"-Adèle ! Tu ne m'as pas prévenu que tu venais, content de t'avoir parmi nous ce soir ! Comment vas-tu ?
Miranbeau haussa les épaules avec un sourire en coin.
-Les affaires vont bien donc je prends un peu de bon temps...
-On est venue accompagnée je vois... Souffla l'homme, Héla tressailli en sentant son regard se poser sur elle.
Il ne lui viendrait pas en aide, elle le sentait. Il y avait dans son aura quelque chose de malsain, sans doute une flamme qui lui rappelait inconsciemment la cruauté de Miranbeau.
-Puis-je...? Demanda poliment l'homme à Miranbeau.
Lorsque la femme d'affaire acquiesça, Héla fît un pas en arrière vers sa geôlière. Elle n'avait aucune idée de ce que lui voulait l'ami de Miranbeau, et elle n'avait pas envie de le savoir. De son côté, la femme d'affaire ne pût retenir un sourire satisfait en sentant le petit corps frêle et tremblotant d'Héla venir se blottir contre elle.
D'un geste vif, l'homme lui attrapa le visage par le menton entre le pouce et l'index et vînt planter son regard dans le sien. Héla cligna des yeux pour retenir des larmes d'appréhension. Lorsque l'homme la relâcha, il releva la tête vers Miranbeau avec un sourire entendu.
-Je ne veux pas de problème ici, soupira l'homme.
-Je ne vois pas de quoi tu parles, ironisa Miranbeau.
L'homme lui répondit par un simple sourire.
-Dans ce cas, souffla-t-il, je ne suis au courant de rien.
Après un clin d'oeil, il ouvrit la porte à Miranbeau. Bien sûr, Héla commençait à avoir une idée de l'endroit où l'avait emmené sa tortionnaire. Pourtant, tout ce qu'elle avait imaginé, même dans ses pires cauchemars, n'égalait en rien la terreur qui s'empara d'elle au moment ou Miranbeau la poussa devant elle pour qu'elle entre dans le club.
Tout d'abord il y eût une fumée à demi épaisse à l'odeur de parfum fruité, et éclairée de l'intérieur par des faisceaux lumineux. Héla cligna des yeux pour y voir plus clair, mais ils peinaient à s'accoutumer à l'éclairage faible. Une musique calme résonnait à l'intérieur faisant danser au passage quelques corps trop peu vêtus pour qu'Héla n'ose relever la tête.
-Par ici, souffla Miranbeau en entraînant la jeune femme par le poignet. Elle s'assît sur une banquette, Héla l'imita en lui jetant tout de même un regard inquiet : Miranbeau semblait véritablement dans son élément.
-Vous boirez quelque chose madame ? Lança une voix claire au-dessus de la musique.
Héla releva les yeux et réprima un hoquet de surprise. C'était à peine si la serveuse était habillée.
-Martini, avec olive, répondit Miranbeau, et... un jus de fruit. Là-dessus, la serveuse s'éloigna, et Héla nota avec dégoût le regard de Miranbeau qui détaillait son déhanché. La femme d'affaire sourît en remportant son regard sur Héla.
-Un commentaire très chère ? Demanda-t-elle amusée.
Héla lui répondit d'un regard noir, elle l'écoeurait. Lorsque Miranbeau approcha ses mains de son visage, Héla s'éloigna brusquement.
-Attends... Soupira Miranbeau en l'acculant dans le coin de la banquette, je veux juste... Elle passa ses mains autour du cou de la jeune femme qui avait cessé de respiré, et lui détacha son bâillon.
Héla ouvrît aussitôt la bouche, sans doute pour crier ou appeler au secours, elle même ne savait pas vraiment ce qu'elle avait en tête lorsque Miranbeau la coupa dans son élan.
-Si tu fais un pas de travers, la menaça-t-elle, je te jure que je te le ferais regretter.
Héla se mordit la langue, elle hocha la tête.
Bientôt, la serveuse revînt avec un petit plateau. Elle déposa le Martini et le verre de jus de fruit sur la table avant de s'éloigner. Héla grinça des dents en voyant Miranbeau regarder une nouvelle fois les fesses de la serveuse avec cette avidité malsaine qui lui était propre.
-Quoi ? Se moqua la femme d'affaire, jalouse ?
-Vous aimeriez bien... Marmonna Héla à peine plus fort que la mélodie de piano qui faisait vibrer la pièce
Miranbeau sourît, elle semblait satisfaite de sa réponse.
-Ne t'en fais pas chérie, tu finiras par l'être.
Héla ravala une réplique cinglante. Ce n'était pas le moment de contrarier Miranbeau.
-Ça te plait ?
Héla baissa le nez dans le jus de fruit qui lui était destiné.
-Répond, ça te plaît ? Insista Miranbeau avec un sourire.
Héla fît non de la tête, Miranbeau se mît à rire doucement.
-Il va falloir oublier ta pudeur chérie, grogna Miranbeau en posant une main possessive sur la cuisse d'Héla qui se crispa aussitôt.
Les spots qui éclairaient la salle s'éteignirent en même temps que la musique. Héla ferma les yeux en sentant Miranbeau se rapprocher d'elle.
