La 3ème Congrégation

By Apo-logie

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La Province de Nauphela est divisée en quatre Ordres : Les Chevaliers, les Fées, les Sorciers et les Archers... More

Prologue
Carte de Nauphela
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
Chapitre 26
Chapitre 27
Chapitre 28
Chapitre 29
Chapitre 30
Chapitre 31
Chapitre 32
Chapitre 33
Chapitre 34
Chapitre 35
Chapitre 36
Chapitre 37
Chapitre 38
Chapitre 39
Chapitre 40
Chapitre 41

Chapitre 11

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By Apo-logie

Souvenirs...

Ce fut la première fois que Nikolaï me parla de la Deuxième Congrégation. Je l'avais rejoint chez Anton, son patron qui deviendra le mien quelques années plus tard, après son service. Nikolaï travaillait comme serveur à l'auberge depuis qu'il avait treize ans. A cette époque, je ne travaillait pas encore chez lui, mais les mercredi après-midi, j'aimais m'assoir à une table et observer Nikolaï servir. C'était toujours mieux que de rester chez Madame Olga, et de devoir supporter ses colères, son alcoolisme et ses violences. Cela me permettait le temps d'un instant d'oublier les difficultés et nos malheurs quotidiens. C'est ce jour-là que Nikolaï mentionna la Deuxième Congrégation.

— J'ai trouvé un moyen de nous en sortir, Anita, me murmura-t-il à l'oreille, alors que sa pause venait juste de commencer.

Je me souvins de son regard, à ce moment-là. Ce fut un regard illuminé d'une lueur que je n'avais pas vu depuis longtemps dans ses yeux.

A l'époque, j'étais encore jeune. Je n'avais que treize ans et lui dix sept. J'étais encore naïve, croyant sans faille au moindre espoir qui nous ferait sortir du cauchemar que Madame Olga nous faisait endurer. Mon cœur se mit à battre très fort.

— Quoi donc ?

— Ça.

Il me pointa du doigt une page de journal. Anton se procurait en secret des journaux de presse qu'il prêtait à ses proches. C'était lui qui avait fourni Nikolaï. Je lus le titre, en fronçant légèrement les sourcils. Cela ne me disait rien.

— La Deuxième Congrégation ? Qu'est-ce que c'est ?

Nikolaï s'essaya en face de moi, rapprochant son visage du mien pour me chuchoter à l'oreille.

— C'est avant tout une formation pour intégrer une sorte de Conseil très fermé. Les citoyens de chaque Ordre peuvent y participer. L'issue finale et de choisir un élu parmi chaque Ordre.

— Tu veux être l'un des élus ?

Nikolaï laissa un silence planer avant de répondre, le regard évocateur.

— Imagine. Imagine juste un instant si je réussis. Je deviendrai riche et connu, et tu n'aurais plus à vivre chez Madame Olga.

Son enthousiasme semblaient un peu trop déborder. Sur la page du journal était indiqué que la Formation ne débuterait que dans quelques années. L'avait-il compris ?

— Mais, c'est dans quatre ans, Nikolaï !

Le garçon acquiesça, m'adressant un regard sage et lucide.

— Oui, c'est dans longtemps, mais cela me laisse le temps de m'entraîner et de passer les épreuves de sélection.

J'avais envie de croire en ce que me disais Nikolaï. Mais, l'imaginer loin de moi me rendit nerveuse.

— Ça veut dire qu'on va être séparés ?

Nikolaï perçut dans mes yeux mes craintes. Il pris tendrement mon visage entre ses mains, m'accordant un regard réconfortant et sûr de lui.

— Pendant un petit temps, on le sera, mais pas pour la suite. On aura un véritable avenir, Anita. On pourra s'en sortir, répliqua-t-il.

Nikolaï soulevait un point important. Les orphelins comme nous, notamment s'ils vivent auprès des Archers n'avaient en grandissant généralement pas d'avenir. Tenus à l'écart par les Archers puisqu'ils n'en sont pas, et par les autres Ordres puisqu'ils ont vécu que parmi les Archers, quand des gens comme nous atteignent leur majorité, deviennent des parias de la société. Les garçons deviennent pour la plupart délinquants et les filles prostituées.

