Le Vœu du Dragon (LES ÉVEILLÉ...

Wolcean

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Ayden Lyart, apprenti médecin, n'est plus lui-même depuis la mort du monstrueux dragon qui semait la terreur... Еще

| ACTE I : Le Vœu |
Prologue : Le Réveil
Chapitre 1 : Premiers soins
Chapitre 2 : Rencontre avec la mort
Chapitre 3 : Le rêve
Chapitre 4 : Le cauchemar
Chapitre 5 : Fresques et lumières
Chapitre 6 : La lumière dans les ténèbres
Chapitre 7 : Curiosité
Chapitre 8 : L'ombre des charpentes
Chapitre 9 : Approche
Chapitre 10 : Questions sans réponses
Chapitre 11 : Études de dragon
Chapitre 12 : Anniversaire
Chapitre 13 : Drokhenwäst
Chapitre 14 : Abandon
Chapitre 15 : Remboursements
Chapitre 16 : Le travail honnête est honnêtement récompensé
Chapitre 17 : Le pardon
Chapitre 18 : Le nom
Chapitre 19 : Routine
Chapitre 20 : Suspicions
Chapitre 21 : Hiver
Chapitre 22 : Les Autres
| ACTE II : Le Lien |
Chapitre 23 : Vhongëdas l'imprenable
Chapitre 24 : Interrogations
Chapitre 25 : Purification
Chapitre 26 : Chaos et souvenir
Chapitre 27 : L'Inconnu
Chapitre 28 : Présentations
Chapitre 29 : Les raisons de Räe
Chapitre 30 : Sÿervik
Chapitre 31 : Révélations
Chapitre 32 : Famille
Chapitre 33 : Sentir
Chapitre 34 : Compagnie
Chapitre 35 : Tourisme
Chapitre 37 : Envol
Chapitre 38 : Solitude
Chapitre 39 : Séparés
Chapitre 40 : L'Enfant
Chapitre 41 : La meute
Chapitre 42 : Les Change-Peaux
Chapitre 43 : Chasse au clair de lune
Chapitre 44 : La Traque
Chapitre 45 : Dernier combat
Chapitre 46 : Cœur de dragon
Epilogue : Merci
L'avis des timides!

Chapitre 36 : Attaque

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Wolcean


 Aujourd'hui, Sÿervik et moi étions partis explorer les limites les plus lointaines de notre territoire. Elle le connaissait par cœur, bien sûr, mais moi non, et la dragonne avait fait de son devoir personnel de m'apprendre tout ce que j'ignorais, alors nous sommes partis à l'aube. Sur la route, elle m'apprit comment elle délimitait ses zones de chasse, en se grattant contre les troncs d'arbre. Elle m'expliqua aussi qu'elle avait trois territoires différents en fonction des saisons et qu'elle alternait régulièrement entre les trois pour éviter l'épuisement des troupeaux, même si l'effort était conséquent, car les gros prédateurs s'y introduisaient assez souvent pour voler ses proies. J'écoutai attentivement, fasciné par chaque nouvelle découverte du mode de vie de mon espèce et, dévoré par un élan de curiosité insatiable, posai de nouvelles questions en réponse, inlassablement.

Mes interrogations incessantes eurent vite fait de transformer ma gorge en vieux parchemin. Néanmoins, j'avais encore de l'énergie à revendre, et alors que nous grimpions la pente d'une énorme montagne à l'extrémité ouest du territoire de Sÿervik, je continuai à la questionner :

— Sÿervik crache du feu?

— Pas vraiment.

— Pourquoi?

La dragonne semblait commencer à être lassée de mes questions : sa queue battait le sol et les membranes le long de son échine tremblèrent quand elle soupira. Je reculai d'un pas quand elle se pencha soudainement en avant, prise d'un haut-le-cœur. Les muscles de son cou se contractèrent brusquement et un mince filet de fluide fut projeté en ligne droite hors de sa gorge pour atterrir sur un rocher sombre. Mes narines se plissèrent instinctivement en sentant l'odeur acide du liquide verdâtre et visqueux.

— Je ne produis pas assez de cette bile à feu pour faire de grandes flammes. Ça demande beaucoup d'efforts et de nourriture pour en produire en grandes quantités. Je la garde plutôt pour marquer les zones éloignées de mon territoire.

— Oh... mais ça pas du feu.

— La bile à feu est le combustible. Tous les dragons ont un silex à l'arrière du palais. Il suffit de faire une étincelle avec tout en crachant la bile...

