QUATORZE
« Petite, ta malédiction Cohen ne m'affectera pas cette fois. »
Fernando Alonso ébouriffa les cheveux de sa nièce lorsqu'ils arrivèrent côte à côte dans le paddock du circuit de Barcelone. C'était sa course à domicile, et pour la première fois en onze ans, il allait piloter aux côtés d'un Cohen.
Cette fois, c'était juste une génération différente.
« Mais ce sera le cas, car tu n'obtiendras pas de podium. » Larissa leva un sourcil taquin à son oncle alors qu'ils marchaient, passant devant des journalistes et des photographes qui semblaient aimer prendre des photos des deux.
Fernando attira la fille à côté de lui en entendant des journalistes poser des questions à sa nièce, qu'il s'agisse de son père, de son accident, de ses relations avec les autres pilotes, de son héritage brésilien ou du fait qu'elle était une femme.
Ça l'ennuyait que les gens dans le monde pensent que la course était réservée aux hommes et que les femmes n'avaient pas leur place dans ce sport. Il avait toujours défendu la devise, ce qu'un homme peut faire, une femme peut le faire plus vite, car il savait avec les femmes de sa vie qu'elles faisaient des tâches beaucoup plus vite que lui.
« Mademoiselle Cohen, qu'est-ce qui vous fait penser que vous avez ce qu'il faut pour rivaliser avec les hommes ? » On entendit un journaliste demander.
Le pilote espagnol avait essayé de l'éloigner pour qu'elle n'ait pas besoin de répondre, mais elle se tourna vers le journaliste et la caméra avec un sourire incroyablement faux.
« Je crois que la plupart des gens peuvent piloter, quel que soit leur sexe, alors pourquoi la Formule 1 est-elle différente ? » Larissa regarda la caméra avec son sourire faux qui ne quittait pas son visage. « Maintenant, pendant que vous êtes escorté hors d'ici pour avoir été sexiste, je ferai ce que je fais le mieux. »
Larissa recula d'un pas, faisant un clin d'œil à la caméra. « Prouver que les femmes peuvent faire ce que les hommes peuvent faire, et que nous pouvons le faire mieux. »
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« Gamine, tu sais quoi faire ? » Franz Tost tapota l'épaule de sa pilote alors qu'elle commençait à se préparer à monter dans la voiture pour les qualifications.
« Faire un tour rapide pour avoir une bonne position et s'assurer que Pierre et moi marquions des points. » dit Larissa presque de manière robotique alors qu'elle fixait le sol.
« Bonne fille. » L'homme posa sa main sur son dos alors que son stratège l'informait de ce qu'elle ferait pendant les qualifications.
Elle n'avait certainement pas oublié que Franz avait mentionné que puisqu'elle était une femme, il devait s'assurer qu'elle était complètement guérie avant de la laisser remonter dans la voiture, mais comme elle restait potentiellement avec Toro Rosso pendant un certain temps, elle ne voulait pas se mettre sur son dos, alors elle avait temporairement laissé tomber.
« Est-ce que c'est mon tour maintenant ? » demanda Larissa en voyant son coéquipier sortir de la voiture et se diriger vers le garage.
« Vas-y, petite. »
Les deux Toro Rosso ne furent pas éliminées en Q2, avec Pierre 11e et Larissa 12e tandis qu'Esteban était arrivé 13e et Charles 14e.
Au grand dam de Larissa, son oncle Nando se qualifia à la 8e place, après avoir atteint la Q3.
A sa course à domicile. L'audace.
C'était une bonne chose que Pierre et Larissa aient pris un bon départ, le Français prenant une place derrière l'Espagnol.
Cependant, cela ne dura pas longtemps car le coéquipier de la Brésilienne avait eu un accident quand il fut percuté par Esteban et finit par éliminer Nico Hulkenberg en même temps.
