La tête baissée

By kiellan

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Rome, 1er siècle après JC. Daphnée, 19 ans, vient d'être capturée et se voit forcée de devenir esclave. Indig... More

Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
Chapitre 26
Chapitre 27
Chapitre 28
Chapitre 29
Chapitre 30
Chapitre 31
Chapitre 32
Chapitre 33
Chapitre 34
Chapitre 35
Chapitre 36
Chapitre 37
Chapitre 38
Chapitre 39
Chapitre 40
Chapitre 41
Chapitre 42
Chapitre 43
Chapitre 44
Chapitre 45
Chapitre 46
Epilogue
Infos

Chapitre 20

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By kiellan

Je restai un instant interdite. J'étais proche d'Eulalie, mais lui faisais-je assez confiance pour tout lui avouer ? Je m'étais mise d'accord il y a quelques minutes avec Aaron pour ne rien dire à personne, et voilà qu'un problème se posait déjà à nous. Je ne connaissais mon amie seulement que depuis un mois, cependant, jamais elle n'avait fait preuve de cruauté ou de méchanceté, au contraire, c'était la gentillesse et la timidité incarnée. En plus de cela, j'avais besoin de me confier. Je pris une grande inspiration, et commençai par lui expliquer.

- Nous nous entendons bien tout les deux, et à un moment, nous étions un peu plus proches que prévu l'un de l'autre et nous avons faillit nous embrasser, chuchotai-je alors que ses yeux s'écarquillaient. Ne t'inquiète pas, il ne s'est rien passé et je suis partie précipitamment.

- Ce n'est pas vrai Daphnée ! Est-ce que tu te rends compte à quel point c'est grave ?

Elle paraissait soudainement affolée et sa voix était montée plus que nécessaire dans les aigus quand elle m'avait posé la question.

- Eulalie, nous avons mis les choses au clair, calme toi. Nous nous verrons mais juste en temps qu'amis. Nous nous apprécions, c'est tout. Nos sentiments ne vont pas au-delà de la sympathie.

- Mais si la situation dérape et que vous vous faites prendre ? Nom de Jupiter, il va se marier ! Vous ne pouvez pas faire cela, et prendre le risque !

- Mais que veux-tu que je fasse ? m'exclamai-je, c'est lui qui m'a demandé de revenir !

- Alors évite le un maximum.

- Il m'a demandé de l'accompagner au port, demain, avouai-je toute penaude.

Elle grommela un instant, les sourcils froncés.

- Très bien Daphnée, tu as décidé de t'embarquer dans cette histoire, mais ne compte pas sur moi pour te sortir du danger !

- Bien sûr, je ne me permettrai pas.

- Nous sommes d'accord.

Elle reparti dans la cuisine, sans me lancer un regard. C'était la première fois que je la voyais énervée, et en plus de cela, c'était contre moi. Je retournai également dans la pièce, essayant de me faire le plus discrète possible. Stella ne fit aucune remarque, même si elle remarqua la situation tendue et nous donna des indications, comme à son habitude.

Lorsque nous commençâmes à servir le repas, je vis qu'Eulalie serrait les poings lorsqu'elle due servir Aaron. J'implorais mon amie du regard, et elle ne fit heureusement aucune remarque. Mon maître quant à lui, prenait grand soin de m'ignorer, ce qui m'exaspéra. Je savais pertinemment que c'était ce que nous avions convenus, seulement, le voir aussi froid après avoir passé l'après-midi à rigoler tout les deux, me crispa.

Lorsque nous mangeâmes entre esclaves, je parlais tranquillement avec Stella et, Julius discutait avec Eulalie qui m'évitait soigneusement. Je finis par soupirer et dire que j'étais fatiguée. De retour dans ma chambre, je m'allongeais dans mon lit et me mis à jouer pensivement avec le bracelet en bronze d'Alexandre. Il me manquait tellement. S'il avait été là, il aurait déjà trouvé une solution, et je ne me serai pas sentie aussi seule. Je ne regrettai pas d'avoir dit la vérité à Eulalie, car elle avait le droit à ma sincérité. Seulement, j'avais peur d'avoir perdue ma seule amie, en étant franche avec elle. Viendrait-elle me chercher comme à son habitude pour m'accompagner aux thermes le lendemain ? Frustrée, je me roulais en boule dans mon lit, et m'endormis.