La Deuxième Congrégation était donc un moyen de nous élever socialement et de quitter notre misère quotidienne.

Nikolaï dût reprendre son service après sa courte pose. Il rattacha son tablier, me tendant ensuite d'autres pages de journal.

— Lis cela et tu en sauras plus. Je ne participerai si tu me demandes de rester avec toi. Mais, prends le temps de te faire ton avis.

Il se leva et me laissa seule, devant mes journaux. Je lus cet après-midi là avec méticulosité toutes les pages, qui me passionnèrent instantanément. Je me pris d'intérêt pour ce que la Formation pourrait nous apporter, rêvant moi aussi un jour de découvrir la temps renommée Capitale d'Akasas. Ce jour-là, je vis moi aussi une chance de nous en sortir. J'étais prête à laisser Nikolaï s'en aller pour pouvoir se retrouver quelques années plus tard. Parce que je ne voyais pas d'autre issue.

Je ne pus terminer de tout lire. Je pris alors la décision de glisser dans mon sac à dos l'une des pages du journal.

Mais, ce soir-là, en rentrant au foyer, Madame Olga fouilla mon sac. Elle en sortit cette fameuse page de journal que j'avais voulu garder secrètement avec moi. Rouge pivoine, j'entrouvris la bouche, bégayant nerveusement de pitoyables excuses.

Madame Olga m'empoigna par mon teeshirt et le déchira brutalement, me laissant à moitié nues, mes mains sur ma brassière. Il attrapa un martinet, prête à me battre. C'est alors que Nikolaï hurla pour s'interposer. Il persuada Madame Olga que c'était lui qui l'avait mis dans mon sac, comme il voulait intégrer la Formation. Il lui demanda de prendre ma place et de recevoir les coups qui m'étaient destinés. Nikolaï ne pouvait pas voir quelqu'un porter la main sur moi. Si un jour, on lui demandait de se tuer pour moi, il le ferait. Nikolaï fut le meilleur grand-frère que j'avais pu imaginer.

Ce soir-là, c'est lui qui se fit battre. Il en a gardé jusqu'à sa mort les cicatrices, tellement la fureur de Madame Olga face à cette découverte l'avait rendue folle. Savoir que l'un des enfants qu'elle avait élevé prévoyait d'intégrer un dispositif créer par le Gouvernement qu'elle haïssait tant la plongea dans une immense rage. Nikolaï paya ce jour-là.

Aujourd'hui encore ses hurlements de douleurs demeurent encore dans mon esprit.

Souvenirs...




***




Le mercredi, nous n'avons ni cours magistral, ni entraînement.

Sinan a insisté pour que je l'accompagne à Onéon. Il semble délibérément décidé à me faire visiter la ville tristement célèbre pour être prénommée la ville du pêcher.

Pour y accéder, nous devons nous rendre à Akasas en train pour emprunter un deuxième à destination d'Onéon. Dans le premier train, je feuillette le journal. A Nelbel, les journaux étaient interdits par le maire. Une mesure extrême qui m'a beaucoup marquée. Les Archers de Nelbel sont pour la plupart extrémistes. Ils détestent le Gouverneur, par qui ils se sentent délaissé, et méprisent les trois autres Ordres. Cela fait des années que le maire réclame l'indépendance au Gouverneur, et forcé de constater son refus, cherche à vivre le plus possible en marge des autre Ordres. C'est donc pour cette raison que les Archers de Nelbel n'utilisent pas de magie, puisque ce serait reconnaître une dépendance face aux Sorciers, et qu'ils refusent tout contact avec l'extérieur notamment par la presse.

Sinan me tire de ma lecture.

— Tu connais quoi d'Onéon ? me demande-t-il.

Je lève les yeux de mon journal, le repliant.

— Pas grand chose. Éclaire-moi de ton savoir, je rétorque, sachant pertinemment qu'il meurt d'envie d'étaler ses connaissances.

Sinan semble avoir un manque de confiance en lui qui le pousse à chaque fois de déverser frénétiquement tout ce qu'il sait, afin d'avoir l'écoute et la reconnaissance de son auditoire.

— Bon, puisque tu insistes. Onéon est une ancienne ville industrielle, située en plein désert, au sud de la Chaîne de Bronze.