« Gasly, Ocon et Hulkenberg sont éliminés, la voiture de sécurité est déployée, tout dépend de toi. »
Son ingénieur radio lui parla alors qu'elle jurait dans sa barbe. Pierre n'avait tout simplement pas eu de chance ces derniers temps, il avait été plusieurs fois proche des points avant d'être mis hors d'état de nuire.
La voiture de sécurité était là depuis un temps étonnamment long, donc dès qu'elle disparut, tout le monde commença à essayer de se dépasser frénétiquement.
Larissa avait réussi à se frayer un chemin jusqu'à la cinquième place, juste derrière son oncle Kimi, alors qu'ils se battaient une fois de plus, Kimi refusant de céder la place.
Il avait toujours voulu qu'elle obtienne des points, des podiums et des victoires, depuis qu'elle était née et il le voulait toujours, mais il connaissait aussi son style de conduite, et comment elle ne le laisserait jamais vivre s'il lui donnait délibérément la place.
Elle était côte à côte avec son oncle, alors même qu'ils arrondissaient les virages, sans qu'aucun d'eux ne sorte de la piste.
C'était jusqu'à ce qu'un fort bruit sourd se fasse entendre dans sa voiture avant qu'elle ne perde le contrôle de sa direction et vire sur le côté de la voiture de son oncle, les envoyant tous les deux tourner dans le mur avant qu'ils ne s'arrêtent, heureusement juste hors du chemin direct des autres.
Tant pis pour battre l'oncle Nando, pensa-t-elle.
Les commissaires aidèrent Kimi et elle à sortir de leurs voitures avant que les deux pilotes ne subissent des dommages de leurs voitures.
Kimi avait l'air furieux. Vraiment, vraiment furieux.
Larissa fit un pas en arrière alors qu'il se précipitait vers elle, pas prête à affronter la colère du 'Iceman' qui avait un très mauvais caractère.
La visière de Kimi était relevée et il se précipita vers sa nièce, l'adrénaline le parcourant.
Il leva la main alors qu'il s'approchait d'elle, l'abaissant juste un peu trop vite, et fut absolument horrifié de voir que sa nièce, sa filleule... tressaillit.
Elle pensait qu'il allait la frapper.
« Kimi, je suis vraiment désolée, je ne sais pas ce qui s'est passé j'ai juste- » Larissa essaya de s'excuser mais s'en trouva incapable lorsqu'elle fut tirée vers l'avant.
Le Raikkonen étreignit sa nièce aussi étroitement qu'il le pouvait, sans l'entendre grimacer de douleur alors qu'elle sentait une pression sur ses côtes cassées.
Les deux furent rapidement escortés en toute sécurité jusqu'à leurs garages, et dès qu'elle revint dans le garage Toro Rosso, elle fut emmenée par un homme parlant français.
« Ma Chérie, est-ce que tu vas bien ? Es-tu blessée ? Qu'est-ce qui s'est passé ? Est-ce qu'il t'a percuté ? Est-ce que tu as besoin d'eau ? » dit Pierre frénétiquement, ses mots sortant précipitamment et légèrement mal articulés alors que ses grands yeux vers la regardaient remplis d'inquiétude.
« Docinho, je vais bien, je ne suis pas blessée, je ne sais pas ce qui s'est passé, je lui suis rentrée dedans, et oui, je pense que j'ai besoin d'eau. » Larissa soupira profondément tandis que son coéquipier hochait la tête.
Pierre se précipita pour lui chercher de l'eau, mais pas avant d'avoir déposé un doux et tendre baiser sur sa joue.
« Lar, est-ce que tu vas bien ? Qu'est-ce qui s'est passé ? » Esteban fronça les sourcils en remarquant que ses épaules s'enfonçaient en signe de défaite.
« Je ne sais pas, j'ai entendu un bruit sourd puis j'ai perdu le contrôle de ma direction. Je ne pouvais même pas essayer de m'empêcher de lui rentrer dedans. Il va me détester. » Larissa commença à se mordre l'intérieur de la joue, tout en continuant à bouger nerveusement ses mains.