Sÿervik ouvrit de nouveau la gueule. Alors qu'elle se préparait à cracher une nouvelle gerbe de fluide, sa langue et sa gorge se contractèrent dans un mouvement étrange, produisant un bruit d'entrechoquement sec. Assis à côté d'elle, j'eus tout juste le temps de voir les étincelles jaillir de sa bouche avant qu'une vague de chaleur ne me force à reculer de nouveau. Le fluide hors de sa gueule avait pris feu et atterrit en fines gouttelettes brûlantes sur la roche. La petite flaque que la dragonne avait craché précédemment s'embrasa immédiatement au contact d'une des gouttes incandescentes. Je n'avais pas besoin de m'approcher pour sentir la chaleur me lécher la peau et voir les marques noires que laissaient les petites flammes verdâtres sur la pierre.

— ... Et les flammes apparaissent.

— Oh...

Le silence revint un instant, perturbé par le sifflement du vent et des oiseaux migrateurs, qui profitaient de la douce chaleur de l'été nordique pour voleter à tout-vas. Et je pourrais voler comme eux, un jour...

L'idée me gonfla le cœur, bien que je ne savais pas encore à quoi m'attendre. Serait-ce dangereux? Effrayant? Exaltant? Quand saurais-je que c'est le moment? Je l'ignorai : Sÿervik restait étrangement vague sur l'expérience du vol, et ça me frustrait. Quand pourrais-je déployer mes ailes comme elle et devenir maître des quatre éléments, comme tous les autres dragons?

— Et pourquoi tu voles pas pour monter la montagne?, demandai-je, curieux. Orthal pouvoir grimper sur ton dos.

— Parce que je ne le peux pas.

— Pourquoi? Toi dire que les dragons pouvoir faire ce qu'ils veulent!

— C'est plus compliqué que ça. (Sÿervik tourna la tête vers moi, les yeux pleins d'un reproche froid :) Si je vole, je vais du bruit et on peut me voir. Et si la Garde me voit, qu'est-ce qu'elle va faire, à ton avis?

Elle lapa la cicatrice de morsure sur mon bassin, marque rose sur ma peau blafarde. Un frisson traversa mon échine quand le souvenir des chiens qui me l'avaient faite et des Autres, si semblables à Ayden mais si étrangers et froids, me revint. Pourquoi Ayden était-il le seul bipède à vouloir mon bien? Même Räe avait tenté de me tuer quand je l'ai mordu — je l'avais pris pour un Autre, lui aussi : il avait la même attitude dure, la même méfiance —. Qu'avions-nous fait, moi et Sÿervik, pour être autant traqué? On n'avait rien fait de mal.

— Elle va faire mal à nous, soufflai-je, regardant le sol.

Sÿervik hocha la tête et continua sa lente ascension, faisant dégringoler les rochers glissants entre ses pattes. Je la suivais par petits bonds entre les pierres. C'était difficile pour quelqu'un de ma taille et mes pattes s'engourdissaient rapidement, mais je refusais de décélérer le pas, pour ne pas perdre ma camarade de vue.

— Et, haletai-je en trébuchant sur une pierre. Pourquoi Sÿervik pas partir? Très loin de la Garde?

— Je ne peux pas. Je dois rester avec Räeghan.

— Pourquoi?

— Tu es vraiment plein de questions... (Elle s'ébroua dans une lassitude amusée :) Je ne peux pas le laisser, comme tu ne peux pas laisser Ayden. Il a besoin de moi, et j'ai besoin de lui. Un lien plus grand que la destinée nous relie, lui et moi. J'ai donc décidé de rester à ses côtés.

Cela me fit réfléchir. Devrais-je aussi rendre la pareille à Ayden? Il m'avait sauvé la vie en me montrant le chemin hors de la caverne, après tout.

— ... car Räeghan est ta famille?

Sÿervik hocha la tête avec un vrombissement, puis elle s'arrêta, tournant la tête vers l'horizon.

— On est arrivé.

Je relevai la tête. La vue qui s'offrit à moi me coupa le souffle et fit battre mon cœur plus fort encore.

La corniche sur laquelle nous nous trouvions donnait sur l'immensité de la forêt de pins dans laquelle nous vivions, qui était tel un immense tapis de verdure sombre. Les arbres et la brume qui s'en dégageait s'étalaient si loin à l'horizon que je devais plisser les yeux pour en voir le bout. Les oiseaux voletaient et virevoltaient au-dessus des cimes; nous étions si haut que je pouvais même voir les aigles planer dans le ciel bleu à la recherche de leurs futures proies. La touche finale qui faisait vraiment la beauté de ce tableau était le soleil se couchant en face de nous; une demi orbe géante faite d'or et de rouge, reflétant sur les lointains nuages des nuances de rouge vif, de rose pâle et de violet sombre.

