Anita,
Je suis bien arrivé au Camp d'Otrance. Bien que je suis noyé dans un flot d'excitation face à ce commencement, je pense continuellement à toi. Je t'écris ainsi cette lettre juste après la présentation de bienvenue pour te partager mes émotions.
Dimitris Silva est encore plus impressionnant en vrai qu'en photo. Tu crois que je pourrais lui adresser la parole pour lui demander un autographe ? Il semble tellement inaccessible... J'ai si hâte de commencer les cours, si tu savais ! Tout est si beau ici, les locaux, les jardins... J'aimerais tellement que tu sois là avec moi. Je te promets qu'un jour, je te ferais découvrir cet endroit merveilleux.
J'espère que tu arrives à supporter toute seule Madame Olga. Je sais que ce n'est pas facile.
Avec tout l'amour que j'ai pour toi,
Nikolaï.
~*~
C'était la première lettre que j'ai reçue de lui. Ses lettres ont été nombreuses et m'ont redonné espoir, durant ces longues années séparées de lui. Mais, je n'ai jamais eu la satisfaction de le retrouver après tous mes efforts.
Le but de mon infiltration est de me faire passer pour l'élève la plus banale possible. Alors, que ferait une simple novice ? Elle se rendrait à la soirée d'intégration prévue ce soir.
Je suis assez curieuse quant à cet événement. Cela me permettra de cerner la personnalité de mes camarades et d'en apprendre plus sur le Camp. Si ce sont davantage les Formateurs et les professeurs qui m'intéressent, il reste tout de même pertinent de connaître ses semblables pour mieux me fondre parmi eux. Je ne suis pas là pour me faire des amis, c'est vrai, mais rester seule peut devenir rapidement suspect. On se méfie beaucoup plus de quelqu'un qui l'est plutôt que de quelqu'un de sociable et qui parle tellement qu'on a l'impression qu'on peut directement le percer à jour. Mon but ce n'est absolument pas t'attirer l'attention, hormis peut-être celle de Dimitris Silva. Mais tout devra se faire en subtilité.
Je décide juste de changer de haut pour la soirée, enfilant un crop top noir à paillette qui fait plutôt fête, et relève mes longs cheveux blonds en chignon.
Le Camp d'Otrance ce situe plein Sud de Nauphela. La température n'a donc rien à voir à celle de Nelbel, qui peut être extrême durant les hivers. Je range mes dossiers dans leur pochette et la cache sous mon matelas, avant de sortir de ma tente, prenant dans un petit sac mes objets de valeur. Évidemment, je n'ai pas confiance en le petit cadenas qui scelle la fermeture éclair. Cela aurait été plus simple si on nous avait admis dans de vraies chambres. Je me demande si la situation est temporaire.
Depuis le domaine des Archers, ont entend déjà la musique retentir, provenant très certainement du hangar de la partie centre du camp, dans lequel se passe la fête.
La crépuscule a déjà pointé le bout de son nez. Ici, la nuit tombe tôt, aux alentours de dix-huit heures. Je remarque que l'éclairage se densifie à mesure qu'on s'approche du centre. Dans le domaine des Archers, on remarque rapidement qu'il fait sombre. Pour me repérer, j'ai même dû utiliser une lampe de poche miniature. Encore un signe des inégalités entre les Ordres. J'ignorais que le Gouvernement manquait à ce point d'argent. Restreindre l'électricité et les travaux leur permet sans doute de faire des économies, comme c'est eux qui financent intégralement la Formation.
— Hey, dossard numéro 22 !
Une voix masculine vient de m'interpeller derrière moi. Je ralentis et me retourne.
— Tiens tiens...Voilà l'Archer le plus insolent de toute la Congrégation.
— Je le prends pour un compliment. Tu te rends à la fête ? me demande Sinan.
— Et toi ?
— Yep. J'aimerais me faire deux trois potes. Ici, la réputation est très importante, et on part déjà avec une balle dans le pied pour être né Archers. Se socialiser est nécessaire si on veut survivre plus d'une semaine.
Je suis dans la même optique.
— Dis donc, tu n'es pas y allé de main morte avec Larsen, je relève alors, faisant référence à la réunion des Archers qui vient d'avoir eu lieu.
Le garçon esquisse un moue dédaigneuse.