— La ville du pêcher, je renchéris, citant alors ce que j'ai entendu.

— Et tu sais pourquoi ?

Je hausse les épaules.

— Beaucoup de délinquance, j'imagine.

— Onéon est la ville du plaisir. Boîtes de nuit, tavernes, maisons closes, salle de drogue, tout y est pour passer des jours de débauches. Tout y est autorisé.

— Elle n'est pas régie par les lois de Nauphéla ?

— Normalement si. Mais, tout un groupuscule s'y est installé depuis quelques années, faisant régner leurs propres règles. La criminalité est en hausse depuis vingt ans et le Gouvernement n'y est jamais parvenu à en reprendre le contrôle. Onéon est donc devenue la ville qui échappe à la maîtrise de Nauphéla, comme si elle en avait pris sa dépendance. Les forces de l'ordre n'y mettent plus les pieds, comme c'est trop dangereux.

— Laisser une de ses ville à l'abandon, c'est un véritable acte de défaite, je lâche.

— C'est vrai. Mais, le Gouvernement ne peut rien faire. Ils n'ont pas les moyens de dresser une armée pour débarrasser Onéon, dorénavant infestée de criminels.

Je croise les bras sur ma poitrine et sens un petit frisson parcourir mon échine.

— C'est terrifiant.

Sinan n'a pas l'air aussi pessimiste que moi.

— Pourtant, Onéon n'est pas qu'un repère de malfrats. C'est aussi la ville la plus prisée dans le monde de la nuit. Elle est parfaite si tu veut faire la fête. Tu connais sa spécialité ? Les tournois de combat de salle. Si tu en as l'occasion un jour, vas-y, c'est absolument incroyable.

— Donc, tu côtoies un milieu bercé d'illégalité.

Sinan m'adresse un petit sourire complice.

— Comme si toi tu n'avais jamais rien fait d'illégal.

—...

Je détourne mon regard, sans répondre. Sinan éclate de rire.

— Tranquille, Dossard numéro 22. T'as tes secrets, j'ai les miens. Mais, ce qui est excitant c'est qu'on fait tous des trucs illégaux. Et Onéon est parfaite pour profiter de la vie sans se soucier des règles. J'ai déjà hâte de te la faire visiter.

La description que Sinan me fait de la ville me fait froid dans le dos, c'est vrai, mais ce qui est très étrange, c'est qu'en fin de compte, cela ne me rebute pas de m'y rendre. Onéon éveille en moi un mystérieux intérêt, loin d'être sain, qui me pousse à vouloir découvrir le moindre de ses recoins.

Arrivés à la gare d'Akasas, on emprunte un long couloir de correspondance. Près de la sortie menant aux quais des trains à destination d'Onéon, je porte attention à deux affiches accrochés au mur. Deux affiches mettant en évidence le portrait de deux hommes hautement recherchés par les autorités.

— Qui est-ce ? je demande intriguée.

— Si on le savait... Ces deux hommes sont les deux Sorciers les plus recherchés de tout Nauphéla. Ils vivent sûrement à Onéon, pour rester plus facilement cachés.

— Ils sont alliés ?

— Non, au contraire. Ils sont rivaux.

— Que revendiquent-ils de différent ?

— Rien. Ils revendiquent la même chose, en fait. Ils veulent tous les deux anéantir le Gouvernement. Leurs différences se situent au niveau des moyens qu'ils utilisent pour mettre en exécution leur plan.

— Quels moyens utilisent-ils donc de différents ?

Sinan pointe du doigt l'affiche de gauche. L'homme est recouvert d'une grande cape qui dissimule son visage dans l'obscurité. On n'en voit rien d'autre.

— Voici Valefor-Sans-Visage. On l'appelle ainsi parce que selon la légende, son visage se serait entièrement défiguré après de violentes batailles, et que c'est pour une raison narcissique qu'il souhaiterait le cacher à la vue de tous, au delà de dissimuler son identité. Il commets principalement des attentas à l'encontre du Gouvernement. Le risque actuel est qu'il cible la Formation de la Troisième Congrégation. Il en a fait des menaces. Comme Silva collabore étroitement avec le Gouverneur, la Formation qu'il dirige est un moyen d'atteindre le Gouvernement.