— C'est magnifique, n'est-ce pas?

Je hochai la tête sans dire mot face à cette immensité, qui me donnait l'impression d'être minuscule et tremblant. Mes yeux avaient toujours été trop près du sol, bloqués par les arbres qui m'ombrageaient; jamais je n'aurais cru que tout était si grand par-dessus la terre et les cimes. C'était tout simplement époustouflant, et savoir que je devrais redescendre un jour me déchirait le cœur.

— C'est si grand... horizon avoir fin, là-bas?

— Oui, mais tu ne peux pas la voir d'ici. C'est ce que Räeghan m'a dit.

— Tu être déjà allé à la fin?

— J'ai passé toute mon enfance à explorer cette forêt. Malheureusement, je n'en ai jamais vu la fin : les habitations des humains m'empêchent d'y accéder en volant.

Sa voix tremblait d'une once de déception, me poussant à lui donner un coup de museau pour la rassurer. Plissant les yeux vers l'horizon, je remarquai des lumières rougeoyantes et des murs de pierre taillés directement dans le flanc escarpé d'une petite montagne en face de moi. C'était comme les murs de Mérégris, mais en beaucoup, beaucoup plus grand.

— C'est Vhongëdas, là où tu étais enfermé.

— Hm.

Je ne voulais pas vraiment entendre parler de cet endroit où je n'avais connu que la faim, le froid et la fièvre, alors je retournai les yeux vers le paysage qui s'étirait si loin de nous.

— Quoi se trouve à l'horizon, là-bas?

— Je ne sais pas. Räeghan dit que tout y est semblable, mais différent à la fois. Tu retrouves toujours quelque chose de familier, mais tu perds quand même tous tes repères.

— Étrange... tu croire que autres dragons vivre là-bas?

Un doux vrombissement emplit l'air d'allégresse. J'eus presque envie de le rejoindre.

— Räeghan dit qu'il n'y en a plus beaucoup, mais je suis sûre qu'ils nous attendent. La vraie question est de savoir où. Et, qui sait, peut-être que tes frères et sœurs t'attendent là-bas.

— Je n'ai pas de frères et sœurs. J'étais seul quand j'ai éclos.

— Non. Moi, j'étais seule quand j'ai éclos : Räeghan a vu que j'étais l'unique œuf que ma mère protégeait avant de mourir. Ayden n'a rien vu, lui, du moins d'après ce qu'il veut bien nous dire. Ta mère était déjà partie quand il t'a trouvé, alors qui te dit que ta fratrie n'est pas cachée, quelque part?

Maintenant que j'y pensais, c'était peut-être possible. Après tout, Ayden ne m'avait jamais parlé de ma vraie famille avant leur conversation sur ma mère, il y a quelques semaines. Il lui avait tout caché pour sa mère, il pourrait très bien faire de même pour les autres... mais pourquoi le ferait-il? Je ne comprenais pas.

— Tout ce que je sais..., continua la dragonne en se retournant vers le soleil, les rayons se reflétant sur ses écailles tels des prismes roux et roses. C'est que toutes les réponses sont là-bas. Les tiennes, et les miennes. Je ne connais pas les miens autant que je le devrais, je dois réparer cela. (Elle soupira doucement :) Je me souviens que Mère m'avait dit que les dragons étaient les maîtres des cieux, mais où sont-ils tous...? Où sont-ils tous partis...?

Sa question ne reçut que le vent tiède et impétueux comme réponse. Elle se releva et fit demi-tour pour continuer son ascension dans la montagne, à ma plus grande confusion.

— Où vas-tu?, demandai-je.

— Suis-moi.

Nos pas nous guidèrent toujours plus haut, là où le vent était toujours plus fort et frais et où la respiration devenait plus laborieuse. Encerclés de monts et de pierre, nous nous arrêtâmes quand notre route fut stoppée par une brusque descente de plusieurs dizaines de mètres de profondeur. Devant nous se trouvait une vallée plus petite que la précédente. Celle-ci avait beaucoup moins d'arbres, mais était parsemée de buissons épineux où broutaient des troupeaux de chevaux sauvages. Son sol rocailleux était de couleur terne, et une rivière la traversant de part en part serpentait jusqu'à atteindre l'infini, au-delà des montagnes blanches qui s'étendaient jusqu'à toucher les cieux.

