La Promesse [ EN PAUSE]

By Fenghuang03

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Issue d'une famille modeste, Keyra est une jeune fille gaie qui rêve depuis toute petite de devenir avocate... More

Avant-Propos
Prologue : Est-ce la fin ?
Chapitre 1 : La Rencontre
Chapitre 3 Partie 1/3: Bienvenue en enfer !
Chapitre 3 Partie 2/3: Juste un avant-goût !
Chapitre 3 Partie 3/3: Sans cœur !
Chapitre 4 : Une entrevue de taille
Chapitre 5 Partie 1/3 : Pas une minute à perdre.
Chapitre 5 Partie 2/3 : Excellente idée !
Chapitre 5 Partie 3/3 : Échappée belle !
Chapitre 6 Partie 1/2 : Tourner la page.
Chapitre 6 Partie 2/2 : Coup de foudre !
Chapitre 7 Partie 1/3 Visiteurs non désirés.
Chapitre 7 Partie 2/3 : Agent double !
Chapitre 7 Partie 3/3: Pas besoin de vous.
Chapitre 8 Partie 1/2 : Le pari
Chapitre 8 Partie 2/2 : Courts retrouvailles !
Chapitre 9 Partie 1/3 : Trésor
Chapitre 9 Partie 2/3 : Drôle de rencard !
Chapitre 9 Partie 3/3 : Le retour du frère prodigue!
Chapitre 10 : Mise en garde !
Chapitre 11 Partie 1/3: Guet-Apens !
Chapitre 11 Partie 2/3 : Règlement de compte !
Chapitre 11 Partie 3/3 : Attraction !
Chapitre 12 Partie 1/3 : Rendez-vous Nocturne!
Chapitre 12 Partie 2/3 : Bonne année !
Chapitre 12 Partie 3/3 : Quatre-quart à la pomme et à la cannelle.
Chapitre 13 : Ce n'est pas un adieu !
Chapitre 14 : Et les ennuis commencent
Chapitre 15 : Nostalgie
Chapitre 16 : Acte de bravoure ou pure folie ?
Chapitre 17 : Quand les souvenirs refont surface.
Chapitre 18 : Sentiments éclaircis
Chapitre 19 : Réconfort divin
Chapitre 20 Partie 1/2 : À cœur ouvert!
Chapitre 20 Partie 2/2 : Culpabilité et regret !
Chapitre 21 : Une nuit apaisante
Chapitre 22 : Tout reprendre à zéro
Chapitre 23 : Plus on est de fous, plus on rit...

Chapitre 2 : Ultimatum

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By Fenghuang03

Deux semaines étaient passées et Keyra était toujours en quête d'emploi. Ce matin-là, elle avait emprunté le scooter de son père puisqu'il ne l'utilisait plus. Le soleil émergeait de son sommeil quand elle arriva devant l'agence de mode M.Design. Les jours précédents, elle avait été dans plusieurs entreprises pour postuler mais ses efforts s'étaient avérés infructueux. Elle essaya de trouver une place dans le parking où garer le scooter mais il semblait qu'elles étaient déjà toutes prises. Keyra observa toutes ces voitures avec un air désespéré puis son regard dévia sur une place vide. Le sourire aux lèvres, elle se dirigea vers la place en question mais une voiture sortit de nulle part et apparut dans son champ de vision.

Prise au dépourvu, Keyra essaya de freiner l'engin mais trop tard. La voiture et le scooter étaient entrés en collision. Les phares ainsi que le pare-brise arrière étaient en milles morceaux. Le propriétaire de la voiture qui y était encore sentit un choc et en descendit. Keyra réfléchissait quant à la façon dont elle allait s'excuser auprès de ce monsieur. Évidemment, elle était consciente que ses excuses n'y changeraient rien mais elle se savait en tort. Obnubilée par ses pensées, Keyra n'avait pas vu qu'il se trouvait juste devant elle, la fixant à travers sa paire de lunettes noires. Un raclement de gorge la sortit de ses pensées. La tête baissée et sans même chercher à savoir qui se trouvait en face d'elle, Keyra commença à lui présenter ses excuses.

— Je... je suis vraiment désolée monsieur. Je ne l'ai pas fait sciemment je vous le promets. Je sais très bien que ce ne sont pas de simples excuses qui vont aider à la réparer mais je tenais quand même à le faire.

Le concerné ne dit mot, la fixant incessamment et durement, les mâchoires contractées. D'un geste lent, il retira sa paire de lunettes et continua de la dévisager. Ayant suivi son geste, Keyra releva la tête lentement vers lui et le vit. Elle déglutit difficilement. C'était bel et bien lui, Monsieur-je-ne-m'excuse-jamais comme elle l'avait surnommé. Ce qu'elle craignait avait fini par se produire. La même chose qui s'était produit la dernière fois arriva de nouveau. Battement de cœur effréné. Son cœur semblait exécuter le son du tam-tam parleur* mais elle n'arrivait pas à décoder si c'était bon signe ou non. Se ressaisissant, elle ne put placer que deux mots.

— Encore vous ?

— Encore moi ? Vous ne croyez pas que c'est à moi de vous poser la question ?

— ......

— Premièrement vous m'humiliez en public, ensuite vous vous en prenez à ma voiture et vous pensez que ce sont vos excuses qui paieront la réparation ?

— Au cas où vous auriez la mémoire courte, laissez-moi vous rappeler que c'est vous qui m'avez agressée et menacée qui plus est. De plus, je n'ai jamais prétendu que mes excuses pourront réparer les dégâts que j'ai causé à votre voiture. Seulement, je sais reconnaître mes torts et je m'en excuse. Pas comme certains.

— Que voulez-vous insinuer ? Que je ne sais pas m'excuser quand il le faut c'est ça ?

— Ce n'est pas moi qui le dis, vous venez de l'avouer à l'instant, répliqua Keyra.

— En ce qui me concerne, il me semble vous l'avoir déjà dit la dernière fois je n'ai de compte à rendre à personne. Est-ce compris ?

— Voyez-vous ça ? Monsieur commets une erreur et refuse de l'admettre. Savez-vous comment on appelle ce genre de personne ? Je plains votre mère car elle a dû supporter votre caractère de cochon pendant toutes ces années.

À ces mots, il la saisit brutalement par les épaules le regard durcit ce qui arracha une grimace de douleur à Keyra. Si les regards pouvaient tuer, c'était sûr et certain qu'à cet instant t, elle aurait déjà passé l'arme à gauche.

— Écoutez-moi très bien mademoiselle, je ne vous permettrai pas de m'insulter à nouveau, ma mère encore moins, dit-il les dents serrées avant d'ajouter. Ne pouvez-vous pas tâcher de vous adresser aux gens sans les insulter ? Vous êtes sans scrupule !

Keyra se libéra de sa poigne et recula de quelques pas. Elle se mit à rire avant de reprendre d'un air sérieux.

— Waouh ça c'est le comble. Regardez qui donc parle de scrupule. Vous ? Ne me faites pas rire. À ce que je sache je n'ai pas parlé en mal de votre mère.

Keyra soupira et le fixa dans les yeux pour mieux répliquer.

— Monsieur commets une erreur, refuse de l'admettre et cette même personne se tient devant moi à me parler de scrupule. Non mais vous n'avez pas honte ?

— De quoi aurais-je honte ? Je n'ai rien à me reprocher. Je vous l'ai déjà dit la dernière fois et je vous le redis, ce n'était pas de ma faute si vous vous trouviez au mauvais endroit au mauvais moment. D'ailleurs vous n'êtes qu'une pauvre fille qui ne sait rien de la vie.

Keyra esquissa un sourire sarcastique avant de lui répondre sérieusement.

— Maintenant vous me parlez de la vie c'est bien ça ? Oui je suis une pauvre fille je l'admets mais ignorante non. Et vous savez quoi ? Je préfère mille fois être une pauvre fille comme vous le dites plutôt qu'être riche et arrogante comme vous. Si je puis me permettre de vous donner un conseil, arrêtez de compter sur votre argent et vous prendre pour le centre du monde parce que figurez-vous que lorsque vous vous en irait, ce n'est pas votre argent qui vous enterrera. La roue tourne ne l'oubliez pas. Sur ce, je vous dis au revoir.