— Il a des partisans ?

Sinan acquiesce.

— Sans surprise, on les appelle les Sans-Visage. Ils ont un visage, en soit, mais il est souvent maquillé de signe tribaux. Ils sont de plus en plus nombreux et facilement reconnaissables à Onéon. Ils ont commis ses derniers temps des violents attentas à Akasas. Tout est bon pour affaiblir le Gouvernement et protester contre lui. Massacres, explosion, ils n'épargnent pas les citoyens. Et, je dois dire que s'ils peuvent toucher ceux des Ordres les plus riches à savoir des Fées et des Chevaliers, c'est encore plus satisfaisants pour eux.

— C'est eux en ont pris le contrôle d'Onéon ?

— C'est ça. Après, tous ne sont pas des meurtriers. Ce ne sont que les soldats de la garde rapprochée de Valefor qui sont impliqués dans les attentats. Les autres n'ont souvent jamais rencontré l'homme à qui ils ont prêté allégeance. C'est très hiérarchisé. Ceux plus bas dans l'échelle qui ne connaissent pas personnellement Valefor, c'est à dire une immense majorité, revendiquent leur appartenance au groupe en exécutant des tâches banales qui leurs sont confiées. C'est souvent ceux que tu vas trouver dans la rue et qui s'ont acquis du rôle de policier, par exemple. On trouve donc qu'exclusivement les Sans-Visage à Onéon. Tu ne les verras jamais à Akasas par exemple. Ce sont pour la plupart des anciens repris de justice ou des criminels qui ne risquent désormais plus rien dans cette ville, puisque les forces de l'ordre ne s'y rendent plus depuis des années.

— Donc, pour résumer, il veut s'en prendre au Gouvernement, sans épargner les citoyens Fées et Chevaliers qu'ils considèrent privilégiés. Il défend donc qui ?

— Les laissés pour compte, ceux qui se sentent exclus par le Gouvernement, et plus particulièrement des Archers et certains Sorciers.

Je hoche la tête, attentivement, et porte ensuite mon regard sur la fiche de droite. De nouveau, elle met en évidence le portrait d'un homme, cette fois-ci le visage dissimuler par un masque au de la bouche et du nez, et le haut par capuche plus petite que celle de Valefor, laissant apercevoir ses yeux. Des yeux absolument troublants, entièrement blancs.

— Et lui ? Qui est-ce ?

— Un sorcier également. Mais, un tout autre personnage. Bien plus énigmatique, répond mystérieusement Sinan.

— Pourquoi ?

— On ne sait pas qui il est ; il semble aussi impalpable que de la fumée. On ne connaît pas vraiment ses objectifs. On sait juste que les action qu'il commet à l'encontre du gouvernement ne touchent jamais les civils. Valefor est un sauvageons qui tue tout ceux qui se présentent sur son chemin. Mais, ce n'est pas son cas à lui. Ils semblent être régi par un code d'honneur qu'il respecte à la lettre. La plupart du temps, il sabote des lieux culturels, ciblant les monuments qui sont les symboles de la puissance de Nauphéla, épargnant les citoyens. Personne ne sait rien de lui, ni de ses compagnons. Il fait preuve d'une discrétion et d'une intelligence remarquable, ce qui n'est pas le cas de Valefor. La seule information qu'il laisse volontairement paraître c'est sa signature. Après chaque attentat, il y inscrit M.K.

— M.K ? Ses initiales ?

Sinan hausse les épaules.

— Sûrement.

— Qui cible-t-il, si ce n'est les citoyens ?

— Le Gouvernement c'est une évidence. Mais, pas que. On a découvert que les lieux ciblés avaient tous été érigés par Dimitris Silva.

— Tu penses que c'est une vengeance à son égard ?

— Je ne sais pas. Je pense que comme Valefor, il met en lumière les inégalités entre les Ordres et les failles du Gouvernement. Mais, je n'en sais pas plus.

— Wow... C'est...déroutant, je souffle, déconcertée.

— Tu ignorais leur existence ?

Je hoche la tête.

