Doucement, elle se réveille et jette un coup d'œil à ma main droite toujours bandée.
- « Montre, comment va ta main ? »
- « Ça va, tu me connais, j'ai l'habitude, je t'attendais pour refaire le pansement. »
- « Mike m'a dit que tu avais bien saigné et que quelqu'un t'avait raccompagné, il a sourit en disant qu'il a presque été obligé de te mettre dehors de force, que tu ne voulais pas partir ! Tu ne répondais pas à ton portable, je me suis inquiétée et après je me suis dit que tu dormais. Qu'est ce qui c'est passé ? »
- « Tu es rentrée tard ? Mike ne m'en veut pas ? Je me sentais si mal, qu'elle idiote ! » j'essaye de me contenir, mais j'ai envie de tout lui raconter
- « Non, il était à peine quatre heures, et ne t'inquiète pas Mike ne t'en veut pas, tu n'es pas la première à qui ça arrive. »
- « J'espère, tu as l'air vraiment crevé ? »
- « Je me reposerais un petit peu tout à l'heure. Alors qui t'a ramené ? C'était un beau gosse ? Ou un taxi ? »
Je rougis, mon sourire s'étend jusqu'à mes oreilles.
- « Aller ! dis-moi tout... »
Je reste muette, j'aime bien la faire languir et ça marche, elle trépigne me suppliant de lui raconter.
- « Dis-moi que c'était un homme canon et surtout célibataire... »
- « T'as gagné c'était bien un homme .... Célibataire... » je pourrais faire ça pendant des heures, enfin si j'avais plus de volonté...
- « Aller dis-moi qu'il était canon et qu'il t'a fait oublier le dieu grec du cimetière... »
- « Encore mieux ... »
- « Ouhh la chanceuse.. » reprenant une gorgée de thé.
- « Enfin encore plus canon que dans mes souvenirs »
- « Quoi !? » elle manque de s'étouffer avec son thé.
Je crois que je suis en train de perdre ma meilleure amie, il est trop tôt pour qu'elle comprenne sans mon aide, je lui tape doucement dans le dos avant de continuer.
- « C'était lui ! »
- « Non, tu plaisantes, l'homme, le pur canon qui envahit tes pensées depuis ce fameux jour au cimetière était à la soirée et t'a raccompagné ? »
Elle contourne le bar et se jette dans mes bras, nous sautillons et couinons comme deux gamines, par moment, on a encore six ans d'âge mental, mais on le vit plutôt bien l'une et l'autre ! Il vaut mieux ça que d'être aigris et triste toute sa vie.
- « Oui il y était, c'était même lui le client exigeant, il était en cuisine, je lui suis rentrée dedans accidentellement, je me suis coupé en voulant ramasser la casse, il s'est senti apparemment coupable et a voulut me raccompagner certainement de peur que je me vide complètement de mon sang et que je ne meurs seule dans mon lit. »
- « Il a quitté sa propre soirée pour te raccompagner, c'est un vrai gentleman, c'est étrange que tu tombes encore sur lui... »
- « Tu n'imagines même pas à quel point.. » je rougis.
- « NOONN, J'en étais sûre, tu as couché avec lui... Enfin! Alléluia » levant les bras au ciel.
Je crois vraiment que mon abstinence sexuelle non désirée et prolongée préoccupait légèrement ma copine !
- « Merci... »
- «Non, mais depuis le temps! C'était comment ? Aller, dis-moi, non attends, ne me dis pas, cligne une fois des yeux si c'était bof et deux fois si c'était bien ... »
Cette fille est folle, mais je joue le jeu et cligne une fois de yeux, elle grimace, puis je cligne une deuxième fois, puis une troisième et une quatrième, je pourrais cligner des yeux une centaine de fois que je ne suis pas sûre que ça suffirait...
- « Oohhh petite dévergondée ! Tu craques complètement ! Tu es amoureuse... »
- « Non mais ça va pas » je me défends rapidement.
Comment tomber amoureuse d'un homme avec qui j'ai à peine parlé et passée juste une nuit, une très bonne nuit, je l'admets, on n'est pas dans un film ni un conte de fées, c'était quand même vraiment une très bonne nuit...