— J'aime pas ce type, c'est tout.
— Tu ne le connais pas, alors comment tu peux ne pas l'aimer ?
— Dit-elle. J'ai vu comment tu le regardais, et tu ne semblais pas plus enjouée que moi de le voir ici, rétorque le garçon sans répondre à ma question.
Je laisse échapper un petit rire gêné, acquiesçant presque ce qu'il avance.
— Si tu le dis.
— Vous n'avez pas vraiment parlé des lieux à visiter près d'Otrance, tout à l'heure, n'est-ce pas ?
—...
Je ne réponds pas, détournant mon regard, un peu mal à l'aise.
Sinan hausse les épaules.
— Ne t'en fais pas. T'as le droit d'avoir des secrets, J'en ai aussi.
Je lève un sourcil, intriguée, lui adressant un petit sourire.
— Ah oui ?
— On a tous nos secrets. Et, bien plus ici qu'ailleurs, tu peux me croire.
— Et lui, tu penses qu'il en a ? je demande alors, pensive.
— Larsen ? Pourquoi ? Il t'intrigue ?
Je hausse les épaules, sans émotion dans le regard.
— Pas forcément.
Sinan poursuit, une onde de dédain dans ses yeux bruns.
— Larsen est comme tous les Archers qui m'insupportent. Il sait pertinemment qu'on lui chie dessus à cause de son Ordre et fait semblant de ne pas en être dérangé. Très bien si ça ne le dérange pas de dormir dans une tente alors que les autres novices ont leur propre chambre, mais moi, je ne peux pas tolérer ça.
— Il a raison, tu devrais te présenter au CAGF. T'as déjà les idées, reste plus qu'à convaincre les autres de ces dernières et tu seras élu, je m'esclaffe alors.
Sinan continue d'arborer un air hostile. Son regard témoigne des sentiments froids qu'il éprouve envers les autres Ordres.
— On sait très bien que les Archers ne sont pas écoutés lors des Assemblées Générales. Leur présence ne sert qu'à respecter la loi. Mais, s'ils pouvaient, ils nous en excluraient.
Sinan a l'air de prendre à cœur ses divergences de traitements entre les ordres, comme s'il en avait souffert pendant son enfance. Je sais que Sinan a des secrets, il l'a même avoué. Il est resté depuis le début très mystérieux sur ses origines. Si j'avais du temps, je ferais des recherches sur lui. Mais, Dimitris Silva occupe pour le moment toute mon attention.
On arrive enfin devant un grand hangars. Devant les portes, des types bien baraqués et tatoués sur les bras et sur le visage contrôlent les entrées. Seraient-ce des anciens élèves qui seraient venus nous bizuter ? Ils ont l'air plus âgés, de toute évidence. Ils distribuent des bracelets phosphorescents aux novices qui franchissent les portes.
— Quel Ordre ? nous lance l'un d'eux quand vient notre tour.
— Archer, articule Sinan, avec orgueil, comme s'il cherchait à rivaliser avec les deux grands gaillards.
Ils nous flanquant alors sur les poignets un bracelet vert.
Je me tourne vers Sinan, une fois à l'intérieur.
— Même pour une soirée, ils nous trient ? je m'interroge, un peu surprise.
L'Archer lève les yeux au ciel, indigné.
— On sera sûrement plus bizutés que les autre, rechigne-t-il.
On passe alors par le hangar pour regagner une cours extérieur où se dresse un buffet avec de l'alcool. Sinan commence à danser au rythme de la musique forte.
Pour ma part je prête attention aux gens autour de moi. Les filles sont toutes habillées très sexy, la majorité des fées, entourées de mecs tous plus athlétiques les uns que les autres. On fait tache, Sinan et moi. Tout le monde parle en petit groupe, commençant à sympathiser entre les Ordres. Sinan aperçoit un groupe près du bar et me les pointes du doigt.
— Eux, là-bas. Viens, on va leur parler, me glisse-t-il alors qu'on s'approche du groupe.
Il n'a pas attendu la réponse pour se lancer. J'essaie de le rattraper comme je peux.
— Attends-moi.
Sinan est déjà au niveau de l'attroupement. Ils sont quatre, deux filles et deux garçons, visiblement profondément plongés dans leur discussion.