— Où croyez-vous aller comme ça ? Nous n'en avons pas encore fini, lui lança-t-il alors qu'elle tournait les talons pour partir.

— Vous peut-être, mais j'ai autre chose à faire que de vous enseigner les rudiments de la vie.

— Vous ne vous en sortirez pas comme cela je vous le garantis.

— Ça je l'ai entendu la dernière fois.

Puis elle lui tourna le dos pour s'en aller quand elle revint sur ses pas comme si elle avait oublié quelque chose.

— Et au fait au sujet de votre voiture, je paierai les frais de réparation peu importe le coût.

— Quoi ? Ne me faites pas rire. Vous ? Payer les frais de réparation ? Vous n'êtes pas sérieuse, comment ferez-vous ?

— Cela ne regarde que moi.

— Okay. Si vous arrivez à payer les frais c'est seulement là que je vous présenterai mes excuses, affirma-t-il d'un air à la fois sérieux et moqueur.

— Si vous y tenez mais rira bien qui rira le... la dernière, rectifia-t-elle avant de partir pour de bon cette fois.

Il la regarda s'en aller, sourit et secoua la tête. Cette fille avait du caractère mais savait-elle à qui elle venait de s'adresser ? Ce n'était assurément pas le cas. Il jeta un coup d'œil furtif à sa montre dont l'aiguille marquait huit heures et demi. Et m**de, il était en retard à sa réunion et s'il y avait une chose qu'il détestait le plus hormis le mensonge, c'était le retard et tous ses employés le savaient très bien. Un seul retard non justifié et vous pourrez dire adieu à votre emploi. C'était à la fois simple et rapide et cette fille lui avait fait perdre un temps précieux mais aussi bizarre que cela puisse paraître, il n'y avait aucun signe de colère sur son visage.

Nous nous retrouverons c'est sûr et cette fois, vous regretterez vos paroles. Je vous en fait la promesse, se dit-il intérieurement en regardant la direction qu'elle avait prise. Il sorti finalement du parking et entra à son tour dans l'agence.

Après avoir passé les tests d'embauche, Keyra sortit de l'agence avec l'espoir d'être retenue. Elle se dirigeait vers le scooter lorsque son regard et celui de Monsieur-je-ne-m'excuse-jamais se rencontrèrent alors que ce dernier s'apprêtait à monter dans sa voiture, un rictus aux lèvres pour la provoquer. Elle le nargua, enfila son casque et démarra le scooter pour s'éloigner au plus vite de cet homme.

Assis dans son bureau, Il travaillait lorsque quelqu'un frappa à la porte, le déconcentrant par la même occasion. Il contracta ses mandibules comme à chaque fois qu'il était énervé et cria un Entrez à glacer le sang. Une jeune dame tenant entre ses mains des dossiers, pénétra toute tremblante dans le bureau, pratiquement comme à chaque fois qu'elle s'y rendait.

— Pourquoi est-ce que tu me déranges ? Ne t'avais-je pas dis d'appeler à l'avance ?

La jeune dame déglutit.

— Si mon... mon... Monsieur, bégaya-t-elle mais madame Sandey m'a demandé de vous apporter en urgence ces dossiers à signer.

— Pose-les et dégage !

— Oui mon-sieur, dit-elle en faisant ce qu'il lui avait ordonné.

— Que des incapables ! lança-t-il alors qu'elle refermait la porte.

Après avoir fini ce qu'il avait à faire, il s'accorda une petite pause et but une gorgée de son café noir qu'on lui avait apporté quelques minutes plus tôt. Son regard dévia sur les fameux dossiers et il en prit un dont la couverture-à-rabat était orange et l'ouvrit. Son visage prit un air surpris lorsqu'il vit la photo de la jeune fille qu'il avait rencontré quelques instants auparavant. Un rire mauvais fendit ses lèvres alors qu'il lisait son dossier.