Ota ne m'en a jamais parlé, et aucun journal de presse qu'il m'a fourni ne mentionnait ces deux Sorciers. Après, peut-être que cela n'a que peu d'importance me concernant. Après tout, Onéon se situe loin du Camp d'Otrance, et je ne suis pas censée y mettre les pieds.

Sinan interrompt brusquement la discussion, après avoir jeter un coup d'œil à sa montre.

— Le train part dans deux minutes. On va le rater !

L'Archer se met alors à courir en direction des quai, me laissant seule devant les deux avis de recherche. Je regarde furtivement à droite et à gauche, m'assurant que je ne suis pas observée, et arrache discrètement les deux affiches pour les ranger dans mon sac. Peut-être qu'elles me seront un jour utiles, qui sait ?

Je m'empresse alors de rejoindre mon camarade, et nous voilà enfin dans le train à destination d'Onéon.

Que dire du train en question ? Il semble en bien mauvais état que celui qui reliait Otrance à Akasas. Il paraît aussi désert. Nous sommes seuls, Sinan et moi dans la rame, à l'exception d'un homme un peu étrange qui dort au fond.

L'Archer semble lire dans mes pensées mes interrogations.

— Le Gouvernement ne finance plus les rénovations de cette ligne. L'entreprise qui s'en occupe est présidée par des citoyens d'Onéon. Alors, il y a peu de conducteurs, peu de personnel, et les trains quand il y en a sont en piteux état. Mais, tant que ça fonctionne, c'est le principal.

Je porte mon regard à travers les fenêtres. La ligne est intégralement sous-terraine, ce qui m'empêche d'admirer le paysage. Ce sera la surprise quand on y arrivera.

Le trajet se passe dans un silence un peu angoissant. Seul le bruit des railles tente de nous bercer. Notre tranquillité est mise à mal quand je vois s'introduire dans la rame deux hommes.

Deux hommes qui correspondent physiquement à la description des Sans-Visage que m'a faite Sinan. Les hommes ont leur visage marqué par des signes tribaux peints en noir sur les joues et près des yeux. Il se dirige alors vers l'homme endormi pour le réveiller. De là où on est, je n'arrive pas à entendre ce qu'ils disent.

— Est-ce que c'est...?

— Des Sans-Visages ? Oui.

Je me redresse brusquement.

— Est-ce qu'on doit s'inquiéter ?

Sinan secoue la tête avec tranquillité, visiblement plutôt à l'aise.

— Ils sont juste là pour contrôler les entrées. Ils font un recensement.

Je fronce les sourcils un peu interloquée.

— Un recensement ?

— Pour savoir qui franchit les portes d'Onéon, acquiesce Sinan

— Ils filtrent les entrées ?

— On peut dire ça, mon répond-il vaguement.

Je sens alors un vent d'inquiétude s'emparer de moi.

— Est-ce que certains ne parviennent pas à y entrer ?

J'espère ne pas avoir fait toute cette route pour rien.

— Ça arrive. Mais, souvent ce sont des Chevaliers où des Fées, donc pas de panique. Ils laissent généralement les Sorciers et les Archers passer. Sauf s'ils sont connus pour avoir troubler les Sans-Visage antérieurement.

Les deux hommes arrivent enfin à notre niveau. Ils ne donnent pas du tout envie de plaisanter. Ils font deux têtes de plus que nous, des bras immenses, et des visages assombris par leur maquillage tribal. Je ne réussis même pas à les regarder dans les yeux. Sinan semble plus calme que moi, comme s'il était habitué à tout cela.

Combien de fois par semaine il vient ici, celui-là ?

— Contrôle des entrées, articule l'un des deux Sans-Visage.

Il tend à Sinan une espèce de machine circulaire qu'il ouvre à la manière d'un poudrier à maquillage. Sauf qu'il n'y a ni maquillage, ni miroir. A l'intérieur se trouve deux écrans. Je déduis que c'est ce qu'on appelle un télécommunicateur. Cet appareil se rechargeant à l'énergie magique sert à communiquer avec d'autres télécommunicateur. Je n'en ai jamais vu, mais j'ai pu m'en imaginer dans des livres le plus souvent. Ce sont des gadgets qui valent très cher, notamment parce qu'ils fonctionnent à l'énergie magique, donc tout le monde n'en dispose pas. C'est souvent les couches de la société les plus riches, ou les Sorciers qui les utilisent, puisqu'ils peuvent plus facilement les faire fonctionner. Je sais qu'il est possible de communiquer avec quelqu'un en le faisant apparaître dans l'appareil sous forme d'hologrammes. La technologie magique est vraiment fascinante.

