ADI-5 Les explorateurs de Tav...

By Jules_Seyes

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Dans l'Empire Humain, l'agence de Développement Impériale est chargé de réintégrer les mondes qui ont régress... More

Prologue ADI
La pyramide de Maslow
Agressions silarsienes

Activités universitaires

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By Jules_Seyes


Le voleur

Puis les pensées de l'officier de l'ADI abandonnérent le croiseur, il avait désormais une mission à remplir.

Son appareil pénétra en atmosphère et les tabassa comme d'habitude. Ces fragiles fusées inventées par la lieutenant Hardann restaient des merveilles de miniaturisation, impossible d'y inclure des gyroscopes performants et il pilotait à vue. Il régla le vol vers une zone de forte navigation. Le plan validé avec Marion était de s'introduire comme un marin naufragé, il y avait régulièrement des navires qui coulaient sur cette mer. Les marins étaient du consommable, la lie de la société de Tavas et personne ne s'en préoccupait. Georg possédait le nom d'un transporteur qui venait justement d'essuyer la tempête mais qui continuait vers le nord. Il lui suffisait de gagner la côte et prétendre avoir été jeté par-dessus bord.

Et il put parfaitement exécuter son plan, au matin il gisait sur une planche, en haillon sur la côte. Le guet local était diligent et il se retrouva à raconter son histoire à leur chef moins de deux heures après son arrivée.

—Qu'allez-vous faire ?

—Je vais tenter de me trouver un emploi de serviteur, j'ai eu trop d'eau salée.

L'officier dédia à ce loqueteux qui abandonnait à la première difficulté un regard méprisant avant de le classer dans la catégorie : Mendiant, mort de faim, cadavre à ramasser plus tard.

Nanti de ce mépris comme laissez passer, Georg pouvait commencer l'aventure sans un sou en poche. Depuis cette position sociale inférieure il devait infiltrer le monde des lettrés si respectés et la cour. Le guet l'avait libéré dans le port, il prit le temps de s'imprégner une dernière fois de ce qui était censé avoir été son univers. Les quais construits comme sur tant d'autres sur les planètes primitives, avec des remblais de pierre plus ou moins mal liés par des poutres de bois et un mortier fragile. Au dessus, trônaient les entrepôts des marchands assez riches pour se payer un local a proximité des navires. Il sourit, n'eussent été les toits pagode, il avait vu les même sur les quais de Thénes la grande cité marchande de la planète Mycène. La mer imposait ses contraintes et certaines choses ne changeaient pas. D'autre si, il fut attentif à la jetée qui protégeait la rade contre les fureur de l'océan Tavasien. Sur Mycène les mers étaient calmes et les tempêtes rares. Ici au contraire la jetée surplombait la mer de plus de quatre mètres et se dressait comme une muraille. L'homme luttait plus durement contre un adversaire plus fort et les chantiers montraient les locaux jugeaient la protection encore insuffisante. Georg consultât Athéna son IA.

Quelle hauteur sera nécessaire pour résister aux tempêtes centenaires ?

Six mètres.

Au moins, les maçons possédaient la sécurité de l'emploi, au rythme de progression des travaux le port ne serait terminé que dans soixante dix ans.

Avant de s'enfoncer vers la grande rue, il accorda un regard de marin nostalgique aux navires. De petites jonques amarrées là assuraient un cabotage entre les ports et ce trafic était essentiel pour l'économie de Tavas. Le transport par voie maritime revenait infiniment moins cher que des charrettes qui réclamaient de nourrir des animaux. En tant que marin Georg aurait facilement trouvé à s'engager mais sa mission le conduisait ailleurs, et il se mit à remonter la grande rue.

Les habitants de Tavas provenaient de toutes les régions de la terre et un métissage fort s'était établit. Il s'exprimait dans un style corporel qui ressemblait beaucoup au type turc sur Terre. Cependant, les pur négroïdes ou les purs caucasiens trouvaient leur place dans ce paysage et le lieutenant se fondrait aisément dans la masse. Les bâtiments, eux, étaient totalement typé chinois, les premiers colons avaient adopté ce style de société qui permettait de structurer la population. L'on aurait pu se croire à canton au XVIème siècle terrien. La grande rue était pavée au contraire des rues adjacentes couvertes de terre battue. On s'était donné du mal pour créer une pente et un filet d'eau au milieu conduisait les déchets à la mer.

Sans hésiter Georg alla frapper à une porte, cette fois ci ils savaient où s'adresser, les services spéciaux impériaux collaboraient, pour une fois, avec l'ADI. Georg disposait de l'organigramme de la cours obtenu par de longues heures d'analyse satellitaire et des milliers d'heures d'analystes. Maître Li Se était un lettré honorablement connu, régulièrement invité à la cour. Il ne disposait bien évidement pas d'entrées auprès du fils du ciel, le dirigeant suprême de ce peuple. Cependant, le frère de la princesse Hise, la troisième épouse du souverrain, recueillait bien volontiers les avis du lettré. Georg connaissait pourtant la partie sombre du personnage, aussi fut-ce d'une main sure qu'il tira la cordelette de la sonnette. Le lettré constituait la véritable raison de l'installation de Georg dans la ville de Hubei.

Une jeune servante lui ouvrit et son éclatant sourire fut comme un rayon de soleil dans la journée de Georg. Elle était menue, de type chinois, à peine plus grande que la lieutenant Tsing, tellement ressemblante que les deux auraient pu être sœurs. Le jeune homme devait cependant accomplir sa mission et ne pouvait pas perdre son temps à compter fleurette. Il savait également que la jeune femme lui était interdite.

—Je désirerais rencontrer maître Li Se, il se dit en ville qu'il cherche un copiste.