— Alors comme ça vous vous appelez Keyra Lartey Tancey ? Très bien, c'est parfait. Nous allons pouvoir nous amuser, dit-il en savourant son café qui avait soudainement meilleur goût.

***

Bientôt, sept jours s'étaient écoulés et Keyra devait se rendre chez M. Design concernant les résultats du test qu'elle avait passé.

Seigneur faites que cette fois soit la bonne je vous en prie.

Alicia voyant l'état dans lequel était sa sœur essaya de la réconforter.

— Ne t'inquiète pas Key' je suis sûre que tout se passera bien.

— Je l'espère sœurette.

Sa sœur lui sourit avant de la prendre dans ses bras.

— Allez vas-y maintenant.

Keyra s'extirpa des bras de sa sœur, salua tout le monde avant de prendre le scooter et rouler en direction de M. Design.

Arrivée devant le building, elle ôta son casque, ferma les yeux, prit une profonde inspiration et expira doucement.

Soit avec moi doux Jésus.

Elle entra finalement dans le bâtiment et ses pieds la dirigèrent machinalement vers l'accueil.

— Excusez-moi mademoiselle, dit-elle à l'intention de la femme qui l'avait reçue la dernière fois. Je suis Keyra Lartey Tancey et j'avais postulé pour le poste de...

— Ah c'est vous Keyra ? la coupa cette dernière. Félicitations vous avez réussi le test.

— C'est vrai ? demanda Keyra dont le visage s'illumina instantanément.

— Oui. Par contre, vous devrez vous rendre dans le bureau de madame Sandey, la directrice des ressources humaines pour tout finaliser.

— Oh je comprends. Pouvez-vous m'indiquer son bureau s'il vous plaît ?

— Oui bien sûr prenez l'ascenseur pour vous rendre au troisième étage, c'est le deuxième bureau dans le fond à droite. Ne vous trompez pas.

— Merci beaucoup mais je peux aussi m'y rendre en prenant les escaliers.

— Oui mais vous perdrez un temps fou. Les ascenseurs sont plus rapides.

— Je sais mais... Keyra soupira. C'est compris merci beaucoup.

— De rien madame Tancey.

Quoi ? Avait-elle bien entendu cette jeune dame l'appeler Madame Tancey ? Peu importe, c'était à présent le cadet de ses soucis. Keyra n'arrivait toujours pas à y croire. Elle avait enfin obtenu du travail.

Merci Seigneur

Elle s'approcha lentement de sa bête noire, prit une profonde inspiration avant d'appuyer sur le bouton. Les portes métalliques s'ouvrirent. Keyra y entra à contrecœur et appuya sur le bouton quatre avant de se mettre à l'arrière comme pour se cacher derrière ces quelques personnes présentes dans l'ascenseur. Keyra ferma les yeux et serra le bout de son écharpe pour essayer de calmer les pulsations de son cœur. Quelques instants plus tard, les portes s'ouvrirent et Keyra s'empressa de sortir comme si elle craignait que le monstre métallique ne referme sa mâchoire sur elle.

Tout va pour le mieux aujourd'hui. Je n'ai pas revu Monsieur-je-ne-m'excuse-jamais et j'ai même obtenu du travail. Alors deuxième bureau dans le fond à droite pensa Keyra en cherchant des yeux ledit bureau.

L'agence était vraiment réputée car elle faisait partie des trois meilleurs agences de mode implantées en Côte d'Ivoire. Elle était dirigée par un certain Hermann J. Mensah d'où le nom M. Design.

— Ah c'est là, dit-elle en se dirigeant vers le bureau en question.

Elle frappa à la porte et une voix masculine lui ordonna d'entrer. Keyra entra et fut surprise de voir un homme et non une femme comme lui avait dit la réceptionniste.

— Excusez-moi, je crois que je me suis trompée de bureau, s'excusa-t-elle.

L'homme en question n'était nul autre qu'Hermann J. Mensah, PDG de M. Design. Il était de dos mais Keyra pouvait très bien voir qu'il tenait un document entre ses mains.

