Let Somebody Go T.1

By -livresse

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Au gré du vent, la vie de Marin passe entre bonheur et manque. Il y a un peu plus de deux ans, sa mère a pris... More

là où tout commence.
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By -livresse

𝐞𝐯𝐚𝐧𝐞


Sur la mer, le soleil commence à se coucher, donnant au ciel les teintes orangées qui me passionnent tant. Mon regard ne peut s'en détacher, faisant battre mon cœur de plus en plus vite à mesure que je le vois disparaitre. Cette euphorie quotidienne de pouvoir voir cet astre si élégant s'incliner devant moi me donne mal à la tête. Il a beau nous illuminer toute la journée, il arrive forcément un moment où il laisse sa place. Comme si son rôle avait trop duré et que la lumière devait se faire artificielle. Pourtant, la lune, connait elle aussi cette force qu'elle nous transmet, mais pas autant que le soleil. Lui, il plonge, nous survole et nous encombre. Alors qu'elle, elle nous laisse dans l'ignorance de ce qu'il se passe, nous coupant le plus possible de la chose la plus magnifie qu'il soit : la vie. Car quand la lune se lève, la vie se couche.

Autre part dans le monde, on se réveille, avec des rêves pleins la tête et des envies de les réaliser.

Pour nous, dans notre monde, les rêves sont bien différents. À certains endroits on rêve d'avoir le courage de parler et l'opportunité de se faire entendre. Alors qu'à d'autres, on use de notre pouvoir en jugeant ce qu'il n'a pas lieu d'être jugé.

C'est ça qui est beau dans la vie. Quand dans un hémisphère l'étincelle est belle, dans un autre elle est sombre. La vie n'est jamais la même où que l'on soit. Mais pourtant, on trouve toujours des manières pour que tout se rejoigne à un moment donné.

La lune et le soleil en sont l'exemple. Chaque personne les a déjà vus et côtoyés. Tout le monde ne les a pas admirés mais a au moins posé son regard dessus.

Dans mon cœur, toute brillance a perdu de son brillant. Tout ce qui était auparavant beau est devenu morne. Depuis que les étoiles ont cessé de briller dans le ciel et que les reflets du soleil se font moins éblouissants, tout va mal. Mais les couchers et levers de soleil le font parfois revivre. Je le sens à nouveau qui pulse dans ma poitrine jusqu'à me donner envie de l'arracher.

Avant, quand ça allait mal, je savais quoi faire. Maintenant, seuls les mots peuvent me sauver. Mais quand je ne peux les extraire de moi, il m'est impossible de les coucher sur le papier. Mon stylo entre les doigts, je ne cesse de me torturer pour trouver les quelques phrases qui me permettront d'enfin passer à autre chose.

Comme rien ne me vient, je m'empare de mon téléphone et compose le premier numéro qui me vient en tête, comme si ce syndrome si puissant allait enfin s'en aller au moment où je prononcerais un seul mot.

— Allô, Evane ?

—Colin ? C'est bien toi ?

Le silence dure de longues secondes.

— Tu viens de m'appeler, donc je pense que c'est bien moi, oui, me charrie-t-il.

Seul son rire résonne. Puis je me rappelle de quelque chose qui s'empare de moi sans me prévenir .

— Tu m'as menti. Tu n'es qu'un menteur.

— De quoi tu me parles ? Je ne vois pas du tout où tu veux en venir.

— C'est ça, fais comme si de rien n'était. Tu n'as pas honte de promettre quelque chose et de ne pas le respecter ?

Colin semble enfin comprendre. Il souffle, prenant le temps sûrement pour chercher des mots ayant comme but de m'apaiser. D'habitude, je ne lui aurais pas laissé le temps de dire quoi que ce soit, aujourd'hui je n'en ai pas la force mentale.

—J'ai eu beaucoup de travail, je suis désolé. Tu sais aussi bien que moi que quand tu commences, tu ne peux t'arrêter.

— Ce n'est pas une excuse ! Elle n'est pas acceptée.

— Ne joues pas à la gamine, Evane. Tu vas bientôt avoir dix-huit-ans, les gamineries ont assez duré.

Pour ne pas dire quelque chose que je risque de regretter, je me tais. Quand je juge que je suis apte à parler comme une presque-adulte, je reprends la parole :

— Tu me manques. Tu sais que tu me manques ?

— Je le sais oui, et vous me manquez aussi. Mais je te promets de bientôt venir te voir.