« Lar, ton oncle Kimi n'est pas fâché que tu lui sois rentrée dedans. » Esteban la serra contre sa poitrine, ses doigts parcourant ses cheveux.
« Mais il avait l'air tellement en colère contre moi. » Sa voix devint timide et effrayée et cela amena un froncement de sourcils sur le visage d'Esteban.
« Je suis passé devant lui alors qu'il criait après Maurizio. Ce n'était pas à propos de toi, apparemment il voulait venir ici et frapper Franz parce que ce qu'il n'allait pas avec ta voiture aurait pu te tuer. » expliqua Esteban, voyant les yeux de sa meilleure amie se diriger vers son visage à la recherche de la moindre trace de mensonge, et elle n'en trouva aucun.
« Je t'apporte de l'eau, ma chérie. » Pierre revint vers sa coéquipière, enroulant ses bras autour de ses épaules tendues dès qu'il lui donne la bouteille d'eau et la regarda l'avaler.
« Tu penses que je peux éviter Franz pendant un moment ? » Larissa ferma les yeux, se frottant les tempes alors qu'un autre mal de tête commençait à se former dans son crâne. « Je ne veux pas vraiment faire face à la déception et à la colère d'avoir échouer maintenant. »
« Petite, viens avec moi. » l'interrompit Kimi alors qu'il se tenait à l'entrée du garage Toro Rosso. « Zahra t'attend, elle n'a pas le droit d'être ici parce qu'elle n'arrête pas de faire des menaces très violentes à ton directeur d'équipe parce que quelque chose n'allait pas avec ta voiture. »
Larissa hocha la tête, embrassant les joues des deux pilotes français alors qu'elle suivait son oncle, s'arrêtant net dans son élan alors qu'elle approchait de son idée de l'enfer.
« Non. » Larissa resta immobile. « Pas question que j'aille là-dedans. »
Le rouge remplit sa vision alors qu'elle se tenait devant le garage Ferrari, voyant Zahra assise à l'intérieur du garage lui faisant signe de la rejoindre.
« Juste une minute, gamine. Ce ne sera pas long, promis. » Kimi essaya doucement, essayant d'atteindre sa main pour la rassurer mais la trouva juste hors de portée.
« Non, tu devrais savoir maintenant que je ne vais jamais chez Ferrari. » La Brésilienne secoua frénétiquement la tête.
Ça n'arriverait pas. Ferrari était la cause de ses cauchemars constants, la raison pour laquelle elle se réveillait au milieu de la nuit en sueurs chaudes, son corps se sentant comme si elle était de retour sur la piste de Monza, voyant et sentant son père brûler vif.
Ferrari était la raison pour laquelle elle fut forcée de grandir sans son père bien-aimé à ses côtés.
Ferrari était la raison pour laquelle elle était toujours l'intruse pendant ses jours de karting. Tous les autres pilotes avaient leurs deux parents pour les encourager, et s'ils réussissaient, ils couraient vers leurs parents pour célébrer.
Larissa n'avait rien de tout ça.
Elle gagnait une course et cherchait sa mère dans la foule, et ne voyait que le siège vide qui avait été abandonné par la femme. Elle regardait les autres pilotes avec leurs pères et son cœur lui faisait mal presque au point de se briser car elle ne pourrait jamais célébrer sa victoire avec son propre père.
Elle avait ses oncles aux courses occasionnelles auxquelles ils pouvaient assister, mais pour 95% de ses courses, elle était seule, sans personne avec qui célébrer.
Tout ce qu'elle pouvait faire était de noyer son chagrin avec le champagne de ses victoires et de s'asseoir seule et de regarder tout le monde jouer joyeusement avec leurs familles.
Ferrari avait causé toute cette douleur et cette souffrance.
Il n'y avait donc aucun moyen qu'elle mette les pieds dans ce garage. Même si sa meilleure amie était assise là en essayant de la rassurer.
