❝ CÉLESTE ❞
PARIS , PYRAMIDE DU LOUVRE
-06:03-
-07 j u i l l e t d e u x - m i l l e s s e p t-
☼
- Bouge pas..
- C'est bon ?
- Ouais vas-y, tu peux aller pisser.
Il se précipitait en retenant son pantalon vers les buissons du jardin qui faisait face au Louvre pendant que je peaufinais le portrait de lui au rouge à lèvres, comme un bon touriste devant la pyramide.
Mes yeux étaient encore plus lourd que d'habitude, une nuit blanche de plus dans mon compteur et qui pourtant, m'avait donné la force surhumaine de me maintenir en toute circonstance éveillée.
Ken revenait sur ses pas en trottinant tandis que j'en profitais pour ranger mon carnet rapidement dans mon sac à main.
- Tu me montres pas ?
- Non.
Il se rapprocha de moi pour essayer d'attraper mon carnet, mais je bloquais le plus rapidement possible l'accès en coinçant ses jambes aux miennes, ce qui le poussa à se maintenir à mes bras.
- Me touche pas, tu t'es pas lavé les mains.
-Viens pas me faire la meuf hygiénique maintenant alors que tu bouffes comme un pouilleux.
Je m'apprêtais à rétorquer, mais je sentis une vibration dans la poche de mon short qui me fit directement attraper l'objet, par peur que la notification provienne de mon père.
✦ MESSAGE ✦
-expéditeur: sophia-
rdv toutes chez bea mtn
- Faut qu'j'y aille. J'ai une urgence.
Je lui pointais le téléphone portable avec le message qui s'y affichait, avant de récupérer mon sac à mes pieds pour l'accrocher au dessus de mon épaule.
- On s'était embrouillées un peu avant qu'on s'voit à la petite ceinture. C'était la première fois depuis la cinquième.
Il prit ma main dans la sienne pour quitter la place du Louvre et sa pyramide, presque moite après avoir passé la soirée à marcher dans les rues, sans même avoir fait le périmètre de la capitale en raison de son envergure.
- Vous vous connaissez depuis combien de temps ?
- Depuis la maternelle. Tu les connais depuis combien de temps toi Idriss et Hakim ?
- Depuis que j'suis sur Paris, y'a six ans.
- Ah ouais ?
- Ouais, j'étais à Nice avant pourquoi ? Me répondit-il en fronçant les sourcils.
- J'sais pas.. Tu m'as fais visiter la ville comme si tu la connaissais déjà cent fois.
On tournait vers les quais de seine comme on l'avait déjà fait plusieurs fois ensemble pendant que de son côté, le soleil se levait.
- Quand tu nais ici, tu t'rends pas compte de la beauté et de la chance que t'as.
J'hochais de la tête en m'allumant une cigarette avec le briquet rouge dans ma poche avant de lui en proposer une.
Je croisais mes bras à cause des pauvres tissus qui recouvraient ma peau, même si je n'étais pas de nature frileuse. Ken se rapprocha de moi pour enrouler son bras autour de mon épaule, ce qui me concilia à me recroqueviller dans les siens.
- J'croyais tu voulais pas me toucher.
☼
- J'te laisse ici ? Me lança le brun.
J'hochais de la tête en m'avançant vers lui pour lui faire un câlin, en posant mon menton sur son épaule.
- Tu m'appelles si t'as un soucis.
- T'es pas mon daron, reste tranquille.
Il rigolait avant de se détacher de mon emprise en déposant un bisou sur le haut de mon crâne, et s'éloigner de son côté.
Je m'avançais vers la porte d'entrée de l'immeuble pour taper le code, mais derrière mon dos des bruits de bottines heurtaient le goudron en s'arrêtant à mon niveau.
- Salut.
Salomé était derrière moi, la mine grise en s'avançant à son tour vers l'accès à l'immeuble.
- Salut, répondis-je en poussant la porte.
- C'était qui le mec avec qui t'étais ?