Je lui raccroche au nez. Sans vraiment y réfléchir à vrai dire. Peut-être que j'ai besoin qu'il me montre qu'il tient à moi d'une autre manière qu'avec des tu me manques aussi. Et même s'ils sont vrais, ce n'est pas ce dont j'ai besoin. Il me faudrait ses bras autour de moi et ses lèvres dans mes cheveux. Un simple baiser sur le front suivi d'une de nos discussions plus que palpitantes. Je sais que je ne les ai pas et je ne peux les imaginer sans que son image se fasse de plus en plus floue à mesure que la sensation fait effet.

COLIN : Et même si des excuses ne suffisent pas, sache que je t'aime plus que tu ne le penses. Bientôt, tu seras dans mes bras. C'est une promesse que je te promets de tenir.

Je la note dans un coin de ma tête et de ma feuille, prête à lui faire remarquer à tout moment s'il ne la respecte pas.

☼ ☼ ☼

Le bruit de la tondeuse accompagnée des effluves de café qui virevoltent dans la maison me réveillent vers huit heures du matin. Il me faut un temps d'adaptation à la lumière du jour mais surtout au vacarme incessant que mon père a décidé de provoquer. Pourquoi faut-il toujours qu'il fasse ça ? Il est pourtant on ne peut plus conscient que, pour moi, le dimanche matin est sacré et qu'une bonne grasse matinée ne m'est pas de refus.

J'enfile un pull car malgré le printemps qui approche, les températures matinales se font encore fraiches. Pieds nus, comme à mon habitude, je descends les escaliers en trombe, consciente que mes protestations ne serviront à rien mais avec l'espoir qu'il veuille quand même les prendre en compte.

Ma mère est en train de regarder une émission à la télé. Je lui embrasse la joue droite puis part immédiatement dans le jardin. J'ouvre la baie vitrée, me rendant compte qu'elle couvre bien le bruit. Heureusement qu'elle est là, je pense.

La voute plantaire de mes pieds entre immédiatement en contact avec le bois de la terrasse puis avec l'herbe, me procurant un léger plaisir. J'aime cette sensation d'être en accord total avec la nature, d'une manière ou d'une autre.

Son casque sur les oreilles et sa veste spéciale jardinage sur les épaules, mon paternel sourit en me voyant plantée devant lui, les mains sur les hanches. Je lui fais signe d'enlever son truc mais il fait comme s'il ne comprenait pas, fronçant les sourcils. Alors je contourne la tondeuse sur laquelle il est assis et le lui enlève moi-même, le cachant derrière mon dos en signe de résistance et de contrariété.

— Tu le fais exprès, c'est ça ?

— Comment ça ? De passer la tondeuse ?

— Non, de le faire au moment où ta fille peut avoir un vrai moment de repos.

Il pouffe, s'enfonçant encore plus dans son siège.

— Ce n'est pas auprès de moi que tu devrais te plaindre, mais d'elle, se défend-il en me montrant la pelouse. C'est elle qui pousse, pousse et pousse jusqu'à avoir besoin qu'on la coupe.

— Ok, c'est bon. Tu as gagné. Mais tu ne me verras pas parler à l'herbe pour autant.

— Mince, moi qui comptais t'inscrire à des cours pour être en harmonie avec elle, se moque-t-il en penchant sa tête de côté, comme s'il était déçu.

Je roule des yeux et lui jette son casque en me tournant sur moi-même et retournant dans la maison, mes pieds commençant à être glacés.

La télévision n'est plus en marche et ma mère n'est plus visible. Je passe en coup de vent dans son bureau en espérant avoir le peu de réconfort dont j'ai besoin mais il n'y a personne. Elle a dû aller faire un tour sur la plage ou est partie faire quelques courses pour la semaine. À l'habitude, nous les faisions avec elle, Colin et moi, quand on était plus jeunes. Maintenant, je ne partage plus ce moment en sa compagnie.

D'une certaine manière, ça me convient. Elle fait ce qu'elle a à faire le dimanche puis je complète de temps en temps en rentrant des cours. Mon père cuisine et des fois, si notre gentillesse commune nous le permet, nous préparons un plat ensemble. Il y a bien longtemps qu'un moment père-fille n'a pas eu lieu. Et même si ça pourrait me déranger, je ne ressens aucun manque.

Je remonte donc dans ma chambre. Elle est tout ce qui me correspond la mieux. Légèrement sous les toits, comme l'a construit l'architecte, mon lit se trouve à cet endroit. Plus loin, mes nombreuses bibliothèques y sont installées, toutes un peu plus pleines que les autres. C'est mon petit cocon, celui où je me cache quand ça va mal mais aussi quand ça va bien. Dans ces moments-là, je ne réfléchis pas.

Les livres à eux seuls peuvent me permettre de combattre mes plus grandes peurs. Celle de l'abandon a été la plus dur mais quelques ouvrages ont su m'apaiser de par leurs mots et les émotions que s'en dégagent.