Sÿervik pointa du museau un espace très, très loin derrière les monts. C'était un point bleu sombre, minuscule comme un grain de poussière, que je n'aurais jamais remarqué si elle ne me l'avait pas montré.

— Tu vois ça, là-bas? C'est l'océan. Le monde du Nord se termine là-bas. Il fait très froid et humide derrière ces montagnes, les hommes ne viennent jamais ici. (Elle tourna la tête vers moi, l'oeil brillant de malice :) Et s'ils ne viennent jamais, ils ne peuvent pas me voir.

Sÿervik sauta de la corniche et je poussai un glapissement surpris. Je me précipitai vers le bord de la paroi pour avoir une meilleure vue sur la dragonne, qui continuait à tomber en chute libre vers le bas de la vallée, ses ailes claquant comme des drapeaux dans son dos. Arrivée à quelques mètres du sol, elle les déploya finalement et leur membrane se gonfla soudainement sous le vent. Elle ouvrit les ailerons derrière ses ailes comme la queue d'un oiseau, ajusta ses membranes caudales et, en un claquement résonnant, sa chute se ralentit. Un second claquement, et elle sembla flotter dans le vide. Un troisième, et elle s'élevait, poussant un cri sifflant comme pour se moquer des éléments qui tentaient tant bien que mal de la guider vers le sol.

Elle était magnifique, dans les cieux. Je scrutai chacun de ses mouvements alors qu'elle faisait un grand tour de la vallée piégée dans les montagnes, faisant fuir les chevaux dans son sillage. Son corps glissait contre les vents comme un serpent, ses écailles brillant de mille feux sous les rayons du soleil. Alors qu'elle se redressait pour ralentir et passer près de ma corniche, je vis dans ses yeux l'éclat d'une exaltation que je n'avais jamais vu chez elle auparavant, un appel à la liberté. C'était donc ça, le bonheur à l'état pur...

Je poussai un gazouillis aigu en réponse à son passage, me postant sur un rocher pour mieux la voir. Je pus alors voir la lueur du regard de Sÿervik s'éteindre et son corps se tendre brusquement. Les éléments, ressentant son instant de faiblesse, rendirent ses battements plus lourds, son corps moins gracile, son vol plus peiné. Confus, je poussai un aboiement questionneur à son égard. Elle me répondit d'un hurlement strident qui me glaça le sang.

— ORTHAL, BAISSE-TOI!

Une vive douleur me déchira le flanc et, surpris, je m'écroulai, ma vision se troublant rapidement. Un explosion de sensations m'assaillit, me faisant alors remarquer tous les détails que je n'avais pas remarqué durant notre promenade : les odeurs que j'avais manqué en grimpant la montagne, dissimulées par celles de l'humus et de la bile à feu de Sÿervik; le tumulte des pierres dégringolant, masqué par le vent cinglant; mes yeux détournés des ombres rampantes par les paysages et le vol de Sÿervik... je n'avais rien senti arriver, et la dragonne non plus. Comment avions-nous pu être aussi aveugle? Ça paraissait irréel, mais ce qui arrivait était bien en train d'arriver : les Autres étaient revenus, et nous avaient suivi.

Je poussai sur mes pattes pour tenter de me relever, mais je me sentais trop fatigué, soudainement. Une voix que je ne connaissais pas glapit un ordre derrière-moi : un horrible son sifflant fit vriller mes oreilles et je vis Sÿervik se cambrer en plein air pour éviter plusieurs lances de métal qui fusaient vers elle. Elle poussa un mugissement aigu quand l'une d'elle se ficha dans sa cuisse et elle s'éleva dans les cieux en un claquement d'ailes, s'éloignant de moi.

Le fracas métallique et les éclats de voix des Autres s'approchèrent alors rapidement de moi. Ma voix intérieure hurlait pour me garder éveillé, mais mes yeux étaient trop lourds. Je me sentis soulevé sans douceur, m'arrachant un sifflement de rage instinctif, mais je n'eus pas la force de donner un coup de crocs. Ma dernière vision avant de m'endormir définitivement fut celle des Autres, me traînant derrière leur chevaux sur un véhicule de bois et cuir, ainsi que celle de Sÿervik qui, après s'être pris un autre carreau en plein dans le poitrail, s'éloignait de moi avec un rugissement déchirant, afin d'éviter les armes douloureuses des Autres.

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