut de « Déesse » auprès des moldus crédules pour se les procurer. Un jour, un moldu lui fit offrande d'un magnifique serpent, un basilic –c'est le roi des serpents, son regard tue. Ne pouvant résister à s'approprier cette beauté mortelle, elle le décapita et fit de sa tête une coiffe sanglante. Le sang de la bête se mélangea au sien, lui donnant la capacité de parler le Fourchelangue. Ce qu'elle ne su que bien trop tard, en revanche , c'est que le pouvoir mortel des yeux d'un basilic ne s'éteint qu'une fois ses yeux crevés. C'est de là qu'est venue la légende de son pouvoir de pétrification. Sa coiffe a tué bien des gens avant qu'elle ne baisse les paupières de la bête morte. Elle instaura un règne de terreur durant bien des années, s'offrir les plus belles parures, les plus beaux esclaves qui lui donnèrent les plus beaux enfants. Un jour, un sorcier du nom de Persée, engagé pour la tuer, la piégea sous un sort d'Imperium (le sort de contrôle) et l'obligea à lever les paupières du basilic et de regarder son reflet dans un bouclier d'argent poli. Cela ne la tua pas mais la pétrifia. Persée détruisit alors la statue de pierre et exécuta nombres d'enfants de la sorcière. Mais l'Homme est faible et Persée tomba amoureux d'une de ses filles, perpétuant ainsi la lignée de Méduse et transmettant la capacité du Fourchelangue à sa descendance.
A la fin du récit, Nathanaël dû admettre que si Salazar n'était pas bon pédagogue, il était bon conteur.
Helga le sortit de ses pensées en posant sa main sur son épaule droite.
-Toujours est-il Nathanaël que je veux que tu me promettes de ne plus chercher à utiliser la magie sans que l'un d'entre nous soit près de toi -tout du moins jusqu'à ce que tu sois capable de la contenir-, tu peux faire ça pour moi, mon grand ?
-C'est promis, Helga, fit le jeune garçon en hochant vigoureusement la tête.
Godric applaudit.
-Bien, très bien ! Allez viens Nathanaël, on va te faire visiter le château, après tout c'est ici que tu viendras t'entraîner ! fit-il en le poussant vers l'arche de pierre conduisant à l'entrée Est.
Rowena et Salazar regardèrent Helga, Godric et Nathanaël s'éloigner, la sorcière fut la première à briser le silence :
-Tu as remarqué ?
Salazar hocha la tête et croisa les bras.
-Oui. Il n'a pas signé sa promesse.