C'est simplement une attirance physique très forte, chaude et électrique, ou mon manque de relation qui a pris le dessus, voila c'est ça, j'étais en manque et avec le sang que j'ai perdue, je n'étais pas complètement moi-même...et puis je suis humaine, j'ai des besoins à assouvir, et il passait par là...
- « Ok ok, tu le revois quand ? »
- « Je ne sais pas, il a dû partir avant que tu ne rentre pendant que je dormais »
- « ah » grimace Lilie, je la connais, elle s'inquiète pour moi et mon petit cœur qui a déjà été bien brisé.
- « Mais il m'a laissé un petit mot pour me dire qu'il partait pour le travail » mais rien n'y change mon sourire n'est plus aussi sincère.
Après tout, je ne connais absolument rien de lui, hormis son nom, il écrit peut-être le même mot à ces conquêtes sans plus jamais leur donner de nouvelles après, une lettre type rédiger par sa secrétaire par dizaines... comme une carte de visite.
- « Aller changeons de sujet » me coupe Lilie pour éviter que je ne plonge dans la déprime et retourne me cacher sous la couette.
Mais c'est trop tard, cette idée me taraude, je lui souris, un sourire moins franc, mais je ne veux pas qu'elle s'inquiète et qu'elle essaye de me rassurer, une fois que je suis tracassé par un sujet, il faut que je me change les idées, en parler ne m'aide pas, j'ai besoin d'un peu de temps.
Je dois me rendre à l'évidence, j'étais le coup d'un soir, une fille facile, il a peut-être attendu que je m'endorme pour filer et retourner à la soirée à la recherche d'une autre proie pour le reste de la nuit.
- « Aller, je vais jeter un coup d'œil à ta main » la prenant doucement dans la sienne.
Elle défait doucement le bandage, c'est moi ou il a fait cinquante tours, je ne risquais pas de la perdre. Lilie a l'habitude de soigner mes petits bobos, s'il y a le moindre bout de verre dans l'appartement, on peut-être sûr que, où qu'il soit, il finira dans ma main ou sous mon pied pour me couper... J'ai même réussi l'année où nous sommes parties en vacance entre amis à l'île d'Oléron à m'entailler le pied assez profondément avec une coquille d'huître, j'ai toujours une cicatrice ici aussi pour me le rappeler, c'était la même semaine que ma chute qui m'a coûté mes points de suture sur la fesse. Quelle semaine en y repensant, je ne peux clairement pas l'oublier, graver à jamais sur ma peau, pourtant hormis ces deux accidents j'en garde un excellent souvenir !
Bref, j'ai la poisse absolue, je suis maladroite, et accessoirement tête en l'air aussi, je ne peux pas le nier.
- « Quand même, tu ne t'es pas loupée cette fois.. »
J'ose à peine regarder.
- « Je sais, j'étais tellement mal à l'aise d'avoir renversé le plateau que je me suis presque jetée dessus pour ramasser sans faire attention »
- « Tu peux regarder ça ne saigne pas ça va te gêner encore quelque jours, surtout là, au milieu de la paume »
Quand j'ose enfin regarder, je vois tout de suite la belle entaille, je comprends mieux d'où venait tout ce sang.
- « Je vais chercher de quoi désinfecter et te refaire un bandage pour être sûre que ça ne se rouvre pas, et que ça ne te gêne pas quand tu fermes la main »
A peine une minute plus tard elle réapparaît avec la trousse pleine de pansements, de désinfectant... ce n'est pas mon sac à main, mais cette trousse que je devrais emmener absolument partout.
- « Alors comment était la soirée ? »
- « Sympas, tout le monde a été plutôt agréable, aucun problème. »
- « La chance, avant que je ne me coupe, je suis tombée sur un Monsieur, disons le franchement chiant, il doit d'ailleurs toujours attendre son verre.. »
- « Je ne l'ai pas croisé celui là. Ah, je t'ai ramené ta veste au fait, tu l'avais laissée sur le toit »
- « Merci, je voulais t'envoyer un message, mais après.. » Liam, notre nuit me revient à l'esprit.
