Encore une autre énigme à propos de Lorenzo Angelo Alberti.
Mais je dois prendre mon mal en patience. Et honnêtement, je n'ai pas la force de me demander : Qui ? Quand ? Comment ? Pourquoi ?
Du moins je ne l'ai plus.
Mes questionnements tournent à l'obsession, et il faut que ça cesse.
Donc je prendrais effectivement mon mal en patience, et j'attendrais.
Je l'attendrais.
Enfin, non ! Je ne l'attendrais pas lui, j'attendrais ses réponses à mes questions. S'il daigne y répondre à son retour, évidemment.
Je ne dois pas penser à Lorenzo matin, midi, et soir. Je ne dois plus passer une journée comme celle d'aujourd'hui. Je dois vivre.
Mais en même temps, cela ne m'empêche pas de me renseigner sur lui, par simple curiosité. Évidemment.
Je prends mon ordinateur portable, je l'allume et je tape son nom dans le moteur de recherche. Qu'est-ce que je vais trouver ?
Rien. Rien sur lui.
Contrairement à son père.
Giovanni Alberti.
Né de Pietro Alberti et d'Anatola Alberti.
Originaire du Sud de la Sicile.
Marié à Marie Alberti depuis juin 1998.
Père de deux enfants, Lorenzo Angelo Alberti et Aurora Angela Alberti.
Chirurgien en pédiatrie.
Mais il est précisé qu'il n'exerce plus depuis 2016.
Voici les quelques informations que j'ai obtenues sur lui.
Mais je me demande quand même, pourquoi il n'exerce plus depuis 2016 ?
Peut-être à cause de l'incarcération de son fils.
Mauvaise publicité.
Je tente d'en savoir plus et cherche un autre article.
Toujours par simple curiosité.
Le titre de la rubrique des faits divers d'un journal attire mon regard : « Inceste, un père condamné à 20 ans de réclusion criminelle. »
Je clique.
Et je lis l'article.
Aucun nom n'est cité.
On parle de monsieur X, marié et père de deux enfants condamné à 20 ans de réclusion criminelle pour viol incestueux sur mineur.
L'affaire date de 2016. À l'époque, elle avait fait polémique puisqu'il s'agissait d'un docteur spécialisé en chirurgie pédiatrique. Puis ce scandale a été oublié. Mais aujourd'hui il refait surface, en effet le père de famille a décidé de faire appel de la décision. Il sera entendu en fin d'année.
Oh. Mon. Dieu.
Même si le nom de Giovanni Alberti n'est pas mentionné, on le devine. On parle bien de lui. Tout concorde avec lui : le nombre d'enfant, la date, la profession ... C'est lui. Je n'ai aucun doute.
J'arrête mes recherches.
Le fait est que le père de Lorenzo est coupable de viol incestueux.
Je n'ai pas besoin d'en savoir plus. Je suis déjà allée trop loin.
Mais je me demande quand même si ce n'est pas la cause de son trouble psychiatrique ?
Sans doute. Difficile de se construire sainement avec un père qui vous viole.
Plus jeune, lorsque mon père biologique est mort, je ne voulais qu'une seule chose : un nouveau papa. Peu m'importait qu'il soit gentil ou méchant, qu'il soit grand ou petit, qu'il m'aime ou non. Je préférais avoir un père déplorable, que de ne pas en avoir du tout.
Je regrette mes anciennes pensées. Il est aujourd'hui limpide qu'il vaut mieux ne pas avoir de père que d'en avoir un comme le sien.
Maintenant, en plus des questions que j'avais déjà, d'autres sur son enfance s'ajoutent.
Comment a-t-il survécu ?
Comment il a fait pour le dénoncer ?
Mais surtout pourquoi avoir tué sa mère plutôt que son père ?
Ma curiosité malsaine me pousse à me poser d'autres questions, mais je m'arrête ici. Il s'agit là d'un lourd passé familial et cela ne me regarde pas. Si un jour, il veut m'en parler, il le fera. Mais je ne dois pas franchir la limite.
Mais en réalité, je l'ai déjà franchi. J'ai fait des recherches sur lui, sur son enfance, sur son père, alors même que je mettais promis de « vivre », et d'arrêter de penser à lui.
Je n'ai même pas réussi à tenir plus d'une heure.
C'est lamentable. Mais s'il y a bien une résolution que je dois tenir, c'est celle-ci : je ne lui poserai que les questions qui me concernent. Et c'est tout.
J'attendrais ses réponses.
Je mentirais si je disais que je n'ai pas hâte de son retour.
Cependant, il faut être réaliste, il ne sortira pas de son isolement demain.
Mais j'attendrais.
Je l'attendrais patiemment.