Plus loin, une lumière rouge s'alluma au-dessus d'une scène et un air de jazz se mît à flotter entre les tables. Une femme faisait son entrée dans un long manteau de fourrure, une cigarette entre les lèvres. Elle avançait doucement, d'un pas presque dansant vers le coeur de la scène en posant ses yeux maquillés sur tous les clients.
-C'est Louisa, murmura Miranbeau à l'oreille d'Héla, elle est très bonne tu vas voir.
Sous les yeux avides de ses spectateurs, la danseuse se mît à se dévêtir lentement, et bien trop sensuellement pour laisser Miranbeau indifférente. Un sourire satisfait étira les lèvres de la femme d'affaire tandis que ses yeux reflétaient la danse de la femme à travers la fumée éclairée de rouge.
Héla détourna le regard lorsque la danseuse commença à s'attaquer à ses sous-vêtements. Miranbeau soupira avant de lui faire relever la tête
-Ne me dis pas que tu ne la trouve pas belle... Souffla-t-elle.
-Elle l'est, grogna Héla derrière ses dents serrées, mais elle est aussi nue.
-Tu me désespères chérie... Grogna Miranbeau.
Sur scène, les lumières changeaient doucement de couleur, et, alors que la salle était baignée dans une obscurité inquiétante, la musique se fît plus agressive. Héla sursauta lorsqu'un rideau tomba, dévoilant un jeune homme de faible corpulence pieds et poings liés aux barreaux d'une cage. Héla frissonna et serra les dents en voyant la danseuse approcher férocement de l'homme, cette fois, elle fois, elle repoussa Miranbeau pour ne pas avoir à regarder le spectacle.
-Tu ne devrais pas détourner le regard, souffla Miranbeau près de l'oreille d'Héla, c'est le meilleur moment.
Héla avait fermé les yeux, et elle se bouchait les oreilles du mieux qu'elle pouvait. Malgré tout, elle entendait les coups qu'infligeait la danseuse suivis des plaintes de l'homme. Dans la salle, de légers soupirs de plaisirs s'échappaient des lèvres des clients alors que l'homme se tordait de douleur, la jeune femme en eût la nausée. Elle ne parvînt même pas à retenir les larmes de dégoût qui coulaient derrière ses yeux clos.
Miranbeau frémit de désir en voyant les joues brillantes d'Héla, elle la serra contre elle comme si elle avait voulu la rassurer, ce qui eût pour seul effet de faire germer une boule douloureuse dans la gorge de la jeune femme.
-Il est consentant tu sais... Murmura Miranbeau.
-Est ce que... Peut-on partir... Articula Héla, je ne me sens pas bien.
L'homme poussa un petit cri de douleur qui fît sursauter Héla dans les bras de Miranbeau.
-Non. Nous allons rester."
Lorsque le spectacle prît fin, la danseuse libéra le jeune homme sous les applaudissements des clients et l'aida à quitter la scène. La lumière revînt lentement, et les conversations reprirent.
Miranbeau retînt un sourire en voyant le visage déconfit d'Héla. Elle était blanche comme un linge.
"-Et bien, je ne pensais pas que ça te plairait autant, ironisa Miranbeau.
Héla lui jeta un regard noir.
-Oh mais ce regard ! S'exclama une voix féminine. Héla reconnût la danseuse, elle déglutît difficilement. J'aurais corrigé ma soumise pour moins que ça.
-Louisa, lança Miranbeau en se décalant pour que la danseuse puisse prendre place à côté d'elle. Vraiment très bien ta prestation.
-Merci, ça manquait peut-être d'un peu de fluidité sur la fin mais Jonas s'en est bien tiré.
-Sans aucun doute. Commenta Miranbeau.
-Tu me présentes ? Demanda Louisa.
Miranbeau tourna la tête vers Héla en plissant les yeux.
-C'est ta soumise ? L'interrogea Louisa en jetant un regard dans la direction d'Héla.
Miranbeau esquissa un sourire.
-C'est mon puppy, corrigea-t-elle en posant une nouvelle fois sa main sur la cuisse d'Héla avec une férocité remplie d'acharnement. Je te l'aurais bien prêté mais elle n'est pas toujours très coopérative.
Héla sentit sa gorge se serrer davantage comme si cela avait été possible.
-Ne dis pas n'importe quoi, se moqua Louisa, tout le monde sais que tu n'es pas partageuse.
-Attendez... Hoqueta Héla toute tremblante. Je... Je ne suis pas un morceau de viande... Je... Je n'ai rien a faire ici... je...
-Chuuuut, la coupa Miranbeau en posant délicatement son index sur ses lèvres. Tu te souviens de ce qu'on a dit.
Héla acquiesça en se mordant la joue. Louisa fronça les sourcils intriguée.
Miranbeau se pencha et murmura quelque chose à l'oreille de la danseuse. Son visage s'éclaira.
-Je comprends, lança-t-elle l'air rassurée, si tu es ok il n'y a pas de problème.
Héla voulut ouvrir la bouche mais la main de Miranbeau s'était refermée comme un étaux sur son poignet.
-Je vous laisse profiter, souffla Louisa en se levant, au plaisir Adèle !
-Au plaisir, répondit la femme d'affaire d'une voix claire. Héla, elle, avait cessé de respirer.
-Je... Bafouilla Héla alors que ses yeux se remplissaient déjà de larmes.
-Nous règlerons ça en rentrant. Rétorqua sèchement Miranbeau, profite de la soirée."