- « Julia, tu es partie où là !? »
Lilie me tire de mes pensées en passant sa main devant mes yeux, je me force à mettre ces images dans un petit coin de mon cerveau, quand les compliments sur ma robe me reviennent.
- « Oups, je réfléchissais, j'ai eu le droit à des beaux compliments sur la robe que je portais hier, une femme l'a adoré »
- « Je sais »
Je suis surprise, je ne me rappelle pas lui en avoir parlé, à moins que je ne perde la tête, ce serait inquiétant à mon âge.
- « Comment ça, tu sais ? »
- « Elle a demandé à Mélissa si c'était elle qui avait fait une robe pour sa meilleure amie, elle s'est doutée que c'était moi qu'elle cherchait et m'a désignée »
- « Ahh ! Mais c'est super, tu aurais dû venir me réveiller pour me raconter tout ça. »
- « Je n'allais quand même pas sauter sur ton lit a quatre heures du matin, j'aurais eu trop peur de me faire tuer ! » continuant mon pansement
Elle n'a pas tort, je ne suis pas toujours aimable au réveil, j'ai besoin d'un bon café, sans lui, je ne peux pas contrôler mon humeur, quoi que cette nuit m'a mise de bonne humeur, enfin m'avait, ma jovialité est redescendue d'un étage.
- « C'est vrai que c'était risqué. Et alors ? »
- « Alors elle m'a laissé sa carte et veut que je lui crée une robe, enfin des croquis dans un premier temps. »
- « AHH c'est super, génial, depuis le temps que je te dis que tu as beaucoup de talent, et toi tu me sors ça, comme ça, modeste comme ci ce n'était rien ! »
J'attends qu'elle ait fini mon bandage et la serre fort dans mes bras, je suis si fière d'elle.
- « Une de nous va réaliser son rêve, je suis trop heureuse ! »
- « Merci... Je ne veux pas trop m'emballer pour le moment, c'est tout. Je t'aime tellement, c'est un peu grâce à toi, elle m'a dit que tu étais superbe avec ta robe. »
Je suis émue, Lilie ma meilleure copine depuis toujours va réaliser une robe et je sais qu'après ça, il y en aura tellement d'autres. Ce n'est que le début, elle est bourrée de talent.
- « Je dois l'appeler demain, pour fixer un rendez-vous et discuter de ce qu'elle veut exactement, pourvu qu'elle aime mes idées.. »
- « Je me fait aucun soucis pour ça, tu vas tout gérer et elle va adorer. »
Lilie rougit, on pourrait croire qu'une fille comme elle, belle, drôle et intelligente aurait pleinement confiance en elle, mais pas elle, elle doute souvent, mais je suis là pour l'aider, comme elle le fait aussi pour moi, on se pousse l'une l'autre.
- « Et si on allait voir les garçons ? Ils doivent repartir demain soir pour une semaine. »
- « On peu faire une petite soirée ici s'ils veulent bien, avec Lucie et on pourrait inviter Mélissa et la présenter à Anthony ils devraient bien s'entendre tout les deux. »
- « Je pensais la même chose, de vraies marieuses... »
Lilie file s'habiller rapidement en riant dans sa chambre et nous montons rapidement à l'étage du dessus en prenant les marches, à défaut de jogging... Et puis passer devant l'ascenseur me fait repenser à notre premier baiser échanger avec Liam, je ne sais pas si je pourrais le reprendre un jour sans rougir avec un sourire béat, ou déçue d'avoir été prise pour une idiote.
Je ne ressemble pas à grand-chose, j'ai relevé mes cheveux avec une barrette et je porte un leggings avec un long t-shirt, j'étais prête pour aller courir, ou pour squatter le canapé. Je dois bien avouer que ça m'arrange bien d'y échapper ce matin, je suis encore courbaturée par cette fabuleuse et grisante nuit.