Lorsque le soleil se leva et que les oiseaux commencèrent à gazouiller, personne ne vint toquer à ma porte. Eulalie avait donc décidé de m'ignorer. C'est donc seule, et l'esprit morose que je partis en direction du centre ville. En chemin, je me demandai si j'étais prête à sacrifier mon amitié pour Aaron afin de garder celle d'Eulalie. La réponse était non. Seulement, je ne voulais pas perdre non plus celle de mon amie si je continuai à parler avec mon maître. Il allait falloir trouver un compromis.

Je trouvais cela étrange d'être dans les thermes, seule. J'avais pris l'habitude d'avoir de la compagnie, et ma gorge se serra à cette pensée. Je me dépêchai donc de me laver, ainsi que mes vêtements, et repartis à la villa. Je préparais le repas, sans voir l'ombre d'Eulalie, qui devait m'éviter à la laverie. Lorsque nous eûmes finit de servir notre famille, j'attendis que le repas se termine en mangeant une pomme. Après cela, je rejoindrai Aaron derrière la fontaine pour notre expédition au port. Pendant que je dégustai mon fruit, Stella vint à ma rencontre.

- Alors, ma brebis, que se passe-t-il entre Eulalie et toi ?

Je mastiquai ma pomme, ne sachant quoi répondre.

- Rien de grave, Stella. Nous nous sommes seulement disputées pour une petite broutille, cela va s'arranger.

- J'espère bien, vous êtes si mignonnes toutes les deux quand vous riez ensembles ! Il serait stupide de perdre cette amitié.

J'acquiesçai, pensive, et elle repartit faire la vaisselle. Finalement, le moment fatidique arriva, et je partis vers mon point de rendez-vous prévu avec Aaron. Lorsqu'il me vit apparaître, devant la fontaine, un large sourire éclaira son visage. Il portait comme à son habitude une tunique luxueuse, et sa petite barbe de trois jours. Je pris soin de vérifier que nous étions seuls et m'approchai de lui. Lorsque je fus assez proche, il m'attira immédiatement à lui et me serra dans ses bras. Son emprise m'enveloppa dans un cocon de bien-être et j'emplis mes narines de son délicieux parfum. A contre cœur, je me détachai rapidement et essayai de prendre un air sévère.

- On avait dit : « distance de sécurité entre nous ».

- Désolé, je disais juste bonjour. Simple mesure de politesse, répondit-il avec un petit sourire innocent. Tu es prête ?

- Allons-y !

C'est enjoués que nous partîmes en direction du port. Je ne m'étais jamais rendue dans cette zone de la ville, et c'est avec une certaine excitation que je m'approchais. J'avais mis de côté l'éloignement d'Eulalie, et me concentrai sur l'instant présent. Quelques nuages voilaient le ciel, malgré tout, cela restait agréable et je profitais du temps passé à l'extérieur. Nous voyions des enfants jouer et se chamailler, et je ne pus m'empêcher de sourire. Certains couples marchaient main dans la main, et le reste du peuple en profitait pour se prélasser pour les plus riches, ou travailler, pour les plus pauvres. Je me demandai s'il fallait que j'informe Aaron que j'avais prévenu mon amie esclave, mais m'en abstins. S'il savait que j'en parlais, peut être n'allait-il pas se gêner à se confier à un ami en qui il avait confiance. Alors que nous nous approchions du port, je lançai :

- Je ne me suis jamais rendue, dans ce genre de port.

- Vraiment ? Tu verras, c'est assez impressionnant au début. Il y a du monde partout, et les marchands semblent assez pressés.

- Au fait, que faites vous comme commerce ? Je ne vous avais jamais demandé.

- Ma famille entretient des relations avec des Gaulois et des Carthaginois. Nous transportons essentiellement du blé, des huiles, du vin, et de la farine. Cela rapporte beaucoup.

- J'imagine.

- Que faisaient tes parents, dans leur village ?

J'inspirai profondément, essayant de ne pas trop penser à ce qui était advenu d'eux.

