CHAPITRE SIX

Depuis le début
                                    

Debout à côté de moi, je ne lève pas les yeux vers les siens mais je sens ses muscles se décontracter dans ma prise autour de son poignet. Elle ne riposte pas. De sa main libre elle caresse le dessus de mes cheveux jusqu'à ma nuque dans un geste tendre. Elle accompagne sa caresse d'un baiser sur le haut de ma tête et je me sens comme un enfant de cinq ans qui accueille l'amour de sa mère à bras ouverts. Melissa est ma sœur mais elle s'est toujours efforcée de continuer à m'offrir l'affection d'une mère acceptant aussi d'être parfois rembarrée par un garçon en pleine crise d'adolescence.

- D'accord.

Je finis de manger mon bol de céréales pendant que Melissa finit de se préparer. Quinze minutes plus tard, je récupère mon sac déposé sur le canapé et je passe la porte en suivant Melissa. On traverse le couloir et en haut des marches, on croise papa qui remonte à l'appartement de bon matin après sa nuit de travail à l'usine. Il me dévisage avec ses yeux fatigués de la tête aux pieds, examinant ma chemise ouverte, mon jean et mes baskets les plus neuves que j'ai trouvé pour ne pas faire trop tâche.

Alors qu'on est tous les trois au milieu des escaliers, il me montre du doigt et interroge Melissa du regard.

- Il a sa photo de classe aujourd'hui.

- Oh ! s'exclame-t-il admiratif.

Papa hoche la tête et me réexamine. Ce n'est clairement pas sur lui que je peux prendre exemple en ce qui concerne la mode. Il a un style très classique et porte des chemises comme moi, que quand la situation l'impose.

Sans dire un mot de plus, comme à son habitude, il fait un pas vers moi. J'ai d'abord un mouvement de recul quand ses mains s'approchent de mon cou. Mais quand je comprends son intention, je le laisse faire. Il s'applique à remettre mon col correctement. Si j'avais eu les cheveux plus long je suis prêt à parier qu'il aurait humidifier ses doigts pour replacer une mèche rebelle comme quand j'étais petit. Je ne me souviens pas qu'une photo de classe ait autant attirée l'attention de chacun et encore moins de mon père. Aussi futile que soit ce geste, je me sens étrangement troublé tout à coup.

- On va pas en faire toute une histoire non plus, je lâche en m'écartant de papa pour me précipiter dans les escaliers sans attendre Melissa.

Dans la cour du lycée l'ambiance générale est à cet événement de photo de classe. Les garçons, au même titre que les filles, ont pris grand soin de leurs tenues. J'entends des compliments à tout vas et je suis désespéré de voir autant d'agitation pour un moment aussi futile. Dans mon ancien lycée, garçons et filles pouvaient être majoritairement habillé d'un ensemble de survêtement et on plaisantait largement sur ceux à l'effigie de l'OM ou ceux du PSG. Le PSG l'emportant haut la main chaque année. Il va m'être difficile de croiser un seul d'entre eux dans l'enceinte de cet établissement, je pense.

- Salut, je lance à Gaspard qui passe à côté du banc sur lequel je me suis assis pour observer l'effervescence de ce jour unique.

- Salut.

Il s'avance non sans avoir pris deux secondes pour s'assurer que c'était bien moi, le bon vieux Léonard qui ne porte jamais de chemises. Les mains dans les poches de son pantalon habillé, il reste debout devant moi. J'en profite pour le scruter à mon tour en plissant les yeux pour le voir malgré le soleil dans son dos. Lui comme tous les autres a fait un effort avec une chemise blanche rentrée dans le pantalon et boutonnée jusqu'en haut pour nouer une cravate bleu marine qui fait me sauter aux yeux la couleur bleu-gris de ses iris. Je vais finir par croire qu'il y a un code vestimentaire pour cette fichu photo de classe et que personne ne m'a prévenu. Mais pour ma défense, j'ai fait un énorme effort pour eux et j'ai surtout fait avec ce que j'avais dans ma penderie.

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⏰ Dernière mise à jour : Jul 05, 2020 ⏰

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