Klaus
Tout ce qui s'est passé ces dernières heures n'est pour moi plus qu'une page blanche. Et, j'ai beau creuser au plus profond de ma mémoire, rien ne me revient et cette sensation est très frustrante.
Par chance, je constate que mon alter ego a su parfaitement retrouver le chemin de la maison, et au fond cela me rassure. À première vue, hormis des empreintes boueuses sur le parquet de notre chambre, il n'y a pas la moindre trace de sang qui pourrait trahir qu'un massacre ait eu lieu cette nuit.
Est-il possible que mon autre moi soit resté sage ?
Son teint de porcelaine et les cheveux blonds de Caroline éparpillés un peu partout sur l'oreiller sont des appels bien trop tentants pour moi. Alors sans attendre, je dépose la pulpe de mes doigts sur sa pommette et remonte tranquillement comme si je craignais de la blesser.
Et, d'une certaine façon, j'ai toujours eu ce pouvoir de le faire de bien des façons.
Après quelques battements de paupières, ses iris s'ouvrent sur moi.
— Encore fâché ? j'ose lui demander tout en ne pouvant m'empêcher de lui offrir mon regard de chien battu.
Las, Caroline soupire longuement. Tout en s'appuyant sur son coude, elle se place de façon à me faire face.
— Tu sais que je t'aime, Klaus... et ça... ça ne changera jamais..., elle commence.
Pourquoi ai-je le sentiment qu'un « mais » va bientôt pointer le bout de son nez ?
Et pour être honnête, je n'ai jamais été un grand fan des « mais ». En général, ils n'annoncent jamais rien de très bon.
— Mais je doute que tu sois réellement conscient de ce qui aurait pu se passer ? me reproche-t-elle.
— Je n'avais pas la moindre échappatoire, Caroline, j'explique. Peu importe l'endroit où je me serai trouvé, le pouvoir de l'Alpha aurait pu me retrouver.
— Et je le comprends ! elle poursuit. Mais être un couple, Klaus, c'est aussi affronter les choses ensemble et je pense que j'avais le droit de connaitre les risques que tu prenais. Et toi, tout ce que tu as fait, même si tu l'as fait, j'imagine, pour ne pas m'inquiéter, c'est de m'en écarter.
— C'est faux !
— Si! Et tu le sais !
Je n'insiste pas davantage, car à quoi bon ? Je sais pertinemment qu'elle a raison. C'est exactement ce que j'ai cherché à faire. Depuis des décennies, j'agis à ma façon, me fichant bien que mes méthodes ne font pas l'unanimité. Et bien que cela m'ait bien trop souvent fait défaut parmi mes proches, elles sont à venues à bout de n'importe quel ennemi. Et c'est tout ce qui m'importait, car j'avais l'éternité pour regagner leur pardon.
Au fil des siècles, de tous mes vices, de cette paranoïa, je suis devenu le monstre capable d'en effrayer les autres. Tel un mythe, génération après génération, le souvenir de cet hybride démonique perdurera. Mais cette bête vile et sans cœur que j'ai moi-même créer qu'en reste-t-il aujourd'hui ? Si on en fait le bilan, ce monstre-là n'a jamais connu le bonheur. Le pouvoir était mon principal moteur et là encore, cette satisfaction n'était que temporaire. Cette créature-là n'aurait jamais réussi à garder Caroline auprès d'elle.
— Et je comprends maintenant pourquoi tu m'as demandé si je voulais réellement venir aux funérailles de Sam, me dit-elle tristement. En vérité, ce n'était pas pour mon bien, mais pour le tien.
C'est un coup de massue auquel et je suis pour le moment incapable de répliquer.
— J'attends de toi que tu te montres sincère avec moi alors je t'écoute, qu'aurais-tu fait de nous si tu étais devenu le nouvel alpha ?
Rebekah
Tout le brouhaha habituel du vieux carré me fait grimacer. Même si j'aimerais aller fermer cette fenêtre afin de lui épargner toute cette agitation je crains de le réveiller moi-même alors je préfère profiter de ces derniers instants à le regarder là, endormi au beau milieu de mon univers. Et il est très loin de faire tache dans celui-ci.