Sinan pose les cinq doigts de sa main droite sur l'écran du bas. Apparaît quelques secondes après sa photo et son nom sur l'écran du haut. Puis, après vérification des Sans-Visages, il me désigne de la main.

— Elle n'est jamais venue ici. Il faudrait l'enregistrer, demande-t-il.

L'homme a qui appartient le télécommunicateur me le tend alors.

— On va vérifier ça, lui répond-il, d'une voix dénuée de toute émotion.

Je pose nerveuse ma main sur l'écran. L'appareil relève mes empruntes et affiche une absence de résultat, comme prévu.

Il me demande alors ma carte d'identité, qui est bien évidemment fausse. Il vérifie que je suis bien conforme à la photo de cette dernière, avant de la scanner avec l'appareil. Je suis alors enregistrer dans la base de données des Sans-Visage.

J'avoue que ça fait un peu peur. Je me demande où mes informations personnelles vont être stockées. Mais visiblement, ils ne nous laisse pas vraiment le choix si on veut rejoindre Onéon. J'imagine que sinon, ils ne nous font pas descendre du train.

Les deux types s'en vont, nous laissant enfin seuls. Je peux enfin souffler. Sinan a remarqué ma nervosité.

— Tu sais, ils ne sont pas méchants. Ils font juste leur travail, donc si tu ne les provoques pas, tu ne risques rien. D'autant plus qu'ils apprécient bien plus les Archers que les Chevaliers ou les Fées.

Je hoche la tête, et laisse un petit silence s'interposer avant de répondre.

— Tu viens souvent ici ?

— Ça m'arrive.

Sa réponse reste volontairement vague.

— Pour quelle raison ?

— Les boites de nuit et les bars, essentiellement.

— Évidemment.

Je ne lui pose pas plus de questions. Sinan semble ne pas tout dire. Je sais qu'il cultive une fascination débordante pour les Sorciers. Pour quelle raison ?

Je sais que je n'aurais pas les réponses à mes questions, maintenant.

On arrive enfin à Onéon. On s'empresse alors de descendre et de regagner l'air libre. On arrive en plein cœur de la ville. Sinan m'emmène dans un bar et ont passe le reste de l'après midi jusqu'au soir à flâner dans les rues.

Que dire de l'architecture d'Onéon... C'est très déroutant. Le centre de la ville est construit de grattes ciels en mauvais états et de routes étroites piétonnes peu empruntées par les véhicule. Une chose me frappe, il y a très peu de lampadaires qui fonctionnent. Le soir venu, la ville semble plongée dans l'obscurité malgré les vitrines de boîtes de nuit ou de maison closes qui agressent les yeux. Plus on s'écarte du centre ville, plus on s'engouffre dans des rues pavées à l'architecture plus médiévale. Comme si la ville avait commencé à être restaurée avant d'être finalement laissée à l'abandon.

Pourtant, les rues sont très vivantes. Les gens parlent fort, déjà ivres depuis seize heures. Les filles sont pour la plupart assez dévêtues. Les couples ne semblent pas avoir froid aux yeux. Ils s'embrassent de manière assez sexuelle aux yeux de tous. Souvent, on trouve des homme assis sur un banc entourés chacun de deux ou trois filles très sexy, des bouteilles à la main. Une forte odeur d'alcool empeste les rues, visiblement peu entretenues. On trouve des débris de verre dans les caniveau, des papiers en tout genre sur les trottoirs... les murs sont placardé par des publicités traitant soit des tournois de combats en salle, soit de la prostitution, soit de l'apologie en faveur des Sans-Visage. C'est donc une ambiance très particulière qui émane de cette ville. La fête ne semble pas avoir de limite, c'en est même le paradis.

Je l'ignorai encore, mais cette ville allait se retrouver au cœur de mon enquête.

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