La jeune femme l'introduisit dans la maison et lui commanda d'attendre dans une antichambre le retour du maître. La pièce était petite, mais bien entretenue, on devinait que la servante la balayait tous les jours. Aux murs, les teintures masquaient la chaux et préservaient la maison du froid. Il activa Athéna son IA via son implant, il allait avoir le temps de travailler à son rapport. Li Se tiendrait à marquer leur différence de statut et ne le recevrait pas avant au moins une bonne heure.

Envoyer un compte rendu au croiseur fut l'affaire de dix minutes, ensuite Georg, s'attaqua aux exercices tactiques confiés par le commodore. Son détachement à l'ADI imposait en contrepartie de le maintenir au niveau exigé par la flotte et son supérieur lui confiait régulièrement des exercices tactiques. Georg eut le temps de simuler une escorte de convoi, et une mission d'appui d'un porte chasseur. Le commodore tendait à introduire de mauvaises surprises dans ses scénarios et à privilégier les assauts brutaux. Lorsque Maître Li Se fit enfin appeler Georg il venait de perdre le porte chasseur.

—Entrez jeune homme, l'on me dit que vous êtes copiste ?

Le lettré, homme sec, petit, avec les yeux profondément enfoncés dans les orbites, portait une longue robe de lin. Jeune, il avait dû être beau, mais il approchait de la cinquantaine. La peau fripée, le poil blanc, des tâches de vieillesse sur la peau il ressemblait aujourd'hui davantage à une momie. La jeune servante, souvent appelé a se substituer à l'épouse désormais agée, avait bien du courage, ce qui s'expliquait sans doute par les contraintes alimentaires.

—J'ai commencé à apprendre la copie lors des cours de calligraphie publique dans mon ancienne ville.

Les lettrés se connaissaient, impossible pour Georg de prétendre avoir été l'élève de l'un d'eux, le cours de calligraphie publique ne laissait, lui, aucun nom.

—Et qui était votre professeur mon garçon ?

—Maître Han Sou, votre grandeur.

—Je l'ai connu autrefois, c'est un bon calligraphe. Je vais vous proposer de copier quelques mots, si votre plume est valable peut-être aurais-je quelque chose pour vous.

En réalité le lettré cherchait tout le temps des copistes, il payait mal, et maintenait ses employés dans un semi esclavage. Nombre d'entre eux le quittaient le plus vite possible. Georg ayant satisfait à l'examen, la négociation s'engagea. Le maître payait bien, en théorie, mais les retenues pour nourriture, logement, eau, linge, prélevaient tout le salaire. En réalité Georg serait nourrit logé blanchit et si il travaillait vite et bien il épargnerait péniblement une pièce de bronze par semaine. De quoi s'acheter une maison et se marier... dans une quinzaine d'année.

Évidement Georg s'en moquait éperdument, il serait reparti bien avant, restait le plus important !

—Pourrais-je avoir des papiers pour mes exercices votre grandeur ?

Il restait toujours des pertes de papyrus pour les chutes des livres, Georg savait les assembler.

—Bien sûr, votre écriture n'est pas fameuse vous aurez besoin de vous entraîner.

***

Georg commenca à travailler pour maître Li Se et ces dernières semaines il s'était habitué. Il pris assez vite ses habitudes, le matin il copiait dans l'atelier avec les autres. Maitre Li Se employait une dizaine de copistes. Son trésor était sa bibliothèque, qui contenait vingt ouvrages venus de la Terre, et plus de cent copies réalisées localement. En cours de journée il s'arrêtait pour une pause et dans la cour de maître Li Se et enchaînait les katas pour maintenir son entraînement. Avec un sac de sable il s'était créé une sorte de sac de frappe qui lui permettait de travailler sa puissance. Torse nu, pieds nu, il enchaînait les frappes pour améliorer sa boxe comme le commodore l'y incitait. Au bout de quelques jours il remarqua que la jeune servante venait balayer le porche à l'heure de ses exercices.

Puis, jusqu'au soir il reprenait la copie, heureusement Athéna vérifiait son ouvrage et il corrigeait méthodiquement. Elle lui projetait des modèles sur lesquels il s'alignait et Georg progressait rapidement dans cette matière. Le soir, il assemblait des papyrus et écrivait le document qui justifiait sa présence dans la maison de maître Li Se.

***

—Je suis très mécontent Georg.

Le maître avait fait convoquer Georg juste avant le petit déjeuner. Son regard simulait à merveille la colère qu'il annonçait ressentir.

—Qu'ais-je fait votre grandeur ?

—Tu manges trop, je ne souhaite pas te garder.

Georg, en apparence piteux, prit son sac et sortit dans la rue, il n'était pas surpris du tout. Petit à petit il avait fabriqué son livre. Évidement Maître Li Se s'était assuré de regarder le titre et le contenu pendant les heures où Georg s'entraînait. Ce matin il venait de voler le livre et de licencier Georg. Le jeune homme quitta la maison, le pas pesant, sous le regard triste de la servante. Lui, quelques rues plus loin s'autorisa à laisser un immense sourire monter à ses lèvres, tout se passait conformément au plan. Avec Marion, ils avaient établi que le lettré volait des articles et des publications dont il se s'attribuait le crédit. Maintenant son texte devenait une découverte planétaire et plus un apport étranger. Le maître qui avait l'oreille de la cour ne tarderait pas à vendre le remarquable document qu'il avait découvert.

Maintenant, il était temps de s'occuper de l'imprimerie, sinon Marion lui arracherait la peau. Munie de ce texte, la planète découvrirait des céréales génétiquement modifiées qui augmenteraient les rendements, mais sa collègue restait focalisée sur le papier et l'imprimerie.

Le souci est qu'il n'avait pas de plan ! Introduire un livre dans le circuit des copistes, une fois un voleur identifié, était facile. Comment, au contraire, proposer une machine inconnue si vous n'aviez ni artisans ni ateliers ? Il était temps de devenir riche !

Et comment le devenir plus facilement qu'en se livrant à la paresse ? La fortune appartient à ceux qui font de bonne siestes comme chacun le sait.