Lorsque le son puissant d'une trompette résonne, il change de position et se tourne sur le ventre. Fichue Nouvelle Orléans, fichu quartier français.
Désormais, je rêve de me retrouver dans une maison calme ou l'unique son capable de me réveiller soit celui du chant des oiseaux.
Petit à petit, ses paupières papillonnent et lorsque ses yeux se verrouillent sur moi je sens l'inquiétude me gagner.
— Bonjour, je lâche timidement.
— Rebekah ?
Sa voix devenue éraillée par le sommeil a ce petit quelque chose de sexy qui me fait sourire. Puis comme s'il était désormais convaincu que ma présence soit réelle, il me demande :
— Qu'est-ce que tu fais là ?
Et je dois dire que je suis surprise du ton qu'il a employé. J'ignore si c'est dû au fait qu'il vient de se réveiller, mais il me parait neutre.
— Tu ne crois pas que ce serait plutôt à moi de te poser cette question ? je lui réponds avec douceur.
Je vois bien qu'il ne comprend pas alors je continue :
— Prends le temps de regarder autour de toi, Trésor, c'est toi qui te trouves dans mon lit.
— Quoi ? s'époumone-t-il en se redressant légèrement afin de confirmer mes dires.
Et dans cette position, son corps sculpté se dessine davantage. Chaque petite sinuosité entre ses abdominaux se creuse tellement qu'il me serait facile de pouvoir les tracer du bout des doigts.
— Qu'est-ce que je fiche ici ? demande-t-il, quelque peu choqué.
— Tu ne te souviens pas ?
Déboussolé, son visage crispé se tourne dans ma direction.
— Ton loup est venu me voir cette nuit, je lui apprends, et je crois bien qu'il a plus qu'apprécié mes gratouilles.
— Tes gratouilles ? il grimace.
— Ou bien mes caresses, si tu préfères.
Si seulement l'homme pouvait les aimer lui aussi. Moi, je suis plus que prête pour le dorloter.
— Désolé pour le dérangement ! raille-t-il
Mal à l'aise par la situation, il cherche à quitter le lit et je me saisis aussitôt de son bras pour l'arrêter dans son élan.
— Attends, Chris. Tu ne me gênes pas, bien au contraire et en plus tu ne vas pas...
Impossible pour moi de ne pas loucher sur ses attributs masculins lorsqu'il se met debout.
—... Sortir... comme ça ! je termine tout en déglutissant.
— Sortir comment ?
Et là, quelque peu frustrée et amusée, je ne peux m'empêcher de me mordiller la lèvre inférieure. Décidément, cet homme depuis le début me dépouille de toutes les façons inimaginables.
— Eh bien... peut-être parce que... tu es.., je commence en me grattant la gorge... complètement nu !
Un sourire niais s'installe sur mon visage.
Il assimile chacun de mes mots, fronce les sourcils puis prend le temps de s'observer.
— Bordel, Rebekah ! il me dispute en me voyant en train de le reluquer.
Gêné, il revient dans le lit et utilise le drap pour se soustraire à mon examen minutieux.
— Désolé, Trésor, je ris. Tu es bien trop canon pour que j'ai envie de regarder ailleurs.
Il pivote sur le côté pour me faire face. Ses yeux bleus pénètrent immédiatement les miens.
— Trésor ? il m'interroge avant qu'un autre détail ne l'interpelle. Attends une minute, est-ce que tu portes ma chemise en jean ? Ne m'avais-tu pas dit que tu ne l'avais pas ?
— Je la porte chaque nuit, je lui apprends dans un grand sourire.
— Parfait, alors tu vas pouvoir me la rendre maintenant. Comme ça, j'aurais au moins quelque chose à me mettre.
Et là, mon envie de jouer, de le malmener me saisit. Après tout, bien qu'il l'a dépouillé de bien des façons, Rebekah Mikaelson est toujours là. Et à cet instant, elle se veut séductrice. Le séduire, lui.
— Mais je t'en prie, Chris..., je lâche d'un ton suave.