J'ai moi-même tenté d'en écrire. D'évacuer toute la haine que je ressens mais surtout la tendresse. J'ai tenté de faire passer les messages les plus invisibles grâce à mes personnages et j'essaie encore. L'écriture est pour moi une vraie source plaisir. Quand je pose un mot, je suis sûre de pouvoir parler de ce que je m'empêche de dire au monde extérieur. Le temps d'un instant, le temps s'arrête pour me laisser la possibilité de m'exprimer. Mes mots ne sont peut-être pas les plus beaux ni les plus vrais mais ils viennent du cœur, et je suis persuadée qu'ils sont les plus importants. Enfin du moins pour moi.

Quand j'aurais le courage de ma mère de faire publier l'un de mes écrits, je pourrais être sûre d'avoir accompli un but majeur dans ma vie. Mais je n'aurais jamais le même talent qu'elle. Celui de jouer avec les émotions de ses lecteurs jusqu'à ce qu'ils se demandent qui est véritablement qui et si la vérité n'est pas en fait mensonge.

Pour le moment, je sais que Kelly m'attend. Mon téléphone ne fait que vibrer depuis deux minutes, signe qu'elle est encore en avance et qu'elle souhaite que je le sois aussi. J'aimerais lui dire que si nous sommes deux à l'être, ça ne sert à rien de fixer des horaires de rencontre. Mais ça reviendrait à parler dans l'oreille d'une sourde.

Alors j'enfile un jean puis un pull et une veste en jean également. De ce fait, je suis sûre de ne pas avoir froid. Je ne me pose pas souvent des questions sur comment il faut que je m'habille même si j'essaie le plus possible d'être à la « mode ». Le monde d'aujourd'hui veut que toute personne qui ne l'est pas soit vue comme étrange. Alors que c'est pourtant une manière de montrer que le style de maintenant peut aussi être celui de demain et que les habits que nous mettons à ce jour seront ceux que les futures générations complimenteront. Je laisse aux personnes spécialisées le droit de dire quoi que ce soit.

Je ne fais même pas l'effort de me maquiller, sachant que je ne croiserai personne qui en vaille la peine.

Mais comme la chance n'est pas avec moi, j'aperçois au loin une silhouette familière, ce qui me fait souffler et me donne envie de me jeter à la mer. Quand il se rend compte que je l'ai reconnu, il avance vers moi, tout euphorique que le monde ait décidé d'être mauvais aujourd'hui. Je continue de marcher, en faisant comme si je ne l'avais pas vu.

Son rictus toujours imprimé sur ses lèvres, j'essaie de l'imaginer en train d'agoniser devant moi. Mais seule l'image de sa si bienveillante mère me vient en tête, comme s'ils étaient inévitablement liés et pas seulement par les liens du sang.

— Qu'est-ce que tu comptes faire maintenant ?

Et même s'il pense que nous allons avoir une vraie conversation, je ne m'arrête pas pour autant. J'ai un but précis et je l'atteindrais, que Marin en fasse partie ou non.

— Aller voir mes amis.

— Donc ça ne te gêne pas si je viens ? me demande-t-il avec sa tête de chien battu, comme si cette simple question pouvait faire que sa vie allait devenir meilleure. Tu sais pour que tes amis deviennent les miens.

— Nan. T'es pas invité.

— Oh mince, ce n'est pourtant pas la proposition que tu as faite à ma mère il n'y a pas moins de deux jours ?

Il est en train de m'avoir, je le sens. Je le sens mais je ne me laisserais pas abattre par lui.

— Il ne faut pas toujours m'écouter. Juste un petit conseil. Ça pourrait t'être utile.

Aucun de nous n'est décidé à cesser de se tenir tête alors je marche droit devant moi, sans jamais lui lancer un regard même si le sien ne veut quitter ma nuque.

— Tu comptes arrêter un jour de me regarder comme si j'avais un billet de cinq-cents sur la joue.

— Tu as juste des brins d'herbe.

Je me précipite vers ma joue pour tout enlever le plus vite possible jusqu'à ce que je la sente qui me brule et son rire qui me perce les tympans. Il m'a eue, putain.

— C'était malin tout ça.

— Plus malin que toi en tous cas.

On arrive à la devanture du café quelques secondes après. Marin se remet difficilement de sa crise de rires. Je le laisse seul un bon moment et entre sans même lui tenir la parole, en priant pour qu'il se la prenne.  



oui, j'envahi vos notifs comme ça, sans prévenir. veuillez m'excuser, mais ce chapitre en valait la peine. 

j'espère qu'il vous a plu ! 

qu'attendez-vous pour la suite de LSG ?

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