Le malheureux licencié se rendit donc sur la plage et bientôt il vit le radeau envoyé par le sergent depuis la capsule. Soudainement devant les passants médusés le marin disgracié se mit à l'eau. Le radeau était loin, mais rapidement Georg le ramena à terre devant les passants médusés et deux hommes d'armes du guet.

L'épave se composait de deux tonneaux avec un coffre arrimé au milieu.

— Ça doit être dans l'eau depuis longtemps, regardez comment les bois sont couverts de coquillages.

—Tu as raison compère ! On ne reconnaît même plus les plaques et tout est complètement rouillé.

L'homme du guet, curieux, à ce stade, de cette affaire qui rompait sa ronde monotone, s'approchât de Georg.

—Voyons ce que tu as trouvé.

Avec la lance ils aidèrent Georg à briser les ferrures et s'arrêtèrent frappés. Ce coffre contenait des milliers de Wen d'or, la monnaie de Tavas. Il s'y trouvait également des pièces d'argent, de cuivre, Georg venait de devenir un homme riche. Évidement cela n'avait rien d'accidentel, il avait fabriqué les pièces avec le métal d'un astéroïde et tout préparé sur le croiseur. Il n'avait pas trouvé de solution pour l'imprimerie, il y avait trop de travail, maintenant il disposait des moyens nécessaires et surtout d'un mobile !

—Nous allons appeler le commandant qu'il constate votre découverte.

L'homme du guet venait de devenir terriblement respectueux. Le capitaine enregistra la trouvaille et aimablement mit avec obséquiosité un local à disposition. Dès le lendemain tous ceux qui avaient des terres ou des biens à vendre vinrent le voir. Georg désormais bien vêtu parti visiter les villes avoisinantes. En une semaine sa réputation fut faite, il était un ancien marin devenu riche. Il passait pour dur en affaires en homme conscient de sa chance qui tenait à pérenniser sa situation. Il achetât plusieurs rizières qui lui rapporteraient de confortables revenus chaque année. Puis il y joignit une maison confortable, mais relativement modeste près du port à la limite du quartier riche. Juste ce qu'il fallait de prétention pour montrer qu'il avait conscience de sa fortune, et indiquait qu'il n'oubliait pas d'où il venait. Le moyen idéal d'être reçu dans tous les milieux.

***

Une fois la maison acquise, on vint frapper à sa porte et l'une des premières fut la servante de maître Li Se.

—Bonjour, que désires-tu ?

—Si monsieur Georg, voulait bien m'engager, monsieur Georg sait que je travaille bien.

Il la fit entrer et raconter sa vie avant de l'engager, il était un maître humain, exigeant sur le travail, mais pas dur. Et, contrairement à son précédent employeur, il n'exigeait rien d'autre de la petit Shao, ce qu'elle paraissait un peu regretter. Marion attendait ses enregistrements et il ne tenait pas à la voire rédiger encore un de ses rapports. De toute les façons il avait désormais une maîtresse officielle : Madame Wang la principale libraire de la ville qui dominait les ventes de livres et là il avait une raison.

Sa connaissance de l'écriture étant connue, il avait fait sa connaissance dans sa boutique, où il s'était régulièrement rendu pour se créer une collection. Vu sa fortune il était normal qu'il se dote d'une bibliothèque symbole de statut social. Entre le marin, enrichit, désormais bien habillé et la libraire de dix ans plus âgée que lui la relation avait rapidement fleurie. Elle fréquentait toutes les maisons de la ville, et la femme d'affaires lui ouvrait de nouvelles portes.

Les satellites trahissaient son jardin, les fleurs auprès desquelles elle s'attardait. Au quatrième jour, il avait offert des pétunias, sa fleur favorite. La veuve, les cheveux soigneusement coiffés en bandeau, grande pour une femme et bien nourrie accepta le pot. Trois jours plus tard, elle invitait le jeune homme dans son jardin d'hivers.

Sur Tavas on utilisait les papyrus, Georg n'avait pas la possibilité d'inventer le papier. Il s'était contenté d'acheter une chute d'eau prés de ses rizières pour implanter une roue. Grâce aux calculs d'Athéna, il installait un atelier de fabrication mécanique du papyrus. Les plantes passaient dans des machines fabriquées par des artisans locaux. Georg s'assurait de commettre suffisamment d'erreurs, mais en un mois il produisait un papyrus de bonne qualité que madame Wang vendait.

—Pourquoi fais-tu cela ?

Lui demanda-t-elle un jour sur l'oreiller.

—Tu vas me trouver ridicule.

Il minaudait, puis se laissa convaincre d'avouer.

—Tu sais que je t'interdis de vendre du papier à Maître Li Se ? Il m'a licencié et je veux me venger en le ruinant.

Son amante rit, la libraire était une veuve extrêmement intelligente et d'un commerce agréable. Au lit elle était une compagnie douce et gentille et Georg l'appréciait. Vu la fortune des Wang, Marion ne pourrait pas prétendre qu'il avait abusé de ses moyens.

—Tu lui a pris sa servante, tu le prive de papyrus en vendant beaucoup moins cher, tu as la rancune tenace Georg.

—Et j'ai mieux, il exploite ses copistes, je vais rendre la copie beaucoup moins chère.

—Comment cela ?

Le lendemain Georg montrait à madame Wang une presse à imprimer assez primitive. Les feuilles de papyrus passaient entre des rouleaux et le rouleau du dessous contenait des blocs de lettres assemblées.

—Nous parvenons à imprimer cent feuilles par heure. Je suis en train de préparer le Tao du fils du ciel, nous allons en imprimer mille, vendus pour seulement cinq wen de bronze.

Le texte rédigé par le premier fils du ciel de Tavas, mélangeait les pensées confucéenne et de d'autres philosophies terriennes. C'était sur ce monde le document de base de ceux qui apprenaient à lire.

—Cinq wen de bronze es-tu certain ? C'est à peine le prix du papyrus ?

—Je te vends le papyrus à ce prix, mais je gagne dessus, et cette impression ne coûte rien. Une fois le Tao vendu les gens prendrons l'habitude d'acheter des livres et je pourrais proposer des livres à dix Wen.

Ce n'était pas le dixième du prix des livres copiés.

—Tu vas ruiner le marché du livre Georg.

—Bien au contraire, les marchands, les bourgeois vont désirer posséder leur bibliothèque. Leurs enfants apprendront à lire, moins les livres sont chers, plus les gens en réclamerons.

Madame Wang aimait l'argent, l'entreprise de Georg promettait des bénéfices conséquents sur la revente, il disposait d'un débouché local et n'apparaissait pas.

Au bout de deux mois sa nouvelle activité réalisait ses premiers bénéfices, maître Li Se avait rapidement disparut. Georg acheta une villa près d'un lac, les rizières et les poissons fournissaient des revenus conséquents. Il allait être temps de partir, d'obtenir du gouverneur une lettre d'introduction pour la capitale afin d'y établir une seconde imprimerie. Dans le sud, les cousins de madame Wang, renseignés on ne sait comment, avaient aussi établis une production de papyrus et une imprimerie.

Le lettré

Mais il n'eut pas le temps d'entreprendre ce voyage. Un matin Georg se réveilla et constata que les soldats cernaient sa maison, un homme, un lettré, attendait dans un pousse pousse devant la porte. Contraint et forcé Georg fit entrer cet individu richement vêtu.

—Shao, peux-tu préparer la chicorée pour le puissant seigneur ?

La servante se précipita pour réchauffer le breuvage, sur Tavas le thé et le café étaient inconnus. Au grand dam de l'impérial adepte du café, la chicorée constituait la boisson planétaire. S'il revenait il faudrait qu'il convainque Marion d'autoriser la découverte de sa drogue favorite.

Les deux hommes s'assirent à genoux de part et d'autre de la table basse. Son invité était un lettré, âgé, ridé que son escorte saluait bien bas. Un homme qui portait avec une grande dignité une robe de soie dorée comme il sied à un mandarin de la cour du fils du ciel. Le temps avait passé et emporté l'énergie du corps, mais les yeux montraient que le cerveau demeurait parfaitement alerte. C'était un homme qui avait passé sa vie à se cultiver, mais aussi à réfléchir et prendre des décisions. La section de soldats montrait qu'il ne craignait pas la violence et qu'en cas de besoin il y recourrait.

—Je vous remercie de m'inviter si aimablement maître Georg, je suis le docteur Lao She.

—Je vous en prie docteur, je pouvais difficilement refuser de vous recevoir, vous êtes en si charmante compagnie.

Le sourire de son invité pendant que Shao assurait un service impeccable prouva qu'il était sensible à l'humour de la répartie. Georg les installa sur la terrasse pour profiter du soleil matinal et de la vue sur le lac qui s'étendait en bas de la colline. Lisant la prière dans les yeux de son invité, il s'adressa à la jeune femme.

—Shao, veux-tu bien prendre quelque Wen et aller chercher des gâteaux pour le puissant seigneur. Je crois qu'un soldat pourras t'accompagner pour porter le panier.

Le lettré de la cour d'un signe mandata un lancier dans la cour, un officier vint rapidement.

—Lieutenant, si vous voulez bien désigner un de vos hommes pour escorter cette jeune dame, elle est chargée d'une course urgente.

A regret, la servante, un peu curieuse, accepta de s'éloigner. Une fois seul le vieux monsieur saisit sa tasse et la porta devant ses lèvres.

—Vous êtes un homme intelligent et avisé maître Georg.

—Je vous en prie que puis-je pour vous ? La boutique de gâteaux n'est pas si loin

—Je m'en doute, savez-vous pourquoi je suis ici ?

—Pas vraiment, le tao ?

Les livres commençaient à circuler, madame Wang les vendaient et comme l'avait prédit Georg le marché s'élargissait.

—Le gouverneur m'en a parlé Maître Georg, non je n'ai rien à redire, voire des livres en circulation nous réjouit. Maître Li Se se plaint que vous le poursuiviez de votre rancune.

—Disons que maître Li Se n'a pas été le meilleur des patrons, mais peut-on décrire mes actes comme une rancune ?

Le vieil homme, les yeux brillants ne se laissa pas prendre aux protestations de Georg.

—Vous savez les lettrés de Tavas se connaissent, maître Li She a toujours été un homme âpre au gain, assez paresseux et jouisseur. Évidemment, pour être charitable je m'en tiendrais à ses qualités, et éviterais de parler de ses défauts.

—Vous ne semblez guère l'apprécier, votre grandeur.

—Voyez-vous maître Georg, lorsque le fils du ciel a établi les bases de notre civilisation, il désirait que nous revenions rapidement au niveau technologique Terrien. Les lettrés ont donc eu beaucoup de prestige, dans l'espoir qu'ils redéveloppent cette fameuse technique. Mais le prestige, la bonne vie ont conduit attirer des ambitieux comme maître Li Se. Au fil du temps, ils ont largement évincés ceux qui se passionnaient pour le savoir. Le fils du ciel en a conscience, il s'efforce de lutter et d'attirer dans les rangs des lettrés des individus ouverts aux nouvelles idées. Ceux qui ont l'amour du vrai savoir, mais c'est une tâche difficile tant les ambitieux se forment en meutes pour évincer cette concurrence.

—Je vois votre seigneurie et cela vous mène dans mon humble demeure ?

—Il se pourrait que le chemin du vrai savoir passe par votre humble maison. Vous êtes une personne béni entre toutes. Le hasard vous dote d'une fortune, et vous savez quoi en faire. J'admire, Maître Georg, et j'espère qu'avant de repartir vous me montrerez vos ateliers.