Je la laissais passer avant moi sans répondre, mon coeur qui battait d'un coup à la chamade.
Elle m'avait vu.
- Un pote pourquoi ?
- Rien. J'aurais juste été contente que t'ai enfin tourner la page.
- Pas besoin d'avoir quelqu'un pour tourner la page.
Elle levait les yeux au ciel en appuyant sur le bouton de l'ascenseur alors que j'essayais de ne laisser transparaitre aucune émotion, comme toujours.
- Il se passe quoi ? Continuais-je pour faire en sorte que Ken soit épargné de la conversation.
- T'as pas vu la vidéo ?
L'ascenseur ouvrit ses portes, me laissant passer en première cette fois-ci pour ensuite appuyer sur le bouton du 5ème étage.
- Quelle vidéo ?
- Trop concentrée à pécho des mecs qu'elle a pas calculé les dramas.
- Excuse, répondis-je de manière insolente et ironique à la fois.
- Sophia t'expliqueras.
On arrivait à l'étage dans le plus grand des silences qui frôlait le malaise en toquant à la seule porte du pallier. Sophia entrouvrit la porte, et Salomé la prit dans ses bras de manière pathétique, presque théâtrale.
- Elle va bien ? La questionna-t-elle.
- Pas du tout, elle est dans sa chambre là, va la voir.
Salomé, sans même prêter attention à moi me bouscula en direction du couloir.
- Il se passe quoi ?
- T'as pas vu la vidéo ?
Je mimais un non de la tête et Sophia, qui malgré nos différents semblait se contenir de me mépriser, entraîna mon bras à l'intérieur de l'appartement.
- Tu t'rappelles de la soirée où vous êtes pas venue ? J'acquiesçais en me triturant les doigts. Bah.. Béatrice elle a rencontré un mec et bref, elle a fait sa première fois avec lui dans une chambre.
- Il l'a filmé ?
- Ouais.. Ça tourne depuis cette nuit sur internet, elle s'est réveillée au milieu de la nuit parce que son portable il arrêtait pas de sonner.
Mon visage se rétracta en essayant de compatir de l'extérieur, mais je n'arrivais qu'à entrouvrir ma bouche et écarquiller mes yeux en marchant côte à côte le long du couloir avec Sophia.
- Tu connais le mec j'pense, c'était Liam.
- Liam ? Genre Liam ?
Elle acquiesça en accédant à la chambre de Béatrice qui était sous sa couette, un paquet de mouchoir en train de renifler et pleurer, son visage entre ses mains.
Ça ne m'étonnait même pas qu'elle ait succombé à Liam, la connaissant. Beaucoup d'entre eux préféraient donner de l'importance à Sophia, sa meilleure amie, plutôt qu'elle qui était constamment dans son ombre. Un garçon comme celui-ci, qui était aussi détestable que influent dans ce quartier l'avait forcément poussé à lui offrir quelque chose d'aussi singulier.
Je m'approchais de Béatrice en m'asseyant sur son lit après avoir retiré ma paire de chaussures, mais celle-ci ne semblait pas rassurée de sa présence chez elle.
- Qu'est-ce qu'elle fait ici elle ?
- Bah, on a appelé tout le groupe..
- Tu peux partir hein.
Sophia me lançait un regard de pitié en se mordant la lèvre inférieure, puis le déviait une fois que Béatrice reprit la parole.
- Après c'que vous avez dit vous deux sur elle là, vous croyez vraiment c'était le bon moment pour l'inviter et lui donner ma pitié ?
Je me retirais du matelas en ne la lâchant pas du regard, les sourcils froncés, une fois ma chaussure droite remise à mon pied.
- J'veux pas d'ta pitié Céleste. Rentre chez toi c'est mieux, toi et tes yeux de morte, on.. On dirait que t'es morte quand on regarde dans tes yeux, j'veux pas de ta pitié, casse-toi, elle bafouilla sans me regarder, plongée dans ses larmes.