Et pour accentuer ce pouvoir, je me redresse légèrement afin que mon corps soit dans une courbe parfaite et ne me gêne pas pour gonfler la poitrine. Par chance, j'ai tout ce qu'il faut où il faut et je le sais.
— Et si tu venais toi-même la récupérer.
Pour la toute première fois, je le vois m'observer. M'observer longuement sans même chercher à se cacher. Ses yeux s'attardent le long de mes jambes nues que j'ai pris soin de laisser à l'air libre puis remontent à mon visage.
Il est loin d'être stupide, il a bien compris mon désir de jouer tout comme mon souhait de remporter la partie. Et en tant qu'Alpha, son instinct lui dicte d'accepter le défi qu'on lui a lancé.
Chris s'assit de telle façon à ce que le drap glisse le long de son torse puis se stoppe en bas de ses reins et moi, je n'ai pu m'empêcher d'en suivre le mouvement.
Le regard rivé dans le mien, il s 'approche. Ma respiration s'accélère. Sa main s'avance et ses doigts se positionnent à hauteur des pressions. Ma peau devient moite. La partie à commencée mais subitement je ne suis plus convaincue de mon jeu.
Puis, il s'arrête dans son élan et me demande avec sérieux :
— Tu portes quelque chose en dessous ?
Et moi, je ne peux m'empêcher de sourire. Il a beau jouer au gros dur, à l'intérieur, c'est tout autre chose.
— A toi de le découvrir !
Il soupire, abandonne la partie en se laissant retomber sur le dos.
— Tu es une femme dangereuse, Rebekah Mikaelson ! il avoue
Et moi, j'éclate de rire.
Kol
Je ferme la porte qui mène au sous-sol tout en frottant ma veste souillée lorsque la voix de mon frère ainé m'interpelle :
— Kol ? Enfin te voilà, c'est justement toi que je cherchais !
— Ah oui ! vraiment !
— Oui, en vérité, je...
Le voir aussi mal à l'aise m'amuse plus que de raison surtout que je sais pertinemment le sujet de cette conversation. Elijah cherche désespérément cette perfection tant convoitée alors qu'au fond il n'y a rien de plus ennuyant.
Cependant, c'est plus fort que lui. Notre ainé s'imagine que si on le perçoit comme un modèle à suivre, il pourra peut-être sauver nos âmes corrompues. Malheureusement, ce qui est brisé ne pourra jamais être recollé et nous le savons tous. Le mal m'a soudoyé il y a trop longtemps et j'y ai pris goût. Et cette nuit, je l'ai encore prouvé.
Lorsqu'il s'attarde sur ma tenue plus que débraillée et mes boots pleines de boue, je vois l'interrogation s'installer sur son visage.
— Yep ! Tu as raison, mon frère, je crois que ma veste est fichue. Dommage, je l'aimais bien ! je lui dis tout en me débarrassant de la veste en question.
— D'où viens- tu, Kol ?
— D'une... petite balade... nocturne ! je réponds avec des pincettes.
— Ne me dis pas que tu sors, toi aussi, au beau milieu de la nuit et qui plus est un soir de pleine lune !
Sa colère est palpable.
Au fond, il me fait de la peine. C'est à croire que c'est lui l'enfant bâtard de notre famille. Nous sommes tous pourris jusqu'à la moelle. Tous, sauf lui !
Elijah a embrassé naturellement et sans difficulté le rôle du grand frère, du confident. Et pour cela, il a volé la vedette à Finn. Je me souviens encore que notre frère maintenant décédé le lui a longtemps reproché. Ce que Finn ignorait c'est qu'Elijah ne lui a rien volé. Comparé à ce dernier, il se souciait réellement de nous tandis que Finn a toujours été dans les petits papiers de notre très chère maman.
— Je pense que pour ton bien, il est préférable que tu n'en saches rien !
— Je suis sérieux, Kol !
Sa prise ferme sur mon bras me surprend. Elijah est clairement à bout et ce sortilège qui nous a privés de notre force surnaturelle a assez duré.
— J'ai déjà suffisamment à faire avec Rebekah pour que tu t'y mettes toi aussi ! gronde-t-il
— Relax, mon frère ! Mes intentions à moi sont très différentes de celle de notre sœur. Je ne cours pas après les loups pour la même chose !
