"Tu peux répéter ?", articula Idras avec lenteur.
Idris soupira. Il savait qu'elle réagirait de cette façon face à la nouvelle.
Mais il s'exécuta tout de même:
- Je compte refuser.
Idras l'observa lentement, semblant avoir du mal à digérer l'information. Enfin, elle laissa échapper un rire tremblant, moqueur.
"Tu n'es pas sérieux, j'espère ?", demanda-t-elle avec dédain, sa voix tressautant sous son éclat.
Idris se contenta de garder la même expression, imperturbable.
Cela eut pour effet de calmer Idras.
"Tu es sérieux. ", nota-t-elle avec incrédulité, une grimace méprisante déformant son visage.
Oh oui, Idris était on ne peut plus sérieux.
"Je ne sais pas si je dois en rire ou en pleurer.", siffla-t-elle en venant se planter devant sa table.
Les mains toujours croisées devant son visage, le Draconique cacha un sourire.
Sa soeur était si prévisible.
"Les deux, peut-être ?", proposa-t-il.
La Démone frappa son bureau de ses paumes, faisant trembler les fournitures tandis qu'elle s'appuyait vers son frère, de la furie dans le regard.
Là encore, pas de surprise.
"Épargne-moi tes traits d'esprit, Idris ! cria-t-elle. Ce que tu proposes est pure folie !
Nullement intimidé, Idris roula ses yeux.
"Ne soit pas si dramatique. Mon idée est plus que raisonnable."
Idras bafouilla un instant, submergée par la rage et la confusion.
"Parce que tu appelles raisonnable refuser l'aide de l'Enfer ?", s'exclama-t-elle, ses bras brassant l'air avec frustration.
- J'irais même jusqu'à dire logique, ma sœur. "
Idras prit un air sombre, ses yeux écarlates brillant de menaces.
"Ne m'appelle pas comme ça. Et ne soit pas stupide. Agir de cette manière causerait notre perte à tous."
Idris se permit un petit rire
"Je t'ai dit d'arrêter d'être si dramatique. " Il la vit ouvrir la bouche pour répliquer mais la coupa dans son élan. "Ne te cache pas derrière de nobles arguments. Je sais très bien que si mon idée te répugne autant, c'est parce qu'elle te met en mauvaise posture auprès de ton précieux roi."
Il avait craché ses derniers mots avec haine et dégoût, ses mains tremblant légèrement devant lui.
Face à sa réaction, Idras renifla rudement.
"Peut-être bien, mais ne va pas non plus me faire croire que la chose n'est pas personnelle."
Idris plissa le nez et s'enfonça dans son siège.
"Je le hais, certes, mais c'est loin d'être la principale raison de ma décision. "
La frustration envahit de nouveau les traits de la Draconiaque.
"Alors expose-la moi, ta si incroyable raison ! explosa-t-elle. Tu oublies que nous sommes deux dans cette affaire ! J'ai mis en jeu mon intégrité en choisissant de t'aider, Idris ! La moindre des choses en échange serait que tu m'expliques un tel revirement de situation !", pesta-t-elle en faisant les cent pas.
Idris aurait tellement aimé croire sa sœur. Il ne demandait que cela. Mais il était temps de penser en tant que meneur, plus en tant que frère.
"Oh, arrête ! persiffla-t-il. Je sais très bien pourquoi tu m'aides ! Et ce n'est certainement pas parce que tu as soudainement décidé que tu tenais encore à moi !"
Idras grogna, ses crocs claquant brutalement l'un contre l'autre.
"Tu veux ma raison ? rugit-il en passant des doigts fébriles dans ses cheveux. La voilà ! Parce que ton salaud de roi est mouillé jusqu'au cou dans le meurtre de l'ancien Empereur ! Parce que son intérêt soudain pour les affaires de l'Empire pue l'embrouille et la trahison !" Il se leva, frappant à son tour son bureau pour se pencher vers Idras, un doigt accusateur pointé sur elle."Parce que je ne te fais pas confiance et que m'allier avec ton roi serait comme poser son épée sur ma nuque dégagée!"
La Démone éclata d'un rire glacial, cruel et menaçant.
"Qui est dramatique à présent, hum ? se moqua-t-elle avant de siffler, la rage transformant son visage en un masque grotesque. Pauvre imbécile ! Ne va pas me faire croire que tu ignorais tout cela ! En acceptant mon aide, tu savais ce que tu risquais ! Tu savais que tu coopérais avec le Diable au moment de notre alliance !
- Coopérer ? la coupa-t-il froidement. Par les Six, Idras ! C'est exactement pour cette raison que je ne veux pas que ton roi s'investisse davantage dans ce conflit ! Coopérer ! répéta-t-il avec haine. Sa soif de pouvoir est dévastatrice et insatiable ! Et il est hors de question que je le laisse contrôler la situation ! Il ne m'aura pas sous sa coupe ! Il n'aura pas mon peuple sous sa coupe ! Moi vivant, jamais.", finit-il, plus calme.
Devant lui, Idras tremblait de fureur.
"Et tu es assez naïf pour penser que tu peux te passer de ses forces ? lança-t-elle avec un sourire amer. Les Enfants de Gaïa et mes troupes; voilà à quoi se résume tes alliés stables. Soit réaliste, Idris: ce ne sera jamais suffisant face à l'armée de l'Empire !"