— Pourquoi partez-vous si tôt ? Asseyez-vous. J'ai à vous parler.

— Mmh moi monsieur ? demanda Keyra en se pointant du doigt.

— Y-a-t-il quelqu'un d'autre dans cette pièce hormis vous et moi à qui je puis m'adresser ?

— Non monsieur, répondit Keyra en s'avançant pour s'asseoir.

Toujours de dos, il continuait à lui parler. Ce que Keyra de son côté trouvait malpoli.

— Ce que je tiens entre mes mains est votre curriculum vitæ.

— Mon CV ? repris Keyra d'un air incrédule. En temps normal, n'est-ce pas avec la directrice des ressources humaines que je devrais m'entretenir en ce moment ?

— Ça aurait été sûrement le cas si vous n'aviez pas appuyé sur le mauvais chiffre. Mais peu importe vous êtes ici et c'est tant mieux.

Keyra fronça les sourcils. Que voulait-il dire par Si vous n'aviez pas appuyé sur le mauvais chiffre ? Elle se rappela avoir appuyé sur le chiffre quatre comme le lui avait dit la réceptionniste. Poudding ! Keyra se souvint qu'elle devait se rendre au troisième étage et non au quatrième.

— Vous êtes bien Keyra Lartey Tancey n'est-ce pas ? lui demanda-t-il, la faisant sortir de ses pensées.

— Oui ?! répondit-elle quelque peu perplexe.

— D'abord dites-moi, êtes-vous mariée ?

— Non monsieur. Pourquoi cette question ?

— Juste parce que je vois ici deux noms de famille et en général quand une femme porte deux noms de famille, c'est parce qu'elle est mariée. Bref passons à autre chose.

Cela expliquait maintenant pourquoi la réceptionniste l'avait appelé ainsi quelques minutes plus tôt. Mais une chose l'intriguait, c'était la voix de cet homme. Elle avait l'impression de l'avoir déjà entendue quelque part mais ne savait plus où exactement. En tout cas, elle n'aurait plus à se creuser les méninges bien longtemps parce qu'il se décida enfin à lui faire face.

— Ça faisait longtemps, depuis l'épisode du parking, dit-il un sourire sarcastique collé aux lèvres.

Keyra ouvrit grand les yeux tant elle était surprise. Son pire cauchemar venait de se réaliser. Il était là, juste devant ses yeux. Elle avait parlé bien trop tôt apparemment. Keyra sentit son cœur battre à tout rompre dans sa poitrine. Pendant un instant, elle sentit ses fesses la brûler comme si la chaise sur laquelle elle était assise était soudainement devenue une fournaise ardente. Monsieur Mensah la dévisageait, satisfait de l'effet qu'il avait produit sur elle.

— Qu'est-ce qu'il y a ? Vous êtes devenue si pâle soudainement. Vous ne vous y attendiez pas hein ?

— Qu'est-ce que... qu'est-ce que vous faites là ? répliqua Keyra encore sur le coup du choc.

Il se mit à rire avant de la regarder droit dans les yeux.

— Toujours aussi drôle mademoiselle Tancey, vous êtes ici dans mon bureau et vous me demandez ce que je fais là ? Mais bon, c'est votre nature je ne peux rien y faire. Comme vous êtes déjà là, je tenais à vous informer personnellement que vous avez été certes embauchée mais au poste d'assistante personnelle du PDG de cette entreprise, c'est-à-dire moi.

Keyra écarquilla les yeux à l'entente de cette nouvelle. Pas possible. Ce ne pouvait pas être vrai. Lui, Monsieur-je-ne-m'excuse-jamais, son nouveau patron ? Ils allaient certainement s'entretuer dans ce bureau. C'était officiel. La situation qu'elle redoutait tant, avait fini par se concrétiser.

— Ne vous en faites pas. Le contrat a déjà été rédigé.

