Louisa, complètement frigorifiée et encore trempée de la tête aux pieds, frappe à la porte du petit appartement marseillais.
Des verrous s'enclenchent immédiatement.
—Louisa ?! s'exclame Victor en sous-vêtements avec un bol de céréales entre les mains.
—Salut Victor...
—Merde ! J'ai faillis pas te reconnaître ! Qu'est ce tu fais ici ? Pourquoi tu es mouillée ? Et surtout, c'est qui cet homme derrière toi avec une arme dans la main ?!
—Je préfère tout te raconter à l'intérieur. Je peux entrer ?
—Seulement si il pose ce flingue !
Louisa fait signe de la main à André qui s'exécute aussitôt. Tout les deux pénètrent à l'intérieur du petit appartement jouxtant la plage du Prado.
—De toute façon, cette arme ne marche plus, proclame André en le projetant sur la table du salon.
Le petit studio est dans un état lamentable. Des paquets de chips et des emballages de sucreries encombrent le canapé et au fond du petit studio, la cuisine déborde de vaisselle et de reste de cartons de pizza et de fast-food. André est presque dégouté par la vétusté de cet endroit tandis que Louisa attrape une serviette dans une panière pour s'éponger les cheveux.
—Eh bien Victor... Je vois que ton goût pour le rangement et la propreté n'a pas changé !
—C'est un logement temporaire alors je m'en fou, rétorque le jeune homme qui enfile un peignoir pour couvrir son corps frêle.
—Oui je connais ce discours, j'ai un collègue qui est comme toi.
—Ah ? Nouveau job ?
—Oui, j'ai quitté la brasserie Rue du Louvres pour me lancer dans d'autres projets, tout comme toi apparemment.
—C'est vrai... Après le meurtre de ce client devant notre terrasse j'ai voulu quitter Paris et me retrouver sous le soleil de Provence. C'est trop la merde de vivre là-bas, dit Victor en s'affalant dans son canapé. Alors j'ai dit merde à ce connard de Jean et j'ai quitté mon job de barman pour venir tenir les cuisines de ce petit restaurant en bord de mer !
—Bien joué, ce Jean est un vrai con...
—Bon... et toi ? Tu vas me dire pourquoi tu es là ? Et je réitère ma question finale, c'est qui lui ?!
André reste silencieux.
—C'est un ami Victor.
—Voilà. Un ami qui a aucun compte à te rendre, rétorque sèchement André. Tu as un téléphone ?
Victor lève les sourcils.
—Tu n'as aucun compte à me rendre mais moi, je dois t'accueillir et en plus te donner mon téléphone ? Demande sarcastiquement le jeune homme en peignoir. Tu te prends pour qui Rambo ?
André contracte ses poings. Louisa décide d'intervenir avant qu'André ne montre son réel visage après ces dernières heures si éprouvantes.
—Victor, je dois juste passer un coup de téléphone important s'il te plait. Et promis on te dérangera pas plus longtemps.
Le jeune homme extirpe de son peignoir son smarphone et le jette dans les mains de André qui le rattrape au dernier moment. André voudrait lui encastrer ce téléphone au fond du gosier, mais il se résigne et part dans la cuisine afin de passer son coup de fil.
—Louisa, ça fait longtemps qu'on s'est pas vu et j'ai pas envie d'être brusque mais... t'as des amis très bizarres. Tu es sûr que tout va bien ?
Louisa, épuisée, s'affale à son tour dans le canapé pour soulager ses jambes tendues par l'eau froide.
Avec une mine dégoûtée, ses mains viennent balayer des emballages de sucreries au sol.
—J'ai passé une très très mauvaise soirée, répond Louisa en soufflant.
—Je vois ça...
Victor s'approche d'elle et lui murmure dans l'oreille.
—Écoute... si cet homme t'as kidnappé ou tu as des emmerdes, dit le moi maintenant. Je te ferai sortir d'ici !
Louisa rigole.
—Non Victor, c'est vraiment mon ami. Cet homme est l'un des êtres le plus fidèle, fiable et courageux que je connaisse. Il me protégerai contre n'importe quel fléau qui s'abattrai sur moi... Et ce soir il l'a encore prouvé...