« Je ne peux pas être près d'ici. » Larissa s'éloigna de son oncle et meilleur ami alors que sa gorge devenait sèche comme si elle se refermait.
Kimi et Zahra la regardèrent s'enfuir d'eux, des regards tristes sur leurs visages. Ils ne pouvaient qu'imaginer ce qui lui passait par la tête, mais ça valait la peine d'essayer.
N'est-ce pas ?
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« J'apporte la marchandise. »
Larissa sourit tristement alors qu'elle se pelotonnait dans son canapé dans sa chambre d'hôtel, une couverture couvrant tout son corps alors que son ami arrivait puisqu'ils avaient convenu de passer une soirée marathon de films ensemble.
Yuki Tsunoda reçut un appel de son amie peu de temps après la fin du Grand Prix d'Espagne, et alors que le pilote de F4 avait terminé sa course, il partit dans sa voiture vers la chambre d'hôtel de son amie pour lui remonter le moral après son malheur.
« Et ? »
« D'accord, j'apporte aussi tes préférés. » Yuki roula des yeux tandis que son amie souriait dès que les mots étaient sortis de sa bouche. Il souleva le sac de courses qu'il tenait à la main, puisqu'il s'était arrêté dans une épicerie avant d'arriver, et commença à déballer le contenu du sac sur la table devant elle.
« De la Sambuca noire, du Pepsi max, de la glace à la menthe aux pépites de chocolat, de la glace cookie dough, des brownies au chocolat, du pain à l'ail au fromage, de la pizza barbecue, de la pizza style ranch, des ailes de poulet et des Kinder Buenos. » Yuki nomma chaque objet alors qu'il les déchargeait tous sur la table, entendant son amie haleter dramatiquement avant d'étendre ses mains.
« A moi. » Larissa sourit, son humeur s'améliorant considérablement.
« J'ai également apporté un banquet de plats asiatiques que j'ai préparés pour mes courses et que je n'ai pas mangés. » Yuki sourit, alors qu'elle jetait les Kinder Buenos au sol avant d'attraper son sac à dos qui contenait la nourriture.
« A moi, a moi. » Larissa poussa un cri d'excitation en ouvrant le premier récipient de nourriture asiatique, en inhalant l'odeur.
Elle adorait quand Yuki cuisinait. Elle avait toujours pensé qu'il devrait ouvrir son propre restaurant.
Yuki avait toujours été fan de Larissa car elle était plus haut placée dans les différentes ligues, et il l'avait toujours encouragée quand il le pouvait.
Il avait failli mourir d'une crise cardiaque quand elle lui avait parlé puisqu'il était la seule personne qu'elle pouvait entendre l'encourager lors d'une course en France.
Quand il ne courait pas en Formule 4, il essayait de la soutenir, même s'il ne le pouvait pas, il lui envoyait un message de soutien pour qu'elle sache qu'il pensait à elle.
Ils ne se parlaient pas tous les jours, c'est plus comme un message ici et là chaque semaine environ, mais il était toujours là si elle voulait une distraction, ou pleurer sur son épaule et c'était la même chose dans l'autre sens.
« C'est l'heure du film d'horreur ? » Larissa fit la moue à son ami, alors qu'il secouait rapidement la tête car il détestait les films d'horreur et se cachait toujours derrière un oreiller ou un ami.
« Pas question, je les déteste. Regardons une comédie romantique ! » se disputa Yuki, alors qu'il se battait pour la télécommande de la smart TV dans la chambre d'hôtel.
« D'accord. » Larissa haussa nonchalamment les épaules. « On peut regarder une comédie romantique, où un gars est incompris parce qu'il est un pari et veut juste des amis et pouvoir s'installer dans une petite ville. »
Yuki la regarda avec surprise. « Ah, c'est quel film ? »
La Brésilienne sourit, cliquant sur le film alors que les yeux de Yuki s'écarquillèrent d'horreur et de peur.
« ÇA. »
« Non, non, non, non, non ! »