— Salut salut ! On fait le tour des gens ici, on est Sinan et Katherina. Comment s'est passé l'arrivée pour vous, alors ? lance-t-il, pour engager la conversation.
Les membre du groupe se retournent légèrement vers nous, et je sens leurs yeux descendre sur nos bracelets verts fluo qui se perçoivent au moins à trente kilomètres à la ronde, nous dévisageant d'un air dédaigneux, malgré les maigres sourire de façades qu'ils nous adressent.
Ils nous répondent par des bref « bonsoir », nous adressant à peine un regard, et retournent très rapidement dans leur discussion, sans tenter de nous y inclure. Pourtant, on essaye. On se montre souriants, enjoués et polis, mais rien n'y fait. On a la désagréable sensation d'être mis à l'écart. Sinan, se met à rechigner, levant les yeux au ciel et balançant deux trois insultes en s'éloignant d'eux pour se remplir un verre d'alcool, pour éponger notre cuisant échec. Quand il me propose de me servir, je décline son offre, voulant rester au maximum maître de moi-même. J'ai besoin d'être sobre, ce soir, pour observer tout ce qu'il se passe.
Peu d'Archers ont décidé de venir. On compte une majorité de Fées et de Chevaliers, et quelques Sorciers qui parviennent pour certains à se fondre dans la masse, mais nous, on fait définitivement tache dans le décor. Sinan tente de combler sa frustration en se remplissant d'alcool. Je lui fais poser sa bouteille pour le calmer un peu.
— Doucement, Sinan. Ne leur laisse pas une occasion de se moquer de toi, en te mettant dans un état pitoyable.
Sinan m'arrache la bouteille des mains pour continuer de boire.
— M'en fous. Qu'ils aillent se faire foutre, grommelle-t-il.
Sauf quand la récupérant, son geste est brusque, et il bute contre une jeune fille, et renverse une bonne partie du contenu sur sa robe.
Le dommage aurait été réparable si cette fille n'avait pas été la reine des pestes et nièce tant redoutée de Dimitris Silva, Delilah Resnick.
Sa robe est d'un rose poudré très pâle, ce qui permet au liquide de la tacher bien visiblement.
Delilah pousse un cri de stupeur, devenant instantanément rouge tomate, sous l'effet de l'indignation ressentie
— Non, mais, c'est pas vrai ! s'écrie-t-elle, en fixant avec horreur le désastre.
Même énervée, cette fille reste jolie. C'est quoi son secret ?
— Pardon, grommelle Sinan, visiblement pas plus embêté que ça.
Delilah est furieuse. Elle se met à frotter frénétiquement le tissu dentelé de sa robe, mais le mal et fait. La tache ne partira pas de cette manière.
— Ça s'entraîne à tirer avec précision, mais c'est même pas capable de regarder autour de soi et de faire attention ! Putains d'Archers !
Sinan commence à perdre patience. Ce n'est pas le genre à se laisser marcher dessus. Elle a beau le dépasser avec ses talons hauts, il lui tient tête.
— Pardon, j'ai dit. Tu veux que je fasse quoi d'autre ? Que j'embrasse tes pieds ?
Le ton monte. Les autres novices autour interrompent leur discussion pour observer la scène.
— Tu sais combien ça coûte une robe comme ça ? Non, évidemment que tu ne sais pas ! Tu ne dois pas venir des beaux quartiers, toi, rétorque-t-elle avec condescendance, en regardant de haut en bas le garçon.
— Oh et va te faire foutre ! s'emporte-t-il dans un soufflement désagréable d'exaspération.
Sauf que c'est le mot qui ne passe pas. Un mec qui fait deux fois sa hauteur et sa largeur vient se planter en face de lui. Un Chevalier, et sûrement du même milieu social que la Fée. Il est blonds, belle gueule, les cheveux qui encadrent son visage, et des yeux bleus qui transpercent l'Archer de la manière la plus dominante possible.
— Qu'est-ce que t'as dit, p'tite merde ?
Ça continue...
— Qu'elle aille se faire foutre. Et tu peux éventuellement l'accompagner, toi aussi, répète-t-il.
Décidément, Sinan est inarrêtable. Sauf qu'il n'a pas compris que le Chevalier n'est pas seul et que tous ses potes autant baraqués que lui nous entourent dorénavant.