- Mon père travaillait dans les champs, et ma mère restait à la maison, pour s'occuper de nous. Parfois, elle se rendait dans des familles, aidant les personnes malades. Elle adorait l'usage des plantes médicinales.

- Tu sais Daphnée, ce que je vais dire va peut-être te sembler horrible mais...

Il s'arrêta de parler, tentant de trouver ses mots. Je l'encourageai du regard. Ses yeux bleus se perdirent dans les miens, comme-ci il souhaitait me dire tout ce qu'il retenait. Finalement il avoua.

- Parfois, je suis heureux que tu aies été capturée. Ne te méprends pas. Ce qu'ils t'ont fait à toi, et ton village, est absolument affreux, inhumain ! Non, seulement, si on ne t'avait pas emmenée de force cette nuit là, nous ne nous serions jamais rencontrés.

Cet aveu me toucha. Je n'irai pas jusqu'à dire que moi aussi, j'avais été ravie de voir mon village à feu et à sang. Cependant, ma rencontre avec Aaron avait été un grand bouleversement. Je me sentais proche de lui, j'aimais me confier, malgré que ce soit mon maître, c'était avant tout un ami désormais. Pour toute réponse, je lui pris la main et la serrai, essayant de lui faire comprendre que ce qu'il m'avait confié m'avait ému. Il me rendit mon geste, malheureusement, il y avait du monde autour et nous fûmes obligés de nous éloigner l'un de l'autre.

- Ca y est, nous sommes arrivés, annonça Aaron.

Le Tibre s'étendait devant moi, miroitant. Le port était conçu de manière circulaire et de nombreux bateaux de toutes tailles étaient amarrés. C'était immense, et impressionnant. Partout, on voyait des tonneaux, des marchandises défiler, se passant de mains en mains. Les couleurs étaient vives et de nombreux cris se faisaient entendre. Je pouvais sentir l'air marin, et instinctivement, je m'approchais de l'eau, voulant la toucher. Contrairement à ce que l'on aurait pu penser, le liquide était assez limpide malgré le fait que nous nous trouvions dans un port. Aaron s'était approché, et me regardait, amusé. Je me mis à observer un énorme navire. Le bois était absolument magnifique, à la proue on voyait une femme sculptée et dessous le nom du vaisseau. Amphitrite. Un instant, je me demandais ce que procurait la sensation de voguer sur la mer. Je n'avais jamais eu l'occasion de monter à bord, alors que l'océan m'attirait irrémédiablement.

- Tu sembles bien captivée, remarqua mon maître.

- Je me demandais ce que cela faisait de naviguer, commentai-je.

- Comment ça ? Tu n'es jamais montée sur un bateau ? comprit-il, surpris.

- Non... Quand en aurais-je eu l'occasion ? Il n'y a pas de mer ou de fleuve vers mon petit village.

Il fronça les sourcils et m'attrapa soudainement la main.

- Viens.

Il m'entraina à travers la foule. Nous évitions les marchands, avec agilité et avancions.

- Où allons-nous ?

Il ne prit pas la peine de me répondre et continua son chemin. Enfin, nous nous arrêtâmes devant un bateau, assez simple. Un petit homme moustachu était assis devant. Il mâchouillait tranquillement je ne sais quoi. Lorsqu'il nous aperçut, il se redressa imperceptiblement et inclina la tête.

- Monsieur Aaron, que nous vaut le plaisir ?

- J'ai besoin de ton bateau, maintenant.

Il blêmit légèrement. Finalement, le moustachu se racla la gorge et répondit.

- Désolé, je ne le prête pas.

- On peut arranger cela. Ne t'inquiète pas, cela durera deux heures tout au plus.

Aaron sortit d'une petite sacoche plein de pièces. Il fit teinter les sesterces dans la main de l'homme qui sembla tout à coup ravi.

- Très bien, allez-y. Tout ce qui est à moi est à vous. Revenez me voir quand bon vous semble.

A mon avis, Aaron l'avait plutôt bien payé vu la tête que le moustachu faisait. Mon maître me reprit la main et m'entraina sur le bateau. J'étais complètement déboussolée. Il venait sérieusement de payer un homme pour me permettre de réaliser une expérience nouvelle ?

- Mais enfin, Aaron ! On ne peut pas faire cela, c'est trop ! Je croyais que vous aviez des marchandises à récupérer...