Georg sentait l'ironie, l'homme savait quelque chose, il l'amenait doucement, et cette retenue était encore plus étonnante. Même dans une civilisation primitive, on ne déplaçait pas comme cela une quarantaine de soldats.

—Je reconnais que la fortune m'a comblé, j'étais désespéré, et le destin m'a gratifié de cette incroyable faveur. J'imagine que ce que la mer m'a pris, elle me l'a rendu.

—En effet maître Georg, vous êtes un homme de mer. J'aimerais d'ailleurs partager avec vous un courrier qui a été récemment adressé au fils du ciel par un autre homme de mer.

—Je vous en prie docteur, je me sens honoré.

—Vous êtes parfaitement urbain.

Le vieil homme sortit une papyrus de sa robe et commença à lire.

Votre seigneurerie.

La flotte de Jonque de la base de Washe a pris la route selon vos ordres au quatrième jour du mois de Tsé. Par votre grâce la flotte disposait de six jonques de quatre mats et quatorze jonques de trois mats.Nous avons emmené ravitaillement et matériel pour quatre mois de mer. La flotte comptait 196 officiers et 2632 marins.

A la fin de la première semaine, nous avons doublé le cap des perles, dernière cote sous votre autorité. Notre navigation, s'est ensuite poursuivie pendant neufs jours, puis nous nous sommes heurtés à une tempête qui a dispersée notre escadre. Deux jours, furent nécessaires pour gagner le point de regroupement, et rassembler nos navires. Les dégâts sont demeurés mineurs, et nous avons pu poursuivre notre route.

Georg imaginait, ces hommes sur ces coques de noix au milieu des océans de Tavas, le rapport ne parlait pas des marins perdus. Lui, le savait, ses drones avaient suivis l'escadre, il avait vu les matelots entraînés par les paquets de mer, ceux qui étaient tombés des vergues. Tous ces morts dont il était bien évidement responsable. Heureusement, l'expédition ne devant pas durer longtemps, le ravitaillement avait pu bien être préparé, le scorbut, la malnutrition n'avaient au moins pas frappé la flotte. Le lettré continuait la lecture de son document. Pour lui, de telles péripéties étaient quotidiennes et il s'y était habitué.

Nous avons finalement atteint l'île d'Araon que vous nous aviez fixé comme objectif. Nos expéditions ont, comme vous nous l'aviez ordonné, trouvé des plantes dont votre seigneurerie nous a parlé. Elles poussent partout, et nous avons ramené de nombreux plants. Nous avons ensuite ravitaillé les navires en eau, en nourriture, en fruits et en légumes et préparé les bâtiments à repartir.

Nous avons repris la route vers notre base le septième jour du mois de Gao que nous avons atteint le vingt-huitième jour de ce même mois. Les plants ont été remis aux agronomes que votre seigneurerie nous a envoyé.

—Je vous épargne la suite, le commandant Nerado est un homme poli. Qu'en pensez-vous maître Georg ?

—J'imagine que si vous avez trouvé de nouveaux plans, vos lettrés vont pouvoir procéder à des améliorations, désirez-vous expérimenter dans mes rizières ?

—Maître Georg, vous êtes extrêmement aimable, mais les domaines du fils du ciel sont immenses et nos spécialistes devraient parvenir à y trouver une parcelle.

Georg était de plus en plus inquiet, l'homme savait où il allait, et il n'avait pas encore abattu son atout.

—Et bien votre grandeur, je m'en félicite je ne vois pas quoi dire de plus.

—Je vous comprend maître Georg, imaginez! Nous venons de trouver dans l'île d'Araon des plantes extrêmement nutritives qui vont nous permettre de produire davantage de nourriture. C'est une remarquable nouvelle, mais il existe un léger détail que j'aimerais porter à votre connaissance...

L'homme s'interrompit, Georg proposa de la chicorée, et resservit son invité. L'heure était venue de savoir ce qui se passait.

—Il y a cents quatre vingts ans, le fils du ciel a voulu étendre nos territoires. Il a donc envoyé sur l'île d'Araon une expédition de colonisation.

—Je vois, où voulez-vous en venir votre grandeur ?

—Imaginez-vous, maître Georg que cinq milles colons sont morts de faim sur une île où poussent des plantes si nourrissantes ? Qu'en pensez-vous ?

—J'ignore ce que je dois en penser votre grandeur.

—Si les colons sont morts de faim autrefois, c'est que ces plantes, qui poussent maintenant là-bas à profusion, ne s'y trouvaient pas. Or, maître Li Se vient de copier une transcription datant de la colonisation selon lequel ces végétaux s'y trouveraient depuis les débuts de la terraformation. Qu'en pensez-vous ?

La menace se précisait, Georg venait tout juste de vérifier, devant lui se trouvait le lettré privé du fils du ciel.

—Je ne sais pas, si maître Li Se a publié le livre, pourquoi ne pas le lui demander ?

—Effectivement maître Georg, nous le lui avons posé cette question. Vous vous en doutez bien, et c'est là, que nous sommes devenus un peu insistants. Parmi, les grandes qualités de mon estimé collègue, j'ai oublié l'absence totale de courage, et le bourreau a su le convaincre. Maître Li Se, nous a rapidement avoué avoir volé l'œuvre d'un autre auteur. Voyez-vous où je souhaite en venir maître Georg ?

—Je présume que vous êtes là pour me poser une question ?

A cet instant la petite Shao revint. Elle posa les gâteaux sur la table, devant le lettré, avant de demander de sa jolie voix.

—Désirez-vous autre chose puissant seigneur ?

Le lettré eut un geste négligent de la main.

—Si vous vouliez bien aller chercher des gâteaux pour mes hommes, je crois qu'ils ont faim.

Shao se tourna vers Georg, dans l'espoir qu'il lui épargne cette nouvelle mission inutile.

—Je crois chère Shao, que le puissant seigneur a raison, ses soldats ont besoin de manger.

