Une semaine avait passé depuis l'appel de Stella à sa mère. Entendre la voix de sa mère lui avait fait du bien. Malgré tout, elle n'avait pas essayé de recontacter le jeune monégasque, et n'avait pas non plus eu de nouvelles du jeune homme.
Même si l'appel avait apaisé certaines de ses craintes, il en restait toujours d'autres. Si ses parents avaient réussi à la reconnaître, est-ce que d'autre personnes l'avaient aussi reconnue ? Combien de temps avait-elle encore devant elle avant que quelqu'un ne la retrouve à Maranello ?
Elle soupira en regardant à travers les fenêtres du restaurant. Elle devait partir.
En entendant, les portes de la cuisine s'ouvrir, elle se mit à sourire. Giovanni avait deux assiettes dans les mains.
« C'est prêt.
- La table est mise.
- Parfait. Alors à table. »
Elle avait repris le travail après deux jours de repos. Malgré son état, elle était retournée travailler, elle ne pouvait pas laisser tomber son patron. Pas après tout ce qu'il avait fait pour elle.
Alors qu'ils étaient à table depuis quelques minutes déjà, Stella se mit à soupirer. Il était temps de prévenir son patron.
« Giovanni ?
- Stella ?
- Je dois vous parler de quelque chose. »
Le vieux restaurateur soupira à son tour. Il était inquiet depuis leur retour d'Imola. Et il savait au fond de lui qu'il n'allait pas aimer les propos de la jeune femme.
« Je t'écoute picola Stella.
- Je vais partir...
- QUOI ? »
Le vieux restaurateur lâcha sa fourchette qui tomba sur son assiette renversant un peu de sauce sur la table. Stella s'empressa d'attraper une serviette pour essuyer la table avant de souffler et de lancer un sourire à son patron.
« Je suis désolée, mais je dois m'en aller. Je vous préviens maintenant, mais je vous laisse le temps de trouver quelqu'un pour me remplacer. Je ne partirais pas tant que vous n'aurez pas trouvé quelqu'un, mais je ne peux plus rester ici. Je...
- Que s'est-il passé ce jour-là à Imola, pour que tu veuilles tout quitter ? Qu'est-ce que Charles a fait ?
- Il n'a rien fait. Rien du tout. À vrai dire, il est la seule raison qui me pousserait à rester. Mais pour ma sécurité, la sienne, et celle des gens à qui je tiens. Je dois partir.
- Qu'est-ce qu'il a bien pu t'arriver dans la vie, pour que tu doives t'enfuir comme ça ? »
La jeune Sicilienne soupira. Elle ne voulait pas le mettre plus en danger en lui racontant toute son histoire, mais elle lui devait tout de même une explication.
« On va dire que ma famille a eu quelques problèmes, et on a dû se séparer pour être protégé. Malheureusement, j'ai été exposée en allant au circuit. Ma mère m'a reconnu dans le garage Ferrari en regardant le Grand Prix, et je ne suis plus en sécurité maintenant.
- Je... Wow... Je pensais vraiment que personne ne te filmerait...
- ...
- C'est pour cela que tu t'es éloignée de Charles ? Quand on était au motor-home.
- Oui et non... J'ai eu une discussion avec Andrea, son entraîneur, et...
- Ah, je vois... »
Le vieux restaurateur souffla.
« Je suppose qu'il a dit quelque chose de méchant à ton propos.
- Oui et non... Enfin plutôt oui, Charles lui a dit que je ne viendrais probablement jamais sur les circuits et il a été assez étonné de me voir. Il pense que je côtoie Charles pour la célébrité.
- Pardon ?
- Oui...
- Comme si toi, tu étais là pour la célébrité... Voyons...
- ... »
Stella ne lui répondait pas... Elle avait le cœur lourd de devoir quitter à nouveau un endroit qu'elle aimait. Mais elle devait protéger ceux qu'elle avait rencontrés ici.
« Je vais essayer de trouver quelqu'un rapidement... Je ne veux pas te voir partir, mais quand je vois que ton sourire a disparu et ton regard perdu, je comprends que tu doives t'en aller. Je vais essayer de contacter Angelica, pour voir si elle pourrait te remplacer le temps que je trouve quelqu'un...
- Je ne veux pas vous poser de problème Giovanni. Si vous ne trouvez personne...
- Tu ne me poses pas de problèmes Stella, voyons... J'ai travaillé seul au restaurant pendant longtemps avant que tu n'arrives à Maranello. Bon, maintenant je ne penses pas que ça serait possible vu le nombre de nouveaux clients que nous avons. Mais sinon j'embaucherais un cuisinier et j'irais en salle. Je trouverais une solution. Le plus important, c'est que ça aille pour toi... »
Une larme que Stella retenait depuis plusieurs minutes, roula sur sa joue et Giovanni s'empressa d'attraper la main de la jeune Sicilienne.
« Ne pleure pas picola Stella. Tout ira bien pour moi. Maintenant, tout ce qui compte, c'est toi. J'espère simplement que tu ne nous oublieras pas trop vite quand tu seras partie.
- Je ne vous oublierais jamais, vous, Lorenzo, Graziella. Je n'oublierais jamais cette année passée à Maranello...
- Est-ce que tu as déjà une idée de l'endroit où tu veux aller ?
- Non... Je dois m'éloigner d'ici, mais il est certain que je resterais en Italie.
- D'accord. Hum, si je peux te conseiller quelques endroits aussi charmants que Maranello...
- Ce serait avec plaisir Giovanni, mais ça serait trop simple.... Vous ne devez pas savoir où je serais...
- ... »
Stella savait déjà où elle allait partir. Elle avait eu toute une semaine pour y réfléchir. Mais elle devait à tout prix garder cette information secrète.
La journée au restaurant passa rapidement. Alors qu'ils étaient tous les deux en train de terminer le nettoyage. Giovanni reçut un appel qu'il attendait depuis quelques heures déjà.
Lorsque l'appel se termina, il quitta la cuisine pour rejoindre la salle du restaurant.
« Mia picola Stella ?
- Sí Giovanni ?
- Je viens d'avoir Angelica au téléphone. Elle va pouvoir te remplacer dès demain.
- Oh... »
Est-ce que Stella s'attendait à pouvoir quitter Maranello si rapidement ? Non. Mais c'était un mal pour un bien.
« Grazie, Giovanni.
- Prego Stella. J'espère que tout ira bien pour toi. »
Stella lui lança un sourire qu'elle voulait le plus rassurant possible. Le vieux restaurateur ouvrit ses bras, et elle se jeta contre lui. En une année passée ici, ils étaient devenus proches. Comme un oncle et sa nièce, ou un père et sa fille. Et elle devait lui dire au revoir maintenant.
Après cette étreinte, elle se détacha de lui et se tourna, essayant d'éviter un torrent de larmes. Elle ferma les yeux puis les rouvrit, son regard posé sur le restaurant vide, puis sur la terrasse...
Elle regardait la terrasse d'un œil triste. Elle réalisait petit à petit ce qu'il se passait devant elle. C'étaient ses dernières heures à Maranello. Sa dernière nuit dans la petite ville italienne. Elle avait dû quitter sa ville natale, puis fuir son île de cœur, et maintenant elle devait fuir la ville qui lui avait redonné le sourire.
Fuir et ne jamais revenir. Fuir et disparaître totalement. Fuir et oublier le passé.
Mais plus rien ne serait jamais comme avant. Elle allait laisser son cœur à Maranello.