Lorsque je pars chercher le fusil que j'avais oublié contre le mur, je vois ses mains tremblantes aggripées nerveusement ses joues.
— Kol, qu'est-ce que tu as fait encore ?
— Comme je te l'ai déjà dit, la réponse ne te plaira pas !
Elijah soupire..
— Tu as raison ! il me dit en se raclant la gorge. Finalement... je crois que je ne veux pas savoir ! termine-t-il en balayant d'un geste de la main. Tu vas bien, c'est l'essentiel !
Tandis que je range le fusil à sa place, Elijah s'arrête dans ses pas et se tourne à nouveau dans ma direction :
— Kol, au sujet de ce que tu as vu hier soir... il commence.
Mon sourire s'étend. Il était plus que temps que le sujet de conversation soit évoqué.
— OH... j'imagine que tu fais référence à tes petites acrobaties sur la table du salon ?
Un sentiment gêné se dessine sur son visage et cela m'amuse de le voir aussi coincé. S'envoyer en l'air, céder à une pulsion animale n'a jamais transformé personne en monstre.
— J'aimerais que tu gardes pour toi ce que... tu as vu ?
Mon sourire perfide s'étend et je prends plaisir à le malmener en choisissant de conserver le silence. Lorsque j'atteins l'étage, je tombe nez à nez avec Chris. Vêtu seulement d'un pantalon, il sort de la chambre de Rebekah.
— Mais c'est mon pantalon que tu portes ! je m'écris.
— Et alors, tu vas chercher à me l'arracher pour le récupérer ? il répond aussitôt.
J'arque un sourcil.
En nous ayant entendus, ma sœur sort en trombe de sa chambre. Elle, en revanche, ne porte qu'une chemise en jeans au moins trois fois trop grande pour elle.
— Je me demande ce que penserait Nik s'il venait à apprendre que tu couches avec notre sœur ? Et si on allait lui poser la question ?
— Kol... s'il te plaît..., me supplie Rebekah en se plaçant entre lui et moi.
Et moi je grince des dents. Pourquoi n'arrive-t-elle pas à s'empêcher de chercher à les protéger ?
Seulement, et sous mes yeux ébahis, le jeune loup riposte en basculant Rebekah derrière lui et en choisissant de m'affronter moi.
— Premièrement... je ne couche pas avec ta sœur. Deuxièmement, je ne pense pas qu'il aurait son mot à dire si c'était le cas et... Troisièment... qu'est-ce que ça peut te foutre à toi ?
Puis sans ajouter d'autre, il prend la direction de la sortie.
— Kol, s'il te plaît, me supplie ma sœur, toute penaude.
— Te souviens-tu, Rebekah de ce que je t'avais dit quand tu t'apprêtais à t'envoyer en l'air avec le Salvatore ?
Las, elle me répond :
— Que tu me laisserais tranquille le jour où je trouverais un homme digne de ce nom ! Écoute, je sais que Chris est plus jeune que nous, mais...
— Je crois que tu le tiens cette fois ! je la coupe
Ébahie, elle s'arrête et m'observe.
— Quoi ?
— Il a de la repartie et il est solide... et c'est... ce dont tu as besoin !
Et le sourire qui prend place sur son visage fait plaisir à voir. Je crois ne jamais l'avoir vue aussi rayonnante.
— Et puis tu n'en restes pas moins une Mikaleson et il est bien connu qu'on arrive toujours à obtenir ce que l'on veut !
— Et il ne fera pas exception ! elle ajoute
— Est-ce que tu crois qu'il me laissera conduire sa moto ? je demande en pleine réflexion.
Ma sœur rigole puis ajoute avec sincérité :
— Merci, mon frère !
Comme unique réponse, je lui dépose un baiser sur la joue.
— Oh et je compte sur toi pour ne rien dire à Nik ! elle s'inquiète.
— À ta guise, petite sœur ! je termine en souriant avant de reprendre ma route.
— Je suis sérieuse, Kol ! je l'entends crier derrière moi.