- Remercie-moi, au lieu de te plaindre sans cesse, Daphnée.

Je me tus mais finis par le remercier. Une fois sur le navire, je courus jusqu'au bastingage. L'embarcation tangua légèrement, et je ne pus retenir un gloussement. Je fis glisser mes doigts le long du bois et admirai la vue du port, vue d'au dessus. Aaron se plaça à ma droite et me murmura à l'oreille.

- Maintenant, profite.

Il me quitta et se mit face à la barre. On aurait dit un navigateur, et je ne pus m'empêcher de sourire lorsqu'il posa ses mains sur le volant.

- Tu voudrais bien retirer l'ancre pour moi, s'il te plaît ? me demanda-t-il.

- Où est-elle ?

Il me désigna l'opposé du bateau, et c'est donc là bas que je me rendis. Je me saisis de la corde et avec difficulté, je commençai à remonter le poids.

- C'est lourd ! gémis-je.

Aaron se détacha immédiatement de la barre pour venir m'aider. Ses bras puissants m'entourèrent et il m'aida à soulever l'ancre. Mon dos se trouvait contre son torse, ce qui me permettait de sentir la moindre de ses respirations. Son souffle créait un léger courant d'air sur ma nuque, ce qui me perturba. Une fois remontée complètement, nous déposâmes l'ancre et je m'éloignais. Il savait très bien que je lui avais posé des limites et jouait avec. Aaron comprit, et repartit à la barre, sans un mot.

Lorsque le navire commença à avancer, je laissai échapper une exclamation de surprise et m'accrochai au rebord. Peu à peu, le port s'éloigna et nous pûmes prendre de la vitesse. C'était incroyable ! Je flottai sur l'eau. Les embruns me tombaient sur le visage, et je fermais les yeux savourant ce moment unique. Le soleil réchauffait mon corps qui tanguait de droite à gauche. Finalement, je laissai échapper un rire insouciant, me retournai et me mis à courir jusqu'à me jeter dans les bras d'Aaron.

- Merci milles fois ! C'est incroyable.

Je venais de le bousculer et il fut obligé de lâcher la barre afin de me rendre mon étreinte.

- Je t'en prie, cette petite virée n'a pas de prix, quand je vois comment tu souris.

J'observai le ciel, devenu nuageux, toujours serrée contre lui. Une angoisse m'envahit.

- Aaron ! Et s'il y avait un orage et qu'il renversait le bateau ! Nous allons mourir ! Je ne sais pas nager !

- Vraiment ? Il faudra que je t'apprenne un jour. Ne t'inquiète pas, il n'arrivera rien de tout cela. S'il y avait réellement eu un risque de violente pluie, je ne t'aurais jamais fait quitter le port.

J'hochai la tête et nous continuâmes notre petite balade en mer, tandis qu'il reprenait les commandes. A un moment, il m'expliqua comment régler les voiles. C'est plusieurs heures plus tard, que nous rentrâmes au quai. J'avais la tête pleine d'images et de sensations. Je m'en rappellerai toute ma vie. Nous avions beaucoup discuté et ri, et j'étais ravie. La carapace d'Aaron disparaissait lorsqu'il était loin de la société et je découvrais alors un homme émouvant.

Je touchai à nouveau pied à terre, suivie de mon maître. Il partit en direction du moustachu pour l'informer que son bateau était de retour quand un autre homme l'interpella.

- Aquilii ! Cela fait trois heures que j'attends pour te remettre la marchandise !

Aaron se retourna et observa l'homme d'une quarantaine d'années, un sourire angélique. Tiens donc ! Aquilii était donc son nom de famille ?

- Pardon monsieur, je n'avais pas vu le temps passer.

- C'est la dernière fois que je fais affaire avec toi, si c'est pour attendre aussi longtemps à chaque fois !

Il lui donna brusquement un petit paquet et fit demi-tour sans le saluer, visiblement très énervé.

- C'est tout ce que vous déviez récupérer ? Cette petite chose ridicule ? Vous m'aviez dit que vous aviez besoin de mon aide pour tout remonter...

Il me fit un clin d'œil, un sourire joueur aux lèvres, et nous repartîmes en direction de la villa.

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Avis ? :)

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