Dès la première sonnerie, la porte s'ouvre, leur appartement est disposé comme le nôtre, en plus masculin, grand écran plat, console de jeux, bibelot et photos personnelles en moins. Je leur envie par contre leur organisation et leur maniaquerie, c'est bien rangé pour un repère de mâle.
C'est Thomas qui nous ouvre, vêtu d'un simple jean comme à son habitude et d'un t-shirt à l'effigie de superman, il est très beau avec ces cheveux tout ébouriffés, je ne crois pas l'avoir vu habillé autrement, c'est d'ailleurs leur style à tous les deux.
- « Salut les filles ! » Nous faisant signe d'entrée. « Vous allez bien ? »
- « Oui très bien et vous ? »
Anthony est assis sur leur canapé immense et comme neuf qui trône au milieu de la pièce, il détourne le regard quelques secondes avant de reprendre sa partie.
- « On vous dérange ? » je demande
- « Salut les voisines ! Non, vous voulez faire une petite partie ? »
- « Non merci. » Répond aussitôt Lilie, qui n'aime pas vraiment ce genre de jeux.
Il nous arrive de jouer avec eux de temps en temps, je me défends plutôt bien, sans me vanter, je suis loin d'égaler les garçons. Lilie est l'une de mes rares amies filles, sinon j'étais plus proche des garçons et de mon frère qui m'a appris. Penser à eux me fait un petit pincement, ils me manquent vraiment, vivement que je les revois...
- « Non, ça va » je réponds, « on venait juste vous demander rapidement si vous vouliez venir à l'appart ce soir pour une petite soirée avant que vous ne partiez demain »
- « Pour ce soir, on comptait justement vous inviter ici, il y aura Lucie et quelque amis » nous explique Thomas
- « Pourquoi pas, je pensais inviter Mélissa, une collègue, ça ne vous gêne pas si elle vient ? » demande Lilie.
- « Non, bien sûr, plus on est de fou... »
- « C'est super, on emmène quelques truc à grignoter et de quoi faire des cocktails? »
- « Je ne connais personne qui consomme autant de mojito que vous... Attend, c'est toi qui vas cuisiner ? demande Anthony sans quitter sa partie.
Je m'approche de lui pour lui donner une tape sur l'épaule, faussement vexée, je ne lui en veux pas, je ne cuisine pas vraiment bien, mise à part quelques apéritifs que je maîtrise, mais il ne peut pas s'empêcher de taquiner.
Se retournant mimant une grosse douleur à l'épaule, il remarque ma main bandé.
- « Qu'est ce qui t'es arrivé Julia ? »
- « Pas grand-chose, j'ai perdu un combat contre une flûte, mais mon infirmière à vérifier, je devrais survivre » indiquant Lilie de la tête, qui n'a pas du m'entendre, occupé à discuter avec Thomas à voix basse, et heureusement sinon ils auraient eu l'histoire complète...enfin pas les détails quand même.
Quand on sera toutes les deux, je lui demanderais de ne pas en parler, enfin surtout la partie où je couche avec un homme que je ne connais pas et que celui-ci s'enfuit en pleine nuit sans me réveiller, me laissant seule. Je n'ai pas envie d'attirer la pitié, je sais qu'elle me comprendra, elle ne veut pas me blesser, ou me mettre mal à l'aise.
- « Tu n'en rates décidément pas une toi »
- « Tu me connais, c'est trop tard pour changer ! » Puis me retournant vers Lilie « Qu'est-ce que vous nous préparez tous les deux. »
- « Oh rien » répond Lilie surprise d'être interrompue « On va vous laisser les garçons, on va préparer ce qu'il faut. A ce soir ! »
Nous quittons leur appartement pour rejoindre le nôtre, mais malgré mes questions, Lilie n'a pas voulue me dire ce qu'ils tramaient tous les deux, je ne sais pas pourquoi, mais j'ai un mauvais pressentiment.
Lilie me cache quelque chose, ou prépare un truc. Je peux le lire sur son visage, elle transpire la culpabilité et pour qu'elle ne m'en parle pas, je ne peux que me sentir visée, je la connais trop bien, surtout quand elle me fait ce petit sourire faussement innocent.
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