Ainsi, elle changeait de tactique... Idris lui ressemblait sur ce point là.
"J'ai d'autres solutions, rétorqua-t-il, confiant.
- Ah ? Et quelles sont-elles ? L'Alliance ? Les Six ? Non... Laisse-moi deviner..."Elle rit froidement." Onyx ?"
Il fit mine d'examiner ses papiers.
"Ce n'est plus de la naïveté à ce stade, mais de la stupidité ! renchérit-elle en avançant vers lui, plus méprisante que jamais. Nous n'avons plus de nouvelles de lui depuis la mort de maman. Tu crois sincèrement qu'il va réapparaître à un moment pareil ? Imbécile. Grandis donc un peu ! Réalise que ta gentille petite famille n'existe plus !", termina-t-elle en lui arrachant ses documents pour les reposer brutalement devant lui.
Le Draconique lutta pour ne pas céder à la colère. Les paroles de sa sœur étaient bien trop proches de la vérité à son goût.
"Et les lettres ? chuchota-t-il en plantant ses yeux dans ceux d'Idras.
- Les lettres ? fit-elle avec un amusement acide. On ne sait même pas si elles sont vraiment de lui ! Et même si c'est le cas, ce ne sont que des mots. Quelle grande avancée ! se moqua-t-elle. Réveille-toi, Idris !" Elle le prit par le col, le secouant à chaque mot."Il n'a pas supporté la mort de maman et il nous a abandonné !"
Elle recula, du dégoût sur le visage.
"Il ne se décidera pas à devenir un père responsable parce que nous sommes en danger. Il ne l'a pas fait par le passé, alors pourquoi maintenant ?"
Idris serra les dents. L'abandon d'Onyx avait été un coup dur pour eux deux. Même à ce jour, la blessure n'était pas tout à fait guérie. Le souvenir d'un père bourru mais aimant avait depuis longtemps laissé place à l'amertume.
Et à la culpabilité.
"Je ne changerai pas d'avis, Idras. Tant que je peux l'éviter, je ne m'allierai pas plus avec ton roi.
- Parce que ta fierté ne le supporterait pas ? le provoqua-t-elle.
- Je te l'ai dis: il ne m'aura pas sous sa coupe; il ne contrôlera pas mon peuple."
Sa réponse sembla déstabiliser Idras.
"Mais il t'a déjà sous sa coupe, Idris...souffla-t-elle avec lassitude. Tu ne t'en rends pas compte, mais c'est déjà trop tard. Dès le moment où j'ai été en son pouvoir, ta fin était garantie."
Idris fronça les sourcils. Était-ce bien de l'inquiétude qu'il voyait dans son regard?
Ou bien de la haine ?
"Est ce une menace, ma sœur ?", fit-il, la mort dans l'âme.
Idras baissa les yeux et mordilla sa lèvre jusqu'à goûter du sang. Elle offrait une vue bien étrange, à cet instant. Adieu la femme forte et féroce. Elle laissait place à la petite fille perdue qu'elle avait été par le passé.
Idris se retint de la prendre dans ses bras.
"Non, hélas, chuchota-t-elle. C'est bien pire."
Elle releva la tête, son expression de nouveau maîtrisée.
Son frère étouffa un juron.
Sa sœur avait depuis bien longtemps cessé d'être sa moitié incandescente.
Idras avait dû tuer l'enfant en elle il y a déjà des centaines d'années de cela.
"Fais ce qu'il te plaît après tout, maugréa-t-elle. Soit têtu et borné. Mais sache que ce que mon roi veut, mon roi l'a.", termina-t-elle, sa voix résonnant dans l'air comme un présage de mort.
Et sur ces dernières paroles, elle quitta la salle comme une tempête, la porte claquant sur son passage.
Toujours aussi mâture.
Idris soupira longuement et se massa l'arrête du nez avec fatigue et désarroi.
"Quelle tristesse...", lâcha-t-il doucement en examinant avec nostalgie son médaillon.
Quelle tristesse, en effet.
Sa sœur était si proche....et pourtant si loin.
Il rangea le médaillon, forçant son cœur à s'endurcir.
Il prenait la bonne décision, il en était certain.
Mais malgré tout, une crainte sans nom enfonçait ses serres acérées dans ses tripes.
"Dès le moment où j'ai été en son pouvoir, ta fin était garantie."
Car au fond de lui, il savait également que sa sœur disait la vérité.
Note: Je vous avais dit que la suite serait là prochainement ! *bombe le torse* Je suis fière de moi :^D ! J'ai tenu parole !
Et on retrouve Idris et Idras ! Ça faisait longtemps ! Ils m'avaient manqué ces deux cocos !
Et...encore du blabla. Mais du blabla important :D ! J'introduis beaucoup d'enjeux majeurs. J'espère que je j'aurais réussi à bien les retranscrire :") !
Le rôle du Diable dans le conflit, celui d'Idras et sa relation avec Idris, Onyx...Je place les bases pour le futur ;) !
Qu'en avez vous pensé ?
Il y aura encore du blabla dans la troisième partie, mais promis, on passe à un peu plus d'action au prochain chapitre ;) !
A la prochaine !
Ps: une bébé note pour un bébé chapitre *W* !