Sur ce, il posa sur la table deux exemplaires dudit contrat. Keyra en prit un et commença à le lire. À priori, il semblait normal. Son salaire s'élevait à hauteur de deux cent cinquante mille francs CFA. Ce n'était pas grand chose vu leur situation financière, mais c'était beaucoup mieux que rien. Elle fit un rapide calcul mental. En déduisant les frais de transport et de repas, il lui resterait environ cent soixante mille. Elle n'allait tout de même pas utiliser le scooter de son père en permanence. En plus, ce n'était déjà pas si mal. Elle pouvait faire des économies solides sur une période de six mois. Et puis, elle bénéficiait aussi d'une assurance maladie qui couvrait quatre vingt pour cent des frais médicaux. Un sourire se dessina progressivement sur son visage. Sans prononcer un mot, monsieur Mensah l'observait avec attention, guettant le moment où elle verrait la surprise qu'il lui avait préparé. N'ayant pas remarqué l'autre partie de la feuille, Keyra se saisit du stylo et chercha des yeux l'endroit où émarger.

— Je vous conseille de bien lire les clauses avant de vous engager, parce que sinon, il sera trop tard pour regretter.

Les sourcils froncés, Keyra vérifia le document et s'aperçut qu'il y avait une autre page.

« Clauses spéciales

En tant qu'assistante personnelle du Président Directeur-Général de l'agence, l'intéressée s'engage à :

– Être respectueuse vis-à-vis de son employeur en toutes circonstances ;

– Se montrer disponible à toute heure de la journée et de la nuit, et ce, peu importe le temps qu'il fait ;

– Être assidue et ponctuelle : Tout retard non justifié et non justifiable se verra sanctionné par un licenciement à effet immédiat.

– Être efficace et consciencieuse dans l'exécution de ses tâches: L'intéressée verra son salaire être réduit de dix mille francs CFA pour chaque tâche partiellement ou non exécutée.

Pour une meilleure collaboration, vous êtes priée de nous accuser réception du présent contrat, en nous retournant le double, revêtu de votre signature précédée de la mention manuscrite "Lu et approuvé " »

En lisant la deuxième clause, elle réalisa enfin la raison de sa question concernant sa situation matrimoniale. 

C'était donc pour ça !

— Bien entendu, vous avez encore le choix. Accepter ou refuser, la balle se trouve dans votre camp.

Keyra serra très fort le bout de son écharpe entre ses doigts. Elle était vraiment face à un dilemme.

Selon le docteur, il doit passer des examens plus complets dans environ un mois pour voir s'il y a des chances qu'il puisse marcher de nouveau après une opération. Je me doute bien que cela va coûter une petite fortune.

Faites gaffe à ce que vous venez de dire, cela vous apportera des ennuis je vous le garantis.

Ces phrases ne cessaient de défiler en boucle dans son esprit. Que faire ? D'une part, il y avait son père et de l'autre, cet être arrogant, impitoyable et sans cœur par dessus le marché. Bien sûr, elle aurait pu accepter facilement, mais la présence de ces clauses dites spéciales la dérangeaient. Elle avait l'impression d'être une souris appâtée dans une souricière, sans aucune possibilité d'échappatoire.

— Tic Tac, Tic Tac. Le compte à rebours commence maintenant Miss Tancey !

Un sourire moqueur peignait ses lèvres, le rendant encore plus méprisable aux yeux de son vis-à-vis. Même s'il s'en était rendu compte, c'était assurément le cadet de ses soucis.

Il ne connait même pas ton nom, alors tu n'as pas à t'en faire. Et puis, qui te dit que vous allez vous revoir ?

Les paroles de sa sœur lui revinrent en tête et elle se rendit compte qu'il était illusoire d'y croire.

Tu as eu tort sœurette, pensa la jeune dame. Nous nous sommes revus, et plus d'une fois. Il connaît aussi mon nom et ça, ça n'augure rien de bon.

— Ça commence à être long. Ce n'est pourtant pas si compliqué. Vous n'avez juste qu'à faire un choix.

Oh mon Dieu ! Est-ce pour m'éprouver ? Papa va bientôt subir de nouvelles analyses et maman peine à joindre les deux bouts. Si j'accepte, Papa aura une chance de remarcher. En revanche...

Elle soupira avant de continuer son monologue intérieur.

Pourquoi faut-il que tout soit si compliqué ? Seigneur, aide-moi à prendre la bonne décision. Je t'en prie.

Elle ferma les yeux et inspira un gros coup. Le stylo en main, Keyra les rouvrit et commença à écrire la mention Lu et approuvé comme c'était mentionné. Sous le regard satisfait de son nouveau patron, elle aposa sa signature sur les deux documents. Ce dernier se saisit du double, le considéra un instant et lui adressa un sourire narquois. Keyra n'en fit pas cas et lui sourit en retour. C'était un sourire fier, plein de détermination. Elle était fin prête à relever ce défi. Pas pour elle, mais pour celui qui s'était battu contre vents et marées pour elle.

Papa, tu vas pouvoir remarcher très bientôt. Ne t'inquiète pas.

— Parfait ! Dernier détail, vous commencez dès lundi à sept heures tapante ici même, et je ne tolérerais aucun retard !

— C'est entendu.

— Je vous avais bien dit que vous regretteriez vos paroles, l'entendit-elle dire alors qu'elle refermait la porte de son bureau.

Juste en un claquement de doigt, sa joie d'avoir obtenu un boulot disparut comme une fumée s'envole au vent et céda place à la peur. Une peur qu'elle trouvait irraisonnée. Pendant un instant, elle avait songé à refuser ce travail. Mais, était-ce certain qu'elle en trouve un autre en peu de temps et mieux payé que celui-là ? Si ce n'était pas pour son père, elle l'aurait envoyé balader sur le champ. De toutes les façons, elle était fin prête à relever ce défi.  Avec tous les différends qui les avaient opposés, elle savait pertinemment que ce ne serait pas de tout repos. De plus, ce n'était qu'une question de temps. Elle avait toujours l'occasion de démissionner dès que l'état de santé de son père serait au mieux et aussi dès qu'elle lui aurait rembourser la somme d'argent qu'elle lui devait.

Keyra se rendit finalement dans le bureau de Madame Sandey, non sans s'être au préalable renseignée auprès de l'un de ses futurs collègues. Elle craignait de se retrouver dans une situation semblable à ce qu'elle venait de subir. Contrairement au cliché de femme sévère qu'elle s'était imaginé, Keyra se rendit compte qu'elle était bien au contraire, d'une agréable compagnie. 

Madame Sandey avait en un rien de temps, réussi à la rendre plus aisée. Le sourire sincère qu'elle affichait en permanence depuis le début de leur entretien ne pouvait que la mettre en confiance. Keyra lui en aurait certainement rendu un vrai, si elle n'avait pas rencontré plutôt son nouvel employeur. La DRH discuta de certains points essentiels avec elle. Puis, à un moment donné, elle se leva pour chercher un document. Ce n'est qu'à cet instant que Keyra remarqua son handicap. Elle boitait du pied droit, mais cela ne semblait pas l'affecter pour autant. Sans savoir pourquoi, Keyra ressentit un pincement au cœur. Pas qu'elle lui inspirait pitié. Bien au contraire. Elles s'entretinrent encore un moment quand la DRH revint à sa place, puis Keyra prit définitivement congé d'elle. C'est le cœur plus apaisé et plus serein qu'elle sortie de cet entretien.

C'est vraiment dommage qu'elle  soit dans cet état. Elle paraît pourtant si sincère et gentille. Dire qu'à l'inverse, il existe des gens comme ce monsieur Mensah qui sont bien portant. Comme quoi, il faut vraiment s'attendre à tout dans la vie, se dit la jeune fille en pensant à sa propre situation.

_____

3962 mots

Tam-tam parleur* : Dans la culture africaine, le tam tam parleur est un instrument de communication qui sert à transmettre des messages ( bons ou mauvais ) entre plusieurs villages ou aux habitants du village en question.

Alors les gars, vous avez trouvé ce chapitre comment ? Perso j'en suis un peu fière par rapport à l'autre 😅. J'espère qu'il vous a aussi plu 😁

100 Abos !!!! \(^o^)/ Merci bande de fou que j'adore ♥╣[-_-]╠♥ j'vous aime

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