Hermione tomba à genoux, secouée de sanglots silencieux. L'amour de sa mère vibrait tellement dans ses paroles qu'il en était presque palpable. La gryffondor avait l'impression qu'elle pourrait tendre le bras et effleurer cette femme qui l'avait élevée, et qu'elle avait pourtant si peu connue.

Ses yeux dissemblables, brun et bleu, me firent remettre en question tout ce que je pensais savoir.  Seule la première fille d'une Fille de Lune le sera à son tour, et encore, seulement si le père est un Être d'Exception. Et pourtant, notre petit bijou, notre Hermione était là. Nous nous sommes promis de la garder en sécurité, loin de tous les drames de la Terre des Anciens, comme du monde des sorciers. Ils n'avaient pas besoin d'une Fille de Lune ou d'une sorcière supplémentaire. Heureusement, mon talent particulier, se transmettant de génération en génération, se prêtait parfaitement à la situation : je pouvais rendre ma présence indétectable, ainsi que celles de toutes les personnes de mon choix.

Nous aurions fait n'importe quoi pour notre petite princesse, qui compte plus que tout pour nous. C'est pour cela que nous avons décidé de nous faire passer pour des moldus, espérant ainsi changer sa destinée. La lettre de Poudlard, et la joie de notre Hermione sonna le glas de notre illusion. Du moins en partie. Nous avons continué de mentir comme des arracheurs de dents - ironique, pour des prétendus dentistes - espérant qu'une "née moldue" serait invisible, et que son ascendance ne serait jamais dévoilée.

D'après ma vision, nous avons échoué. J'ai échoué à la protéger. Je ne serais plus là pour lui dire que je l'aime, pour la serrer dans mes bras en cas de chagrin d'amour. Pour, tout simplement la soutenir au quotidien, la voir se transformer en la merveilleuse femme qu'elle deviendra à coup sûr.

Hermione sentit un poing glacial serrer son coeur. Elle avait l'impression de se noyer : sa mère lui manquait à un point tel que s'en était douloureux, mais d'un autre côté, entendre sa voix, se voir à travers ses yeux, l'entendre dire qu'elle l'aimait, sentir sa fierté dans chacune de ses paroles, c'était comme l'adieu qu'elle n'avait jamais pu avoir.

Je veux juste qu'elle sache que nous voulions seulement la protéger, que notre amour pour elle nous a poussé à lui mentir, même une fois immergée dans le monde des Sorciers. Ma petite princesse, j'aurais vécu des centaines de vies moldues si cela avait pu la garder en sécurité. J'aurais aimé être présente à chacun de ses moments de bonheur comme de tristesse, malheureusement c'est impossible. J'espère qu'elle pourra me pardonner, ainsi qu'à son père, et je veux qu'elle sache que je n'aurais pas pu être plus fière d'elle. Ce n'était pas la destinée que je voulais pour elle, je suis une mère, après tout, mais je sais qu'elle réussira. J'ai confiance en elle plus qu'en n'importe qui pour sauver le monde.

Je t'aime, mon bébé.

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Cette dernière phrase, chuchotée d'une voix douce, eut raison des dernières barrières d'Hermione.

- Je t'aime aussi, maman, murmura-t-elle entre deux sanglots - plus si silencieux, maintenant.

Elle aurait tant voulu retenir la voix de sa mère, sa présence, et pouvoir la garder près de soi pour toujours, la réécouter à volonté, comme cet appareil moldu acheté par son père - un mp3.

La déesse se recula, la tristesse apparente sur son visage. Avec le temps, le destin de ses protégées était devenu de plus en plus ardu, mais ses pouvoirs de déesse ne l'autorisait pas à faire ce qui lui plaisait. Cela en contrariait certaines - Naïla, pour ne citer qu'elle - mais elle n'y pouvait rien, être une divinité ne la rendait pas omnipotente. La seule chose qu'elle pouvait faire, c'était tirer les fils du destin dans l'ombre, à leur avantage, et leur octroyer des pouvoirs qui les aideraient dans leurs quêtes. Le reste : leur courage, leur détermination, tout cela ne venait que de ces extraordinaires femmes sous sa responsabilité.

La Fille de Lune égaréeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant