" Ce que la chenille appelle la mort, le papillon l'appelle renaissance "
Elijah
Tout au long de ma vie, j'ai essayé de me persuader qu'il y avait encore du bon dans ce monde. Que la lumière resterait à jamais présente et éloignerait les ténèbres. J'avais tant besoin d'y croire.
Apparemment, tout n'était qu'une feinte. Je me suis trompé.
La notion de temps s'en est définitivement allée. J'ai parcouru tant de kilomètres que je ne les compte plus. Et tout ça pour quoi ? Pour espérer trouver l'endroit parfait !
Mes yeux étudient les églantiers qui s'étendent à perte de vue et qui appartiennent sans aucun doute à cette ferme à contrebas.
Je me souviens encore de son rire, du mouvement de sa robe émeraude qui virevoltait lorsqu'elle courait parmi les jardins. C'était dans un endroit assez proche de celui-ci. Et c'est d'ailleurs pour ça que ce lieu me plait.
Cette femme n'était pas la perfection mais aucun de nous ne l'est. Le vampirisme nous a tous changés.
On avait beau la considérer comme une personne sans cœur moi, je me souviens de cette jeune humaine qui, après nos jeux de course-poursuite, m'avait donné sa définition d'un amour véritable.
« - Je crois qu'il n'y a d'amour vrai que lorsqu'il est partagé ! m'avait-elle dit. La vie est trop cruelle, si nous n'avons plus foi en l'amour pourquoi donc vouloir vivre ? »
Aujourd'hui, je le sais, le nôtre l'était.
Une larme de douleur roule sur ma pommette.
Tout n'est devenu que ténèbres autour de moi. La fraîcheur tombe sur ma peau où c'est son corps maintenu dans mes bras qui refroidit bien trop vite. Sa tête est blottie contre mon torse, sa chevelure noire aux reflets d'argent dissimule une partie de ses traits.
Je dépose Katherine au sol. Ma main glisse sur son visage alors que je lui murmure à quel point je suis désolé. Je lui avais promis de la sauver. J'ai échoué. Aujourd'hui, elle s'en est allée.
Mes paupières se ferment. Une énième larme perle ma joue jusqu'à chuter sur ses traits figés.
J'espère que cet endroit sera son havre de paix.
La douleur est pour le moment mon seul et unique sentiment mais je sais que bientôt la colère prendra le dessus.
C'est pour ça que mon choix est fait. Tout est fini, je ne reviendrais pas.
Caroline
Assise sur notre lit, le regard figé dans le vide, il m'est impossible d'oublier les événements de cette nuit. Petit à petit, le rêve que nous vivons se transforme en cauchemar.
La meute des loups Originels est désormais là et devant les menaces de notre ennemi, Klaus aura besoin d'eux. Inconsciemment, tout le pousse vers son destin tracé.
Je songe à Sam. Il a lui-même essayé de me prévenir. Peu importe les chemins détournés, le destin s'évertue à reprendre sa route.
J'ai bien compris que je n'étais malheureusement qu'une étape sur son chemin. Je ne suis pas la première à devoir subir cette tragédie et je ne serais sans aucun doute la dernière.
J'en suis convaincu, les vampires ne sont pas les seules créatures à être maudites, les loups Originels le sont tout autant.
Pourtant, le destin a fait en sorte de l'éloigner des siens et l'a tout de même conduit à moi. Notre chemin à nous suit sa propre route. À la différence de tous ceux qui nous ont précédés, nous ne pouvons procréer. Notre Karma à nous, ne semble-t-il pas bien distinct ?
Je soupire puis trouve le courage de me redresser pour partir à sa recherche. Accoudé au balcon en fer forgé, il n'a pas bougé.
Cela fait des heures qu'il est là à attendre je ne sais quoi. J'ignore jusqu'où sa culpabilité le tourmente et au fond je ne préfère pas le savoir. Il n'est jamais facile de devoir faire des choix aussi cornéliens et en assumer les conséquences. Tous ceux qui ont passé leur temps à le juger l'ont fait sans le connaitre vraiment. Car oui, il est bel et bien imprévisible. Tel un cheval sauvage, une part de lui restera à jamais indomptable. Et cela même pour moi.
Rebekah
Les images pleins la tête de ce futur incompréhensible, j'erre dans les rues du vieux carré depuis un petit moment déjà. À vrai dire, depuis que j'ai abandonné Sophie et Davina dans leur crypte.
Chaque instant de cette vision presque utopique restera gravé dans ma mémoire. Il ne peut pas en être autrement.
Inconsciemment, mes yeux s'attardent sur la devanture d'un petit restaurant. Je reconnais aussitôt Sam puis Adam. Un homme, la cinquantaine, que je n'avais jamais vu est assis à la même table. Au vu des traits de son visage plutôt durs, je l'imagine être l'Alter ego du loup Originel noir. Puis, en face de Sam, il y a lui. Chris.
Alors que l'aube se lève, et que le soleil entreprend sa longue ascension, je me retrouve derrière cette simple vitre à l'épier. Le regard perdu dans le vide, Chris n'a visiblement pas touché à son assiette. À cet instant, il n'a plus rien de cet homme si fort qu'il montre sans cesse. Sa tristesse me fend le cœur.
Et c'est ma faute ! J'ai attisé sa colère en apposant du sel sur une blessure à vif dont j'ignorais la présence.
Je le regrette ! Ce n'est pas ce que je voulais !
Son père, juste en face de lui, a le regard rivé sur lui. Lui aussi s'est aperçu de sa profonde mélancolie.
Lorsque deux iris de ce bleu quasi irréel se verrouillent sur moi, je déglutis. Chris m'observe maintenant attentivement.
Jamais encore je n'avais éprouvé ce besoin latent d'appartenance et pourtant malgré cette envie profonde, je n'arrive pas à la satisfaire.
Possédée, la paume de mes mains se dépose sur la vitre entre nous. Mes doigts s'écartent comme s'ils n'attendaient qu'une seule chose : les siens de l'autre côté.
Il arque un sourcil puis le visage crispé se détourne de moi. Patiente, je ne bouge pas et me contente de fixer sa pomme d'Adam qui tressaute. Mes sens vampiriques sont à l'affut. Ses pulsations cardiaques s'affolent.
Me prenant au dépourvu, il se lève rapidement, saisit sa veste sur le dossier de sa chaise.
Aussitôt, je ne perds pas une minute et calque le rythme de mes pas aux siens. Il n'y a qu'un moyen de sortir et c'est par cette unique porte. Il ne peut pas m'échapper.
Je rêve subitement qu'il agrippe mon visage. Que ses lèvres capturent les miennes dans un baiser plus que passionné. Je le sais... cela pourrait être épique.
Mais c'est à une poignée de centimètres de moi qu'il passe sans la moindre attention.
Le cœur en miette, je me retourne pour le voir déjà loin. Je ne suis pas stupide, cette déception, que j'éprouve n'est pas là pour rien. Sans le vouloir, Chris m'a littéralement harponné ! Cupidon m'a décoché sa flèche mais a malheureusement raté son second tir.
Et c'est encore plus douloureux pour moi de savoir qu'il n'est pas l'homme de cette vision du futur. J'aurais pourtant tant aimé qu'il le soit. C'est pour cette raison même qu'en le comprenant, je n'ai pas eu le courage de soulever mes paupières.
C'est lui que je voulais !
Le regard songeur de Sam est posé sur moi. Il a sans doute suivi son fils jusqu'à me trouver moi. Je tente de lui adresser un sourire crédible puis m'éloigne dans la direction opposée à celle que Chris a prise un peu plus tôt.
Elijah
Après avoir récupéré une pelle dans la grange de la ferme, j'ai creusé longuement. Désormais, l'emplacement est prêt et n'attend plus qu'elle. Seulement, je n'arrive pas à m'y résoudre. Je ne suis pas encore prêt à lui faire mes adieux. Tout courage m'a déserté et pourtant, je n'ai pas d'autre choix.
Alors que je me penche pour me saisir de son corps, elle se redresse un coup sec, cherchant son souffle.
Choqué, je bascule en arrière.
Alors qu'elle reprend ses esprits, je ne la bouscule pas. J'ai déjà bien du mal à réaliser ce que j'ai juste sous les yeux.
Après quelques minutes, et après avoir tout observé autour d'elle, elle tourne enfin la tête dans ma direction.
Mes larmes roulent toutes seules le long de mes joues alors que mes mains terreuses caressent désormais son visage. Je n'arrive pas y croire !
— Comment est-ce possible ? je murmure.
— Klaus ! termine-t-elle en verrouillant ses yeux couleur noisette dans les miens.
Elle réfléchit longuement laissant ces derniers souvenirs remonter à la surface puis poursuit :
— Juste avant de m'amener à Silas, il m'a donné de son sang et m'a contraint à tout oublier la seconde suivante.
Et c'est là que je comprends.
— Il était le seul à pouvoir te retransformer !
— Si l'on y réfléchit, il était mon créateur de départ.
Mes mains continuent de caresser son visage. Je le recouvre de terre mais peu m'importe. Je veux la toucher pour m'assurer de sa présence, j'ai tellement eu peur de l'avoir perdu.
— Tu es là ! je souffle
— Je suis bel et bien de retour ! confirme-t-elle
Je n'arrive plus à retenir mon sourire. Katherine se redresse entièrement, frotte ses vêtements terreux puis m'observe avec malice.
— M'attraperas-tu cette fois ou simuleras-tu de ne pas en être capable ?
Et sur ces derniers mots, elle flashe à sa vitesse vampirique.
Je ris et lui laisse quelques minutes d'avance avant de m'élancer à mon tour.
Nous retrouvons rapidement le chemin du QG. Katherine se poste devant l'imposante grille en fer de l'entrée, m'attendant patiemment.
— Vous deviez m'attraper, Monsieur ? s'amuse-t-elle en utilisant ces mêmes mots prononcés il y a de cela plusieurs siècles.
— Si je l'avais fait, le jeu aurait pris fin ! je réplique à mon tour.
Alors que nous pénétrons à l'intérieur de la cour pavée, je croise aussitôt le regard de Niklaus et me fige dans mes pas.
Mon petit frère m'observe puis il en fait de même pour Katherine. Sans attendre, il comble les derniers mètres et m'étreins avec soulagement.
— Pourquoi ne m'avoir rien dit ? je chuchote à bout de souffle.
— Parce que je n'étais pas sûr que cela fonctionnerait ! m'avoue-t-il d'un air penaud. Lorsque tu m'as dit qu'elle ne conservait pas ton sang, j'ai repensé à la fois où j'avais essayé de la retransformer. Elle n'avait pas recraché le mien.
C'est exact ! C'était au moment où Caroline l'avait empêché de la mordre. Miss Forbes avait fait preuve de perspicacité.
— Et si cela n'avait pas fonctionné, je demande, le cœur palpitant.
J'ai encore du mal à croire qu'il a pu agir de cette façon, me privant de tout bonheur après avoir fait tant de progrès.
— D'une façon ou d'une autre, Katherine aurait fini par mourir, il m'avoue.
Et au fond, je sais que c'est la pure vérité.
— Nous n'aurions pas réussi à empêcher Silas de la prendre. Quant à toi, mon frère, tu te serais maudit de ne pas avoir réussi à la sauver. Et si mon sang n'avait pas fonctionné... place-t-il sa main sur mon épaule. C'est moi que tu aurais maudit pour l'éternité... pas toi !
Caroline
Impossible pour moi de retenir mon large sourire. Une fois encore, il a agi à sa manière et au fond, je suis ravie que cela se finisse bien.
Nous avons frôlé la catastrophe !
Mes yeux dérivent sur la blonde originelle qui fait son entrée et se stoppe à la vue de ses frères enlacés. Une larme roule sur sa joue en découvrant Katherine bel et bien vivante.
— Que s'est-il passé ? demande-t-elle, effarée.
Le sourire d'Elijah pourrait se remarquer à des kilomètres. Ne pouvant pas se retenir plus longtemps, Rebekah accourt dans leur direction, peste contre Klaus de jouer avec ses nerfs et serre ses frères dans ses bras.
Le moment est presque parfait ! Et si j'ai bien entendu, il va bientôt l'être.
Quelques secondes après, Magellan entre à son tour tout en ronchonnant après Kol qui lui, semble blasé par leur dispute.
En voyant sa fratrie collée les uns aux autres, Kol arque un sourcil.
— J'ai raté quelque chose ? demande-t-il
Il est bien loin d'imaginer tout ce qui s'est passé depuis qu'il est parti avec Magellan dans ses bras.
— Au lieu d'être jaloux, si tu venais nous rejoindre ! lui propose Rebekah
— Moi ? Faire un câlin ? Est-ce que tu m'as bien regardé ?
— Allez, vas-y ! je lui dis en le poussant dans leur direction.
Cette fois, ce moment parfait ! Je l'ai !
Sans attendre une seconde de plus, je sors mon smartphone afin de capturer cet instant à tout jamais.
— Collez-vous les uns aux autres ! je demande. Attention, le petit oiseau va sortir !
— Tu vas le voir mon petit oiseau, tout à l'heure ! poursuit Kol.
Klaus assène une claque derrière la tête à son cadet et tous éclatent de rire.
J'appuie aussitôt sur le bouton afin de capturer la photo.
— C'est dans la boite ! je m'écrie, ravie.
Rebekah
Je regarde Caroline se blottir contre mon frère. Je me sens si désireuse d'un amour comme le leur.
Je soupire et regagne l'étage.
— Attends, Rebekah !
Caroline me court après.
— Tu n'as pas vu la photo !
Alors qu'elle me la montre, je lui arrache son téléphone des mains pour la voir de plus près.
— Bordel de merde ! je m'époumone.
C'est bien la même qui était affichée dans la cage de l'escalier dans la vision du futur que Davina et Sophie m'ont offert.
— Il y a un problème avec la photo ? me demande Caroline.
Les yeux au bord de larmes, je l'observe.
— Non ! Elle est parfaite, Caroline ! je lui avoue. Merci... merci de l'avoir prise !
Sans me contrôler, je la serre dans mes bras. Nous lui devons tant ! Surprise par ma réaction, elle se tend puis me sert à son tour.
Finalement, il est possible que ce futur ne soit pas révolu !
Et bien qu'il soit en partie utopique, je n'arrive pas à m'empêcher d'avoir un nœud à l'estomac. Je sais ce que j'ai vu à travers cette vision. Je revois sans mal le visage de cet enfant dont le gène de loup-garou est enclenché. Et Caroline, qu'est-elle devenue dans tout ça ?
— Rien de plus normal, nous sommes en train de graver notre histoire !
— Tu as raison, Caroline, on l'a grave en ce moment même !
J'attrape ses mains dans les miennes, puis ajoute :
— Quand tu l'apprendras, j'espère que tu auras assez confiance en moi pour m'en parler.
La blonde en face de moi fronce les sourcils puis me demande :
— Quand j'aurais découvert quoi ?
Je souris timidement.
— Quand le moment sera venu, tu le sauras !
— Si je te dis que je n'ai rien compris, est-ce que tu m'en veux ?
Toutes les deux, nous rions.
— Rebekah, je sais qu'on a eu des débuts difficiles toutes les deux mais sache que j'ai confiance en toi bien plus que tu ne le crois, m'avoue-t-elle avec un sourire.
— Merci... va retrouver ton homme, ma belle !
— Même si ce n'est pas Stefan, tu trouveras la bonne personne !
— Alors je pense qu'il serait plus que temps de lui faire parvenir une carte routière ! je me moque
— Moi je suis convaincue qu'il trouvera son chemin car il sera impossible pour lui de ne pas te voir !
Et sur ces derniers mots, elle part rejoindre Niklaus.