—Ok... Et je peux savoir ce qu'il s'est passé exactement ?
Louisa tapote amicalement la main de son ami.
—Moins tu en sais, mieux tu te porteras, répond-elle en fermant un instant les yeux.
Un repos de très courte durée car André débarque brusquement dans le salon.
—Louisa, j'ai eu Julien et...
André s'interrompt subitement. Avec son regard glacial qui le caractérise tant, André fixe Victor avec intensité et lui fait clairement comprendre qu'il dérange.
—Je vois... Je vais vous faire du thé pour vous réchauffer.
Le jeune homme part dans la petit cuisine tandis qu'André reprend.
—J'ai eu Julien au téléphone et il a réussit à pirater des rapports de la police française qui précise qu'il y a eu des arrestations importantes après la fusillade sur le port. Hélène n'est peut-être pas morte !
—Quoi ?! Tu en es sûr ?!
—Ça ne peut-être que Hélène ! Tu ne l'as pas clairement vu se faire tuer, si ?
—Non ! Je n'ai rien vu après que la grenade fumigène aie explosé ! André, il faut s'arranger pour faire sortir Hélène de là !
—Elle est entre les mains des autorités Louisa ! Pour le coup on est bloqué ! On doit attendre !
—On peux réfléchir à un plan d'évasion ! Ou engager les meilleurs avocats de la planète ! On ne peux pas l'abandonner André ! Elle va vivre un véritable calvaire si on la laisse entre les mains du lieutenant Bérard !
—Tu crois que je ne le sais pas ? Hélène préfèrerai mourir que de passer le restant de sa vie en prison mais on ne peux tout risquer pour la sauver...
Louisa se redresse sur le canapé puis regarde André avec intensité.
—On ne doit pas l'abandonner ! Je ferai tout ce qui est possible, je prendrai tout les risques nécessaires pour sortir Hélène de là !
—Je le sais Louisa, mais tu ne peux pas te sacrifier et nous emmenez dans ta chute avec toi pour Hélène ! C'est impossible ! De toute façon, nous ne pouvons rien faire pour le moment. Julien a repris contact avec Loup. Il vient nous chercher demain matin à la première heure pour nous ramener sur Paris. On rentrera en voiture. Se rendre dans un aéroport est bien trop risqué.
—Loup est revenu d'Ukraine ? Je pensais qu'il ne voulait plus travailler avec ALLOS après les péripéties du manoir des Balaz. Il ne voulait pas que sa couverture d'espion ukrainien tombe en lambeaux.
—Oui mais Hélène et Loup sont très proches. Ils ont travaillé ensemble pendant des décennies et je pense même qu'ils ont partagé une relation plus qu'amicale pendant un certains temps. Il revient pour elle et non pour ALLOS.
—C'est parfait ! Plus on sera nombreux, plus on aura de chance de ramener Hélène à nos côtés !
André sourit mais semble perplexe. Il triture le téléphone entre ses mains.
—Qu'est ce qu'il y a André..? Tu as ton fameux tic lorsque t'es anxieux ou inquiet. Dit moi !
—Je crois qu'Oléana Thörsen n'est pas morte... La police a aussi mis la main sur elle.
—Pourtant je l'ai vu se faire transpercer par une balle devant moi !
—Une balle qui ne l'a pas tué...
—Merde ! J'ai une confiance totale envers Hélène. Je sais qu'elle ne parlera jamais et préféra mourir plutôt que de nous balancer. Par contre Oléana... C'est une vraie connasse ! Elle va jacter pour sauver son gros cul ! Tu penses qu'on risque gros ?
—Elle est aussi mouillée que nous dans cette histoire, elle n'a rien à gagner à parler. Pour l'instant, Julien m'a dit qu'un rapport de police montre son transfert dans un hôpital de l'armée française ultra-surveillé. Il est impossible de l'atteindre et de s'assurer qu'elle ne parlera pas...
Étrangement, Louisa est soulagée d'apprendre que son amie est en vie. Mais un étrange sentiment d'oppression l'envahît. Comme si ce grand piège soigneusement pensé par le lieutenant Bérard se refermait autour d'elle.
Louisa sait que la traque initiée par ce policier revanchard ne va pas cesser et qu'elle se doit d'y faire face.