Déçue la jeune femme sortie, elle venait de comprendre que les deux hommes souhaitaient avant tout se débarrasser de sa présence.

—Elle est charmante maître Georg. Je pense que vous avez gagné au change, il a volé votre oeuvre, vous lui avez pris cette jeune personne.

Le regard brillant du lettré montrait que l'ascétisme n'était pas forcément sa plus grande ambition dans la vie.

—Ce qui nous ramène à la question que nous avons posé à maître Li Se : Quelle est l'origine de ce texte maître Georg ?

—Je crains de ne pas comprendre votre question monsieur ?

—Je souhaiterais éviter de devenir impoli, maître Li Se nous a avoué vous avoir volé ce livre. Ce qui pose la question de comment vous êtes en possession de cet ouvrage. il décrit une situation parfaitement réelle, puisque nos marins ont trouvé les plantes. Pourtant, c'est un faux grossier, puisque ces plantes n'ont pas été introduite lors de la terraformation.

—Peut-être se sont-elles répandues aux fil des années et les colons ne les ont-ils pas trouvées.

Le lettré esclaffa, de tous petit hoquets dans sa bouche fine. Juste assez pour honorer la plaisanterie et suffisamment pour montrer qu'il n'était pas dupe.

—Vous ne manquez pas d'humour maître Georg, savez-vous ce que je crois ?

L'homme tournait autour du véritable sujet, mais Georg avait déjà été identifié sur d'autres planètes.

—Je vous en prie puissant seigneur, je suis intéressé par vos conclusions.

L'homme sourit à son hôte, avant de boire une gorgée de chicoré puis prendre un gâteau.

—Voyez-vous maître Georg, nous savons pourquoi nous sommes là, que nos voisins nous ont pillés. A plusieurs reprises, nous avons soupçonné des interventions extra planétaires qui visaient à ralentir notre développement. Ici nous constatons une intervention qui est évidement d'origine extra planétaire.

—Dans ce cas, votre grandeur, pourrais-je savoir ce que vous attendez de moi ?

—Vous êtes charmant jeune homme, admettez-vous être un extra planétaire ?

—Je préférerais ne pas vous répondre sur ce sujet, pourrais-je savoir pourquoi c'est si important pour vous ?

—Vous représentez un changement pour nous, nous connaissons trop d'interventions qui visaient à ralentir notre développement. Des navettes extra planétaires sont venues pour enlever des gens. Vous représentez un cas particulier, la première immixtion qui nous soit favorable. Alors le fils du ciel aimerait en apprendre davantage.

—Que désirez-vous comprendre votre grandeur ?

—Votre présence traduit-elle un changement de ceux qui nous ont jusqu'ici empêchés de nous développer ou si êtes-vous un nouvel acteur.

L'homme était intelligent et organisé Georg venait de trouver le partenaire de négociation dont l'empire avait besoin.

—Votre grandeur, rien de tout cela n'avait été prévu, pourrais-je vous demander le temps de contacter ceux qui seraient habilités à négocier avec vous ? Je devais me rendre dans la capitale, ainsi le contact ne serait pas perdu.

L'homme plongea son regard dans celui de Georg, deux charbons ardents qui s'enfonçaient et semblaient vouloir attendre les tréfonds de son cerveau. De bonne grâce il se prêta à l'examen, quel que soit le niveau de technologie, la société... On en revenait toujours là, cette méthode primitive pour évaluer ce qui comptait plus que les faits : Les intentions

—Le fils du ciel espérait des réponses, je lui expliquerais. Auriez-vous une objection si le lieutenant Song, et son unité, assuraient votre escorte jusqu'à la capitale ?

Georg compris, le lettré tenait à s'assurer qu'il ne leur fausse pas compagnie, il était normal qu'il cherche à avoir une garantie.

—Bien sûr que non, je devrais cependant laisser le lieutenant s'organiser, je n'ai pas les moyens de pourvoir à l'entretient de tant d'hommes.

—Ne vous inquiétez pas maître Georg, le lieutenant et ses hommes pourvoirons à leur entretient. Je vous réserverais un logement dans la capitale pour ne pas retarder votre voyage.

Il jeta un regard sur les restes des gâteaux et la théière.

—La boulangère de votre quartier est excellente, ces gâteaux sont presqu'aussi bon que la chicorée que prépare cette petite, vous la remercierez de ma part.

—Je n'y manquerais pas, votre grandeur.

Shao rougit sous les compliments, puis Georg transmit son rapport pour Centrus, le croiseur disposait de drones hyperspatiaux conçus pour assurer ce type de messages. Monsieur l'ambassadeur n'avait plus qu'à venir pour la visite diplomatique !

Laservante

Les chemins étaient mauvais et Georg choisi donc la voie maritime plus rapide et plus confortable. La vaste jonque transportait le lieutenant et ses hommes, les pièces pour l'usine de papyrus et l'imprimerie que Georg planifiait d'installer à la capitale.

Il avait loué une vaste jonque à quatre mats, le grand modèle tavasien d'à peine mille huit cents tonnes. Dans l'empire, un navire de ce tonnage aurait été limité à la plaisance où à un rôle de bac. Ici, c'était un événement, la marque d'un prince marchand. Marion protesterait que la méthode manquait de la discrétion souhaitable, mais depuis Mycène où il avait faillit mourir en mer Georg abordait cet élément avec une certaine prudence.