Le type s'apprête à le soulever par le col de son teeshirt pour lui porter un coup afin de le faire taire, et je comprends rapidement que physiquement, Sinan ne fera pas le poids. Je me mets alors en travers des deux garçons, défiant le Chevalier d'un regard franc et téméraire, ce qui semble l'agacer de plus belle.
— Qu'est-ce que t'as toi ? Tu veux prendre le coup de ton pote ? crache-t-il.
Il fait une tête de plus que moi et son front est positionné très près du mien. Trop même. Mais, je ne veux pas reculer face à lui.
Je hausse un sourcil avec insolence, approchant encore plus mon front du sien pour le provoquer.
Tous leurs amis se mettent à nous encercler.
— Frapper une femme ? T'as rien trouvé de mieux pour impressionner ta nana ? je lance, en le transperçant du regard.
Je ne suis pas forcément téméraire, mais je ne suis pas du genre à me laisser impressionner. Il ne me fait pas peur.
Cette fois-ci, Delilah, craignant que son ami riposte contre ma désinvolture, s'interpose entre lui et moi.
— C'est bon Taniel, ils n'en valent pas la peine.
— C'est ça, Taniel, casse-toi, rétorque Sinan.
Le Chevalier nous adresse un regard noir avant de nous cracher dessus.
— Petites merdes. On va faire de votre Formation un véritable enfer, vous allez voir ! s'exclame-t-il en s'emportant, alors que Delilah l'attrape par les bras.
Les autres types nous font des gestes obscènes et d'intimidation.
— Sale con ! riposte Sinan, à mesure que le groupe s'éloigne.
— Enfoiré !
— P'tit Batard !
Je me plante devant mon collègue en le poussant en arrière pour le calmer.
— Stop, Sinan ! Ça suffit ! je tranche autoritairement.
L'Archer m'accorde un regard agacé
— Quoi ça suffit ? Tu veux que je le laisse m'insulter sans rien faire ? s'indigne-t-il.
— Ils sont quinze et toi seul. T'es maso ou quoi ? Ça va te retomber dessus !
Sinan serre les poings, pousse un soupir de frustration mais finit par reprendre ses esprits et se calmer.
— Quel connard ce type ! Avec ses faux muscles gonflés à l'hélium, là ! s'emporte-t-il, avec dédain, en faisant exprès de parler bien fort pour qu'il entende, tout en le fixant s'éloigner.
— Sinan ! Il n'en vaut pas la peine. Laisse-le. On est là pour se faire des amis, pas faire fuir les autre, je te rappelle. Là, t'as formé un cercle de cinq mètres de diamètre de distance autour de nous ! Ça va vachement faciliter notre intégration !
Je le tire alors un peu plus loin à l'extérieur, tandis que le groupe de Chevalier regagne la partie intérieure du hangar.
La garçon semble se calmer davantage, mais continue de rechigner.
— Regarde comme ils se pavanent ! Finalement, je crois que je vais suivre le conseil de Larsen. Je vais me présenter au CAGF. Ils vont voir ce qu'ils vont voir, ils n'auront plus à nous parler comme si on venait d'une caste inférieur !
— Hey, les deux insolents, venez vous asseoir avec nous.
Je n'ai pas le temps de replier à Sinan que je me retourne alors vers la droite, là où les voix semblent provenir. Il y a un groupe de deux mecs et d'une fille gothique, en train de boire et de fumer à l'écart. Je comprends à leurs auras que ce sont des sorciers. Ils sont très impressionnants, et ils m'intriguent fortement.
Je m'exécute, curieuse.
Un des sorciers tend quelque chose que je soupçonne être plus que de la cigarette.
— Non merci, je décline en m'asseyant sur le gazon, à la place qu'il vient de me faire.
Le type est grand, plutôt mince, les cheveux noirs et les yeux maquillés de khol à l'intérieur de la paupière, et tatoué sur les bras et le cou de signes étranges ressemblant à des croissants de lune. J'aime bien sa vibe. Un peu la même que celle de Sinan, mais en plus affirmée, en plus incarnée.
— Je m'appelle Vrenn, et voici Sierra et Max. On vous a vu vous emporter à l'instant. Vous êtes de toute évidence fous, ou suicidaires. Mais, on aime ça.
