Hélène ouvre difficilement les yeux. Ses paupières sont lourdes et sa vision est floue. Au fur et à mesure que la netteté lui revient et que la lumière pénètre enfin dans sa rétine, une vision apaisante se dévoile face à elle. À son grand étonnement, l'immensité de la Méditerranée se déploie jusqu'à perte de vue et Nice, la ville aux couleurs ocres, semble scintiller sous le soleil provençale. En arrière fond, le doux chant des cigales résonne dans ses oreilles. Dans une grande chambre moderne et alitée dans un lit confortable, Hélène peine à retrouver ses esprits. Les images de l'explosion sur le navire, l'attaque surprise de la Norway, les rafales de mitraillettes, sa tentative de fuite... Tout s'entrelacent dans sa tête et brouille son esprit.
Seule la douleur persistante à sa cheville lui permet de revenir à la réalité. Hélène fait glisser la couverture le long de sa jambe et remarque que sa cheville a été soignée et soigneusement bandée. Elle comprend alors que son état confus s'explique par l'anesthésie qui a dû être pratiquée pour effectuer cette opération.
—Peut-être qu'ils m'ont volé des organes ! pense-t-elle subitement.
Elle commence à gigoter dans tout les sens et vérifie si de nouvelles cicatrices sont apparues sur son corps. Dés lors, son rythme cardiaque augmente dangereusement et la sonnerie du moniteur de surveillance commence à retentir. Aussitôt, un homme d'une cinquantaine d'âgée en blouse blanche, le visage alourdie par une barbe fournie et des lunettes de geek vissées sur le nez, pénètre dans la chambre.
—Ne bougez pas ! Vous sortez d'une opération, restez calme !
—Restez calme ?! Mais vous êtes qui bordel ?!
L'homme triture les boutons du moniteur.
—Dans cette chambre, je suis votre médecin et seulement votre médecin. Je ne peux rien vous dire d'autre à part au sujet de votre état de santé.
—Mais ou suis-je ?!
—Je ne peux pas répondre à cette question.
L'homme reste concentré sur l'écran du moniteur, son regard fixé sur les chiffres du tensiomètre. Il rehausse ses lunettes à la lecture des résultats.
—Votre tension reste élevée, reprend-il. Je vais vous donner un calmant.
—Hors de question ! Tu me touche pas Hannibal ! Barre toi !
Hélène le transperce de son regard glacial.
—Je te préviens.... Si tu m'injectes quoique soit, tu finiras avec l'aiguille enfoncée dans ta glotte !
—Je vois ! Vous voulez souffrir ?! Grand bien vous fasse ! De toute façon, mon travail ne servira sûrement à rien ! Encore des heures perdues mais j'en ai rien à foutre, tant que je suis payé.
L'homme à la blouse prend alors la direction de la sortie.
—Comment ça à rien ?! réplique Hélène avec surprise.
Il se retourne puis, comme un tic persistant, rehausse ses lunettes.
—Vous ne devriez pas avoir peur de votre médecin mais plutôt des personnes qui sont derrières cette porte. J'espère sincèrement que vous vous en sortirez.... Mais avec votre tempérament et votre façon de parler, j'ai bien peur que non, conclue-t-il en claquant la porte derrière lui.