Il ne manquait pas d'arguments, la section du lieutenant Song aurait besoin de place, il devait transporter les pièces pour les machines. Surtout, il devait rentabiliser le voyage et il avait engagé sa fortune pour acquérir des fils de soie venues du sud. Les cousins de Madame Wang contactés par pigeons avaient acquis le lot pour lui et le lui avait fait parvenir. Dans le nord, autour de la cours, le froid venait de ravager les mûriers. Bientôt les artisans tomberaient à cours de matière et les prix monteraient, au sud la situation inverse prévalait et personne ne pouvait utiliser tout le fil disponible. Grâce aux drones et aux prévisions météo avancées il était le premier à pouvoir s'engager dans ce commerce. Les princes marchands prenaient encore leurs disposition que sa cargaison serait livrée à Hubei et limiterait l'inflation et le chomage. Cet agiotage promettait un doublement de la valeur de la cargaison qui établirait la réputation d'homme d'affaire avisé de Georg. Il emportait également quelques milliers de livres qu'il vendrait dans les ports aux contacts de sa maîtresse. Ceux-ci l'attendaient avec impatience.

Il pouvait ainsi visiter Tavas. Idaho s'amusait de ses rapports quotidiens :

—Georg tu es là pour une mission de reconnaissance, pas pour une étude sur l'éducation dans les sociétés primitives.

Son camarade avait raison, mais lui connaissait son Altesse Lisa Ravierri, elle l'avait convoqué avant son départ en mission.

—Je suis intéressé par cette société de lettrées et j'apprécierais si vous pouviez quelques notes Georg. Pas grand-chose, juste les rapports entre le capital culturel et la promotion sociale, la manière dont les familles traitent l'école comme une priorité, ou non, la place sociale des enseignants. Si vous pouvez simplement enregistrer un peu que nous connaissions les programmes, la place de l'apprentissage par cœur, l'esprit critique.

Je ne vous demande pas grand-chose, simplement un petit brouillon qui pourra plus tard finir comme un article dans le journal de sociologie à l'université.

Elle avait accompagné sa demande de son petit jeu de cils qui avait autrefois entraîné le jeune homme dans un marathon de quatre vingt seize heures sans sommeil. Un article qui n'était même pas noté et pour lequel il avait retardé un mémo sur les tactiques de mouvements en formation pour les super cuirassés qui comptait pour la note de tactique spatiale. Seuls les stimulants et une programmation informatique agressive l'avaient alors sauvé d'un retard pour livrer son devoir. Et là, devant la prière de son enseignante il avait su que pas plus cette fois ci qu'autrefois il ne pourrait lui dire non.

Qu'Idaho se moque ou non il visiterait les écoles. Du cours de calligraphie publique où les jeunes enfants se rendaient aux classe, extrêmement chères qui préparaient les futurs mandarins de la cours aux concours.

Son Altesse n'avait d'ailleurs pas tardé a préciser ses attentes.

—Voyez aussi la comparaison avec nos écoles, quels objectifs sociaux sont attendus, la socialisation des jeunes enfants. C'est important, vous tenez l'occasion d'un article qui marquera le journal.

Elle avait en quelques mots monté ses attentes, placer un texte dans le journal de l'université Léa Ravierri était une mission exigeante. L'établissement formait les cadres supérieurs de l'empire et attirait les meilleurs enseignants. Étudiants d'élite, professeurs réputés se battaient pour publier. Georg, poussé par sa professeur avait réussit deux fois cet exploit et si elle tenait tant à ce sujet, il passerait des heures dans son bureau à peaufiner après la mission.

Évidement, il n'avait pas davantage su refuser, il observait les élèves, ceux des familles riches qui passaient leur journée dans un cours avec un enseignant. Les enfants de paysans qui eux, ne suivaient que quelques heures de cours par jour avant de retourner à la rizière. A leur age il ne pouvaient pas assurer une journée complète de travail, alors avec des bâtons ils traçaient les lettres dans le sable. Les familles peinaient à payer le pédagogues elle ne pouvaient ajouter le matériel mais l'enseignant assurait la garde sur ces heures improductives.

Quelle différence entre ces granges à bœuf et les écoles impériales richement dotées d'un matériel audiovisuel performant ? Entre les enfants impériaux qui avaient le choix entre de multiples activités et qui parfois considéraient l'école comme une interruption malvenue dans des jeux bien plus essentiels. Au contraire, pour l'enfant du paysan tavasien, le lettré qui avait appris à écrire, connaissait le Tao, et dont la nourriture était assuré parce qu'il traçait des signes sur un papyrus était une créature quasi divine.

—Désirez-vous quelque chose maître Georg ?

—Non merci Shao, je dois finir mes exercices, as-tu pris tes graines de soja fermentées ?

—Pas encore monsieur, je n'aime pas les prendre le matin, je le mangeraient après la chicorée.

Georg regarda la petite partir, elle n'aimait pas le natto, fromage de soja fermenté que tous les marins devaient consommer pour les apports en vitamines C. Les passagers des navires pouvaient éviter, mais Georg, spatial expérimenté suivait bien évidement la routine de l'équipage.

Seul problème le natto dégageait une odeur assez forte et déplaisante et Shao avait pris l'habitude de boire sa chicorée le matin avec le lieutenant Song. Jamais elle n'aurait accepté de se présenter devant lui avec une telle odeur sur les vêtements. Les deux à force de veiller sur Georg avaient appris à se connaître et à s'apprécier. Comme lui ne pratiquait pas les amours ancillaire l'aventure ne tarderait probablement pas. Song venait d'une famille noble et titrée, mais cadet de famille il n'avait pas de fortune. Le service dans les armées du fils du ciel lui apportait la solde, le repas du jour et peut-être, un jour l'espoir d'une glorieuse campagne dont le butin ferait de lui un homme riche.

Georg ne tarderait pas à partir alors Shao pourrait devenir la concubine du lieutenant, leur entente était évidente, mais sans titre ni fortune elle ne pourrait prétendre l'épouser. Restait à espérer que les deux seraient heureux ainsi.

Il reprit ses exercices de musculation contre le bastingage. Les pompes lui permettaient d'observer la terre. La cote était riche, la plaine côtière aménagée pour retenir les eaux de pluies qui descendaient lentement. Les récoltes bonnes assuraient une abondance de nourriture, mais les bassins salins, la pèche fournissaient des compléments appréciable et les villages hébergeaient une population importante. Les ressources de la mer permettaient de tenir entre deux récoltes et contrairement aux régions de monoculture la famine frappait moins grâce à cette diversité alimentaire.

Il observait avec soin, il serait sûrement possible d'ajouter des fermes d'algues, une aquaculture primitive et ces régions fourniraient d'importants excédents de population. Le commerce maritime était aussi florissant. Les jonques à fond plat pouvaient remonter les rivières et si une déplacement océanique était nécessaire une quille était ajoutée. Les tavasiens avaient su conserver la cale sèche et consigner autant de leur savoir que possible par écrit. Modifier les navires était donc une opération courante fréquemment réalisée. Grace à cela la prospérité des régions maritime contribuerait à éviter les famines dans l'intérieur des terres.

La petite Shao lui parlait parfois des famines qui ravageaient ces territoires.

—J'avais huit ans lorsque je suis venue, les inondations avaient ravagées les rizières et il n'y avait plus assez de vivants pour enterrer les morts. Avec mon frère, nous avons pris soin des corps de nos parents puis nous avons marché. Tant que nous pouvions, nous mangions l'écorce des arbres puis nous sommes arrivés à la cote. Mon frère s'est engagé comme marin, je lavais le pont et un jour nous sommes arrivés à Hubei, j'y suis restée dans plusieurs maisons et à la fin chez maître Li She.

Elle ne parlais pas de frère, mais la langue tavasienne avait développé très rapidement un terme pour grand frère qui incluait le respect du à l'aîné. Shao, à cette mention semblait d'ailleurs baisser la tête et le saluer comme si il avait été présent.

Sur le navire il avait le temps, alors le lieutenant et elle subissaient l'interrogatoire de sociologie dans toute sa splendeur.

—As-tu suivit le cours de calligraphie Shao ?

—Non maître Georg, je devait commencer l'année suivante si il n'y avait pas eu la famine. Nous récitions le Tao, le lettré nous le lisait nous répétition, j'aimais bien cela.

De sa voie chantante elle avait commencé à lui réciter des passages, plus de dix ans plus tard elle n'avait rien oublié. Il avait chargé Athéna d'évaluer, la récitation était conforme à 97,5 % au texte d'origine sans que cela ne surprenne personne. Song n'atteignait que 82 % et peinait sur certain passages.

—Shao, ton professeur vous punissait-il ?

—Parfois, mais c'était rare, personne ne se serait permit de l'interrompre pendant qu'il parlait. C'était quelqu'un de très important, il avait vu la ville, l'université. J'écoutais, je répétait, puis de nouveau lorsque je conduisait les buffles. Le soir, je voulais que le maître soit content de moi.

Incrédule Georg avait fixé stupidement sa servante avant de ne prononcer qu'un seul mot.

—Pourquoi ?

—C'était le professeur, il savait lire, il écrivait, n'allait pas aux champs.

Song, moqueur l'avait interrompu.

—Je parie que personne d'autre dans ton village ne savait lire il lisait les décrets impériaux au chef de village ?

D'une petite voie elle confirma.

—Oui, bien sur qui d'autre en aurait été capable ? Nous devions récolter le riz, c'est notre place selon le Tao.

—Et vous lieutenant aviez vous le même respect pour votre professeur ?

—Vous avez des questions étranges maître Georg, ce n'était qu'un domestique de mon père. Pourtant, si il s'était plaint j'aurais été puni, Père aurait aimé que je réussisse les concours. Je manquais d'application, j'aimais la chasse et les armes.

—Donc, vous assuriez juste une présence et une obéissance de façade ?

—Je crois que l'on peut le dire ainsi, pour moi, ce n'était pas important, j'ai un cousin qui voulais absolument devenir mandarin. J'ignore si l'idée venait de lui, de ses parents, mais je crois que son prof et lui avaient une bonne relation. D'ailleurs il l'a conservé comme assistant lorsqu'il a réussit.

Georg, avec fébrilité prenait des notes.

Athéna, conserve ce passage, note le visage extatique, quasi religieux de Shao lorsqu'elle parle de son professeur. Envoie des drones dans les écoles pour suivre combien d'élèves ont le même rapport à leur pédagogues.

Il réfléchit.

Non, observe la ségrégation sociale dans le milieu éducatif, il nous faut par classe sociale, le taux d'écoliers qui manifestent un tel respect à leurs enseignants. Les différences de vêtement, d'attitudes, de langages par rapport à leurs élèves et aux parents. Comment naît la domination symbolique, et quel capital culturel est transmit en contrepartie. Nous devrons réaliser la même étude dans l'empire sur l'attitude des élèves, les enfants d'impériaux, ceux de colons.

Il aurait du travail pour compléter, mais madame Lisa avait eu une bonne idée, il disposait d'un excellent matériaux avec des possibilités de retombées. Lui même avait été un bon étudiant à l'école, mais il avait su ce qu'il désirait et que le concours de la flotte passait par de bonnes notes.

***

Ils abordèrent à quarante kilomètres de la capitale, et des charrettes les emportèrent avec le matériel. Shao veillait sur Georg comme une mère poule, s'assurant qu'il ait à manger, négociait dans les ports avec les aubergistes. Le jeune homme lui avait payé deux robes, et elle était en admiration devant tant de générosité. Un vêtement coûtait cher, plus d'un mois de salaire.

Shao, fut la plus heureuse de voir la villa réservée par le lettré du fils du ciel. Georg se moquait du luxe, des dragons en terres cuites peints de magnifiques émaux, il venait de recevoir une réponse de Centrus. Il s'adressa au lieutenant Song :

—Monsieur, si votre supérieur le désire nous pourrions dîner ensemble.

—Bon maître Georg je transmettrais.

Devant une Shao émerveillée, l'après-midi même, un messager du palais remit à Georg une invitation à dîner au palais.

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