Sinan lève un sourcil et croise les bras.
— Vous aimez les suicidaires ?
— Non, les réactions comme celles-ci, lui répond-il.
— Pourtant vous êtes sorciers. Vous ne devez pas vous faire pas emmerder autant que nous, marmonne l'Archer.
— C'est vrai, mais ce n'est pas pour autant qu'on sera intégrés autant qu'eux. Les gens se méfie des Sorciers, répond Sierra, en lui tendant une bouteille d'alcool.
Sinan la récupère et bois quelques gorgées avant de répondre.
— Être méfiés, c'est cool. Mais, nous, ils nous méprisent juste, lâche-t-il, en grommelant.
— Parce que vous ne vous y prenez pas de la bonne manière, relève Vrenn.
— Et, c'est quoi la bonne manière ?
Notre interlocuteur récupère la bouteille d'alcool pour vider l'intégralité du reste de son contenu, avant de répondre.
— Les gens foutent la paix aux sorciers parce qu'ils ont peur d'eux. Débrouillez-vous pour leur faire éprouver de la peur face à vous, et vous aurez tout gagner. Le pouvoir n'est pas détenu par les gens qui gouvernent, vous savez. Le pouvoirs est détenus par ceux qui savent instaurer la crainte, répond énigmatique le sorcier.
Sinan semble boire ses paroles. Venant d'une mère sorcière, je me demande s'il n'éprouve pas une certaine admiration poussée pour cet Ordre. Physiquement, il en a tout l'air. Il a les caractéristiques et l'aura d'un sorcier, pas d'un archer.
— Je m'appelle Katherina, et lui c'est Sinan. Vous avez l'air sympa, ça fait plaisir de pouvoir échanger sans être vus comme un sous-Ordre, je réplique alors.
Sierra hoche la tête.
— Nous ne sommes pas comme ces gens privilégiés. Nous avons grandi dans des quartiers difficiles, avec des Archers. Nous comprenons ce que vous vivez.
— Tout les sorciers sont comme vous ? je demande naïvement.
— Pas tous, ma jolie. Nous on est des petits rebelles qui essayons de faire changer le monde, mais la majorité d'entre eux se montre extrêmement docile face aux Chevaliers et gouvernement, pour s'attirer leurs faveurs, glisse Vrenn plus bas à mon oreille.
Je plisse les yeux, intriguée. Un flot d'interrogations m'assaillent
— Pourquoi intégrer la Formation alors, si vous n'approuvez pas le gouvernement ?
Vrenn laisse échapper un petit rire énigmatique.
— Pour changer la donne justement. Les membres de la Congrégation prennent une place décisionnaire importante dans la société. En faire partie c'est avoir le pouvoir de changer les choses, répond-il.
— Vous n'êtes pas là pour suivre à la lettre les demande de Silva, n'est-ce pas ? je lâche plus bas.
Un sourire discret se dessine sur les visages des trois Sorciers.
— Tu crois que tous les gens sont tous venus ici pour se soumettre aveuglément à la Congrégation ? réplique Max.
Je croise de nouveau les bras et plisse les yeux, un peu interloquée.
— Les Formateurs ont scrupuleusement choisis les novices. Pourquoi avoir alors sélectionné des rebelles ? Ça n'a pas de sens, je rétorque.
Le groupe des trois sorciers éclatent de nouveau de rire. Un rire qui me fait frissonner.
— On est des bons comédiens devant eux. Il est facile de se créer un personnage. Et, je suis intimement persuadé qu'on n'est pas les seuls à faire ça, quelque soit la raison, me murmure de nouveau à l'oreille Vrenn, avant de planter ses yeux noirs et mystérieux dans les miens.
Par son regard, c'est comme s'il lisait en moi. J'ai l'impression qu'il me destine un sous-entendu.
Je frissonne, mais reste impassible.
Je ne dois pas avoir l'air d'une révolutionnaire devant aucun de mes camarades. Le personnage que j'ai construit est aux antipodes de ça. Je dois garder ma couverture jusqu'au bout.
Je me redresse et plante davantage mes yeux dans la profondeur des siens, esquissant un sourire en coin.
— Eh si, Vrenn. Vous êtes sans doute les seuls.